La tentation de Jésus, selon Maria Valtorta.
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L’épreuve de la tentation.
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"Dans l’épreuve de la
tentation, que personne ne dise : ma tentation vient de Dieu. Dieu, en
effet, ne peut être tenté de faire le mal, et lui-même ne tente personne.
Chacun est tenté par sa propre convoitise qui l’entraîne et le séduit. Puis
la convoitise conçoit et enfante le péché, et le péché, arrivé à son terme,
engendre la mort" (Jacques 1, 13-15).
Nos péchés sont donc les fruits du consentement à la tentation.
On imagine que la sainteté évite les épreuves, mais elle permet seulement
d’en triompher.
Jésus Lui-même a été tenté, mais Satan "ayant ainsi épuisé toutes les
formes de tentations, s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé" (Luc 4, 13). Certains imaginent que ce ne fut qu’une formalité
destinée à notre éducation et qu’il serait inconvenant de croire qu’Il le fut
vraiment : ce serait alors en enlever les mérites qui anticipent la
victoire de la Passion.
Le Christ a été "éprouvé en tout, d’une manière semblable à nous"
(cf. Hébreux 4, 15).
"En effet "seul l’homme peut être tenté, lui qui se compose de
substance matérielle et de substance spirituelle, et dont la raison,
l’intelligence et la conscience sont libres, pour pouvoir discerner le bien
et le mal et vouloir l’un ou l’autre. Seul l’homme, qui mène encore son combat,
peut être sujet à la tentation, en raison de sa triste hérédité due au péché
des premiers ancêtres de l’humanité" (Cahiers, 18 février 1947).
Le Christ a donc triomphé de la tentation, Il a vaincu le Tentateur pour nous. Il a affronté la tentation en sa nature humaine, mais
Il n’a jamais consenti au péché car Satan n’a trouvé aucune prise en Lui (cf.
Jean 14, 30).
"Heureux l’homme qui supporte l’épreuve avec persévérance, car, sa
valeur une fois vérifiée, il recevra la couronne de la vie promise à ceux qui
aiment Dieu". (Jacques 1, 12).
Si Jésus a été tenté, nous le sommes aussi. Les saints furent attaqués par
ruse ou par force. Maria Valtorta n’échappa à la règle et en triompha.
Mais dans l’histoire ce ne fut pas toujours le cas : on connaît le cas
de Madeleine de la Croix, une clarisse du XVIe siècle qui succomba à la
gloire du monde et fut déchue de sa sainteté que tous reconnaissait pourtant
jusqu’alors.
Rien n’est définitivement acquis dans la lutte contre le Tentateur : il
est donc important de s’arrêter sur les enseignements qui ressortent de
l’œuvre de Maria Valtorta.
Qu’est-ce que la tentation ?
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À cette question, Jésus répond à Maria Valtorta en citant le Catéchisme "C’est une incitation au péché qui nous vient du
démon, ou des personnes mauvaises, ou de nos passions."
"C’est une incitation, commente
Jésus. Si donc cela incite au péché, c’est le signe que ce n’est pas un péché en tant que tel. Non,
ce n’est pas un péché. C’est au
contraire un moyen de croître en justice et d’augmenter nos mérites en
restant fidèles à la Loi du Seigneur. Cela commence à devenir
péché quand l’homme se met volontairement en condition de pécher, en
s’approchant de choses ou de personnes qui peuvent l’y induire.
"De qui vient la
tentation ? Du démon, des personnes mauvaises, des passions. Elle est donc
causée par des facteurs externes ou internes. Mais je vous assure, en vérité,
que les plus dangereux sont les facteurs internes, autrement dit les
inclinations désordonnées et les instincts ou incitations demeurés en l’homme
avec les autres misères qui sont la conséquence du péché d’Adam.
"Ces facteurs internes,
Satan les excite, ou tente de les exciter, par tous les moyens, et pour ce
faire il est très bien servi par les hommes qui vous entourent et par votre moi
humain: ce dernier est en effet un domaine de tentations toujours
ravivées, car il possède de fortes tendances à l’égoïsme de la matière et à
la sensualité de l’esprit, le premier poussant la chair à se rebeller contre
Dieu et contre l’âme, la seconde portant l’esprit à cet orgueil stupide qui
se croit tout permis, jusqu’à critiquer les œuvres de Dieu et ses justices.
