Vision du samedi 8
septembre 1945
(Nativité de la Vierge Marie)
368>
[…]
275.1 – Jésus se trouve dans les
plaines de Chorazeïn (Corozaïn), le long de la vallée du haut Jourdain, entre
le lac de Génésareth et le lac de Mérom. Une campagne pleine de vignobles où
déjà commencent les vendanges. Il doit y être depuis déjà quelques jours
parce que, ce matin, sont avec Lui les disciples qui étaient à Sicaminon et
parmi eux, de nouveau Étienne et Hermas. Isaac s'excuse de n'avoir pu être là
plus tôt, c'est que, dit-il, il se demandait s'il était bien d'amener ou non
avec lui les nouveaux venus et ces réflexions l'avaient retardé.
"Mais" dit-il encore "j'ai pensé que le chemin du Ciel est
ouvert à tous ceux de bonne volonté et il me semble que ceux-ci, bien que
disciples de Gamaliel, sont tels"
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369> "Tu as bien dit et bien fait.
Amène-les-moi ici."
Isaac s'en va et revient avec les deux.
"La paix à vous. Est-ce que la parole des apôtres vous a semblé si vraie
que vous voulez vous y unir ?"
"Oui, et la tienne davantage. Ne nous repousse pas, Maître."
"Pourquoi le devrais-je ?"
"Parce que nous appartenons à Gamaliel."
"Et avec cela ? Moi, j'honore le grand Gamaliel et je le voudrais
avec Moi car il est digne d'y être. Il ne lui manque que cela pour faire de
sa sagesse une perfection. Que vous a-t-il dit quand vous l'avez
quitté ? Parce que, certainement, vous l'avez salué."
"Oui. Il nous a dit : "Heureux êtes-vous de pouvoir croire.
Priez pour que moi j'oublie pour pouvoir me souvenir"
Les apôtres qui, curieux se serrent autour de Jésus, se regardent l'un
l'autre et se demandent à voix basse : "Qu'est-ce qu'il a voulu
dire ? Que veut-il ? Oublier pour se souvenir ?"
Jésus entend ce chuchotement et explique : "Il veut oublier sa
sagesse pour prendre la mienne. Il veut oublier qu'il est le rabbi Gamaliel
pour se rappeler qu'il est un fils d'Israël qui attend le Christ. Il veut
s'oublier lui-même pour se rappeler la Vérité."
"Ce n'est pas un menteur, Gamaliel, Maître" dit Hermas pour l'excuser.
"Non. Mais c'est le fatras des pauvres mots humains qui est mensonge.
Les paroles qui remplacent la Parole, il faut les oublier, s'en dépouiller,
venir nu et vierge à la Vérité pour être revêtu et
fécondé. Cela requiert l'humilité. L'écueil ..."
"Alors, nous aussi, nous devons oublier ?"
"Sans aucun doute. Oublier tout ce qui est chose humaine. Se rappeler
tout ce qui est chose de Dieu. Venez, vous pouvez le faire."
"Nous voulons le faire" assure Hermas.
"Avez-vous déjà vécu la vie des disciples ?"
"Oui, du jour où nous avons appris le meurtre du Baptiste. La nouvelle
arriva très vite à Jérusalem, apportée par des courtisans et des officiers
d'Hérode. Sa mort nous a tirés de notre torpeur" répond Étienne.
"Le sang des martyrs est toujours vie pour ceux qui sont dans la
torpeur. Rappelle-le-toi, Étienne."
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370> "Oui, Maître. 275.2 – Parleras-tu aujourd'hui ?
J'ai faim de ta parole."
"J'ai déjà parlé, mais je parlerai encore beaucoup, à vous les
disciples. Vos compagnons, les apôtres, ont déjà commencé la mission après
une active préparation. Mais ils ne suffisent pas aux besoins du monde, Et il
faut avoir tout fait, dans un temps précis. Je suis comme quelqu'un qui a une
échéance et qui doit avoir tout fait dans un temps limité. Je vous demande, à
tous, de l'aide et, au nom de Dieu, je vous promets, de l'aide et un avenir
de gloire."
L’œil perçant de Jésus découvre un homme tout enveloppé dans un manteau de
lin :
"N'es-tu pas le prêtre Jean ?"
"Si, Maître. Plus aride que le vallon maudit est le cœur des juifs. Je
me suis enfui à ta recherche."
"Et le sacerdoce ?"
"La lèpre m'en avait banni la première fois, les hommes pour la seconde,
parce que je t'aime. Ta Grâce m'attire à elle : à Toi. Elle aussi
m'avait expulsé d'un lieu profané pour m'amener dans un lieu pur. Tu m'as
purifié, Maître, en mon corps et en mon esprit. Et une chose pure ne peut
pas, ne doit pas, s'approcher d'une chose impure. Ce serait une offense pour
celui qui a purifié."
"Tu as un jugement sévère, mais il n'est pas injuste."
"Maître, les laideurs de famille sont connues de celui qui vit dans la
famille et ne doivent être dites qu'à celui qui est un esprit droit. Tu l'es
et, d'ailleurs, tu sais. Aux autres, je ne le dirais pas. Ici, il y a Toi, tes apôtres et deux qui sont au courant, comme Toi et
comme moi. Par conséquent..."
"Cela va bien. Mais... oh !
toi aussi ?! La paix soit à toi !
Tu es venu pour donner d'autre nourriture ?"
"Non. Pour avoir, moi, ta nourriture."
"Est-ce que tes récoltes sont perdues ?"
"Oh ! non. Jamais elles n'ont été si belles. Mais, mon Maître, je
cherche un autre pain, une autre récolte : les tiens. Et, avec moi, j'ai
le lépreux que tu as guéri sur mes terres. Il est revenu à son Maître. Mais
lui et moi, avons maintenant un maître à suivre et à servir : Toi."
