Dictée du mardi 15 février 1944
35> 603.1 – Jésus dit :
"La souffrance de mon agonie spirituelle, tu l'as contemplée dans la
soirée du Jeudi.
Tu as vu ton Jésus s'affaisser comme un homme frappé mortellement qui sent
fuir sa vie à travers les blessures qui lui font perdre son sang, ou comme
une créature dominée par un traumatisme psychique au-dessus de ses forces. Tu
as vu la croissance de ce trauma qui a atteint son point extrême dans
l'effusion du sang, provoquée par le déséquilibre circulatoire que produisait
l'effort de me vaincre et de résister au poids qui s'était abattu sur Moi.
J'étais, je
suis le Fils du Dieu Très-Haut, mais j'étais aussi le Fils de l'homme. Je
veux que, de ces pages, se dégage nettement cette double nature pareillement
totale et parfaite.
De ma Divinité, fait foi ma parole qui a des accents que seul un Dieu peut
avoir. De mon Humanité, les besoins, les passions, les souffrances que je
vous présente et que je souffris dans ma chair d'Homme véritable, et que je
vous propose comme modèle de votre humanité, de même que je vous instruis
l'esprit par ma doctrine de vrai Dieu.
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36> Au cours des siècles, aussi bien ma
très sainte Divinité que ma très parfaite Humanité, par l'action de désagrégation
de "votre" humanité imparfaite, ont été diminuées, déformées dans
leur présentation. Vous avez rendue irréelle mon Humanité, vous l'avez rendue
inhumaine comme vous avez rendue petite ma figure divine, en la niant sur
tant de points que vous ne vouliez pas reconnaître ou que vous ne
pouviez plus reconnaître avec vos esprits diminués par les corruptions du
vice et de l'athéisme, de l'humanisme, du rationalisme.
603.2 – Je viens, en cette heure
tragique,
prodrome
de malheurs universels, je viens rafraîchir dans vos esprits ma double figure
de Dieu et d'Homme, pour que vous la connaissiez telle qu'elle est, pour que
vous la reconnaissiez après tant d'obscurantisme dont vous l'avez
couverte pour vos esprits, pour que vous l'aimiez et reveniez à elle et que vous
vous sauviez par son intermédiaire. C'est la figure de votre Sauveur, et
celui qui la connaîtra et l'aimera sera sauvé.
Ces jours-ci, je t'ai fait connaître mes souffrances physiques. Elles ont
torturé mon Humanité. Je t'ai fait connaître mes souffrances morales liées,
entrelacées, fondues avec celles de ma Mère comme le sont les lianes
inextricables des forêts équatoriales, que l'on ne peut séparer pour en
couper une seule mais que l'on doit briser d'un seul coup de hache pour
s'ouvrir un passage, en les coupant toutes ensemble; ou encore comme sont les
veines du corps dont on ne peut priver une seule de sang parce qu'un seul
liquide les emplit; comme, c'est encore mieux, comme on ne peut empêcher que
pour l'enfant qui se forme dans le sein de la mère qu'entre la mort si la
mère meurt, car c'est la vie, la chaleur, la nourriture, le sang de la mère
qui, par un rythme accordé avec le mouvement du cœur maternel, pénètre, à
travers les membranes internes, jusqu'à l'enfant qui doit naître pour faire
de lui un être vivant.
Elle, oh ! elle, la Mère pure m'a porté
non seulement les neufs mois pendant lesquels une femme porte le fruit de l'homme,
mais pendant toute sa vie. Nos cœurs étaient unis par des fibres spirituelles
et ont palpité ensemble toujours, et il n'y avait pas une larme maternelle
qui tombât sans humecter mon cœur de son sel, et il n'y avait pas une seule
de mes plaintes intérieures qui ne résonnât en elle pour éveiller sa douleur.
Vous souffrez de voir la mère d'un enfant destiné à mourir par suite d'une
maladie incurable, la mère de quelqu'un condamné au dernier supplice par la
rigueur de la justice humaine. Mais pensez donc à ma Mère ! Dès le
moment où elle m'a conçu, elle a tremblé à l’idée que j'étais le Condamné…
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37> Lorsqu’elle m'a donné le premier baiser sur ma peau
douce et rose de nouveau-né, elle a senti les plaies futures de son Enfant…
Cette Mère qui aurait donné dix, cent, mille fois sa vie pour m'empêcher de
devenir Homme et d'arriver au moment de l'Immolation. Cette Mère qui savait et qui devait
désirer cette heure terrible pour accepter la volonté du Seigneur, pour
la gloire du Seigneur, par bonté envers l'Humanité. Non, il n'y a pas eu
d'agonie plus longue, et qui ait pris fin en une douleur plus grande, que
celle de ma Mère.
