| Le vendredi 25
  mai 1945. 97/98>  171.1 – Le sermon sur la montagne
  continue. 
 Le lieu et l'heure sont toujours les mêmes. Il y a encore plus d'affluence.
  Dans un coin, près d'un sentier, comme s'il voulait entendre sans provoquer
  l'hostilité de la foule, il y a un romain.
  Je le reconnais parce qu'il a un vêtement court et un manteau différent. Étienne
  et Hermas
  sont encore là.
 
 Jésus
  regagne lentement sa place et se remet à parler.
 
 
  "Avec
  ce que je vous ai dit hier, vous ne devez pas penser que je suis venu pour
  abolir la Loi .
  Non. Seulement, puisque je suis l'Homme et que je comprends les faiblesses de
  l'homme, j'ai voulu vous encourager à la suivre en dirigeant votre regard
  spirituel non pas vers l'abîme noir mais vers l'Abîme lumineux. Car si la
  peur du châtiment peut retenir trois fois sur dix, la certitude de la
  récompense vous donne de l'élan sept fois sur dix. La confiance est donc plus
  efficace que la peur. Et je veux que vous la possédiez pleine, assurée, pour
  pouvoir réaliser non pas sept parts de bien sur dix, mais dix parts sur dix
  et conquérir cette très sainte récompense du Ciel. 
 Je ne change pas un iota de la Loi. Et qui l'a donnée au milieu des foudres
  du Sinaï ? Le Très-Haut. Qui est le Très-Haut ? Le Dieu Un et Trin.
  D'où l'a-t-Il tirée ? De sa Pensée. Comment l'a-t-Il donnée ? Par
  sa Parole. Pourquoi l'a-t-Il donnée ? À cause de son Amour. Vous voyez
  donc que la Trinité était présente. Et le Verbe, obéissant comme toujours à
  la Pensée et à l'Amour, a parlé au nom de la Pensée et au nom de l'Amour.
 
 Pourrais-je me démentir Moi-même ? Non, je ne le pourrais pas. Mais je
  puis, parce que je puis tout, compléter la Loi, la faire divinement complète,
  non pas telle que l'on faite les hommes qui au cours des siècles l'ont faite,
  non pas complète mais seulement indéchiffrable, inexécutable, en y
  superposant lois et règlements, règlements et lois, tirés de leur pensée
  en accord avec leurs intérêts de manière à lapider et étouffer, à
  enterrer et rendre stérile la Loi très sainte donnée par Dieu. Est-ce qu'une
  plante peut survivre si on la submerge continuellement sous des avalanches,
  des décombres, des inondations ? Non. La plante meurt. La Loi est morte
  dans beaucoup de cœurs, étouffée sous l'avalanche de trop de superstructures.
  Je suis venu les enlever toutes et, la Loi une fois sortie du tombeau, une
  fois ressuscitée, voici que j'en fais non plus une loi mais une reine.
 
 
  171.2 – Ce sont les reines qui
  promulguent les lois. Les lois sont l’œuvre des reines, mais elles ne sont
  pas plus que des reines. Moi, au contraire, je fais de la Loi la reine :
  je la complète, je la couronne en mettant à son sommet le diadème des
  conseils évangéliques. D'abord, il y avait l'ordre. Maintenant, il y a plus
  que l'ordre. D'abord il y avait l'indispensable. Maintenant, il y a plus que
  l'indispensable. Maintenant, c'est la perfection. Celui qui dispose de la Loi
  comme je vous la donne, à l'instant est roi, car il a rejoint le
  "parfait", parce qu'il n'a pas été seulement obéissant, mais
  héroïque, c'est-à-dire saint. Car la sainteté est l'ensemble des vertus
  portées au sommet le plus haut que puisse atteindre la créature, des vertus
  aimées héroïquement et servies avec le détachement complet de tout ce qui est
  appétit ou réflexion humaine pour quelque chose que ce soit. 
 Je pourrais dire que le saint est celui auquel l'amour et le désir s'opposent
  à toute vue qui n'est pas Dieu. N'étant pas distrait par des vues
  inférieures, il a les yeux du cœur fixés sur la Splendeur tout sainte qui est
  Dieu et dans laquelle il voit. Car tout est en Dieu, les frères qui s'agitent
  et tendent leurs mains suppliantes, et sans détacher ses yeux de Dieu, le
  saint s'épanche sur ses frères suppliants.
 