"Venez. Un, deux, trois, quatre... Une bonne récolte ! Mais
avez-vous réfléchi à votre situation auprès du Temple ? Vous savez, et
Moi je sais... et je ne dis rien d'autre ..."
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371> "Je suis un homme libre et je
vais avec qui je veux" dit le prêtre Jean.
"Et moi aussi" dit le nouveau venu, le scribe Jean, qui est l'homme
qui a donné de la nourriture le sabbat au pied du Mont des Béatitudes.
"Et nous aussi" disent Hermas et Étienne.
Et Étienne ajoute :
"Parle-nous, Seigneur. Nous ignorons ce qu'est précisément notre
mission. Donne-nous le minimum pour pouvoir te servir tout de suite. Le reste
viendra en te suivant."
"Oui. Sur la montagne, tu as parlé des béatitudes. Et c'était une
instruction pour nous. Mais nous, auprès des autres, pour le second amour,
celui du prochain, que devons-nous faire ?" demande le scribe Jean.
275.3 – "Où est Jean
d'En-Dor ?" demande Jésus pour toute réponse.
"Là-bas, Maître, avec ceux qui ont été guéris."
"Qu'il vienne ici"
Jean d'En-Dor accourt. Jésus lui met la main sur l'épaule en le saluant en
particulier et il dit :
"Voilà, maintenant, je vais parler. Je veux vous avoir devant Moi, vous
qui portez le nom saint. Toi, mon apôtre; toi, le prêtre; toi, le scribe;
toi, Jean du Baptiste; et toi, enfin, pour fermer la couronne des grâces
faites par Dieu. Et si je te nomme le dernier, tu sais que tu n'es pas le
dernier dans mon cœur. Je te l'ai promis, un jour, ce discours, Tu vas
l'avoir."
Et Jésus, comme il le fait d'ordinaire, monte sur un petit talus pour que
tous puissent le voir. Il a devant Lui, au premier rang les cinq Jean. En
arrière se trouvent les disciples, mêlés à ceux qui sont accourus de toutes
parts de la Palestine, pour leur santé ou pour entendre la parole.
275.4 – "La paix à vous tous, et
la sagesse sur vous.
Écoutez. Quelqu'un, en un jour lointain, m'a demandé
si Dieu est miséricordieux envers les pêcheurs et jusqu'à quel point Il
l'est. Celui qui le demandait était un pécheur pardonné qui n'arrivait pas à
se persuader de l'absolu pardon de Dieu. Et Moi, par des paraboles, je le
calmai, le rassurai et lui promis que pour lui j'aurais toujours parlé de
miséricorde pour que son cœur repenti qui, semblable à un enfant égaré lui
pleurait au-dedans, se sentît assuré d'être déjà en possession de son Père
des Cieux.
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372> Dieu est Miséricorde parce que Dieu
est Amour. Le serviteur de Dieu doit être miséricordieux pour imiter Dieu.
Dieu se sert de la miséricorde pour attirer à Lui ses fils dévoyés. Le
serviteur de Dieu doit se servir de la miséricorde comme d'un moyen pour
amener à Dieu les fils dévoyés.
Le précepte de l'amour doit être obligatoire
pour tous, mais il doit l'être trois fois pour les serviteurs de Dieu.
On ne conquiert pas le Ciel si en n'aime pas. Mais cela, il suffit de le dire
aux croyants. Aux serviteurs de Dieu, Moi je dis : "On ne fait pas
conquérir le Ciel aux croyants si on n'aime pas avec perfection". Et
vous, qui êtes-vous, vous qui vous pressez tout autour ? En plus grande
partie, vous êtes des créatures qui tendez à une vie
parfaite, à la vie bénie, à la vie pénible, lumineuse du serviteur de Dieu,
du ministre du Christ. Et quels devoirs avez-vous en cette vie de serviteurs
et de ministres ? Un amour total pour Dieu, un amour total pour le
prochain. Votre but : servir. Comment ? En rendant à Dieu ceux que le monde, la
chair, le démon ont pris à Dieu. De quelle façon ? Par l'amour. L'amour
qui a mille façons de s'exercer et une fin unique : faire aimer.
275.5 – Pensons à notre beau Jourdain.
Comme il est imposant à Jéricho ! Mais, était-il ainsi à sa
source ? Non, c'était un filet d'eau, et tel il serait resté s'il avait
toujours été seul. Au contraire, voilà que des montagnes, et des collines, de
l'une et l'autre rive de sa vallée, descendent mille et mille affluents, les
uns seuls, d'autres déjà formés de cent ruisseaux, et tous se déversent dans
son lit, qui croit, croît, croît, jusqu'à devenir, de doux ruisseau qu'il
était, cours d'eau d'argent azuré qui rit et s'amuse dans son enfance de
fleuve, le fleuve large, solennel, tranquille qui déroule son ruban d'azur au
milieu de ses rives fertiles couleur d'émeraude.
Ainsi en est-il de l'amour. Un filet initial chez ceux qui sont des enfants
sur le Chemin de la Vie qui savent à peine se garder du péché grave par crainte
de la punition et puis, avançant sur le chemin de la perfection, voilà que
des montagnes de l'humanité rugueuses, arides, orgueilleuses, dures, sortent
par la volonté de l'amour de nombreuses rivières de cette principale vertu.
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373> Tout sert à la faire surgir et
jaillir : les douleurs et les joies, comme sur les montagnes servent à
faire des ruisseaux les neiges gelées et le soleil qui les fait fondre. Tout
sert à leur ouvrir le chemin : l'humilité comme le repentir. Tout sert à
les diriger vers le fleuve initial, car l'âme, poussée sur cette voie, aime
descendre dans l'anéantissement du moi aspirant à remonter, attirée par le
Soleil-Dieu, après être devenue un fleuve puissant, magnifique, bienfaisant.
