Vision du lundi 5 février 1945
136> 98.1 - Jésus est avec tous les siens. Désormais
ils sont à eux seuls treize
et Lui est en plus. Ils sont sept par barque sur le lac de Galilée. Jésus est
dans la barque de Pierre, la première, avec Pierre, André, Simon, Joseph et les deux cousins.
Dans l'autre se trouvent les deux fils de
Zébédée avec les autres : à savoir
l'Iscariote, Philippe, Thomas,
Nathanaël
et Matthieu.
Les barques marchent rapidement à la voile, poussées par un vent frais de
borée, qui forme sur l'eau une multitude de rides légères, à peine marquées
par des lignes d'écume qui dessinent une sorte de tulle sur l'azur de
turquoise du beau lac tranquille. Elles avancent, laissant derrière elles,
deux sillages qui se rejoignent fondant leurs joyeuses écumes en une seule
trace riante à la surface de l'eau. Elles marchent, en effet de conserve,
celle de Pierre précédant à peine de deux mètres.
De barque à barque, rapprochées de quelques mètres l'une de l'autre, on
échange des conversations et des réflexions. J'en déduis que les Galiléens
montrent et expliquent aux Juifs les détails du lac, leurs commerces, leurs
personnalités, les distances entre les points de départ et d'arrivée, c'est à
dire, Capharnaüm et Tibériade. Les barques ne servent pas pour la pêche, mais pour le
transport des personnes.
Haut de page..
137> Jésus est assis à la
proue. Il jouit visiblement de la beauté qui l'entoure, du silence, de tout
cet azur pur du ciel et des eaux, encadré de vertes rives où sont disséminés
des villages tout blanc sur le fond de verdure. Il s'abstrait des
conversations des disciples, car il est tout à l'avant sur la proue, presque
allongé sur un tas de voiles, le visage souvent incliné sur ce miroir de
saphir qu'est le lac, comme s'il en étudiait le fond et s'intéressait à tout
ce qui vit dans ses eaux très limpides. Mais, qui sait à quoi il pense...
Pierre l'interroge par deux fois pour savoir si le soleil le dérange. Le
soleil, tout à fait levé à l'orient, atteint en
plein la barque par son rayonnement pas encore brûlant, mais déjà chaud. Une
seconde fois il Lui demande s'il veut aussi du pain et du fromage comme les
autres. Mais Jésus ne veut rien, ni toile ni pain. Et Pierre le laisse en
paix.
98.2 - Un groupe de petites barques que
l'on emploie pour se promener sur le lac, des sortes de chaloupes, mais
ornées de riches baldaquins pourpre et d'agréables coussins, coupe la route
aux barques des pêcheurs. Bruits, éclats de rire, parfums passent avec elles.
Elles sont pleines de belles femmes et de joyeux Romains et Palestiniens,
mais plutôt Romains, ou du moins pas Palestiniens, car il doit y avoir
quelque Grec. Je le déduis des paroles d'un jeune homme maigre, élancé, brun
comme une olive presque mûre, tout pomponné. Il porte un court vêtement
rouge, bordé en bas par une lourde grecque et serré à la taille par une
ceinture qui est un chef d’œuvre d'orfèvrerie. Il dit : "L'Hellade
est belle, mais mon olympique patrie n'a tout de même pas cet azur et ces
fleurs. Et vraiment on ne s'étonne pas que les déesses l'aient abandonnée
pour venir ici. Effeuillons sur les déesses, non plus grecques mais juives,
les fleurs, les roses et nos hommages..."
Et il jette sur les femmes de sa barque des pétales de roses splendides et il
en jette d'autres sur la barque voisine. Un romain répond
"Effeuille, effeuille, Grec ! Mais Vénus est avec moi. Moi je
n’effeuille pas : je cueille les roses sur cette belle bouche. C'est
plus doux !"
Et il se penche pour embrasser, sur sa bouche souriante, Marie de Magdala
à moitié allongée sur les coussins, avec sa tête blonde sur le sein du
Romain.