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 99> Contre la chair, contre les
  richesses, contre le confort, il dresse son idéal : servir. Le saint, un
  être pauvre ? Un être amoindri ? Non. Il est arrivé à posséder la
  vraie sagesse et la vraie richesse. Il possède donc tout. Et il ne sent pas
  la fatigue, car s'il est vrai qu'il ne cesse de produire, il est vrai aussi
  qu'il ne cesse de se nourrir. Car s'il est vrai qu'il comprend la douleur du
  monde, il est vrai aussi qu'il se nourrit de la joie du Ciel. De Dieu lui
  vient sa nourriture, en Dieu il a sa joie. C'est la créature qui a compris
  le sens de la vie.
 
 Comme vous voyez, je ne change ni ne mutile la Loi, comme je ne la
  corromps pas en lui superposant des théories humaines toujours en
  fermentation. Mais je la complète. Elle est ce qu'elle est, et telle elle
  restera jusqu'au dernier jour, sans qu'on en change un seul mot ou qu'on en
  supprime un commandement.
  Mais elle est couronnée de perfection. Pour avoir le salut, il suffit de
  l'accepter comme elle a été donnée. Pour s'unir immédiatement à Dieu, il faut
  la vivre comme je conseille de le faire. Mais puisque les héros sont
  l'exception, je vais parler pour les âmes ordinaires, pour la masse des âmes,
  pour qu'on ne dise pas que pour vouloir la perfection je laisse inconnu ce
  qui est nécessaire.
  Cependant,
  de ce que je vous dis, retenez bien ceci : celui qui se permet de violer
  un des plus petits de ces commandements sera considéré comme un des plus
  petits dans le Royaume des Cieux. Et celui qui en amènera d'autres à les
  violer sera considéré comme très petit pour lui et pour celui qu'il a amené à les violer. Celui, au contraire,
  qui par sa vie et ses œuvres plus encore que par ses paroles, aura persuadé
  les autres d'obéir, celui-là sera grand dans le Royaume des Cieux et sa
  grandeur s'accroîtra pour chacun de
  ceux qu'il aura porté à obéir et à se sanctifier de cette façon . 
 
  171.3 – Je sais que ce que je vais
  dire sera désagréable pour un grand nombre. Mais je ne puis mentir même si la
  vérité que je vais dire me crée des ennemis. 
 En vérité je vous dis que, si votre justice ne se recrée pas en se détachant
  complètement de cette pauvre chose qu'on a injustement dénommée justice,
  celle des scribes et des pharisiens, que si vous n'êtes pas beaucoup plus, et
  vraiment, justes que les pharisiens et les scribes qui croient l'être
  en accumulant les formules mais sans changer profondément leurs esprits, vous
  n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux.
 
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 100>
  Gardez-vous
  des faux prophètes et de ceux qui enseignent l'erreur. Ils viennent à vous
  comme des agneaux et ce sont des loups rapaces .
  Ils viennent à vous sous des dehors de sainteté et ils se moquent de Dieu.
  Ils disent aimer la vérité et se nourrissent de mensonges. Étudiez-les avant
  de les suivre. 
 L'homme a la langue pour parler, les yeux pour voir et les mains pour faire
  des gestes. Mais il y a une autre chose qui témoigne avec plus de vérité de
  ce qu'il est réellement: ses actes. Et que voulez-vous que soient deux mains
  jointes pour la prière si ensuite l'homme est voleur et adultère ? Et
  que sont deux yeux qui voulant faire les inspirés chavirent de tous côtés, si
  ensuite, finie l'heure de la comédie, ils se plaisent à regarder
  avidement la femme ou l'ennemi dans un désir de luxure ou d'homicide ?
  Et que voulez- vous que soit la langue qui sait siffler la chanson mensongère
  de la louange et séduire par ses paroles mielleuses alors qu'ensuite par
  derrière elle vous calomnie et est capable de se parjurer pour vous faire
  passer pour des gens méprisables ? Qu'est la langue qui fait de longues
  oraisons hypocrites et s'en va tuer aussitôt la réputation du prochain ou
  séduire sa bonne foi ? Elle est répugnante ! Répugnants sont les
  yeux et les mains qui mentent. Mais les actes de l'homme, les vrais actes,
  c'est-à-dire sa façon de se comporter en famille, dans le commerce, envers le
  prochain et les serviteurs, voilà ce qui témoigne : "Celui-ci est
  un serviteur du Seigneur". Car les actions saintes sont le fruit d'une
  religion vraie.
 