Les ruisseaux qui nourrissent le ruisseau embryonnaire de l'amour de respect
sont, outre les vertus, les œuvres que les vertus apprennent à accomplir, les
œuvres qui justement, pour être des ruisselets d'amour, sont des œuvres de
miséricorde. Voyons-les
ensemble. Certaines étaient déjà connues à Israël, d'autres, c'est Moi qui
vous les fais connaître parce que ma loi est perfection d'amour
.
275.6 – Donner à manger aux affamés.
Devoir de reconnaissance et d'amour. Devoir d'imitation. Les enfants sont reconnaissants
au père du pain qu'il leur procure et, devenus hommes, ils l'imitent en
procurant du pain à leurs enfants, et à leur père que l'âge rend désormais
incapable de travailler, ils procurent le pain par leur propre travail,
affectueuse restitution, juste restitution du bien qu'ils ont reçu. Le
quatrième commandement le dit : "Honore ton père et ta mère" .
C'est aussi honorer leurs cheveux blancs de ne pas les réduire à demander
leur pain à d'autres.
Mais, avant le quatrième commandement, il y a le premier : "Aime
Dieu de tout toi-même" et le second : "Aime ton prochain comme
toi-même". Aimer Dieu pour Lui-même et l'aimer dans le prochain, c'est
la perfection.
On l'aime en donnant du pain à qui a faim en
souvenir de tant de fois où Lui a rassasié l'homme par des actes miraculeux.
Mais sans regarder uniquement la manne et les cailles, regardons le miracle
continuel, du grain qui germe par la bonté de Dieu qui a donné une terre
propre à la culture et qui règle les vents, les pluies, la chaleur, les
saisons pour que la semence devienne épi et que l'épi devienne pain.
Et est-ce que cela n'a pas été un miracle de sa miséricorde d'avoir enseigné
par une lumière surnaturelle à ses fils coupables que ces herbes grandes et
fines, qui se terminent par un épi de grains d'or à la chaude odeur de
soleil, renfermés dans la dure enveloppe d'écailles épineuses, étaient une
nourriture qu'il fallait récolter, égrener, réduire en farine, pétrir,
cuire ?
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374> Dieu a enseigné tout cela. Et
comment le récolter, le trier, l'écraser, le pétrir, le cuire. Il a mis les
pierres près des épis et l'eau près des pierres, Il a allumé par des
réverbérations de l'eau et du soleil le premier feu sur la terre et le vent a
amené sur le feu des grains qui ont grillé en. répandant une odeur agréable
pour faire comprendre à l'homme qu'il est meilleur ainsi qu'au sortir de
l'épi, comme les consomment les oiseaux, ou pétri après avoir été moulu
formant ainsi une pâte gluante que l'on cuit au feu. Vous n'y pensez pas,
vous qui maintenant mangez le bon pain cuit dans le four familial, de quelle
miséricorde est la preuve, ce fait d'être arrivés à cette perfection de
cuisson, quel chemin on a fait faire à la connaissance humaine depuis le
premier épi que l'homme a mastiqué comme le fait le cheval, jusqu'au pain
actuel ? Et, grâce à qui ? A Celui qui a donné le pain. Et ainsi
pour toute espèce de nourriture que l'homme a su,
par une lumière bienfaisante, distinguer parmi les plantes et les animaux
dont le Créateur a couvert la terre, lieu de châtiment paternel pour le fils
coupable.
Donc, donner à manger aux affamés, c'est une prière de reconnaissance au
Seigneur et Père qui nous rassasie, et c'est imiter le Père duquel nous avons
la ressemblance gratuitement donnée, et qu’il faut augmenter toujours plus en
imitant ses actions.
275.7 – Donner à boire à ceux qui ont soif.
Avez-vous jamais pensé à ce qui arriverait si le Père ne faisait plus
pleuvoir ? Ou bien s'Il disait : "A cause de votre dureté pour
celui qui a soif, J'empêcherai les nuages de descendre sur la terre"
pourrions-nous protester et maudire ? L'eau, plus encore que le grain,
appartient à Dieu. Car le grain est cultivé par l'homme, mais c'est Dieu seul
qui cultive les champs de nuages qui descendent en pluie ou en rosée, comme
les brouillards et les neiges, et alimentent les champs et les citernes et
remplissent les fleuves et les lacs, en donnant un refuge aux poissons qui,
avec d'autres animaux, rassasient l'homme. Pouvez-vous donc dire à celui qui
vous dit : "Donne-moi à boire" "Non. Cette eau
m'appartient et je ne te la donne pas" ? Menteurs ! Qui de
vous a fait un seul flacon de neige ou une seule goutte de pluie ? Qui a
évaporé un seul diamant de rosée par sa chaleur astrale ? Personne.
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375> C'est Dieu seul qui le fait. Et si
les eaux descendent du ciel et y remontent, c'est seulement parce que Dieu
règle cette partie de la création comme Il règle le reste.
Donnez donc à qui a soif la bonne eau fraiche qui sort des veines du sol, ou
l'eau pure de votre puits, ou celle qui remplit vos citernes. Les eaux
appartiennent à Dieu. Elles sont pour tous. Donnez-les à qui a soif. Pour une
si petite œuvre, qui ne vous coûte pas d'argent, qui n'impose pas d'autre
fatigue que celle de présenter une tasse ou un broc, je vous le dis, vous
aurez une récompense au Ciel. Car ce n'est pas l'eau, mais l'acte de charité
qui est grand aux yeux et à l'appréciation de, Dieu.
275.8 – Vêtir ceux qui sont nus.
Il passe sur les routes de la terre des misères nues, honteuses, pitoyables.
