Le lundi 30 décembre 1946.
478> 550.1 – Il
fait bon rester ainsi, au repos, dans l'amour des amis et près du Maître dans
les journées ensoleillées qui annoncent déjà un précoce sourire de printemps,
à regarder les champs qui ouvrent leurs sillons à un verdoiement innocent des
grains qui poussent, à regarder les prés qui rompent le vert uniforme de
l'hiver avec les premières fleurettes multicolores, à regarder les haies qui
dans les endroits les plus ensoleillés présentent déjà le sourire des boutons
qui s'ouvrent, à regarder les amandiers qui déjà moussent à leur sommet avec
les premières fleurs qui éclosent.
Et Jésus
en jouit, et de même les apôtres, et aussi les trois amis de Béthanie. Elle
semble si loin la malveillance, la douleur, la tristesse, la maladie, la
mort, la haine, l'envie, tout ce qui est peine, tourment, préoccupation sur
la Terre.
Les apôtres, tous, jubilent et le montrent.
Ils disent leur conviction, oh ! si sûre, si triomphante, que
désormais Jésus a vaincu tous ses ennemis, que sa mission continuera
désormais sans obstacles, qu'il sera reconnu comme Messie même par ceux qui
s'obstinaient davantage à le nier. Et ils parlent, un peu exaltés, rajeunis,
tant ils sont heureux, en faisant des projets pour l'avenir, en rêvant... en
rêvant tellement... et si humainement.
550.2 – Le plus exalté, à cause de sa
mentalité qui le porte aux extrêmes, c'est Judas de Kériot.
Il se félicite d'avoir su attendre, et d'avoir su agir, il se félicite de sa
longue foi dans le triomphe du Maître, il se félicite d'avoir défié les
menaces du Sanhédrin... Il est tellement exalté qu'il finit par dire aussi ce
qu'il a toujours tenu caché jusqu'ici, au milieu de l’étonnement et de la
stupéfaction de ses compagnons :
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479> "Oui, ils voulaient m'acheter,
ils voulaient me séduire par des flatteries, et en voyant qu'elles ne
servaient pas, par des menaces. Si vous saviez ! Mais moi, je les ai payés de
la même monnaie. J'ai feint de l'amour pour eux, comme eux pour moi. Je les
ai flattés comme eux me flattaient, et je les ai trahis comme eux voulaient
me trahir... Parce que, c'est cela qu'ils voulaient. Me faire croire que
c'était dans une bonne intention qu'ils éprouvaient le Maître pour pouvoir le
proclamer solennellement le Saint de Dieu. Mais moi je les connais ! Je les
connais. Et dans toutes les choses qu'ils me disaient vouloir faire, je m'y
prenais de façon que la sainteté de Jésus se manifestât vraiment avec plus
d'éclat que le soleil de midi dans un ciel sans nuages... Jeu dangereux que
le mien ! S'ils l'avaient compris ! Mais j'étais prêt à tout, même à mourir,
pour servir Dieu dans mon Maître. Et ainsi je savais tout... Hé ! parfois je
vous aurai semblé fou, mauvais, sauvage. Si vous aviez su ! Moi seul je
connais mes nuits, les précautions que je devais prendre pour faire du bien
sans attirer l'attention de personne ! Vous me suspectiez tous quelque peu,
je le sais, mais je ne vous garde pas rancune. Ma manière de faire... oui...
pouvait faire naître des soupçons, mais mon but était bon et je ne me
préoccupais que de cela. Jésus ne sait rien, ou plutôt je crois que Lui aussi
me soupçonne. Mais je saurai me taire sans exiger de Lui sa louange. Et
taisez-vous, vous aussi. Un jour, dans les premiers temps que j'étais avec
Lui — et toi, Simon
le Zélote, et toi, Jean de Zébédée,
vous étiez avec moi — Lui me fit un reproche parce que je m'étais vanté
d'avoir le sens pratique .
Depuis lors, moi... je ne Lui ai jamais fait ressortir cette qualité, mais
j'ai continué de l'employer, pour son bien. J'ai agi comme une mère pour son enfant
inexpérimenté. Elle enlève les obstacles de son chemin, elle plie pour lui la
branche sans épines et lève celle qui peut le blesser, ou bien par des gestes
avisés, elle l'amène à faire ce qu'il doit savoir faire et à éviter ce qui
est mal, sans même que son fils s'en aperçoive. Ainsi le fils croit être
arrivé par lui-même à marcher sans trébucher, à cueillir une belle fleur pour
sa mère, à faire ceci ou cela spontanément. J'ai fait la même chose avec le
Maître, car la sainteté ne suffit pas dans un monde d'hommes et de satans. Il faut aussi combattre à armes égales, au moins en hommes... et
parfois... même un rien de fourberie d'enfer ce n'est pas mal de la ranger
parmi les armes. C'est mon idée. Mais Lui ne veut pas en entendre parler...