Maintenant les barquettes s'en vont directement contre les lourdes barques,
et soit à cause de la maladresse des rameurs, soit à cause du vent, il s'en
faut de peu qu'elles ne se heurtent.
Haut
de page.
138> "Faites attention si vous
tenez à la vie" crie Pierre furieux pendant qu'il vire, donnant un coup
de barre, pour éviter le choc. Insultes des hommes et cris d'épouvante des
femmes circulent d'une barque à l'autre. Les Romains insultent les Galiléens
en disant : "Écartez- vous, chiens d'Hébreux que vous êtes."
Pierre et les autres Galiléens ne laissent pas tomber l'insulte et Pierre
spécialement, rouge comme la crête d'un coq, debout sur le bord de la barque
qui tangue fortement, les mains aux hanches, répond coup pour coup,
n'épargnant ni Romains, ni Grecs, ni Juifs, ni Juives. Au contraire il
adresse toute une collection d'appellations honorifiques que je ne transcris
pas. La prise de bec dure tant que l'enchevêtrement des quilles et des rames
n'est pas débrouillé, puis chacun va son chemin.
98.3 - Jésus n'a jamais changé de position.
Il est resté assis, absent, sans regards ni paroles pour les barques et leurs
occupants. Appuyé sur le coude, il a continué de regarder la rive lointaine
comme si rien n'arrivait. Il Lui arrive une fleur qu'on a jetée. Je ne sais
d'où elle vient, certainement d'une des femmes, car j'entends son éclat de
rire qui accompagne le geste. Mais Lui... rien. La fleur le frappe presque au
visage et tombe sur les planches, allant terminer sa course aux pieds du
bouillant Pierre.
Quand les barquettes sont sur le point de s'éloigner, je vois que la
Madeleine s'est dressée debout et suit la direction que lui indique une
compagne de vice, braquant ses yeux splendides sur le visage tranquille et
lointain de Jésus. Comme il est loin du monde ce visage ! ...
98.4 - "Dis, Simon ! interpelle
l'Iscariote. Toi qui es Juif comme moi, dis-moi. Mais cette belle blonde, sur
le sein du Romain, celle-là qui s'est levée tout à l'heure, n'est-ce pas la
sœur de Lazare de
Béthanie ?"
"Moi, je ne sais rien" répond sèchement Simon le Cananéen "Il
y a peu de temps que je suis revenu parmi les vivants, et cette femme est
jeune..."
"Tu ne voudrais pas me dire que tu ne connais pas Lazare de Béthanie,
j'espère ! Je sais bien que tu es son ami et aussi que tu as été chez
lui avec le Maître."
"Et même si c’était le cas ?"
"Étant donné que c’est
effectivement le cas, tu dois connaître aussi la pécheresse qui est sœur
de Lazare. Même les tombeaux la connaissent ! Il y a dix ans qu'elle
fait parler d'elle. À peine pubère elle s'est montrée légère. Mais, depuis
quatre ans !
Haut
de page.
139> Tu ne peux ignorer le scandale,
même si tu étais dans "la vallée des morts ". Tout Jérusalem en a
parlé. Et Lazare s'est alors retiré à Béthanie... Il a bien fait, du reste.
Personne n'aurait plus mis les pieds dans son splendide palais de Sion où
elle allait et venait encore. J'entends dire : personne qui fut saint. A
la campagne... on est au courant !... Et puis, désormais elle est
partout, sauf à sa maison. Maintenant elle est sûrement à Magdala... Elle
aura trouvé quelque nouvel amour ...Tu ne réponds pas ? Peux-tu me
démentir ?"
"Je ne démens pas. Je me tais."
"Alors, c'est elle ? Toi-même tu l'as reconnue !"
"Je l'ai vue toute jeune. Elle était pure, alors. Je la revois
maintenant... Mais je la reconnais. Bien qu'impudique, sa physionomie
rappelle celle de sa mère, une
sainte."