Il y a les vieillards abandonnés, ceux qui sont invalides par maladies ou
accidents; il y a les lépreux qui reviennent à la vie par la bonté du
Seigneur; il y a les veuves, chargées de famille, il y a ceux qui ont été
frappés par des malheurs qui leur ont enlevé toute aisance, il y a les
orphelins innocents. Si je porte les yeux sur la vaste terre, je vois partout
des personnes nues ou couvertes de haillons qui protègent à peine la décence
et ne mettent pas à l'abri du froid, et ces personnes regardent d'un œil
humilié les riches qui passent en vêtements somptueux, les pieds chaussés de
confortables sandales. Humiliation et bonté chez ceux qui sont bons,
humiliation et haine chez qui sont moins bons. Mais pourquoi ne venez-vous
pas en aide à leur humiliation, en les rendant meilleurs s'ils sont bons, en
détruisant la haine par votre amour s'ils sont moins bons ?
Ne dites pas : "Je n'en ai que pour moi". Comme pour le pain,
sur les tables et dans les armoires vous avez quelque chose de plus que ceux
qui sont absolument délaissés. Parmi ceux qui m'écoutent, il en est plus d'un
qui a su, d'un vêtement mis de côté à cause de l'usure, tirer un petit
vêtement pour un orphelin ou pour un enfant pauvre, et d'un vieux drap faire
des langes pour un innocent qui n'en a pas, et il en est un qui, mendiant, a
su pendant des années partager le pain, qu'il s'était péniblement procuré par
l'aumône, avec un lépreux qui ne pouvait aller tendre la main à la porte des
riches. Et, en vérité, je vous dis que ces gens miséricordieux, il ne faut
pas les chercher parmi les gens nantis, mais dans les humbles rangs des
pauvres qui savent, par leur condition, combien est pénible la pauvreté.
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376> Et ici aussi, comme pour l'eau et le
pain, pensez que la laine et le lin, dont vous vous vêtez, viennent d'animaux
et de plantes que le Père a créés, non pas seulement pour ceux qui parmi les
hommes sont riches, mais pour tous les hommes. Car Dieu a donné une seule
richesse à l'homme : celle de sa Grâce, de la santé, de l'intelligence,
mais pas la richesse souillée qu'est l'or. Vous l'avez élevé, du rang de
métal qui n'est pas plus beau qu'un autre, beaucoup moins utile que le fer
avec lequel on fabrique les houes et les charrues, les herses et les faux,
les burins, les marteaux, les scies, les rabots, les outils saints du saint
travail, au rang d'un métal noble, d'une noblesse inutile, mensongère, à
l'instigation de Satan qui, de fils de Dieu, vous a rendus sauvages comme des
fauves. La richesse de ce qui est saint vous avait donné de quoi devenir
toujours plus saints ! Non pas cette richesse
homicide qui fait couler tant de sang et de larmes. Et donnez comme on vous a
donné. Donnez au nom du Seigneur, sans craindre de rester nus. Il vaudrait
mieux mourir de froid pour s'être dépouillé en faveur d'un mendiant, que de
se laisser geler le cœur, même sous des vêtements moelleux, par manque de
charité.
La tiédeur du bien que l'on a fait est plus douce que celle d'un manteau de
très pure laine, et le corps du pauvre qui a été recouvert parle à Dieu et
Lui dit : "Bénis ceux qui nous ont vêtus".
275.9 – Si rassasier, désaltérer,
vêtir, en se privant pour donner aux autres, unit la sainte tempérance à la
très sainte charité et si la bienheureuse justice vous unit aussi, elle par
qui on modifie saintement le sort des frères
malheureux en donnant de ce que nous avons en abondance, par la permission de
Dieu, en faveur de ceux qui, par la méchanceté des hommes ou par les maladies
en sont privés, l'hospitalité
donnée aux voyageurs unit la charité à la confiance et à l'estime
du prochain. C'est aussi une vertu, savez-vous ? Une vertu qui dénote,
chez ceux qui la possèdent, en plus de la charité, l'honnêteté. En effet
celui qui est honnête agit bien et puisqu'on pense que les autres agissent
comme on agit à l'ordinaire, voilà que la confiance, la simplicité qui
croient à la sincérité des paroles d'autrui, dénotent que celui qui les écoute
est quelqu'un qui dit la vérité dans les grandes et les petites choses, sans
arriver par conséquent à se méfier des récits d'autrui.
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377> Pourquoi penser, en présence du
voyageur qui vous demande l'hospitalité : "Et puis, si c'est un
voleur et un meurtrier ?" Tenez-vous tant à vos richesses que vous
fait trembler, pour elles, tout étranger qui se présente ? Tenez-vous
tant à votre vie que vous vous sentez frémir d'horreur à la pensée de pouvoir
en être privés ? Et quoi ? Vous pensez que Dieu ne peut pas vous
défendre des voleurs ? Et quoi ? Vous craignez dans le passant, un
voleur et vous n'avez pas peur de l'hôte ténébreux qui vous dérobe ce qui est
irremplaçable ? Combien logent le démon dans leurs cœurs ! Je
pourrais dire : tous logent le péché capital, et pourtant personne ne
tremble à cause de lui. N'y a-t-il donc de précieux que le bien de la
richesse et de l'existence ? Et n'est-elle pas plus précieuse l'éternité
que vous vous laissez dérober et tuer par le péché ? Pauvres, pauvres
âmes, dépouillées de leur trésor, tombées aux mains des assassins, comme si
c'était une chose insignifiante, alors qu'ils barricadent les maisons,
mettent des verrous, des chiens, des coffres-forts
pour défendre des choses qu'ils n'emportent pas avec eux dans l'autre
vie !
Pourquoi vouloir voir dans tout voyageur un voleur ? Nous sommes frères.