Il est trop bon... Bon ! Moi je comprends tout et tout le monde et j'excuse
tous des mauvaises pensées que vous pouvez avoir eues sur mon compte.
Maintenant vous savez. Maintenant aimons-nous en bons compagnons, tout pour
son amour et sa gloire".
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480> Et il montre Jésus qui se promène
beaucoup plus loin dans une allée ensoleillée en parlant avec Lazare, qui
l'écoute avec un sourire extasié sur le visage.
550.3 – Les apôtres s'éloignent vers
la maison de Simon. Jésus s'approche au contraire avec son ami. Je les
écoute. Lazare
dit :
"Oui. Je l'avais compris qu'il y avait un grand but, et certainement de
bonté, de me laisser mourir. Je pensais que c'était pour m'épargner la vue de
la persécution qu'ils te font. Et, tu sais si je dis la vérité, j'étais
content de mourir pour ne pas la voir. Elle m'aigrit, elle me trouble.
Vois-tu, Maître. J'ai pardonné tant de choses à ceux qui sont les
chefs de notre peuple. J'ai dû pardonner jusqu'aux derniers jours... Elchias...
Mais la mort et la résurrection ont annulé tout ce qui s'y rapportait.
Pourquoi me rappeler leurs dernières actions pour m'affliger ? J'ai tout
pardonné à Marie.
Elle semble en douter. Et même, je ne sais pourquoi, depuis que je suis
ressuscité elle a pris à mon égard une attitude si... je ne sais comment la définir.
Elle est d'une douceur et d'une soumission, si étrange dans ma Marie... Même
dans les premiers moments où elle revint ici, rachetée par Toi, elle n'était
pas ainsi... Et même, peut-être tu sais et tu peux m'en dire quelque chose,
car Marie te dit tout... Tu sais si ceux qui sont venus ici lui ont peut-être
fait trop de reproches .
J'ai toujours cherché à amoindrir le souvenir de sa faute quand je l'ai vue
absorbée dans la pensée du passé pour guérir sa souffrance. Elle ne sait pas
s'en tranquilliser. Elle semble tellement... au-dessus de ce qui pourrait
être de l'avilissement. A certains elle pourrait paraître même peu
repentie... Mais moi, je comprends... Je sais. Elle fait tout pour expier. Je
crois qu'elle fait de grandes pénitences, de toutes sortes. Je ne
m'étonnerais pas que sous ses vêtements elle eût un cilice et que sa chair
connût la morsure des fouets... Mais l'amour fraternel que j'ai, et qui veut
la soutenir en mettant un voile entre le passé et le présent, les autres ne
l'ont pas... Tu sais si, peut-être, elle a été maltraitée par ceux qui ne
savent pas pardonner... et elle a tant besoin de pardon ?"
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481> "Je ne sais pas, Lazare. Marie
ne m'en a pas parlé. Elle m'a dit seulement d'avoir beaucoup
souffert en entendant les pharisiens insinuer que je n'étais pas le Messie
parce que je ne te guérissais pas ou que je ne te ressuscitais pas."
"Et... elle ne t'a rien dit de moi ? Tu sais... j'avais si mal... Je me
rappelle que ma mère, à ses derniers moments, révéla des
choses qui étaient passées inaperçues à Marthe et à moi. Ce fut comme si le fond
de son âme et de son passé était revenu à la surface dans les derniers
soulèvements du cœur. Moi, je ne voudrais pas... Mon cœur a tant souffert
pour Marie... et s'est tant efforcé de ne lui donner jamais l'impression de
ce que j'ai souffert à cause d'elle... Je ne voudrais pas l'avoir frappée,
maintenant qu'elle est bonne, alors que par amour fraternel d'abord, par
amour pour Toi ensuite, je ne l'ai jamais frappée au temps infâme où elle
était un opprobre. Que t'a-t-elle dit de moi, Maître ?"
"Sa douleur d'avoir eu trop peu de temps pour te donner son saint amour
de sœur et de condisciple. En te perdant, elle a mesuré toute l'étendue des
trésors d'affection qu'elle avait piétinés autrefois... et maintenant elle
est heureuse de pouvoir te donner tout l'amour qu'elle veut te donner, pour
te dire que pour elle tu es le frère, saint, aimé."
"Ah ! voilà ! J'en avais eu l'intuition ! Je m'en réjouis, mais je
craignais de l'avoir offensée... Depuis hier, je pense, je pense... j'essaie
de me souvenir... mais je n'y arrive pas..."