"Et alors pourquoi as-tu presque nié qu'elle était la sœur de ton
ami ?"
"Nos plaies et celles de ceux que nous aimons, on
cherche à le cacher, surtout quand on est honnête." Judas rit jaune.
98.5 - "Tu parles bien, Simon. Et tu
es un homme honnête." observe Pierre.
"Et tu l'avais reconnue ? Tu vas certainement à Magdala pour vendre
ton poisson, et qui sait combien de fois… tu l'as vue !..."
"Garçon, sache que lorsqu'on est fatigué par un honnête travail,
les femmes n'attirent plus. On aime seulement le lit honnête de son
épouse."
"Eh ! Mais ce qui est beau plaît à tout le monde ! Au moins
n'y aurait-il que cela, on regarde."
"Pourquoi ? Pour dire : "Ce n'est pas nourriture pour ta
table" ? Non, sais-tu. Le lac et le métier m'ont appris plusieurs
choses, et en voilà une : que poisson d'eau douce et de fond n'est pas
fait pour l'eau salée et les remous de surface."
"Qu’est-ce que tu veux dire ?"
"Je veux dire que chacun doit rester à sa place pour ne pas mourir de
malemort."
"Elle te faisait mourir, la Madeleine ?"
"Non, j'ai la peau dure. Mais... tu me le dis : c'est toi qui te
sens mal, peut-être ?"
"Moi, je ne l'ai pas même regardée!.."
Haut de page.
140> "Menteur ! Je parie que tu t'es bien rongé au
dedans pour ne pas te trouver sur cette première barque et en être plus
proche... Tu m'aurais même supporté pour y être plus près... C'est si vrai ce
que je dis, que c'est à cause d'elle que tu me fais l'honneur de me parler
après tant de jours de silence."
"Moi ? Mais si elle ne m'aurait pas même vu ! Elle ne
regardait continuellement que le Maître, elle !"
"Ah ! Ah ! Ah ! et tu dis que tu ne la regardais
pas ! Comment as-tu fait pour voir où elle regardait, si tu ne la
regardais pas ?"
Tout le monde rit, sauf Judas, Jésus et le Zélote à la remarque de Pierre.
98.6 - Jésus met fin à la discussion qu'il
a affecté de ne pas entendre, en demandant à Pierre :
"C'est Tibériade ?"
"Oui, Maître. Maintenant je vais accoster"
"Attends, peux-tu te mettre dans ce golfe tranquille ? Je voudrais
parler, à vous seulement."
"Je mesure le fond et je vais te le dire." Pierre enfonce une
longue perche et va lentement vers la rive. "Oui, je peux, Maître.
Puis-je approcher encore davantage ?"
"Le plus que tu peux. Il y a de l'ombre et de la
solitude. Cela me plaît."
Pierre va jusqu'aux abords de la rive. La terre n'est plus qu'à une quinzaine
de mètres, au maximum. "Maintenant je toucherais le fond"
"Arrête, et vous, venez le plus près possible et écoutez." Jésus
quitte sa place et vient s'asseoir au centre de la barque sur une banquette
qui va de bord à bord. Il a en face l’autre barque, et autour de Lui les
disciples de sa barque.
"Écoutez.
Il vous paraît que je m'abstrais parfois de vos conversations et que suis
donc un maître paresseux qui ne surveille pas ses propres élèves. Sachez que
mon âme ne vous quitte pas un instant Avez-vous jamais observé un médecin qui
étudie un malade dont la maladie n'est pas déterminée et qui présente des
symptômes qui s'opposent ? Il le tient à vue d’œil, après l'avoir visité
qu'il dorme ou veille, le matin comme le soir, quand il se tait ou qu'il
parle, car tout peut-être symptôme et indication pour déceler le mal caché et
indiquer un traitement. Je fais de même avec vous. Vous m'êtes reliés par des
fils invisibles, mais très sensibles qui me sont rattachés et me transmettent
jusqu'aux plus légères vibrations de votre être. Je vous laisse croire à votre liberté, pour que vous
manifestiez toujours plus ce que vous êtes. C'est ce qui arrive quand un
écolier ou un maniaque se croit perdu de vue par le surveillant.
