Le jeudi 18 octobre
1945
69> 306.1 – Le soir
tombe vite en décembre, et on allume de bonne heure les lampes et la famille
se réunit dans une seule pièce. Il en est de même dans la petite maison de
Nazareth, et pendant que les deux femmes travaillent l'une au métier à tisser
et l'autre à la couture, Jésus assis près de la table avec Jean d'En-Dor parle doucement avec lui pendant que Marziam achève de polir deux coffres posés par terre.
L'enfant y emploie toutes forces jusqu'au moment où Jésus, s'étant levé et
penché sur le bois, dit en le touchant :
"Maintenant cela suffit. Il est bien poli et nous pourrons le vernir
demain. Maintenant range tout pour que demain nous travaillions encore."
Et pendant que Marziam sort avec les outils de polissage - spatules dures
avec clouées dessus des peaux rugueuses de poissons, qui remplissent l'office
de notre papier de verre, et des espèces de couteaux qui ne sont sûrement pas
en acier employés pour le même travail - Jésus prend dans ses bras robustes
un des coffres et le porte à l'atelier, où certainement on a travaillé car il
y a de la sciure et des copeaux près de l'un des établis remis pour la
circonstance au milieu de la pièce. Marziam a remis ses outils en place sur
leurs supports et maintenant il ramasse les copeaux pour les jeter dans le
feu, et il voudrait enlever la sciure, mais Jean d'En-Dor préfère le faire.
Tout est en ordre maintenant quand Jésus revient avec le second coffre qu'il
place près du premier.
306.2 – Tous les
trois vont sortir quand on entend frapper à la porte de la maison et, tout de
suite après, la voix grave du Zélote résonne dans un
salut profond donné à Marie :
"Je te salue, Mère de mon Seigneur, et je bénis votre bonté qui me
permet d'habiter sous votre toit."
"Simon est arrivé. Maintenant nous allons savoir le pourquoi de son
retard. Allons..." dit Jésus.
Quand ils entrent dans la petite pièce où l'apôtre se trouve avec les femmes,
il est en train de déposer un gros paquet qu'il a sur ses épaules.
"La paix à toi, Simon..."
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"Oh ! Maître béni ! Je suis en retard, n'est-ce pas ?
Mais j'ai tout fait et bien fait..."
Ils s'embrassent. Puis Simon continue son exposé :
"Je suis allé chez la veuve du menuisier. Tes secours sont très utiles. La vieille femme est très
malade et par conséquent les dépenses augmentent. Le petit menuisier s'ingénie
à travailler sur des objets petits comme lui et se souvient toujours de Toi.
Tous te bénissent. Puis je suis allé chez Nara, Samira
et Sira. Le frère est plus dur que jamais. Mais elles sont en paix, comme des saintes qu'elles
sont, et elles mangent leur pauvre pain assaisonné de larmes et de pardon.
Elles te bénissent pour le secours envoyé. Mais elles te supplient de prier
pour que leur dur frère se convertisse. La vieille Rachel aussi te bénit pour
l'obole. Enfin je suis allé à Tibériade pour les achats. J'espère avoir bien
fait. Maintenant les femmes observeront... Mais à Tibériade j'ai été retenu
par certains qui me croyaient ton estafette : Ils m'ont séquestré pendant
trois jours... Oh ! une prison dorée, si l'on veut ! Mais tout de
même une prison... Ils voulaient savoir tant de choses… J'ai dit la vérité en
disant que tu nous avais congédiés tous, te retirant de ton côté pour le plus
fort de l'hiver... Quand ils ont été persuadés que c'était vrai, parce qu'ils
sont allés chez Simon de Jonas et Philippe sans te trouver et sans apprendre
rien de plus, ils m'ont laissé aller. Même l'excuse du mauvais temps était
tombée avec ces belles journées. Voilà pourquoi j'ai tardé."
"Peu importe. Nous aurons du temps pour rester ensemble. Je te remercie
de tout...
306.3 – Mère,
regarde avec Syntica ce qu'il y a dans le paquet, et dis-moi s'il te paraît
que cela suffise pour ce que tu sais..."
Pendant que les femmes défont le paquet, Jésus s'assied pour parler avec
Simon.
"Et Toi, qu'as-tu fait, Maître ?"
"J'ai fait deux coffres pour ne pas rester oisif et parce qu'ils seront
utiles. Je me suis promené, j'ai joui de ma maison..."
Simon le regarde fixement, fixement... mais il ne dit rien. Les exclamations
de Marziam qui voit sortir du paquet de la toile, de la laine, des sandales,
des voiles et des ceintures, font tourner de ce côté Jésus et les deux
compagnons.
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71> Marie dit :
"Tout va bien, très bien. Nous nous mettrons tout de suite au travail,
et bientôt tout sera cousu."
L'enfant demande :
"Tu te maries, Jésus !"
Tous rient et Jésus demande :
"D'où te vient cette idée ?"
"De ce trousseau qui est pour homme et pour dame, et des deux coffres
que tu as faits. C'est pour ton trousseau et celui de l'épouse. Tu me la
feras connaître ?"
"Tu veux vraiment connaître mon épouse ?"
"Oh ! oui ! Qui sait comme elle sera belle et bonne !
Comment s'appelle-t-elle ? ..."
"C'est un secret, pour le moment, car elle a deux noms, comme toi qui
d'abord étais Yabeç (Jabé), puis Marziam."
"Et je ne peux pas les savoir ?"
"Pour le moment, non. Mais un jour, tu les sauras."
"Tu m'inviteras au mariage ?"
"Ce ne sera pas une fête pour les enfants. Je t'inviterai pour la fête
nuptiale. Tu seras un des invités et des témoins. Cela te
va-t-il ?"
"Mais dans combien de temps ? Un mois ?"
"Oh ! Beaucoup plus !"
"Et alors pourquoi as-tu travaillé au point de t'amener des ampoules aux
mains ?"
"Elles sont venues parce que je ne travaille plus des mains.
306.4 – Tu vois,
enfant, que l'oisiveté est pénible ? Toujours. Quand ensuite on se remet
au travail, on souffre doublement parce qu'on est devenu trop délicat.
Réfléchis ! Si cela nuit pareillement aux mains, quel mal cela fera à
l'âme ? Vois-tu ? Moi, ce soir, j'ai dû te dire :
"aide-moi" parce que je souffrais tellement que je ne pouvais tenir
la râpe, alors qu'il y a seulement deux ans, je travaillais jusqu'à quatorze
heures par jour sans éprouver de souffrance. C'est la même chose pour celui
qui s'attiédit dans la ferveur, dans sa volonté. Il se rend mou, il
s'affaiblit. il se lasse plus facilement de tout. Avec plus de facilité, à
cause de sa faiblesse, pénètrent en lui les poisons des maladies
spirituelles.
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C'est avec une double difficulté, au contraire, qu'il accomplit les œuvres
bonnes dont l'exécution ne lui coûtait pas auparavant parce qu'il était
entraîné. Oh ! il ne faut pas rester oisif, en disant : "Une
fois cette période passée, je me remettrai plus dispos au travail" On
n'y réussirait jamais, ou bien ce serait avec une très grande fatigue."
"Mais Toi, tu n'as pas chômé !"
"Non, j'ai fait d'autre travail. Mais tu vois que l'oisiveté de mes
mains leur a été nuisible."
Et Jésus montre ses paumes rougies avec çà et là des ampoules.
Marziam les baise en disant : "Ma mère me faisait cela quand
j'avais mal, parce que l'amour guérit."
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