 
  Un
  bon arbre ne donne pas de mauvais fruits et un arbre mauvais ne donne pas de
  bons fruits .
  Ces broussailles piquantes pourront-elles donner des raisins savoureux ?
  Et ces chardons encore plus piquants pourront-ils faire mûrir des figues
  délicieuses  ?
  Non, en vérité vous ne cueillerez sur les premières que quelques mûres peu
  agréables et ce sont des fruits immangeables que donneront ces fleurs
  épineuses tout en étant des fleurs. 
 L'homme qui n'est pas juste pourra inspirer le respect par son aspect, mais
  par cela uniquement. Même ce chardon plumeux semble une touffe de fils
  d'argent très fins que la rosée a orné de diamants. Mais si par inadvertance
  vous le touchez, vous voyez que cette touffe n'est qu'une masse de piquants
  qui vous font souffrir, nuisibles aux brebis. Aussi les bergers les arrachent
  de leurs pâturages et les jettent au feu allumé pendant la nuit pour que les
  graines n'échappent pas à la destruction. Juste mesure de prévoyance.
 
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 101> Moi, je ne vous dis pas : "Tuez les faux
  prophètes et les fidèles hypocrites" .
  Au contraire je vous dis : "Laissez-en la charge à Dieu". Mais
  je vous dis : "Faites attention, écartez-vous-en pour ne pas être
  empoisonnés par leurs sucs".
 
 
  171.4 – Comment Dieu doit être aimé,
  je l'ai dit hier. J'insiste sur la façon dont on doit aimer le prochain. 
 Autrefois on disait : "Tu aimeras ton ami et tu détesteras ton
  ennemi" .
  Non. Non pas ainsi. C'était bon pour les temps où l'homme n'avait pas le
  réconfort du sourire de Dieu. Mais maintenant viennent des temps nouveaux,
  des temps où Dieu aime tant l'homme qu'Il lui envoie son Verbe pour le
  racheter. Maintenant le Verbe parle. Et c'est déjà la Grâce qui se répand.
  Puis le Verbe consommera le sacrifice de paix et de rédemption et la Grâce
  non seulement sera répandue mais sera donnée à tout esprit qui croit au
  Christ. C'est pour cela qu'il faut élever l'amour du
  prochain à la perfection qui ne distingue pas l'ami de l'ennemi.
 
 
  On
  vous calomnie ? Aimez et pardonnez .
  On vous frappe ? Aimez et présentez l'autre joue à qui vous gifle, en
  pensant qu'il vaut mieux que la colère s'attaque à vous qui savez la
  supporter plutôt qu'à un autre qui se vengerait de l'affront.  On
  vous a volés ? Ne pensez pas : "Mon prochain est un être
  cupide", mais pensez charitablement : "Mon pauvre frère est
  dans le besoin" et donnez-lui aussi la tunique s'il vous a déjà enlevé
  le manteau.
  Vous le mettrez dans l'impossibilité de faire un double vol car il n'aura
  plus besoin de voler la tunique d'un autre. Vous dites : "Ce
  pourrait être vice et non besoin". Eh bien, donnez-le quand même. Dieu
  vous en récompensera et l'injuste expiera. Mais, souvent, et cela rappelle ce
  que j'ai dit hier de la douceur, de se voir ainsi traité, le pécheur
  renoncera sincèrement à son vice et se rachètera en réparant le vol par la
  restitution. 
 Soyez généreux envers ceux qui, plus honnêtes, vous demandent, au lieu de
  vous voler, ce dont ils ont besoin. Si les riches étaient réellement pauvres
  en esprit comme je vous l'ai enseigné hier, il n'y aurait plus ces pénibles
  inégalités sociales causes de tant de malheurs humains et surhumains.
 
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 102> Pensez toujours : "Mais, si moi j'avais été
  dans le besoin, quel effet m'aurait produit le refus d'une aide ?"
  et d'après la réponse, agissez. Faites aux autres ce que vous voudriez qu'on
  vous fasse et ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qu'il vous
  soit fait .
 
 
  L'ancienne
  parole : "œil pour œil, dent pour dent"
  n'est pas dans les dix commandements mais on l'a ajoutée parce que l'homme
  privé de la Grâce est tellement féroce qu'il ne peut comprendre que la
  vengeance. Elle est annulée, bien sûr qu'elle est annulée, par la nouvelle
  parole :  "Aime
  celui qui te hait, prie pour celui qui te persécute, justifie celui qui te
  calomnie, bénis celui qui te maudit, fais du bien à celui qui te fait du
  tort, sois pacifique avec le querelleur, condescendant avec celui qui
  t'importune, volontiers secourable pour celui qui te sollicite. Ne sois pas
  usurier, ne critique pas, ne juge pas". Vous ne connaissez pas les
  raisons des actions des hommes. En toutes sortes d'aides, soyez généreux,
  soyez miséricordieux. Plus vous donnerez et plus l'on vous donnera, et Dieu
  versera dans le sein de l'homme généreux une mesure pleine et bien tassée.
  Dieu vous donnera non seulement pour
  ce que vous avez donné, mais davantage et davantage encore. Cherchez à aimer
  et à vous faire aimer. Les procès coûtent plus qu'un arrangement à l'amiable
  et la bonne grâce est comme du miel dont la saveur reste longtemps sur la
  langue. 
 