"Mais pourquoi veux-tu te rappeler ? Tu as devant toi l'avenir. Le passé
est resté dans la tombe, ou plutôt il n'y est même pas resté. Il a brûlé en
même temps que les bandelettes funèbres, mais si cela doit te donner la paix,
je te dis les dernières paroles que tu as eues pour tes sœurs, pour Marie
spécialement. Tu as dit que c'est à cause de Marie que je suis venu ici et
que j'y viens, parce que Marie sait aimer plus que tous. C'est vrai. Tu lui
as dit qu'elle t'a aimé plus que tous ceux qui t'ont aimé. Cela aussi est
vrai, car elle t'a aimé en se renouvelant par amour pour Dieu et pour toi. Tu
lui as dit précisément que toute une vie de délices ne t'aurait pas donné la
joie dont tu as joui grâce à elle. Et tu les as bénies comme un patriarche
bénissait ses enfants les plus aimés. Tu as semblablement béni Marthe que tu
appelais : ta paix, et Marie que tu appelais : ta joie. Es-tu en paix,
maintenant ?"
"Maintenant, oui, Maître. Je suis en paix."
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482> "Et alors, puisque la paix
donne la miséricorde, pardonne aussi aux chefs du peuple qui me persécutent.
En effet tu voulais dire que tu peux tout pardonner, mais pas le mal qu'ils
me font à Moi."
"C'est cela, Maître."
"Non, Lazare. Moi, je leur pardonne. Tu dois leur pardonner si tu
veux être semblable à Moi."
"Oh ! Semblable à Toi ! Je ne puis, je suis un simple homme !"
550.4 – "L'homme est resté
là-dessous. L'homme ! Ton esprit... Tu sais ce qui arrive à la mort de
l'homme..."
"Non, Seigneur, Je ne me rappelle rien de ce qui m'est arrivé"
interrompt vivement Lazare.
Jésus sourit et répond :
"Je ne parlais pas de ton savoir personnel, de ton expérience
particulière. Je parlais de ce que tout croyant sait ce qu'il arrive
quand il meurt."
"Ah ! Le Jugement
particulier. Je sais. Je crois. L'âme se
présente à Dieu, et Dieu la juge."
"C'est ainsi. Et le jugement de Dieu est juste et inviolable, et il a
une valeur infinie. Si l'âme jugée est coupable mortellement, elle devient
une âme damnée. Si elle est légèrement coupable, elle est envoyée au
Purgatoire. Si elle est juste, elle va dans la paix des Limbes en attendant
que j'ouvre la porte des Cieux. J'ai donc rappelé ton esprit après qu'il
était déjà jugé par Dieu. Si tu avais été un damné, je n'aurais pas pu te
rappeler à la vie car en le faisant j'aurais annulé le jugement de mon Père.
Pour les damnés, il n'y a plus de changement. Ils sont jugés pour toujours. Tu
étais donc au nombre de ceux qui n'étaient pas damnés. Par conséquent de la
classe des bienheureux ou de la classe de ceux qui seront bienheureux après
leur purification. Mais réfléchis, mon ami. Si la volonté sincère de repentir
que l'homme peut avoir alors qu'il est encore homme, c'est-à-dire chair et
âme, a une valeur de purification; si un rite symbolique de baptême dans
l'eau, voulu par esprit de contrition des souillures contractées dans le
monde et à cause de la chair, a pour nous hébreux une valeur de purification.
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483> Quelle valeur aura le repentir plus
réel et plus parfait, beaucoup plus parfait, d'une âme libérée de la chair,
consciente de ce qu'est Dieu, éclairée sur la gravité de ses erreurs,
éclairée sur l'immensité de la joie qui s'est éloignée pendant des heures,
pendant des années ou pendant des siècles - la joie de la paix des Limbes,
qui bientôt sera la joie de la possession de Dieu que l'on aura rejointe -
qui sera la purification double, triple, du repentir parfait, de l'amour
parfait, du bain dans l'ardeur des flammes allumées par l'amour de Dieu et
par l'amour des esprits dans lequel et par lequel les esprits se dépouillent
de toute impureté et d'où ils sortent beaux comme des séraphins, couronnés de
ce qui ne couronne même pas les séraphins : leur martyre
terrestre et ultra-terrestre contre les vices et grâce à l'amour ? Que
sera-ce ? Dis-le donc, mon ami."
"Mais... je ne sais pas... une perfection. Ou plutôt... une nouvelle
création."
"Voilà. Tu as dit le mot juste. L'âme en sort comme créée à nouveau.
L'âme devient semblable à celle d'un enfant. Elle est neuve. Tout le
passé n'existe plus, son passé d'homme. Quand tombera la Faute d'origine,
l'âme exempte de toute tache et de toute ombre de taches, sera supercréée et
sera digne du Paradis. J'ai rappelé ton âme qui déjà s'était recréée par son
attachement au Bien, par l'expiation de la souffrance et de la mort, et grâce
au parfait repentir et au parfait amour que tu avais atteints au-delà de la
mort. Tu as donc l'âme tout à fait innocente d'un enfant né depuis quelques
heures. Et si tu es un enfant nouveau-né, pourquoi veux-tu endosser sur cette
enfance spirituelle les vêtements lourds, accablants de l'homme adulte ? Les
petits enfants ont des ailes et non des chaînes à leurs esprits joyeux. Eux
m'imitent avec facilité parce qu'ils n'ont pas encore pris de personnalité.