"En vérité je vous dis
que vous êtes vous-mêmes le meilleur soutien de Satan quand vous accueillez
et cultivez en vous "la concupiscence de la chair, la concupiscence des yeux, l’orgueil de la
vie" : toutes choses qui ne proviennent pas du Père mais
du monde. Car si vous ne consentiez pas à préparer un terrain propice à
l’invasion des facteurs internes, ils ne pourraient pas pénétrer en vous,
troubler votre être profond et exaspérer les facteurs internes".
On retrouve bien là, le développement de l’enseignement exprimé dans l’épître
de saint Jacques et l’affirmation de Jésus : Satan n’a aucune prise sur
Lui.
Satan se présente toujours avec un extérieur
bienveillant.
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Dans ses commentaires sur sa Tentation au désert, Jésus décrypte les procédés de Satan et la façon dont
il convient de les déjouer.
1 - Satan se présente toujours sous un
aspect inoffensif qui endort la vigilance des âmes inattentives au
divin : elles n’utilisent pas la prière qui les unit à Dieu.
"Satan se présente
toujours avec un extérieur sympathique, sous un aspect ordinaire. Si les âmes
sont attentives et surtout en contact spirituel avec Dieu, elles se rendent
compte de cette observation qui les rend circonspectes et promptes pour
combattre les embûches du démon. Mais si les âmes sont inattentives au divin,
séparées de lui par des tendances charnelles qui les envahissent et les
rendent sourdes n'utilisant pas le secours de la prière qui les unit à Dieu
et fait couler sa force comme par un canal dans le cœur de l'homme, alors
elles s'aperçoivent difficilement du piège dissimulé sous une apparence
inoffensive et y tombent. S'en dégager après cela est très difficile.
2 - Il s’attaque ensuite au sens
charnels avant de s’attaquer à l’esprit.
"Les deux chemins que
prend plus communément Satan pour arriver aux âmes sont l'attrait charnel et
la convoitise, Il commence toujours par le côté matériel de la nature. Après
l’avoir démantelé et asservi, il dirige l’attaque vers la partie supérieure.
"D’abord le côté moral :
la pensée avec son orgueil et ses convoitises; puis l’esprit, en lui enlevant
non seulement l’amour, mais aussi la crainte de Dieu. L’amour divin n’existe
déjà plus quand l’homme l’a remplacé par d’autres amours humains. C’est alors
que l’homme s’abandonne corps et âme à Satan pour arriver aux jouissances
qu’il poursuit, pour s’y attacher toujours plus.
3 – Il faut lui opposer silence et
prière avec fermeté, mais sans crainte excessive.
"Comment je me suis
comporté, tu l’as vu, dit-Il à Maria Valtorta. Silence et prière. Silence.
Car si Satan exerce son entreprise de séduction et cherche à nous
circonvenir, on doit le supporter sans sottes impatiences et sans peurs
déprimantes, mais réagir avec fermeté à sa présence et par la prière à ses
séductions.
4 – Ne répliquer, le cas échéant que
par la Parole de Dieu.
"Inutile de discuter
avec Satan. Lui serait victorieux car il est fort dans sa dialectique. Il n'y
a que Dieu pour le vaincre, et alors recourir à Dieu qui parle par nous, à
travers nous, montrer à Satan ce nom et ce Signe, non pas écrits sur un
papier ou gravés sur le bois, mais inscrits et gravés dans les cœurs. Mon
Nom, mon Signe. Répliquer à Satan uniquement quand il insinue qu'il est comme
Dieu en utilisant la parole de Dieu. Il ne la supporte pas.
"Il faut avoir la
volonté de vaincre Satan, la foi en Dieu et en son aide, la foi dans la
puissance de la prière et la bonté du Seigneur. Alors Satan ne peut nous
faire du mal.
Satan s’en prend encore plus aux âmes
d’exception.