La maison s'ouvre aux frères de passage. Le voyageur n'est pas de notre
sang ? Oh ! si ! Il est du sang d'Adam et Eve. Il n'est pas
notre frère ? Et comment non ?! Il n'y a qu'un seul Père :
Dieu qui nous a donné une même âme, comme un père donne un même sang aux
enfants d'un même lit. Il est pauvre ? Faites en sorte que ne soit pas
plus pauvre que lui votre esprit, privé de l'amitié du Seigneur. Son vêtement
est déchiré ? Faites en sorte que votre âme ne soit pas davantage
déchirée par le péché, Ses pieds sont boueux ou poussiéreux ? Faites
que, plus que sa sandale souillée par tant de chemin, usée par un long voyage,
votre moi ne soit
pas abîmé par les vices. Son aspect est désagréable ? Faites que le
vôtre ne le soit pas davantage aux yeux de Dieu. Il parle une langue
étrangère ? Faites en sorte que le langage de votre cœur ne soit pas
incompréhensible dans la Cité de Dieu.
Voyez dans le voyageur un frère. Nous sommes tous des voyageurs en route pour
le Ciel et tous nous frappons aux portes qui sont le long de la route qui va
au Ciel.
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378> Les portes sont les patriarches et
les justes, les anges et les archanges, auxquels nous nous recommandons pour
avoir aide et protection pour arriver au but, sans
tomber épuisés dans l'obscurité de la nuit, dans la rigueur du froid, proie
des pièges des loups et des chacals des passions mauvaises et des démons.
Comme nous voulons que les anges et les saints nous ouvrent leur amour pour
nous abriter et nous redonner des forces pour continuer la route, agissons de
même nous pour les voyageurs de la terre. Et chaque fois que nous ouvrirons
notre maison et nos bras en saluant du doux nom de frère un inconnu, en
pensant à Dieu qui le connaît, je vous dis que vous aurez parcouru plusieurs
milles sur le chemin qui va aux Cieux.
275.10 – Visiter les malades.
Oh ! en vérité, comme les hommes sont des voyageurs, ils sont tous
malades. Et les maladies les plus graves sont celles de l'esprit, les
maladies invisibles et les plus mortelles.
Et pourtant elles ne provoquent pas le dégoût. La plaie morale
n'inspire pas de répugnance. La puanteur du vice ne donne pas la nausée. La
folie démoniaque ne fait pas peur. La gangrène d'un lépreux spirituel ne
repousse pas. Le tombeau rempli d'ordure d'un homme dont l'âme est morte et
putréfiée ne fait pas fuir. Ce n'est pas un anathème de s'approcher de l'une
de ces impuretés. Pauvre, étroite pensée de l'homme !
Mais dites-moi : est-ce l'esprit qui a le plus de valeur ou bien la
chair et le sang ? Ce qui est matériel a-t-il le pouvoir de corrompre ce
qui est incorporel, par l'effet du voisinage ? Non. Je vous dis que non.
L'esprit a une valeur infinie en comparaison de la chair et du sang, cela,
oui, mais la chair n'a pas un pouvoir supérieur à celui de l'esprit. Et
l'esprit peut être corrompu non par des choses matérielles, mais par des
choses spirituelles. Même si quelqu'un soigne un lépreux, son esprit ne
devient pas lépreux, mais au contraire, à cause de la charité qu'il pratique
héroïquement jusqu'à s'isoler dans des vallées de mort, par pitié pour le
frère, toute tache de péché tombe de lui, Car la charité est absolution du
péché et la première des purifications.
Partez toujours de la pensée : "Que voudrais-je qu'on me fasse, si
j'étais comme celui-ci ?" Et faites comme vous voudriez qu'on vous
fasse.
Maintenant encore, Israël a ses anciennes lois. Mais un jour viendra, et son
aurore n'est plus très lointaine, où on vénérera comme un symbole d'absolue
beauté, l'image de Quelqu'un en qui sera reproduit matériellement l'Homme des
douleurs d'Isaïe et le Torturé du psaume de David ,
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379> Celui qui, pour s'être rendu
semblable à un lépreux, deviendra le Rédempteur du genre humain et vers ses
plaies accourront, comme des cerfs vers les sources, tous ceux qui ont soif,
qui sont malades, épuisés, tous ceux qui pleurent sur la terre, et Il les désaltérera,
les guérira:, les restaurera, les consolera en leur esprit et en leur chair,
et les meilleurs aspireront à devenir semblables à Lui, couverts de
blessures, exsangues, frappés; couronnés d'épines, crucifiés, par amour des
hommes qu'il faut racheter, continuant l’œuvre de Celui qui est le Roi des
rois et le Rédempteur du monde. Vous qui êtes encore d'Israël, mais qui déjà
dressez vos ailes pour voler vers le Royaume des Cieux, commencez dès
maintenant à concevoir cette valeur nouvelle des infirmités et, en bénissant
Dieu qui vous garde en bonne santé, penchez-vous sur ceux qui souffrent et
qui meurent.
Un de mes apôtres a dit un jour à un de ses frères : "Ne crains pas
de toucher les lépreux. Par la volonté de Dieu aucun mal ne s'attachera à nous" .
Il a bien parlé. Dieu protège ses serviteurs. Mais même si vous étiez
contaminés en soignant les malades, vous seriez portés dans l'autre vie sur
la liste des martyrs de l'amour.
275.11 – Visiter les prisonniers.
Croyez-vous que dans les galères il n'y ait que des criminels ?
La justice humaine est aveugle d'un œil, et l'autre a des troubles visuels,
Elle voit des chameaux où il y a des nuages et prend un serpent pour un
rameau fleuri. Elle juge mal. Plus mal encore parce que celui qui préside
crée volontairement des nuages de fumée pour qu'elle voie encore plus mal.