Ils se font comme je suis, car sur leur âme vierge de toute empreinte peut
s'imprimer sans confusion de lignes ma figure et ma doctrine. Ils ont l'âme
exempte de souvenirs humains, de ressentiments, de préjugés. Il ne s'y trouve
rien. Et je puis y être, Moi qui suis parfait, absolu comme je suis dans le
Ciel. Toi qui es comme re-né, nouvellement
né, car dans ta vieille chair la puissance motrice est
nouvelle, sans passé, pure, sans traces de ce qui a été, toi qui es revenu
pour me servir, rien que pour cela, tu dois être comme je suis, plus que
tous. Regarde-moi. Regarde-moi bien. Mire-toi en Moi, et réfléchis-toi en
Moi. Deux miroirs qui se regardent pour réfléchir l'un dans l'autre la figure
de ce qu'ils aiment. Tu es un homme et tu es un enfant.
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484> Tu es homme pour l'âge, tu es
enfant pour la pureté du cœur. Tu as sur les enfants l'avantage de connaître
déjà le Bien et le Mal, et d'avoir déjà su choisir le Bien, même avant le
baptême dans les flammes de l'amour. Eh bien, Moi, je te dis à toi, homme
dont l'esprit est purifié grâce à la purification reçue : "Sois parfait
comme l'est notre Père des Cieux
et comme je le suis. Sois parfait, c'est-à-dire sois semblable à Moi qui t'ai
aimé au point d'aller contre toutes les lois de la vie et de la mort, du ciel
et de la terre pour avoir de nouveau sur la Terre un serviteur de Dieu, et
pour Moi un véritable ami, et au Ciel un bienheureux, un grand
bienheureux". Je le dis à tous : "Soyez parfaits". Et eux,
pour la plupart, n'ont pas le cœur que tu avais, digne du miracle, digne
d'être pris comme instrument pour une
glorification de Dieu en son Fils bien-aimé. Et eux n'ont pas tes
dettes d'amour envers Dieu... Je puis le dire, je puis l'exiger de toi. Et en
premier lieu, j'exige que tu n'aies pas de rancœur pour ceux qui m'ont
offensé et m'offensent. Pardonne, pardonne, Lazare. Tu as été plongé dans les
flammes allumées par l'amour. Tu dois être "amour", pour ne plus
jamais connaître autre chose que l'étreinte amoureuse de Dieu."
"Et en agissant ainsi, j'accomplirai la mission pour laquelle tu m'as
ressuscité ?"
"En agissant ainsi, tu l'accompliras."
"Cela suffit, Seigneur. Je n'ai pas besoin d'en demander et d'en savoir
davantage. Te servir était mon rêve. Si je t'ai servi même dans le rien que
peut faire celui qui est malade et mort, et si je pourrai te servir dans tout
ce que peut faire quelqu'un qui a recouvré la santé, mon rêve est réalisé et
je ne demande rien de plus. Que tu sois béni, Jésus, mon Seigneur et mon
Maître ! Et qu'avec Toi soit béni Celui qui t'a envoyé."
"Béni soit toujours le Seigneur Dieu Tout-Puissant."
550.5 – Ils s'en vont vers la maison,
s'arrêtent de temps en temps pour observer le réveil des arbres. Jésus lève
un bras et cueille, grand comme il est, une petite touffe de fleurs à un
amandier qui se chauffe au soleil contre le mur méridional de la maison.
Marie sort de la maison et, les voyant, s'approche pour entendre ce que dit
Jésus :
"Tu vois, Lazare ? À ceux-ci aussi le Seigneur a dit :
"Sortez". Et ils ont obéi pour servir le Seigneur."
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485> "Quel mystère que la
germination ! Il paraît impossible que du tronc dur et de la dure semence puissent
sortir des pétales si fragiles et des tiges si tendres et se changer en
fruits ou en arbres. Est-ce une erreur, Maître, de dire que la sève ou le
germe c'est comme l'âme de la plante ou de la semence ?"
"Ce n'est pas une erreur car c'est la partie
vitale. En eux, elle n'est pas éternelle, créée pour chaque espèce le premier
jour que les arbres et les blés le furent. Chez l'homme, elle est éternelle,
ressemblant à son Créateur, créée chaque fois pour chaque nouvel homme qui
est conçu. Mais c'est par elle que la matière vit. C'est pour cela que je dis
que c'est seulement par l'âme
que l'homme vit. Non seulement vit ici, mais au-delà. Il vit par son âme.