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À l’image du Christ, tous les mystiques
eurent à affronter, de diverses manières, les attaques de Satan :
morales ou physiques, par séduction ou par violence, directement ou par
l’action de leur entourage. "Votre adversaire, le diable, comme un lion
rugissant, rôde, cherchant qui dévorer. Résistez-lui avec la force de la
foi" (1 Pierre 5, 8-9),
Mère Yvonne-Aimée de Malestroit (1901-1951) fut en butte à de violentes
attaques physiques du Démon. Lors d’une de ces attaques on dénombra 80 coups
de griffes parfois profonds jusqu’à l’os. Satan tenta de l’éloigner de
Malestroit par un faux qui prit feu spontanément quand on le découvrit. Il en
advint de même avec le journal de Gemma Galgani (1878-1903). Marthe Robin
(1902-1981), grabataire durant 53 ans, était malmenée par Satan et jetée hors
de son lit : c’est ainsi qu’on la trouva à sa mort. Les grands
confesseurs comme le curé d’Ars ou Padre Pio eurent les mêmes démêlées avec
le "Grappin".
"En vérité, je vous le dis, explique Jésus à Maria Valtorta : ce n’est pas d’être tenté qui doit faire
peur. Et la force de la tentation, la répétition de ses violentes attaques ne
doivent pas induire l’âme à s’avilir à penser que, si cela se produit, c’est
qu’elle n’est plus dans la grâce du Seigneur et qu’elle est destinée à la
mort éternelle.
Réjouissez-vous au contraire, vous qui êtes si fortement tourmentés
par Satan : c’est signe que vous êtes ses ennemis et qu’il pressent que vous
êtes des proies qui lui ont échappé pour toujours. La colère satanique se
déchaîne toujours contre les proies qui échappent à sa faim et contre les
conquêtes de Dieu" (Cahiers,
18 février 1948).
Si les grands mystiques furent en proie à de telles attaques, c’est en raison
de leur vocation de corédempteurs, d’âmes victimes ou d’âmes réparatrices. À
la suite et à l’imitation du Christ, ces mystiques acceptent de le suivre
jusqu’à la Croix où ils partagent son amour souffrant pour l’humanité.
Paradoxe de la Croix, folie et scandale pour les hommes, dit saint Paul.
Ce choix est parfois difficile à comprendre car il touche au mystère même de
la Rédemption où Jésus a pris sur lui nos péchés pour nous en délivrer.
Quelques exemples illustreront cette condition de corédempteurs selon la phrase de saint Paul :
"Maintenant je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour
vous ; ce qui reste à souffrir des
épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps
qui est l’Église".
Après s’être offerte "comme Victime d’Holocauste à l’Amour
Miséricordieux du Bon Dieu", Thérèse de Lisieux vécut la nuit
spirituelle, et finit sa vie dans la souffrance, assaillie par les doutes et
tentations des pécheurs, solidaire de leur enfer. Endormie dans la mort, son
visage souriait pourtant : unie au Christ, elle l’avait aidé à prendre
le péché des hommes.
Sœur Josefa Menéndez (1890-1923) subit plus d’une centaine de fois les peines
de l’Enfer pour contribuer à la rédemption de ceux qui les méritaient.
Maria Teresa Carloni (1919-1983) subit trois heures
de souffrances atroces pour offrir une dernière chance de repentir à Staline
qui se mourrait.
Il ne faut pas croire cependant que ces souffrances physiques et morales sont
de simples "apparences : les douleurs subies en réparation de nos
péchés sont réelles, à la mesure de nos fautes.
Jésus dans l’agonie du Gethsémani souffrit jusqu’au sang.
Maria Valtorta confrontée aux tentations.
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Dans une
lettre à son confesseur,
Maria Valtorta décrit tous les sortes d’assauts qu’elle subit. À sa lecture,
on comprend la promesse de la Vierge Marie à sainte Bernadette
Soubirous : "Je vous promets de vous rendre heureuse, non pas dans
ce monde mais dans l'autre."
Après la chair, Satan tente l’esprit.