Mais même si tous les prisonniers étaient des voleurs et des meurtriers, il
n'est pas juste de nous rendre voleurs et homicides en leur enlevant par
notre mépris l'espoir du pardon.
Pauvres prisonniers ! Ils n'osent pas lever vers Dieu leurs yeux
accablés comme ils le sont par leurs fautes. Les chaînes, en vérité, lient
davantage leurs esprits que leurs pieds. Mais malheur s'ils désespèrent de
Dieu ! Au crime envers le prochain, ils ajoutent celui de désespérer du
pardon. La galère est expiation comme l'est la mort sur le gibet. Mais il ne
suffit pas de payer ce qui est dû à la société humaine pour le crime
accompli. Il faut payer aussi et surtout la part qui doit être payée à Dieu
pour expier, pour avoir la vie éternelle.
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380> Et celui qui est révolté et
désespéré n'expie qu'à l'égard de la société humaine. Qu'au condamné ou au
prisonnier aille l'amour des frères. Ce sera une lumière dans les ténèbres,
ce sera une voix, ce sera une main qui montre les hauteurs alors que la voix
dit : "Que mon amour te dise que Dieu aussi t'aime. C'est Lui qui
m'a mis au cœur cet amour pour toi, frère infortuné" et la lumière
permet d'entrevoir Dieu, Père plein de pitié.
Que votre charité aille avec plus de raison consoler les martyrs de
l'injustice humaine. Ceux qui ne sont pas du tout coupables ou ceux qu'une
force cruelle a amenés à tuer. Ne jugez pas vous aussi là où un jugement a
été porté. Vous, vous ne savez pas pourquoi un homme peut tuer. Vous ne savez
pas que bien des fois, ce n'est qu'un mort celui qui tue, un automate privé
de raison parce que, sans verser le sang, un assassin lui a enlevé la raison
par la lâcheté d'une trahison cruelle. Dieu sait. Cela suffit. Dans l'autre
vie on verra au Ciel beaucoup de galériens,
beaucoup qui auront tué et volé, et on en verra en Enfer beaucoup qui
sembleront avoir été volés ou tués parce qu'en réalité ils auront été les
vrais voleurs de la paix d'autrui, de l'honnêteté, de la confiance, les
véritables assassins d'un cœur : les pseudo-victimes. Victimes, parce
qu'ils ont été à la fin frappés, mais après que, pendant des années, ils ont
eux-mêmes silencieusement frappé. L'homicide et le vol sont des péchés, mais
entre celui qui tue et vole parce qu'il y a été amené par d'autres et puis
s'en repent, et celui qui en porte d'autres au péché et ne se repent pas,
sera davantage puni celui qui amène au péché sans en éprouver de remords.
Par conséquent, sans jamais juger, soyez pleins de pitié pour les
prisonniers. Pensez toujours que si tous les homicides et les vols devaient
se trouver punis, il y aurait peu d'hommes et peu de femmes qui ne mourraient
pas aux galères ou sur un gibet.
Ces mères qui conçoivent et qui ne veulent pas amener leur fruit à la
lumière, comment les appellera-t-on ? Oh ! ne faisons pas de jeux
de mots ! Disons-leur sincèrement leur nom : "Assassins".
Ces hommes qui volent des réputations et des places, quel nom leur
donnera-t-on ? Mais simplement ce qu'ils sont :
"Voleurs". Ces hommes et ces femmes qui sont adultères ou qui,
tourmentant leurs conjoints, les poussent à l'homicide ou au suicide et semblablement
ceux qui, étant les grands de la terre, portent au désespoir leurs sujets et
par le désespoir à la violence, quel est leur nom ?
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381> Le voici :
"Homicides". Eh bien ? Personne ne fuit ? Vous voyez bien
que parmi ces galériens, échappés à la justice, qui remplissent maisons et
villes et nous frôlent sur les routes, et dorment avec nous dans les
auberges, et partagent les repas avec nous, on vit sans y penser. Eh bien,
qui est sans péché ?
Si le doigt de Dieu écrivait sur les murs de la pièce où banquettent les
pensées de l'homme: sur le front, les paroles accusatrices de ce que vous
avez été, êtes ou serez, peu de fronts porteraient en lettres de lumière, la
parole: "Innocent". Les autres fronts, en caractères verts comme
l'envie, ou noirs comme la trahison, ou rouges comme le crime, porteraient
les mots : "Adultère" "Assassins"
"Voleurs" "Homicides".
Soyez donc, sans orgueil, miséricordieux pour vos frères moins heureux
humainement qui sont aux galères, expiant ce que vous n'expiez pas pour la
même faute. Cela profitera à votre humilité.
275.12 – Ensevelir les morts.
La contemplation de la mort est une école de la vie. Je voudrais pouvoir vous
amener tous en face de la mort et vous dire : "Sachez vivre en
saints pour n'avoir que cette mort : séparation temporaire du corps et
de l'esprit pour ressusciter ensuite triomphalement pour l'éternité, réunis,
bienheureux".
Tous, nous naissons nus. Tous nous mourons en devenant des dépouilles vouées
à la décomposition. Rois ou gueux, on meurt comme on vient au monde. Et si le
luxe des rois permet une plus longue conservation des cadavres, la
décomposition est toujours le sort de ce qui est la chair morte. Les momies
elles-mêmes, que sont-elles ? De la chair ? Non. Une matière
fossilisée par les résines, lignifiée. Pas la proie des vers parce qu'elle
est vidée et brûlée par des essences, mais proie des vers rongeurs comme le
vieux bois.
