Le mercredi 3
octobre 1945
516> 294.1 - La
vénération de Misace se
révèle au matin suivant. Pour les premiers kilomètres de route, il a fait
arranger la charge des chameaux de manière à former un berceau commode pour les
cavaliers inexperts. Et c'est assez amusant de voir émerger des paquets et
des caisses, les têtes brunes ou blondes, aux cheveux longs jusqu'aux
oreilles des hommes ou des tresses qui apparaissent sous le voile des femmes.
De temps à autre le vent, produit par la course accélérée des chameaux,
rejette en arrière ces voiles et on voit briller au soleil les cheveux d'or
de Marie de Magdala ou ceux d'un blond plus doux de Marie très Sainte, alors
que les têtes de couleurs plus ou moins foncées de Jeanne, Syntica, Marthe, Marcelle, Suzanne et Sarah prennent des reflets d'indigo ou de bronze foncé, et que
les têtes chenues d'Élise, de Salomé et de Marie de Cléophas, saupoudrées d'argent, brillent sous le clair soleil qui
les chauffe. Les hommes avancent sur leur nouveau moyen de transport et Marziam rit heureux.
On s'aperçoit que l'explication du marchand est vraie quand, en se
retournant, on voit tout en bas Bozra avec
ses tours et ses hautes maisons dans le dédale de ses rues étroites. Des
collines en pente douce se présentent au nord-ouest.
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517> C'est à leur base que
s'allonge la route pour Arbel, c'est là que s'arrête la caravane pour faire
descendre les voyageurs et se séparer. Les chameaux s'agenouillent avec leur
charge mouvante, ce qui fait pousser des cris à plus d'une femme. Je
m'aperçois maintenant que les femmes avaient été prudemment attachées à leurs
selles. Elles descendent un peu étourdies par le roulis, mais reposées.
Misace aussi descend, qui avait pris en selle Marziam et, pendant que les
chameliers refont les chargements suivant la méthode habituelle, il
s'approche de Jésus pour un nouveau salut.
"Je te remercie, Misace. Tu nous as épargné beaucoup de fatigue et de
perte de temps."
"Oui, vingt milles se sont faits en une petite heure. Ils ont de longues jambes les chameaux, même si leur
démarche n'est pas douce. Je veux espérer que les femmes n'en ont pas trop
souffert."
Les femmes assurent toutes qu'elles se sont reposées et sans souffrance.
"Maintenant vous êtes à six milles d'Arbel. Que le Ciel vous accompagne et vous donne un agréable
chemin. Adieu, mon Seigneur. Permets-moi de baiser tes pieds saints. Heureux
de t'avoir rencontré, Seigneur. Souviens-toi de moi."
Misace baise les pieds de Jésus et puis remonte en selle et son crrr, crrr fait
relever les chameaux... Et la caravane part au galop sur la route plate,
parmi des nuages de poussière.
Pierre dit :
"Le brave homme ! Je suis tout mal fichu mais, en revanche, mes
pieds sont délassés. Mais quelles secousses ! C'est autre chose qu'une
tempête du Nord sur le lac ! Vous riez ? Moi, je n'avais pas de
coussins comme les femmes. Vive ma barque ! C'est encore la chose la
plus propre et la plus sûre.
294.2 - Et
maintenant, mettons-nous les sacs au dos et allons-y."
C'est une compétition à qui prendrait la plus lourde charge. Mais les
vainqueurs sont ceux qui doivent rester avec Jésus, c'est-à-dire Matthieu, le Zélote, Jacques et Jean, Hermastée et Timon. Ils
prennent tout pour épargner les trois qui doivent aller avec les femmes, ou
plutôt les quatre s'il faut compter Jean d'En-Dor,
mais comme il est mal en point, son aide aurait été toute relative.
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518> Ils marchent à vive
allure pendant quelques kilomètres. Ils arrivent au sommet de la colline qui
servait de paravent du côté ouest, et là réapparaît une plaine fertile
entourée par un cercle de collines plus élevées que celles d'abord
rencontrées et qui a, en son milieu, une colline longue et isolée. Dans la
plaine, une ville : Arbel.
Sur ce dessin, Maria Valtorta a dessiné une ligne transversale qui unit Bozra
(au sud-est) à Arbel (au nord-ouest) qui est la route principale
Bozra-Arbel. Elle croise la ligne verticale marquée "Route des
caravanes vers Aëra".
Ils descendent et ils sont vite dans la plaine.
Ils marchent encore quelque temps, puis Jésus s'arrête en disant :
"Voici l'heure de la séparation. Prenons ensemble la nourriture et puis
séparons-nous. C'est la bifurcation pour Gadara, Vous
prendrez cette route et, avant le soir, vous pourrez être sur les terres que Kouza a en garde."
Il n'y a pas beaucoup d'enthousiasme... Mais enfin, on obéit.