603.3 – Et il n'y a pas eu une douleur
plus grande, plus complète que la mienne. J'étais Un avec le Père. Il m'avait
de toute éternité aimé comme Dieu seul peut aimer. Il s'était complu en Moi
et avait trouvé en Moi sa divine joie. Et Moi, je l'avais aimé comme seul un
Dieu peut aimer et j'avais trouvé dans l'union avec Lui ma joie divine. Les
ineffables rapports qui lient ab aeterno
(éternellement) le Père avec son Fils ne peuvent vous être expliqués même par
ma Parole, car si elle est parfaite votre intelligence ne l'est pas et vous
ne pouvez comprendre et connaître ce qu'est Dieu tant que vous n'êtes pas
avec Lui dans le Ciel.
Eh bien, je sentais, comme l'eau qui monte et fait pression contre une digue,
croître, heure par heure, la rigueur de mon Père envers Moi. En témoignage
contre les hommes-brutes, qui ne voulaient pas comprendre qui j'étais, Il
avait, durant le temps de ma vie publique, ouvert par trois fois le Ciel : au
Jourdain, au
Thabor et à Jérusalem la veille de la
Passion. Mais Il l'avait fait pour les hommes, non pour me donner un
soulagement à Moi. J'étais, désormais, l'Expiateur.
Souvent, Maria, Dieu fait connaître aux
hommes un de ses serviteurs pour les secouer et les entraîner, par son intermédiaire,
vers Lui, mais cela arrive aussi à
travers la douleur de ce serviteur. C'est lui-même qui paie personnellement,
en mangeant le pain amer de la rigueur de Dieu, les réconforts et le salut de
ses frères. N'est-ce pas ? Les
victimes d'expiation connaissent la rigueur de Dieu. Ensuite vient la gloire,
mais après que la Justice est apaisée. Ce n'est pas comme pour mon
amour qui, à ses victimes, donne ses baisers.
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38> Je suis Jésus, je suis le Rédempteur, Celui qui a
souffert et sait, par expérience personnelle, ce que c'est que la douleur d'être regardé avec sévérité par Dieu et
d'être abandonné par Lui, et je ne suis jamais sévère, et je n'abandonne
jamais. Je consume pareillement, mais dans un incendie d'amour.
603.4 – Plus l'heure de l'expiation
approchait, plus je sentais le Père s'éloigner. Toujours plus séparé du Père,
mon Humanité se sentait moins soutenue par la Divinité de Dieu. Et j'en souffrais
de toutes les manières. La séparation d'avec Dieu amène avec
elle la peur, elle amène avec elle l'attachement à la vie, elle amène avec
elle la langueur, la lassitude, l'ennui. Plus elle est
profonde et plus fortes sont ses conséquences. Quand elle est totale, elle
amène au désespoir. Et plus celui qui, par suite d'un décret de Dieu,
l'éprouve sans l'avoir méritée, plus il en souffre parce que l'esprit vivant
sent la séparation d'avec Dieu comme une chair vivante sent l'amputation d'un
membre. C'est un étonnement douloureux, accablant, que ne comprend pas celui
qui ne l'a pas éprouvé.
Je l'ai éprouvé. J'ai dû tout connaître pour pouvoir plaider sur tout sujet
auprès du Père en votre faveur. Même vos désespoirs. Oh ! Je l'ai éprouvé ce
que veut dire : "Je suis seul. Tous m'ont trahi, abandonné. Même le
Père, même Dieu ne m'aide plus"
Et c'est pour cela que j'opère des prodiges
mystérieux de grâce chez les pauvres cœurs que le désespoir accable et que je demande à mes privilégiés de boire mon calice si amer à l'expérience, pour
que ceux, qui font naufrage dans la mer du désespoir, ne refusent pas la croix que je leur offre
comme ancre de salut, mais qu'ils
s'y accrochent et que je puisse les amener à la rive bienheureuse où ne vit
que la paix.