Mais la poussière redevient poussière, comme Dieu l'a dit. Et pourtant,
uniquement parce que cette poussière a enveloppé l'esprit et en a été
vivifiée, voici que comme une chose qui a touché une gloire de Dieu - telle
est l'âme de l'homme - il faut penser que c'est une poussière sanctifiée
d'une manière qui ne diffère pas des objets qui ont touché le Tabernacle. Il
y a eu un moment, au moins, où l'âme a été parfaite : pendant que Dieu
la créait. Et si ensuite la Tache l'a souillée, en lui enlevant sa
perfection, par sa seule origine elle communique de la beauté à la matière
et, à cause de cette beauté qui vient de Dieu le corps s'embellit et mérite
le respect.
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382> Nous sommes des temples, et comme
tels nous méritons l'honneur comme ont toujours été honorés les endroits où
avait séjourné le Tabernacle.
Faites donc aux morts la charité d'un repos honoré dans l'attente de la
résurrection, en voyant dans les admirables harmonies du corps humain
l'esprit et la main de Dieu qui l'a pensé et modelé avec perfection, en
vénérant même dans sa dépouille l’œuvre du Seigneur.
275.13 – Mais l'homme n'est pas
seulement chair et sang. Il est aussi âme et pensée. Celles-ci souffrent
aussi et il faut miséricordieusement subvenir à leurs besoins.
Il y a des ignorants qui font le mal parce qu'ils ne connaissent pas
le bien. Combien ne connaissent pas ou connaissent mal les choses de Dieu et
même les lois morales ! Ils languissent comme des affamés parce qu'il
n'y a personne pour leur donner la nourriture et ils tombent en langueur par
manque de vérités qui les nourrissent. Allez les instruire car c'est pour
cela que je vous rassemble et vous envoie. Donnez le pain de l'esprit à la
faim des esprits.
Instruire les ignorants
correspond, dans l'ordre spirituel, à rassasier les affamés, et si
on donne une récompense pour un pain donné au corps qui languit pour qu'il ne
meure pas ce jour-là, quelle récompense sera donnée à celui qui rassasie un
esprit des vérités éternelles, en lui donnant la vie éternelle ? Ne
soyez pas avares de ce que vous savez. Cela vous a été donné gratuitement et
sans mesure. Donnez-le sans avarice car c'est chose de Dieu comme l'eau du
ciel, et il faut la donner comme elle a été donnée. Ne soyez pas avares et
orgueilleux des choses que vous savez, mais donnez avec une humble
générosité.
275.14 – Et donnez le rafraîchissement limpide et bienfaisant de la prière aux
vivants et aux morts qui ont soif de grâces. On ne doit pas
refuser l'eau aux gosiers desséchés. Que faut-il donner alors aux cœurs des
vivants angoissés et aux esprits souffrants des morts ? Des prières, des
prières, fécondes parce qu'elles sont inspirées par l'amour et l'esprit de
sacrifice.
La prière doit être vraie, non pas mécanique
comme le bruit d'une roue sur le chemin. Est-ce le bruit ou la roue qui fait
avancer le char ? C'est la roue qui s'emploie à faire avancer le char.
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383> Il en est de même de la prière
vocale et mécanique et de la prière active. La première : du bruit, rien
de plus. La seconde : un travail où les forces s'usent et où s'accroît
la souffrance, mais on arrive au but. Priez davantage par vos sacrifices que
par vos lèvres et vous donnerez le repos aux vivants et aux morts en faisant
la seconde œuvre de miséricorde spirituelle. Le monde sera davantage sauvé
par les prières de ceux qui savent prier, que par les batailles bruyantes,
inutiles, meurtrières.
275.15 – Beaucoup de personnes dans le
monde savent. Mais ne savent pas croire avec fermeté. Comme si elles étaient
prises entre deux camps opposés, elles hésitent, elles hésitent sans avancer
d'un seul pas, et elles épuisent leurs forces sans arriver à rien. Ce sont
les hésitants. Les gens des "mais" des "si" des "et
puis". Ceux qui. Demandent : "Après, il en sera
ainsi ?" "Et si ce n'était pas ainsi ?" "Et
est-ce que je pourrai ?" "Et si je ne réussis pas ?"
et ainsi de suite. Ce sont les velléitaires qui, s'ils ne trouvent pas où
s'accrocher, ne montent pas et, même s'ils trouvent, s'agrippent ici et là,
et non seulement il faut les soutenir, mais les faire monter à chaque nouveau
tournant de la journée. Oh ! vraiment ils exercent la patience et la
charité plus qu'un enfant retardé !
Mais, au nom du Seigneur, ne les abandonnez pas ! Donnez toute votre foi
lumineuse, toute votre force ardente à ces gens prisonniers d'eux-mêmes, de
leur maladie brumeuse. Conduisez-les vers le soleil et les hauteurs. Soyez
des maîtres et des pères pour ces hésitants, sans vous lasser ni vous
impatienter. Ils vous font tomber les bras ? Très bien. Vous aussi, tant
de fois, vous me les faites tomber, à Moi, et encore plus au Père qui est
dans les Cieux, qui doit souvent penser qu'il semble inutile que la Parole se
soit faite Chair, puisque l'homme est encore hésitant, même maintenant qu'il
entend parler le Verbe de Dieu. Vous ne voudrez pas présumer d'être plus que
Dieu et que Moi !
Ouvrez donc les prisons à ces prisonniers des "mais" et des
"si". Délivrez-les des chaînes des "Pourrai-je ?"
"Si je ne réussis pas ?". Persuadez-les qu'il suffit de tout
faire de son mieux pour que Dieu soit content. Et si vous les voyez tomber de
l'appui, ne les laissez pas, mais relevez-les une fois de plus. Comme font
les mères qui ne passent pas outre si leur petit vient à tomber, mais
s'arrêtent, le relèvent, le nettoient, le consolent, le soutiennent jusqu'à
ce qu'il ne craigne plus une nouvelle chute.