Nous hébreux, nous ne faisons pas de dessins
sur les tombeaux
comme les font les gentils. Mais si nous les faisions, nous devrions toujours
dessiner, non pas le flambeau éteint, la clepsydre vide ou un autre symbole
de fin, mais bien la semence jetée dans le sillon qui fleurit en épi. C'est en effet la mort de la chair qui libère l'âme de son écorce et
la fait fructifier dans les parterres du Seigneur. La semence. L'étincelle
vitale que Dieu a mise dans notre poussière et qui devient épi si nous savons
par la volonté et aussi par la douleur rendre fertile la motte qui l'enserre.
La semence, le symbole de la vie qui se perpétue... Mais Maximin t'appelle..."
"J'y vais, Maître. Il sera venu des régisseurs. Tout était arrêté ces
derniers mois. Maintenant ils s'empressent de me rendre leurs
comptes..."
"Que tu approuves d'avance, car tu es un bon maître."
"Et parce qu'eux sont de bons serviteurs."
"Le bon maître fait les bons serviteurs."
"Alors je deviendrai certainement un bon serviteur, car j'ai en Toi un
Maître parfait" et il s'en va en souriant, agile, si différent du pauvre
Lazare qu'il était depuis des années.
550.6 – Marie
reste avec Jésus.
"Et toi, Marie, deviendras-tu une bonne servante de ton Seigneur ?"
"C'est Toi qui peux le savoir, Rabboni. Moi... moi je sais seulement que
j'ai été une grande pécheresse."
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486> Jésus sourit :
"Tu as vu Lazare ? Lui aussi était un grand malade et ne te semble-t-il
pas que maintenant il soit bien sain ?"
"C'est ainsi, Rabboni. Tu l'as guéri. Ce que tu fais est toujours total.
Lazare n'a jamais été aussi fort et joyeux que depuis qu'il est sorti du
tombeau."
"Tu l'as dit, Marie. Ce que je fais est toujours total. C'est
pour cela aussi que ta rédemption est totale car c'est Moi qui l'ai
accomplie."
"C'est vrai, mon Sauveur aimé, mon Rédempteur, mon Roi, mon Dieu. C'est
vrai. Et si tu le veux, je serai, moi aussi, une bonne servante de mon
Seigneur. Moi, de mon côté, je le veux, Seigneur. Je ne sais pas si Toi tu le
veux."
"Je le veux, Marie. Une bonne servante pour Moi. Aujourd'hui plus
qu'hier. Demain plus qu'aujourd'hui. Jusqu'à ce que je te dise : 'Cela
suffit, Marie. C'est l'heure de ton repos'."
"C'est dit, Seigneur. Je voudrais que tu m'appelles, alors. Comme tu as
appelé mon frère hors du tombeau. Oh ! appelle-moi, Toi, hors de la vie
!"
"Non, pas hors de la vie. Je t'appellerai à la Vie, à la vraie Vie. Je
t'appellerai hors du tombeau qu'est la chair et la Terre. Je t'appellerai aux
noces de ton âme avec ton Seigneur."
"Mes noces ! Tu aimes les vierges, Seigneur..."
"J'aime ceux qui m'aiment, Marie."
"Tu es divinement bon, Rabboni ! C'est pour cela que je ne savais pas me
donner de paix en entendant dire que tu étais mauvais parce que tu ne venais
pas. C'était comme si tout s'écroulait. Quelle peine de me dire à moi-même :
"Non. Non ! Tu ne dois pas accepter cette évidence. Ce qui te paraît
évident est un rêve. La réalité, c'est la puissance, la bonté, la divinité de
ton Seigneur". Ah ! combien j'ai souffert ! Si grande la douleur pour la
mort de Lazare et pour ses paroles... Ne t'en a-t-il rien dit ? Ne se
souvient-il pas ? Dis-moi la vérité…"
"Je ne mens jamais, Marie. Il craint d'avoir parlé et d'avoir dit ce qui
avait été la douleur de sa vie. Mais je l'ai rassuré, sans mentir, et
maintenant il est tranquille."
"Merci, Seigneur. Ces paroles... elles m'ont fait du bien. Oui, comme
font du bien les soins d'un médecin qui met à nu les racines d'un mal et les
brûle. Elles ont fini de détruire la vieille Marie. J'avais encore une trop
haute idée de moi. Maintenant... je mesure le fond de mon abjection et je
sais que je dois faire une longue route pour le remonter. Mais je la
ferai, si tu m'aides."
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487> 550.7 – "Je
t'aiderai, Marie. Même quand je m'en serai allé, je t'aiderai."
"Comment, mon Seigneur ?"
"En accroissant ton amour dans une mesure incalculable. Pour toi, il n'y
a pas d'autre voie que celle-là."
"Trop douce pour ce que j'ai à expier ! Tous se sauvent par l'amour.
Tous acquièrent ainsi le Ciel. Mais ce qui suffit pour les purs, les justes,
n'est pas suffisant pour la grande coupable."