Haut
de page.
141> 98.7 - Vous
êtes un groupe de personnes, mais vous formez un noyau, c'est à dire une
seule chose. Car vous êtes un ensemble complexe qui naît à l'existence et
qu'on étudie dans toutes ses caractéristiques, plus ou moins bonnes, pour le
former, l'amalgamer, l'émousser, le développer dans ses tendances
multiformes, et en faire un tout parfait. C'est pour cela que je vous étudie
et que je fais sur vous des observations, même quand vous dormez.
Qu'êtes-vous ? Que devez-vous devenir ? Vous êtes le sel de la terre.
C'est cela que vous devez devenir : sel de la terre. Avec le sel, on
préserve les viandes de la corruption et aussi beaucoup d'autres denrées.
Mais le sel pourrait-il saler s'il n'était pas salé ? C'est avec vous
que je veux saler le monde, pour lui donner une saveur céleste. Mais comment
pouvez-vous saler si vous me perdez, vous, la saveur ?
Qu'est-ce qui vous fait perdre la saveur céleste ? Ce qui est humain. L'eau de mer, de la
vraie mer, n'est pas bonne à boire, tant elle est salée, n'est-ce pas ?
Et pourtant, si quelqu'un prend une coupe d'eau de mer et la verse dans une
cruche d'eau douce, voici qu'on peut la boire, parce que l'eau de mer est
tellement diluée qu'elle a perdu son mordant. L'humanité est comme l'eau
douce qui se mélange à votre salinité céleste. Et encore, en supposant qu'il
soit possible de dériver un ruisselet de la mer et de l'envoyer dans ce lac,
pourriez-vous y retrouver ce filet d'eau de mer ? Non. Il serait perdu
dans une telle masse d'eau douce. Ainsi il en est de vous quand vous plongez
votre mission, ou plutôt la noyez, dans tant d'humanité. Vous êtes des
hommes. Oui. Je le sais. Mais, et Moi qui suis-je ? Je suis Celui qui a
en Lui toute force. Et que fais-je ? Je vous communique cette force
puisque je vous ai appelés. Mais à quoi sert de vous la communiquer si vous
la dispersez sous des avalanches de sensations et de sentiments
humains ?
Vous êtes, et devez être la lumière du monde.
Je vous ai choisis : Moi, Lumière de Dieu, pour continuer d'éclairer le
monde quand je serai retourné au Père. Mais pouvez-vous donner la lumière si
vous êtes des lanternes éteintes ou fumeuses ? Non, la fumée incertaine
d'un lumignon est pire que sa mort totale et avec votre fumée vous
obscurcirez cette lueur de lumière que les cœurs peuvent encore avoir.
Oh ! malheureux ceux qui, cherchant Dieu, se tournent vers des apôtres
qui au lieu de lumière ont de la fumée ! Ils en recevront le scandale et
la mort. Mais malédiction et châtiment subiront les apôtres indignes.
Haut de page.
142> 98.8 - Grande
est votre destinée ! Mais aussi : grande et redoutable est votre
mission ! Rappelez-vous que celui à qui on a
plus donné, est tenu à donner
davantage. Et à vous, c'est le maximum qui a été donné en fait d'instruction
et de don. Vous êtes instruits par Moi, Verbe de Dieu, et vous recevez de
Dieu le don d'être "les disciples", c'est à dire les continuateurs
du Fils de Dieu.
Je voudrais que vous ne cessiez de méditer
le choix dont vous êtes l'objet et encore que vous examiniez et encore que
vous pesiez... et vous vous rendiez compte si vous n'êtes capables que d'être
fidèles, seulement fidèles. Je ne veux pas même dire si vous vous sentez
pécheurs et endurcis, mais fidèles seulement, sans avoir l'énergie d'un apôtre, il
faut alors vous retirer. Le monde, pour qui l'aime, est si vaste, si beau,
suffisant, varié !