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384> Et elles agissent ainsi pendant des
mois et des années si l'enfant a des jambes faibles.
275.16 – Revêtez ceux dont l'esprit est nu en pardonnant à ceux qui
vous offensent.
L'offense est anti-charité. L’anti-charité dépouille de Dieu.
Aussi celui qui commet l'offense s'est dévêtu et seulement le
pardon de celui qu'il a offensé revêt cette nudité, parce qu'il lui redonne
Dieu. Dieu attend, pour pardonner, que l'offensé ait pardonné. Pardonner
aussi bien l'homme qui a été offensé, que celui qui a offensé l'homme et
Dieu. Parce que, allons ! Il n'est personne qui n'ait offensé son
Seigneur. Mais Dieu nous pardonne à nous, si nous pardonnons au prochain, et
Il pardonne au prochain si celui qui a été offensé pardonne. Il vous sera
fait comme vous avez fait. Pardonnez par conséquent si vous voulez qu'on vous
pardonne et vous jouirez au Ciel à cause de la charité que vous avez donnée,
comme si on mettait un manteau d'étoiles sur vos épaules saintes.
275.17 – Soyez miséricordieux envers ceux qui pleurent. Ce sont
ceux que la vie a blessés, ceux dont le cœur a été brisé dans ses affections.
Ne vous enfermez pas dans votre sérénité comme dans une forteresse. Sachez
pleurer avec ceux qui pleurent, consoler ceux qui sont affligés, combler le
vide de celui qui est privé d'un parent par la mort. Pères avec les
orphelins, enfants avec les parents, frères les uns pour les autres.
Aimez. Pourquoi n'aimer que ceux qui sont heureux ? Ils ont déjà leur
part de soleil. Aimez ceux qui pleurent. Ce sont les moins aimables pour le
monde, mais le monde ne connaît pas la valeur des larmes, Vous, vous la
connaissez. Aimez donc ceux qui pleurent. Aimez-les si dans leur chagrin ils
sont résignés. Aimez-les, et plus encore, si la douleur les révolte. Pas de
reproches, mais de la douceur pour les persuader dans leur douleur de
l'utilité de la souffrance. Ils peuvent, à travers le voile des larmes, voir d'une manière déformée le visage de Dieu qu'ils
réduisent à l'expression d'une toute puissance vengeresse. Non. Ne vous
scandalisez pas ! Non, ce n'est qu'une hallucination qui vient de la
fièvre de la souffrance. Secourez-les pour faire tomber leur fièvre. Que votre
foi toute fraîche soit comme la glace qu'on applique à celui qui délire.
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385> Puis, quand le plus fort de la
fièvre tombe et qu'arrive l'abattement et la stupeur hébétée de celui qui a
subi un traumatisme, alors, comme pour des enfants que la maladie a retardés,
recommencez à parler de Dieu, comme d'une chose nouvelle, doucement,
patiemment... Oh ! une belle histoire que l'on dit pour distraire
l'éternel enfant qu'est l'homme ! Et puis, taisez-vous. N'insistez
pas... L'âme se travaille elle-même. Aidez-la par des caresses et par la
prière. Et quand elle dit : "Alors, ce n'était pas
Dieu ?"dites: "Non, Lui ne voulait pas te faire du mal, parce
qu'Il t'aime, même pour qui ne t'aime plus à cause de la mort ou d'autre
chose". Et quand l'âme dit : "Mais moi, je l'ai accusé"
dites : "Lui l'a oublié parce que c'était la fièvre". Et quand
elle dit : "Alors, je le voudrais", dites : "Le
voici ! Il est à la porte de ton cœur qui attend que tu Lui ouvres".
275.18 – Supportez les importuns. Ils viennent déranger la petite
maison de notre moi, comme les voyageurs viennent déranger la maison que nous
habitons. Mais, comme je vous ai dit d'accueillir ces derniers, accueillez
aussi les premiers.
Ce sont des importuns ? Mais, si vous, vous ne les aimez pas à cause du
dérangement qu'ils vous donnent, eux, plus ou moins bien, vous aiment.
Accueillez-les à cause de cet amour. Et même s'ils venaient poser des
questions indiscrètes, vous dire leur haine, vous insulter, usez de patience
et de charité. Vous pouvez les rendre meilleurs par votre patience, vous
pouvez les scandaliser par votre manque de charité. Vous souffrez de les voir
pécher, d'eux-mêmes; mais souffrez davantage de les faire pécher et de pécher
vous-mêmes. Recevez-les en mon nom si vous ne pouvez les recevoir avec votre
amour. Et Dieu vous donnera une compensation en venant Lui, ensuite, vous
rendre visite et effacer le souvenir désagréable par ses surnaturelles
caresses.
Enfin 275.19 – efforcez-vous d'ensevelir les pécheurs pour préparer leur retour à la
vie de la Grâce. Savez-vous quand vous le faites ? Quand vous
les réprimandez avec une insistance paternelle, patiente, affectueuse. C'est
comme si vous ensevelissiez peu à peu les laideurs du corps avant de le
confier au tombeau en attendant le commandement de Dieu : "Lève-toi
et viens à Moi".
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386> Ne purifions-nous pas les corps, nous
les hébreux, par respect pour le corps qui doit ressusciter ? Réprimander les pécheurs, c'est comme
purifier leurs membres avant l'opération de l'ensevelissement. Le reste,
c'est la Grâce du Seigneur qui le fera. Purifiez-les par la charité, les
larmes et les sacrifices. Soyez héroïques pour arracher un esprit à la
corruption. Soyez héroïques.
Cela ne restera pas sans récompense. Car si on donne une récompense pour un
calice d'eau donné pour étancher une soif matérielle, qu'est-ce qu'on
donnera pour avoir enlevé à un esprit la soif infernale ?
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