"Maintenant que Satan ne tente plus la chair, il tente l'esprit,
écrit-elle. C'est depuis un an que de temps à autre il me donne des ennuis.
- La première fois, ce fut quand il me tenta dans les journées redoutables
pour moi, en avril 1944, quand il me promit de m'aider si je l'adorais.
- La seconde, quand il m'assaillit par cette pénétrante, violente et longue
tentation du 4 juillet 1944, en me tentant à singer le langage du Maître pour
anéantir ceux qui m'avaient offensée.
- La troisième quand il me suggéra de faire avec les paroles dictées une
œuvre personnelle et de la publier en m'en attribuant le mérite et en en
tirant des bénéfices.
- La quatrième quand, en février de cette année (il me semble qu'on était
déjà en février) il m'apparut
(c'était la première fois que je le voyais, car
les autres fois, je sentais seulement sa présence) me terrorisant par son
aspect et sa haine.
- La cinquième, ce fut hier soir.
Mais il y a aussi les assauts du
quotidien.
Ce sont là les grandes manifestations de Satan. Mais depuis, j'ai mis
à son compte, à lui, toutes les autres choses plus petites qui me viennent des autres qui veulent
me porter à l'orgueil, à la complaisance en moi-même, ou bien à la
simulation, ou encore à la persuasion que je ne suis qu'une malade et que
tout est le fruit de troubles psychiques.
Même les obstacles qui viennent de parents, des autorités et des camionneurs, je les attribue tous
à Satan. Il fait ce qu'il peut, de son mieux, pour me
causer des ennuis et m'amener à l'inquiétude, à la révolte, à la persuasion que la prière est inutile et que tout
est mensonge.
Satan tente de la persuader que ses
efforts sont inutiles.
Mais, je vous avoue qu'hier soir, il m'a beaucoup troublée. Ce n'est
pas la première fois qu'il fait naître en moi la peur d'être trompée et d'en
devoir un jour rendre compte à Dieu et même aux hommes. Vous savez que c'est
là ma terreur... Jésus et vous (le confesseur) me réconfortez toujours
et elle renaît, toujours, Pourtant c'étaient des pensées qui étaient "à
moi", excitées par Satan mais qui
venaient de moi. Hier soir, ç'a été une menace explicite, directe. Il m'a
dit :
"Vas-y, vas-y ! Je t'attends au bon
moment. Au dernier moment. Alors je te persuaderai tellement que tu as
toujours menti à Dieu, aux hommes et à toi même, et que tu es une menteuse
que tu tomberas dans une vraie terreur, dans le désespoir d'être damnée. Et
tu le diras avec de telles paroles que les personnes qui t'entoureront
croiront à une rétractation finale pour aller vers Dieu chargée d'un péché
moins lourd. Toi, et ceux qui seront avec toi, vous resterez dans cette
persuasion. Et c'est ainsi que tu mourras... et les autres en resteront
profondément troublés... Je t'attends, oui... Et toi aussi, attends-moi. Je
ne fais pas de promesses sans les tenir. En ce moment tu me donnes un ennui
sans mesure. Mais alors ce sera moi qui te le donnerai. Je me vengerai de
tout ce que tu me fais... Je me vengerai, comme moi seul sais
le faire."
Et sur ce, il s'en est allé, me laissant bien mal...
Ensuite, la douce Mère est venue, bienveillante et pleine d’amour, en
vêtement blanc, pour me sourire et me caresser. Jésus m’a fait son plus
heureux sourire. Mais à peine m’avait-il laissée seule que je suis retombée
dans mon chaos... Et il dure.
Maria Valtorta doit repousser la tentation
idolâtre et la raillerie. .
Quand cette pensée m'arrive avec cette force, je me sens tentée de
dire : "Je n'écris plus une seule parole, en dépit de toute
pression." après, je réfléchis et je me dis : "C'est
justement cela que veut Satan" et je laisse tomber cette suggestion.