Il offre à tous les fleurs et les fruits pour les
jouissances des sens. Moi, je n'offre qu'une chose : la sainteté. Sur
la terre, c'est la chose la plus étroite, la plus pauvre, la plus rude, la
plus épineuse, la plus persécutée qui existe. Au Ciel son étroitesse se
change en immensité, sa pauvreté en richesse, ses épines en un tapis de
fleurs, sa rudesse en un sentier facile et agréable, sa persécution en paix
et béatitude. Mais ici-bas, c'est un, effort héroïque que d'être saint. Moi,
je ne vous offre que cela.
Voulez-vous rester avec Moi ? Ne vous sentez-vous pas le courage de le
faire ? Oh ! ne vous regardez pas, étonnés et affligés ! Vous
m'entendrez encore de nombreuses fois poser cette question. Et quand vous
l'entendrez, pensez que mon cœur pleure, parce qu'il est blessé de vous
trouver sourds à mon appel. Examinez-vous, alors, et puis jugez honnêtement
et sincèrement et décidez. Décidez pour n'être pas des réprouvés.
Dites : "Maître, amis, je me rends compte que je ne suis pas fait
pour suivre cette voie. Je vous donne le baiser d'adieu, et je vous
dis : priez pour moi" Cela vaut mieux que de trahir. Cela vaut
mieux...
Que dites-vous ? Trahir qui ? Qui ? Moi. Ma cause, c'est à
dire la cause de Dieu, car Je suis un avec le Père, et vous, oui ! vous
vous trahiriez, vous trahiriez votre âme en la donnant à Satan. Vous voulez rester juifs ? Et
Moi, je ne vous force pas à changer.
Haut
de page.
143> Mais ne trahissez
pas. Ne trahissez pas votre âme, le Christ et Dieu. Je vous jure que ni Moi,
ni ceux qui me sont fidèles ne vous critiquerons, ne vous désignerons au
mépris des foules fidèles. Il y a peu de temps, un de vos frères a dit une grande parole : "Nos plaies
et celles de ceux que nous aimons nous cherchons à les tenir cachées".
Et celui qui se séparerait serait comme une plaie, une gangrène survenue au sein
de notre organisme apostolique. Il se détacherait à cause de sa gangrène
inguérissable, laissant une cicatrice douloureuse que nous tiendrons cachée
avec le plus grand soin.
98.9 - Non, ne pleurez pas, vous les meilleurs.
Ne pleurez pas. Je n'ai pas pour vous de rancœur et je ne suis pas
intransigeant pour vous voir si lents. Je viens de vous prendre et ne puis
prétendre que vous soyez déjà parfaits. Je ne le prétendrai même pas après
des années, après vous avoir dit cent et deux cent fois les mêmes choses
inutilement. Au contraire, écoutez : après des années vous serez moins
ardents qu'à cette heure où vous êtes néophytes. La vie est ainsi...
l'humanité est ainsi... On perd l'élan après le premier
bond.
Mais (Jésus s'est brusquement levé) je vous jure que Moi je
vaincrai. Purifiés, par une sélection naturelle, fortifiés par un breuvage
surnaturel, vous, les meilleurs, vous deviendrez mes héros :
Les héros du Christ. Les héros du Ciel. La puissance des Césars sera
poussière en comparaison de la royauté de votre sacerdoce. Vous, pauvres
pêcheurs de Galilée, vous, Juifs inconnus, vous, nombres dans la masse des
hommes qui vous entourent, vous serez plus connus, acclamés, respectés que
des Césars que tous les Césars que la terre a eus et aura. Vous serez connus,
vous serez bénis dans un avenir très prochain et dans les siècles les plus
reculés jusqu'à la fin du monde.