603.5 – Dans
la soirée du Jeudi, Moi seul sais si j'aurais eu besoin du Père !
J'étais un esprit déjà à l'agonie à cause de l'effort d'avoir dû surmonter
les deux plus grandes douleurs d'un homme : l'adieu à une Mère très aimée, le
voisinage de l'ami infidèle. C'étaient deux plaies qui me brûlaient le cœur :
l'une par ses larmes, l'autre par sa haine.
J'avais dû rompre mon pain avec mon Caïn.
J'avais dû lui parler en ami pour ne pas le dénoncer aux autres dont je pouvais
redouter la violence, et pour empêcher un crime, inutile d'ailleurs, puisque
tout était déjà marqué dans le grand livre de la vie : et ma Mort sainte et
le suicide de
Judas. Inutiles, d'autres morts réprouvées par Dieu. Aucun
autre sang que le mien ne devait
être répandu, et ne fut pas répandu. La corde étrangla cette vie en
renfermant dans le sac immonde du corps du traître son sang impur vendu à
Satan, ce sang qui ne devait pas se
mélanger, en tombant sur la Terre, au sang très pur de l'Innocent.
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39> Elles auraient bien suffi ces deux plaies pour faire de
Moi un agonisant dans mon Moi. Mais j'étais l'Expiateur, la Victime,
l'Agneau. L'Agneau, avant d'être immolé, connaît la marque au fer rouge, il
connaît les coups, il connaît le dépouillement, il connaît la vente au
boucher. Ce n'est qu'à la fin qu'il connaît le froid du couteau qui pénètre
dans la gorge et saigne et tue. Auparavant il doit tout quitter : le pâturage où il a grandi, la mère au sein de laquelle il s'est
nourri et réchauffé, les compagnons avec lesquels il a vécu. Tout. Moi j'ai
tout connu : Moi, Agneau de Dieu.
603.6 – Satan est donc venu alors que le Père se
retirait dans les Cieux. Il était déjà venu au commencement de ma mission
pour essayer de m'en détourner.
Maintenant il revenait. C'était son heure. L'heure du sabbat satanique.
Des foules et des foules de démons étaient cette nuit-là sur la Terre pour
mener à terme la séduction dans les cœurs et les disposer à vouloir le
lendemain le meurtre du Christ. Chaque sanhédriste avait le sien, Hérode
le sien, Pilate
le sien, et le sien chacun des juifs qui aurait appelé mon Sang sur lui. Les
apôtres aussi avaient près d'eux leur tentateur qui les assoupissait pendant
que je languissais, qui les préparait à la lâcheté. Remarque le pouvoir de la
pureté. Jean,
le pur, fut le premier de tous à se libérer de la griffe démoniaque et
revint tout de suite vers son Jésus et comprit son désir inexprimé et m'amena Marie.
Mais Judas
avait Lucifer et Moi j'avais Lucifer. Lui dans le cœur, Moi à mon côté. Nous
étions les deux principaux personnages de la tragédie, et Satan s'occupait
personnellement de nous. Après avoir amené Judas au point de ne plus pouvoir
revenir en arrière, il se tourna vers Moi.
Avec sa ruse parfaite, il me présenta les
tortures de ma chair avec un réalisme insurpassable. Au désert aussi, il
avait commencé par la chair. Je le vainquis en priant. Mon esprit domina la peur de
la chair.
Il me présenta alors l'inutilité de ma mort,
l'utilité de vivre pour Moi-même sans m'occuper des hommes ingrats. Vivre
riche, heureux, aimé. Vivre pour ma Mère, pour ne pas la faire souffrir.
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40> Vivre pour amener à Dieu, par un long apostolat tant
d'hommes qui, une fois que je serais mort, m'auraient oublié; alors que si
j'avais été Maître non pas pendant trois ans, mais pendant des lustres et des
lustres, j'aurais fini par les pénétrer de ma doctrine. Ses anges m'auraient
aidé à séduire les hommes. Est-ce que je ne voyais pas que les anges de Dieu
n'intervenaient pas pour m'aider ? Ensuite, Dieu m'aurait pardonné en voyant
la moisson de croyants que je Lui aurais amenés. Dans le désert aussi il m'avait
poussé à tenter Dieu par l'imprudence. Je le vainquis par la prière. Mon
esprit domina la tentation morale.