C’est le temps de la Passion, n’est-ce pas ? Il y a d’un côté ceux qui,
sous l’influence de l’idolâtrie inscrite dans l’homme fût-il bon, adorent le
porte-parole, l’idolâtre, en oubliant qu’il n’est qu’un instrument et que l’adorable,
c’est Dieu;
et de l’autre ceux qui me raillent; mais leur attente est identique, même si
les intentions sont différentes, celle de faits merveilleux en moi, tout
particulièrement en ce temps de Passion. Peut-être vous-même les
attendez-vous comme une chose naturelle dans mon cas. En ce qui vous
concerne, cette attente est juste, mais les autres agissent par dérision ou
par idolâtrie.
Soumission à la volonté divine et
humilité.
Je vous assure que je préfère encore le mépris pour Maria Valtorta, à
l'idolâtrie pour ma personne. Cette dernière me donne un ennui
indescriptible. Il me semble qu'on me dépouille sur une place publique, que
l'on m'extorque mon précieux secret... que sais-je ? J'en souffre,
voilà. Le mépris me fait moins mal s'il s'adresse à Maria Valtorta, pourvu
qu'il ne lèse pas les "dictées" et ne les fasse pas prendre pour
une plaisanterie et une folie...
Mais, par-dessus les désirs plus ou moins saints et honnêtes de tant de gens,
il y a la volonté de Dieu, sa bonté, plutôt, qui écoute sa pauvre Maria. Sa
prière de toujours, sa prière de maintenant c'est celle-ci :
"Voilà ta "victime". Tout ce que Tu veux, mais pas
de signes extérieurs." Je n'aurais pas voulu non plus cette
manifestation de Dieu en moi, en ce qui me concerne... Mais Lui a voulu que
je sois son phonographe... patience ! Mais, autre chose non,
non, et non.
Les stigmates invisibles et le
Gethsémani.
(J’accepte) toutes
les maladies qui peuvent être diagnostiquées ou celles qui ne le sont pas
parce qu'elles n'offrent pas des symptômes connus ; (j’accepte) toutes
les souffrances pour souffrir en moi ce que Lui a souffert. Une agonie
complète qui me courbe sous le poids de son agonie. Mais que cela soit connu
de Lui seul, de vous qui me dirigez, et de moi. Cela suffit.
Cependant, si en ce temps de passion je déçois les idolâtres et les railleurs
puisque je ne suis pas matériellement
"la victime de la Passion", je vous assure que je vis ma passion.
Et, plus augmente la souffrance physique du corps qui se sent harassé et brisé
par les coups et la fatigue du Golgotha, la souffrance de la tête sous le
cercle cruel, la souffrance encore de l’étirement et des crampes, de
l’angoisse et de la congestion de cette torture, de la soif et de la fièvre,
de la faiblesse et de l’excitation du supplice, ce qui est une
"passion" est toujours pour moi ce que j’appelle "mon
Gethsémani" : l’obscurité qui monte, pleine de chimères et de peurs...
la crainte, même la terreur de l’avenir et de Dieu... et la proximité de la Haine
pendant l’absence de l’Amour. Cela, oui, produit soif, fièvre, larmes de
sang, gémissements, épuisement. Je vous assure que, par sa puissance, cela
vaut bien l’heure que j'ai vécue l’an dernier lorsque Dieu m’a laissée seule. Mieux, je peux dire que c’est plus fort, car cela fait
souffrir bien que Dieu soit avec moi.
Tout ce qu’elle vit ne peut être
partagé.
J’espère m’être bien fait comprendre. Mais il est très difficile d’expliquer
certaines tortures. Elles sont d’ailleurs encore plus mal comprises, tant par
le père spirituel que par l’idolâtre, le curieux, ou encore celui qui étudie
ou raille le... phénomène. Il faudrait que ces trois derniers endurent ne
serait-ce qu’une heure ce que nous vivons... Les idolâtres, eux aussi, qui
peut-être [nous] envient, devraient essayer. Mais non ! Il vaut mieux que
cela n’arrive pas. Les idolâtres se sauveraient je ne sais où par peur d’une
autre heure semblable, et les curieux, les observateurs et les railleurs en
viendraient à maudire Dieu... Par conséquent... courbons nos épaules sous le
joug, retirons le poison... et en avant !