"Il n'y a pas d'autre voie pour toi,
Marie. En effet quelle que soit la voie que tu prendras, elle sera toujours
amour. Amour si tu rends service en mon nom. Amour si tu évangélises. Amour
si tu t'isoles. Amour si tu te martyrises .
Amour si tu te fais martyriser. Tu ne sais qu'aimer, Marie. C'est ta nature.
Les flammes ne peuvent que brûler, soit qu'elles rampent sur le sol pour
brûler des herbes, soit qu'elles montent comme un embrassement de splendeurs
autour d'un tronc, d'une maison, ou d'un autel pour s'élancer vers le ciel. À
chacun sa nature. La sagesse des maîtres spirituels consiste à savoir
faire fructifier les tendances de l'homme en le dirigeant vers la voie par
laquelle il peut le mieux se développer. Même chez les plantes et les
animaux cette loi existe et il serait sot de vouloir prétendre qu'un arbre à
fruit ne donne que des fleurs ou des fruits différents de ceux que comporte
sa nature, ou qu'un animal accomplisse des fonctions qui
sont propres à une autre espèce. Pourrais-tu prétendre que cette
abeille dont le destin est de faire du miel devienne un oiseau qui chante
dans le feuillage des haies ? Ou que ce rameau d'amandier que j'ai dans les
mains, avec tout l'amandier duquel je l'ai cueilli, au lieu de produire des
amandes laisse suinter de son écorce des résines odoriférantes ? L'abeille
travaille, l'oiseau chante, l'amandier donne son fruit, l'arbre résineux
donne ses résines aromatiques, et tous remplissent leur office. Il en est
ainsi des âmes. Tu as l'office d'aimer."
"Alors, brûle-moi, Seigneur. Je te le demande en grâce."
"Ne te suffit-elle pas la force d'amour que tu possèdes ?"
"C'est trop peu, Seigneur. Elle pouvait servir pour aimer des hommes,
pas pour Toi qui es le Seigneur infini."
"Mais justement parce que je suis tel, il serait alors nécessaire
d'avoir un amour sans limites..."
"Qui, mon Seigneur. C'est cela que je veux. Que tu mettes en moi un
amour sans limites."
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488> "Marie, le Très-Haut, qui sait
ce qu'est l'amour, a dit à l'homme : "Tu m'aimeras de toutes tes
forces" .
Il n'exige pas davantage, car Il sait que c'est déjà un martyre d'aimer avec
toutes ses forces…"
"N'importe, mon Seigneur. Donne-moi un amour infini pour t'aimer comme
tu dois être aimé, pour t'aimer comme je n'ai aimé personne."
"Tu me demandes une souffrance semblable à un bûcher qui brûle et
consume, Marie. Il brûle et se consume lentement... Penses-y."
"Il y a si longtemps que j'y pense, mon Seigneur, mais je n'osais te le
demander. Maintenant je sais combien tu m'aimes. Maintenant vraiment je sais
à quel point tu m'aimes, et j'ose te le demander. Donne-moi cet amour infini,
Seigneur."
Jésus la regarde. Elle est devant Lui, encore amaigrie par les veilles et la
souffrance, avec un vêtement modeste et une coiffure simple, comme une
fillette sans malice, avec un visage pâle où s'allume le désir, les yeux
suppliants et pourtant déjà étincelants d'amour, déjà plus séraphin que
femme. C'est vraiment la contemplatrice qui demande le martyre de la
contemplation absolue.
Jésus lui dit un seul mot après l'avoir bien regardée, comme pour mesurer sa
volonté :
"Oui"
"Ah ! mon Seigneur ! Quelle grâce de mourir d'amour pour Toi !"
elle tombe à genoux pour baiser les pieds de Jésus.
"Lève-toi, Marie, prends ces fleurs. Ce seront celles de tes noces
spirituelles. Sois douce comme le fruit de l'amandier, pure
comme sa fleur et lumineuse comme l'huile que l'on extrait de son fruit quand
on l'allume, et parfumée comme cette huile quand saturée d'essences on la
répand dans les banquets ou sur la tête des rois, parfumée par tes vertus.
Alors vraiment tu répandras sur ton Seigneur le baume qui Lui sera infiniment
agréable."
Marie prend les fleurs mais ne se lève pas de terre et embaume à l'avance par
son amour avec ses baisers et ses larmes répandues sur les pieds de son
Maître.
550.8 – Lazare les rejoint :
"Maître, il y a un petit garçon qui te demande. Il était allé chez Simon
pour te chercher et n'y a trouvé que Jean qui l'a conduit ici. Mais il ne
veut pas parler à d'autres qu'à Toi."
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489> "C'est bien, amène-le-moi. Je
vais aller sous la tonnelle des jasmins."
Marie rentre dans la maison avec Lazare. Jésus va sous la tonnelle. Lazare
revient en tenant par la main cet enfant que j'ai vu dans la maison de Joseph de
Sephoris. Jésus le reconnaît tout de suite
et le salue : "Toi, Martial
? La paix soit avec toi. Pourquoi es-tu ici ?"