603.7 – Il me présenta l'abandon de
Dieu, Lui, le Père, ne m'aimait plus. J'étais chargé des péchés du monde. Je
Lui faisais horreur. Il était absent, Il me laissait seul. Il m'abandonnait aux
moqueries d'une foule féroce, et Il ne m'accordait même pas son divin
réconfort.
Seul, seul, seul. À cette heure, il n'y avait que Satan près
du Christ. Dieu et les hommes étaient absents parce qu'ils ne m'aimaient pas,
Ils me haïssaient ou étaient indifférents. Je priais pour couvrir par mon
oraison les paroles sataniques. Mais ma prière ne montait plus vers Dieu.
Elle retombait sur Moi comme les pierres de la lapidation et m'écrasait sous
sa masse. La prière qui pour Moi était toujours une caresse donnée au Père,
une voix qui montait et à laquelle répondait la caresse et la parole
paternelle, maintenant elle était morte, pesante, lancée en vain contre les
Cieux fermés.
Alors j'ai senti l'amertume du fond du
calice. La saveur du désespoir. C'était ce que voulait Satan. M'amener à désespérer pour faire de Moi
son esclave. J'ai vaincu le désespoir et je l'ai vaincu par mes
seules forces, parce que j'ai voulu le vaincre. Avec mes seules
forces d'Homme. Je n'étais plus que
l'Homme. Et je n'étais plus qu'un homme qui n'est plus aidé par Dieu. Quand Dieu aide, il est facile de soulever
le monde lui-même et de le soutenir comme un jouet d'enfant. Mais quand Dieu
n'aide plus, même le poids d'une fleur est une fatigue.
J'ai vaincu le désespoir et Satan
son créateur pour servir Dieu et vous, en vous donnant la Vie. Mais j'ai
connu la Mort. Non pas la mort physique
du crucifié — elle fut moins atroce — mais la Mort totale, consciente, du
lutteur qui tombe après avoir triomphé, le cœur brisé et le sang se répandant
dans le trauma d'un effort au-dessus du possible. Et j'ai sué sang. J'ai sué du sang pour être fidèle à la volonté de Dieu.
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41> 603.8 – Voilà pourquoi l'ange de ma douleur m'a présenté l'espérance de tous
ceux qui sont sauvés par mon sacrifice comme un remède à ma mort.
Vos noms ! Chacun a été pour Moi une goutte de remède infusé dans
mes veines pour leur redonner tonus et fonctionnement, chacun a été pour Moi
la vie qui revient, la lumière qui revient, la force qui revient. Dans les
tortures inhumaines, pour ne pas
crier ma douleur d'Homme, et pour ne pas désespérer de Dieu et dire qu'il
était trop sévère et injuste envers sa Victime, je me suis répété vos noms,
je vous ai vus. Je vous ai bénis depuis lors. Depuis lors, je vous ai porté
dans mon cœur. Et quand pour vous est venue votre heure d'être sur la
Terre, je me suis penché du Ciel pour accompagner votre venue, jubilant à la
pensée qu'une nouvelle fleur d'amour était née dans le monde et qu'elle
aurait vécu pour Moi.
Oh !
mes bénis ! Réconfort du Christ mourant ! Ma Mère, le Disciple, les
pieuses Femmes entouraient ma mort, mais vous aussi y étiez. Mes yeux
mourants voyaient, en même temps que le visage déchiré de ma Mère, vos
visages affectueux et ils se sont fermés ainsi, heureux de se fermer parce
qu'ils vous avaient sauvés, ô vous qui méritez le Sacrifice d'un Dieu."
Le mercredi 16 février 1944
Jésus dit :
603.9 – "Désormais tu as pris
connaissance de toutes les douleurs qui ont précédé ma Passion proprement
dite. Maintenant je vais te faire connaître les douleurs de ma Passion en
acte. Ces douleurs qui frappent davantage votre esprit quand vous les
méditez. Mais vous les méditez très peu, trop peu. Vous ne réfléchissez pas à
ce que vous m'avez coûté et de quelle torture est fait votre salut.