294.3 - Pendant le
repas Marziam dit :
"Alors, c'est le moment de te donner cette bourse. Elle m'a été donnée
par le marchand quand j'étais en selle avec lui. Il m'a dit : "Tu
la donneras à Jésus avant de le quitter et tu Lui diras qu'il m'aime comme il
t'aime". La voilà. Elle me pesait ici, dans mon vêtement. Elle semble
pleine de cailloux."
"Fais voir ! Fais voir ! L'argent c'est lourd !"
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519> Tout le monde est
curieux. Jésus délie les cordons de cuir qui ferment la bourse en peau de
gazelle, je crois, parce qu'elle me semble en peau de chamois, et il renverse
le contenu sur son vêtement. Des pièces de monnaie roulent. Mais c'est ce
qu'il y a en moins grande quantité. Il en sort tant
de sachets de byssos : des sachets attachés
avec un fil. Des couleurs délicates transparaissent à travers le lin très fin
et le soleil semble allumer un petit brasier dans ces paquets, comme si
c'étaient des braises sous une couche de cendre.
"Qu'est-ce ? Qu'est-ce ? Délie, Maître."
Tous sont penchés sur Lui qui calmement dénoue le nœud d'un premier paquet de
feu blond : topazes de différentes tailles, encore bruts, resplendissent
libres au soleil. Un autre paquet : des rubis, des gouttes de sang
coagulé. Un autre : des éclats d'émeraude à la riante couleur verte. Un
autre : des morceaux de ciel avec de purs saphirs. Un autre : des
douces améthystes. Un autre : l'indigo violet des béryls. Un
autre : la splendeur noire des onyx... Et ainsi de suite pour les douze
paquets. Dans le dernier, le plus lourd, toute la splendeur d'or des
chrysolithes, il y a un petit parchemin : "Pour ton Rational de
vrai Pontife et Roi."
Le vêtement de Jésus est un petit pré sur lequel sont effeuillés des pétales
lumineux... Les apôtres plongent les mains dans cette lumière qui est devenue
matière multicolore. Ils sont stupéfaits... Pierre murmure :
"Si Judas de Kériot était là !..."
"Tais-toi ! Il vaut mieux qu'il n'y soit pas" dit le Thaddée avec
brusquerie.
294.4 - Jésus demande
un morceau de toile pour faire un seul paquet des pierres et, pendant que
durent les commentaires, il réfléchit.
Les apôtres disent : "Mais il était bien riche cet
homme !" et Pierre provoque les rires lorsqu'il dit :
"Nous avons trotté sur un trône de gemmes. Je ne croyais pas être sur
une pareille splendeur. Mais si cela avait été un peu plus moelleux !
Que vas-tu en faire maintenant ?"
"Je vais le vendre pour les pauvres." Il lève les yeux et souriant
regarde les femmes.
"Et où vas-tu trouver ici un joaillier qui achète cette
marchandise ?"
"Où ? Ici. Jeanne, Marthe, Marie, achetez-vous mon
trésor ?"
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520> Les trois femmes, sans
même se consulter, disent :
"Oui" avec vivacité. Mais Marthe ajoute :
"Ici nous avons peu d'argent."
"Vous me le ferez trouver à Magdala pour la nouvelle lune."
"Combien veux-tu, Seigneur ?"
"Pour Moi, rien. Pour mes pauvres, beaucoup."
"Donne donc. Tu auras beaucoup" dit Marie-Magdeleine qui prend la
bourse et la met dans son sein.
Jésus garde seulement les pièces de monnaie. Il se lève, embrasse sa Mère,
embrasse sa tante, ses cousins, Pierre, Jean d'Endor et Marziam. Il bénit les
femmes et les congédie. Et elles s'en vont se retournant encore, encore
jusqu'à ce qu'un tournant de la route les cache.
Jésus, avec ceux qui restent, se dirige vers Arbel. Une toute petite troupe,
désormais, avec seulement huit personnes. Ils marchent rapidement et en
silence vers la ville qui se rapproche de plus en plus.
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[…]
Et même pour aujourd'hui, avec beaucoup de patience des deux côtés, nous
avons fini ! Vingt-trois interruptions hier, quatorze aujourd'hui.
N'était-ce que l'infinie patience de Jésus émane de Lui et s'écoule en moi,
je vous assure que je deviendrais enragée. Mais Lui est tellement
patient ! Il s'arrête, reprend, calme, souriant. Moi, je ne réussis pas
à m'impatienter pour les interruptions gênantes qui m'obligent à fermer mon
cahier et à laisser de côté ma plume pendant quelques minutes, pour voiler le
mystère qui s'accomplit si doucement et si secrètement, et le dérober aux
curiosités inutiles. Et c'est un grand miracle d'avoir fait de moi une
personne patiente... Certainement que je le suis, parce que je sais que c'est
Lui qui dicte et qui ne perd pas le fil. Car, lorsque comme ce matin
c'est moi qui écris une lettre ou autre chose, alors je perds tout de suite
le fil et la patience, même si j'entends parler auprès de moi, Et Marthe
sait combien de fois je crie : "Silence ! Ferme, la
porte !" quand c'est pour mon compte que j'écris...
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Fiche mise à jour le 28/10/2023.
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