"On m'envoie te dire une chose..." et il regarde Lazare qui
comprend et se dispose à s'éloigner.
"Reste, Lazare. C'est Lazare, mon ami. Tu peux parler devant lui, mon
enfant, car je n'ai pas d'ami plus fidèle que lui."
Le garçon se rassure. Il dit :
"C'est Joseph
l'Ancien qui m'envoie, car maintenant je
suis avec lui, pour te dire d'aller tout de suite, tout de suite à Bethphagé, chez Cléonte. Il doit te parler tout de suite,
mais vraiment tout de suite. Et il a dit que tu viennes seul, car il doit te
parler en grand secret."
"Maître ! Qu'arrive-t-il ?" demande Lazare impressionné.
"Je ne sais pas, Lazare. Il n'y a qu'à y aller. Viens avec Moi."
"Tout de suite, Seigneur. Nous pouvons aller avec l'enfant."
"Non, Seigneur. Je m'en vais seul. Joseph me l'a recommandé. Il a dit :
"Si tu sais te débrouiller seul, je t'aimerai comme un père", et
moi je veux que Joseph m'aime comme un fils. Je m'en vais de suite en
courant. Toi, viens après. Salut, Seigneur. Salut, homme."
"La paix à toi, Martial."
Le petit s'envole comme une hirondelle.
"Allons, Lazare. Apporte-moi mon manteau. Moi, je vais en avant car,
comme tu le vois, l'enfant n'arrive pas à ouvrir la grille et certainement il
ne veut appeler personne."
Jésus va vivement à la grille, Lazare vivement à la maison. Le premier ouvre les fermetures de fer à l'enfant qui s'en va en
vitesse. Le second apporte le manteau à Jésus et à côté de Jésus il marche
sur la route vers Bethphagé.
550.9 – "Que peut bien vouloir
Joseph, pour envoyer si secrètement un enfant ?"
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490> "Un enfant échappe à ceux qui
peuvent surveiller" répond Jésus.
"Tu crois que... Tu soupçonnes que... Tu te sens en danger, Seigneur
?"
"J'en suis certain, mon ami."
"Comment ? Même maintenant ? Mais tu ne pouvais pas donner une preuve
plus grande !..."
"La haine croît sous l'aiguillon de la réalité."
"Oh ! c'est à cause de moi, alors ! Je t'ai nui !... Ma peine est sans
pareille !" dit Lazare, vraiment affligé.
"Ce n'est pas à cause de toi. Ne t'afflige pas sans motif. Tu as été le
moyen, mais la cause a été la nécessité, tu comprends, la nécessité de donner
au monde la preuve de ma nature divine. Si ce n'avait pas été toi, cela
aurait été un autre, car je devais prouver au monde que, en Dieu que je suis,
je peux tout ce que je veux. Et ramener à la vie quelqu'un qui est mort
depuis plusieurs jours et déjà décomposé, ce ne peut être l'œuvre que de
Dieu."
"Ah ! Tu veux me consoler. Mais pour moi, ma joie, toute ma joie, est
dissipée... Je souffre, Seigneur."
Jésus fait un geste comme pour dire :
"Qu'y faire !" et ils se taisent ensuite tous les deux.
Ils marchent vivement. La distance est courte entre Béthanie
et Bethphagé et ils ont vite fait d'arriver.
550.10 – Joseph fait les cent pas sur
la route à l'entrée du village. Il a le dos tourné quand Jésus et Lazare
débouchent d'un sentier caché par une haie. Lazare l'appelle.
"Oh ! Paix à vous ! Viens, Maître. Je t'ai attendu ici pour te voir tout
de suite, mais allons dans l'oliveraie. Je ne veux pas qu'ils nous
voient..."
Il les conduit derrière les maisons, dans un bosquet d'oliviers qui, avec
leurs frondaisons touffues et ébouriffées qui cachent les pentes, sont un
refuge commode pour parler sans être remarqués.
"Maître, je t'ai envoyé l'enfant, qui est éveillé et obéissant et qui
m'aime beaucoup, parce que je devais te parler et que je ne devais
pas être vu. J'ai suivi le Cédron pour venir ici... Maître, tu dois t'en
aller tout de suite d'ici. Le Sanhédrin a décrété ton arrestation et
demain, dans les synagogues, on lira le décret. Quiconque sait où tu
te trouves, a le devoir de l'indiquer. Je n'ai pas besoin de te dire, Lazare,
que ta maison sera la première perquisitionnée.
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491> Je suis sorti à sexte du Temple et
je me suis hâté; car pendant qu'ils parlaient, j'avais déjà fait mon plan. Je
suis allé à la maison, j'ai pris l'enfant. Je suis sorti à cheval par la
Porte d'Hérode comme pour quitter la ville, puis j'ai traversé le Cédron et
je l'ai suivi. J'ai laissé l'âne au Gethsémani, j'ai envoyé en vitesse
l'enfant qui déjà connaissait la route pour être venu avec moi à Béthanie.