98.10 - C'est pour cette sublime destinée que je vous ai choisis. Vous qui
avez une honnête volonté et qui avez la capacité de la suivre, je vous donne
les lignes essentielles de votre caractère d'apôtres.
Soyez toujours vigilants
et prêts. Que vos reins soient ceints, toujours ceints, et vos lampes allumées
comme des gens qui doivent partir d'un moment à l'autre ou courir à la
rencontre de quelqu'un qui arrive. En fait, vous êtes, vous serez jusqu'à ce
que la mort vous arrête, d'inlassables pèlerins à la recherche de qui est
errant; et jusqu'à ce que la mort ne vous arrête, vous devez tenir votre
lampe haute et allumée pour indiquer la route aux égarés qui viennent vers le
bercail du Christ.
Haut de page.
144> Vous devez être fidèles au Maître, qui vous
a préposés à ce service. Il sera récompensé ce serviteur que le
maître trouvera toujours vigilant et que la mort surprend en état de grâce.
Vous ne pouvez pas, vous ne devez pas dire : "Je suis jeune, j'ai
le temps de faire ceci et cela et ensuite penser au Maître, à la mort, à mon
âme". Les jeunes meurent comme les vieux, les forts comme les faibles.
Et les vieux comme les jeunes, les forts comme les faibles, sont également
exposés à l'assaut de la tentation. Sachez que l'âme peut mourir
avant le corps et que vous pouvez porter, sans le savoir, en votre sein une
âme en putréfaction. C'est tellement insensible la mort d'une âme !
C'est comme la mort d'une fleur. Sans un cri, sans convulsion... elle laisse
baisser sa flamme comme une corolle flétrie et elle s'éteint. Après,
longtemps après pour l'une, aussitôt après pour l'autre, le corps s'aperçoit
qu'il porte en lui un cadavre vermineux. Il devient fou d'épouvante et se tue
pour échapper à cette union... Oh ! il n'échappe pas ! Il tombe,
vraiment, avec son âme vermineuse sur un grouillement de serpents dans la
Géhenne.
Ne soyez pas malhonnêtes comme des courtiers ou des avocats
qui ménagent deux clients ennemis. Ne soyez pas faux comme de politiciens qui
disent "ami" à tel ou tel et ensuite ils en sont ennemis. N'essayez
pas de suivre deux manières de faire. On ne se moque pas de Dieu et on ne Le
trompe pas. Agissez avec les hommes comme vous agissez avec Dieu, car toute
offense aux hommes est une offense à Dieu. Ayez le souci que Dieu vous voie
comme vous voulez être vus par les hommes.
98.11 - Soyez
humbles. Vous ne
pouvez pas reprocher à votre Maître de ne pas l'être. Je vous donne
l'exemple. Agissez comme j'agi. Soyez humbles, doux, patients. C'est ainsi
que l'on conquiert le monde, non par la violence et la force. Soyez
forts et violents contre vos vices, Déracinez-les, même s'il vous faut
déchirer votre cœur. Je vous ai dit, il y a quelques jours, de veiller sur
vos regards. Mais vous ne savez pas le faire. Je vous dis, Moi : il
vaudrait mieux devenir aveugles en vous arrachant des yeux plein de
convoitises, plutôt que de devenir luxurieux.
Haut de page.
145> Soyez sincères. Je suis la Vérité. Dans les choses d'en haut comme
dans les choses humaines. Je veux que vous soyez francs vous aussi. Pourquoi
user de tromperie avec Moi, ou avec de frères, ou avec le prochain ?
Pourquoi s'amuser à tromper ! Quoi ! Orgueilleux comme vous l'êtes,
et vous n'avez pas la fierté de dire : "Je ne veux pas qu'on me
découvre menteur" ? Et soyez francs avec Dieu. Croyez-vous de Le
tromper avec des prières longues et manifestes ? Oh ! pauvres
fils ! Dieu voit le cœur !