Vous qui vous plaignez d'une écorchure, d'un coup contre un coin, d'un mal de
tête, vous ne réfléchissez pas que Moi, je n'étais qu'une plaie, que ces
plaies étaient envenimées par beaucoup de choses, que les choses elles-mêmes
servaient à tourmenter leur Créateur parce qu'elles torturaient le Dieu-Fils
déjà torturé, sans respect pour Celui qui, Père de la Création, les avait
formées.
Mais les choses n'étaient pas coupables.
C'était encore et toujours l'homme le coupable. Le coupable depuis le jour où
il écouta Satan dans le Paradis terrestre. Elles
n'avaient pas d'épines, de poison, de cruauté jusqu'à ce moment-là les choses
de la Création pour l'homme créature choisie.
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42> Dieu l'avait fait roi cet homme, fait à son image et à
sa ressemblance et, dans son paternel amour, Il n'avait pas voulu que les
choses puissent être un piège pour l'homme. Satan mit le piège. Dans le cœur
de l'homme pour commencer, puis il produisit pour l'homme, avec la punition
du péché, des ronces et des épines.
603.10 – Et voici que Moi, l'Homme,
j'ai dû souffrir aussi pour les choses
et par les choses en plus que par les personnes. Ces dernières m'ont donné
insultes et sévices; les choses en furent les armes.
La main que Dieu avait faite pour l'homme pour le distinguer des brutes, la
main dont Dieu avait enseigné l'usage à l'homme, la main que Dieu avait mise
en rapport avec l'esprit en lui donnant le pouvoir d'exécuter les
commandements de l'esprit, cette partie de vous si parfaite et qui n'aurait
dû avoir que des caresses pour le Fils de Dieu dont elle n'avait eu que des
caresses et la guérison si elle était malade, se révolta contre le Fils de
Dieu et elle le frappa de soufflets, de coups de poing, elle s'arma de
fouets, se fit tenaille pour arracher les cheveux et la barbe, et marteau
pour enfoncer les clous.
Les pieds de l'homme, qui auraient dû uniquement courir avec agilité pour
adorer le Fils de Dieu, furent rapides pour venir me capturer, pour me
pousser et me traîner par les chemins, vers mes bourreaux, et me frapper de
coups de pied comme il n'est pas juste de le faire pour un mulet rétif.
La bouche de l'homme, qui aurait dû user de la parole, la parole qui n'a été
donnée qu'à l'homme de tous les animaux créés, pour louer et bénir le Fils de
Dieu, s'emplit de blasphèmes et de mensonges et les lança, en même temps que
sa bave, contre ma personne.
L'esprit de l'homme, qui est la preuve de son origine céleste, s'est épuisé
pour imaginer des tourments d'une rigueur raffinée.
603.11 – L'homme, l'homme tout entier,
s'est servi de tout ce qui le constitue pour torturer le Fils de Dieu. Et il
a appelé la terre, sous toutes ses formes, à l'aider dans la torture. Il a
fait des pierres du torrent des projectiles pour me blesser, des branches des
arbres des matraques pour me frapper, du chanvre tordu une corde pour me
traîner en coupant la chair, des épines une couronne de feu qui piquait ma
tête lasse, des minéraux un fouet exaspéré, du roseau un instrument de
torture, des pierres du chemin un piège pour le pied vacillant de Celui qui
montait, en mourant, pour mourir crucifié.
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43> Et aux choses de la terre se joignaient les choses du
ciel : le froid de l'aube pour mon corps déjà épuisé par l'agonie du Jardin,
le vent qui exaspère les blessures, le soleil qui augmente la brûlure et la
fièvre et amène les mouches et la poussière, qui éblouit les yeux fatigués
que les mains prisonnières ne peuvent protéger.
Et aux choses du ciel se joignent les fibres données à l'homme pour couvrir
sa nudité : le cuir qui devient un fouet, la laine du vêtement qui s'attache
aux plaies ouvertes par les fouets et donne torture à chaque mouvement par
frottement et déchirement.
603.12 – Tout, tout, tout a servi pour
tourmenter le Fils de Dieu. Lui, par qui toutes les choses ont été créées,
à l'heure où il était l'Hostie offerte à Dieu, eut contre Lui toutes les
choses devenues hostiles. Il n'a pas reçu de soulagement d'aucune chose,
Marie, ton Jésus. Comme des vipères devenues furieuses, tout ce qui existe
s'est mis à mordre ma chair et à accroître ma souffrance.
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