Va-t'en tout de suite, Maître, en lieu sûr. Sais-tu où aller ? As-tu où aller
?"
"Mais ne suffit-il pas qu'il s'éloigne d'ici ? De la Judée, tout au plus
?"
"Cela ne suffit pas, Lazare. Ils sont furieux. Il faut qu'il aille où
eux ne vont pas..."
"Mais ils vont partout, eux ! Tu ne voudrais pas que le Maître quitte la
Palestine !..." dit Lazare agité.
"Mais que dois-je te dire ? ! Le Sanhédrin le veut..."
"C'est à cause de moi, n'est-ce pas ? Dis-le !"
"Hum ! Oui ! À cause de toi... plutôt parce que tous se convertissent à
Lui, et eux... ne veulent pas de cela."
"Mais c'est un crime ! C'est un sacrilège... C'est..."
Jésus, pâle, mais calme, lève la main pour imposer le silence et il dit :
"Tais-toi, Lazare. Chacun fait son travail. Tout est écrit. Je te
remercie, Joseph, et je te certifie que je m'en vais. Va, va, Joseph. Qu'ils
ne remarquent pas ton absence... Que Dieu te bénisse. Par Lazare je te ferai
savoir où je suis. Va ! Je te bénis toi, Nicodème
et tous ceux qui ont le cœur droit." Il l'embrasse et ils se séparent.
Jésus revient avec Lazare, par l'oliveraie, à Béthanie, alors que Joseph va
vers la ville.
550.11 – "Que vas-tu faire, Maître
?" demande Lazare angoissé.
"Je ne sais pas. Ces jours-ci les femmes
disciples arrivent avec ma Mère.
J'aurais voulu les attendre..."
"À cause de cela... moi, je les accueillerais en ton nom, et je pourrais
te les conduire. Mais, Toi, en attendant où vas-tu ? Dans la maison de Salomon
je ne crois pas... ni chez des disciples connus. Demain !.., Tu dois partir
tout de suite !"
"J'aurais un endroit, mais je voudrais attendre ma Mère. Son angoisse
commencerait trop tôt si elle ne me trouvait pas..."
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492> "Où iras-tu, Maître ?"
"À Éphraïm."
"En Samarie ?"
"En Samarie. Les samaritains sont moins samaritains que beaucoup
d'autres et ils m'aiment. Éphraïm est à la frontière..."
"Oh ! C'est pour être contre les juifs qu'ils te feront honneur et
qu'ils te défendront ! Mais... attends ! Ta Mère ne peut venir que par la
route de la Samarie ou par celle du Jourdain. J'irai avec des serviteurs par
l'une, et Maximin avec d'autres serviteurs par
l'autre, et l'un ou l'autre la trouvera. Nous ne reviendrons qu'avec elles.
Tu sais que personne de la maison de Lazare ne peut trahir. Tu vas
aller pendant ce temps à Éphraïm, tout de suite. Ah ! il était dit que je ne
pourrais jouir de Toi ! Mais je viendrai par les monts d'Adomin. Je suis sain
maintenant. Je puis faire ce que je veux. Et même, oui ! Je ferai croire que
par la route de la Samarie je vais à Ptolémaïs
afin de prendre le bateau pour Antioche.
Tout le monde sait que j'y ai des terres... Mes sœurs resteront à Béthanie...
Toi... Oui. Maintenant je vais faire préparer deux chars et vous irez à
Jéricho avec eux. Puis à l'aube de demain, vous reprendrez le chemin à pied.
Oh ! Maître ! Mon Maître ! Sauve-toi ! Sauve-toi !" Après l'excitation
du premier moment, Lazare tombe dans la tristesse et il pleure. Jésus
soupire, mais ne dit rien. Que devrait-il dire ?...
550.12 – Les voilà à la maison de Simon.
Ils se séparent. Jésus entre dans la maison. Les apôtres, déjà étonnés que le
Maître soit parti sans rien dire, se serrent autour de Jésus qui leur dit :
"Prenez les vêtements. Faites les sacs. Nous devons partir tout de suite
d'ici. Faites vite. Et rejoignez-moi chez Lazare."
"Même les vêtements mouillés ? Ne pouvons-nous pas les reprendre à notre
retour ?" demande Thomas.
"Nous ne reviendrons pas. Prenez tout."
Les apôtres s'en vont en se parlant par leurs regards. Jésus va prendre ses
affaires dans la maison de Lazare et salue les sœurs consternées...
Les chars sont vite prêts, des chars lourds, couverts, tirés par des chevaux
robustes. Jésus prend congé de Lazare, de Maximin, des serviteurs qui sont
accourus.
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