Soyez discrets en faisant le bien. Même en faisant l'aumône. Un
publicain a su y être avant sa conversion. Et vous,
vous ne saurez pas l'être ? Oui, je te loue, Matthieu, de la discrète offrande
de chaque semaine que le Père et Moi étions seuls à connaître et je te cite
en exemple. Cette réserve est aussi une forme de chasteté, amis. Ne découvrez
pas votre bonté, comme vous ne découvririez pas une toute jeune fille aux
yeux d'une foule. Soyez vierges en faisant le bien. Une bonne action est
virginale quand elle ne s'allie pas avec une arrière-pensée
de louange ou d'estime ou de sentiments d'orgueil.
Soyez des époux fidèles de votre vocation à Dieu. Vous ne pouvez servir deux maîtres. Le
lit nuptial ne peut accueillir en même temps deux épouses. Dieu et Satan ne
peuvent se partager vos embrassements. L'homme ne peut pas, et Dieu non plus,
ni Satan partager un triple embrassement entre trois êtres qui sont en
opposition l'un de l'autre.
Soyez contraires au désir de l'or comme au désir de la
chair; au désir charnel comme au désir de la puissance. Voilà ce que Satan
vous offre. Oh ! ses richesses trompeuses ! Honneurs, réussite,
pouvoir, argent : marchandises impures que vous achetez au prix de votre
âme. Soyez contents de peu. Dieu vous donne le nécessaire. Cela suffit. Ceci,
Il vous le garantit, comme Il le garantit à l'oiseau de l'air, et vous êtes
beaucoup .plus que des oiseaux. Mais Il veut de vous confiance et sobriété.
Si vous avez confiance, Lui ne vous décevra pas. Si vous êtes sobres, son don
journalier vous suffira.
98.12 - Ne soyez pas
païens, tout en appartenant, de nom, à Dieu. Ce sont les païens, ceux qui,
plus que Dieu, aiment l'or et la puissance pour paraître des demi-dieux.
Soyez saints et vous serez semblables à Dieu pour l'éternité.
Ne soyez pas intransigeants. Tous pécheurs, il vous faut vouloir être avec
les autres comme vous voudriez que les autres fussent avec vous : c'est
à dire compatissants et disposés au pardon.
Haut de page.
146> Ne jugez pas. Oh ! ne jugez pas !
C'est depuis peu que vous êtes avec Moi et pourtant vous voyez combien de
fois Moi, innocent, j'ai été à tort mal jugé et accusé de péchés inexistants.
Mal juger, c'est offenser, Et seul celui qui est vraiment saint ne répond pas
à l'offense par l'offense. Abstenez-vous donc d'offenser pour n'être pas
offensés. Vous ne manquerez ainsi ni à la charité, ni à la sainte, chère et
douce humilité, ennemie de Satan, avec la chasteté. Pardonnez, pardonnez
toujours. Dites : "Je pardonne, ô Père, pour être pardonné par Toi
pour mes péchés sans nombre".
Améliorez-vous d'heure en heure, avec patience, avec fermeté, héroïquement.
Et, qui vous dit que devenir bon ne soit pas pénible ? Je vous dis
même : c'est le plus dur travail. Mais le Ciel est la récompense et il
vaut la peine de s'épuiser dans cet effort.
98.13 - Enfin, aimez.
Oh ! quelle parole, quelle parole dois-je dire pour vous inculquer
l'amour ? Aucune n'est capable de vous convertir à l'amour, pauvres
hommes que Satan excite ! Et alors voilà que je dis : "Père, hâte l'heure de la purification.
Cette terre est aride, et malade est ce troupeau, ton troupeau. Mais il y a
une rosée qui peut tout adoucir et purifier. Ouvre, ouvre la source de cette
rosée. C'est Moi que Tu dois ouvrir, Moi. Voici, Père. Je brûle d'accomplir
ton désir qui est le mien et celui de l'Amour Éternel. Père, Père,
Père ! Regarde ton Agneau et sois-en le
Sacrificateur".
|