  171.5 – Aimez, aimez ! Aimez amis
  et ennemis pour être semblables à votre Père  qui
  fait pleuvoir sur les bons et les méchants et fait luire son soleil sur les
  justes et les injustes, se réservant de donner un soleil et des rosées
  éternels, et le feu et la grêle infernaux quand on aura trié les bons comme
  des épis choisis, dans les gerbes de la récolte. Il ne suffit pas d'aimer
  ceux qui vous aiment et de qui vous espérez un retour .
  Il n'y a pas de mérite à cela : c'est une joie et même les hommes
  naturellement honnêtes savent le faire. Même les publicains le font et aussi
  les gentils. Mais vous, aimez à la ressemblance de Dieu et aimez par respect
  pour Dieu qui est le Créateur même de ceux qui sont pour vous des ennemis ou
  des gens peu aimables.  Je
  veux en vous la perfection de l'amour, et pour cela je vous dis :
  "Soyez parfaits comme
  est parfait votre Père qui est dans les
  Cieux". 
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 103/104> Si grand est le commandement d'amour pour le prochain,
  le perfectionnement du commandement d'amour pour le prochain, que je ne vous
  dis plus comme il était dit : "Ne tuez pas" 
  car celui qui tue sera condamné par les hommes. Mais je vous dit :
  "Ne
  vous fâchez pas" parce que vous êtes soumis à un jugement plus élevé et
  qui tient compte même des actions immatérielles. Celui qui aura insulté son
  frère sera condamné par le Sanhédrin. Mais celui qui l'aura traité de fou et
  aura ainsi fait du tort sera condamné par Dieu .  Il
  est inutile de faire des offrandes à l'autel si auparavant, du fond du cœur,
  on n'a pas sacrifié ses propres rancœurs pour l'amour de Dieu et si on n'a
  pas accompli le rite très saint de savoir pardonner. Par conséquent, quand tu
  es sur le point de faire une offrande à Dieu, si tu te souviens d'avoir mal
  agi envers ton frère ou d'avoir en toi de la rancœur pour une de ses fautes,
  laisse ton offrande devant l'autel, immole d'abord ton amour propre en te
  réconciliant avec ton frère et
  viens ensuite à l'autel et saint sera alors, seulement alors, ton sacrifice.
  Le bon accord est toujours la meilleure des affaires. Précaire est le
  jugement de l'homme et celui qui le brave obstinément pourrait bien perdre sa
  cause et devoir payer à son adversaire tout ce qu'il possède ou languir en
  prison. 
 En toutes choses, élevez votre regard vers Dieu. Demandez-vous :
  "Ai-je le droit de faire aux autres ce que Dieu ne me fait
  pas ?" Car Dieu n'est pas inexorable et obstiné comme vous. Malheur
  à vous s'Il l'était ! Personne ne se sauverait. Que cette réflexion
  vous amène à des sentiments doux, humbles, pleins de pitié. Et alors, ici-bas
  et ensuite, vous aurez de la part de Dieu la récompense.
 
 
  171.6 – Ici, devant Moi, il y a un
  homme qui me hait et qui n'ose me dire : "Guéris-moi" parce
  qu'il sait que je connais ses pensées. Mais Moi, je dis : "Qu'il te
  soit fait comme tu le désires. Et comme les écailles tombent de tes yeux, qu'ainsi
  te tombent du cœur la rancœur et les ténèbres". Partez tous avec ma
  paix. Demain je vous parlerai encore." 
 Les gens s'éloignent lentement attendant peut-être l'annonce d'un miracle qui
  ne se produit pas.
 
 Même les apôtres et les disciples les plus anciens, restés sur la montagne,
  demandent :
 
 "Mais qui était-ce ? Il n'est peut-être pas guéri ?"
 
 Et ils insistent auprès du Maître resté debout, les bras croisés, et qui
  regarde les gens descendre.
 
 Mais Jésus, tout d'abord ne répond pas, puis il dit :
 
 "Les yeux sont guéris. L'âme non. Elle ne peut pas car elle est chargée
  de haine."
 
 "Mais, qui est-ce ? Ce romain, peut-être ?"
 
 "Non. Un pauvre homme."
 
 "Mais pourquoi l'as-tu guéri, alors ?" demande Pierre.
 
 "Devrais-je foudroyer tous ceux qui lui ressemblent ?"
 
 "Seigneur... je sais que tu ne veux pas que je dise :
  "oui", par conséquent je ne le dis pas... mais je le pense... et
  cela revient au même..."
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