Seigneur, pas ma volonté, mais la tienne. Voici ta servante et ta
victime Oui, fais de moi ce que Tu veux. Mais seulement, à cause de ta bonté,
donne-moi la force de pouvoir souffrir. Et ne me laisse pas seule.
"Reste avec nous, car il se fait tard et déjà baisse la clarté du jour
... "
La chute des anges.
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"Même ceux qui étudient le
phénomène ne peuvent comprendre", dit Maria Valtorta. Son acte
d’offrande en tant qu’âme victime lui valut tout à la fois les souffrances
extrêmes qu’elle partageait avec le Christ, et le don de l’œuvre, un don
"extraordinaire".
D’autres âmes inspirées eurent des défaillances et succombèrent aux assauts
de Satan par le péché d’orgueil, le péché même de Lucifer, le plus beau des
anges.
Ce fut le cas de Marie-Paule Giguère (1921-2015).
Elle fonde l’Armée de Marie le 28 août 1971 à Lac-Etchemin
(Québec). Le 10 mars 1975, ce mouvement est approuvé comme association pieuse
catholique par le cardinal Maurice Roy, archevêque de Québec et primat de
l'Église du Canada. Le succès est au rendez-vous et l’inspiration réelle.
Mais progressivement les dérives se font sentir. Marie-Paule Giguère passe insensiblement à l’adulation puis à
l‘idolâtrie : elle se déclare réincarnation
de la Vierge Marie, se fait
consacrer par ordre "d’En-Haut" Souveraine de la Terre,
Corédemptrice et se fait canoniser de son vivant par un prêtre dissident de
son mouvement.
Dès le début de ces dérives, l’Église avait retiré son approbation puis
excommunié ses derniers membres. Marie-Paule Giguère
est morte sans repentance apparente.
Ce ne fut pas le cas de Madeleine de la Croix (de Cordoue), une clarisse
espagnole. Au siècle de l’Inquisition et de la Reconquête (XVIe), elle fait
preuve très jeune d’une âme mystique. Sa piété, son humilité, sa science de
Dieu et sa préscience assurent rapidement sa réputation. Sa sainteté est
reconnue par tous et montrée en exemple. On édite même un livre retraçant sa
vie.
Cette mise en lumière, que redoute tant Maria Valtorta avec raison, va causer
la perte de la grâce : Madeleine cède peu-à-peu à l’attrait de la
célébrité puis à l’orgueil. Dieu se retirant de l’orgueil, Madeleine perd ses
grâces. Elle se lance alors dans la dissimulation, le simulacre, la
pathologie, le mensonge.
Tout ceci ne tarde pas à être découvert. Madeleine de la Croix est
emprisonnée par l’Inquisition. Un exorcisme et un autodafé public suivent sa
condamnation. Après cela, Madeleine de la Croix vécut, dans l’humilité
retrouvée, le reste de ses jours. "Celle qui était devenue démoniaque pour satisfaire
seulement des goûts de vanité terrestre, termina sa vie, humble, sans
affectation, ennemie résolue des pompes, et paraissant avoir perdu jusqu'au
souvenir de ce que peut être le péché d'orgueil".
Son cas est principalement connu par Juan-Antonio Llorente
(1756-1823), un prêtre déchu de son ministère en raison de ses accommodements
avec le monde. Puis par l’académicien Maurice Garçon (1889-1967), passionné de littérature diabolique et de
sorcellerie. Ils construisirent la légende d’un pacte diabolique qu’aurait
passé la jeune Madeleine afin de simuler la sainteté.
Mais ce pacte est contredit par le bon sens : la jeune Madeleine aurait
ainsi pratiqué une auto-crucifixion (pieds et mains) totalement impossible à
réaliser par soi-même. Nul n’imagine prendre au sens premier ce que saint
Paul déclare "Avec le Christ, je suis crucifié". Mais il affirme cependant : "Je porte dans
mon corps les stigmates (stigmata) des souffrances
de Jésus" (Galates 6, 17).
Ce pacte diabolique est surtout contraire à l’Écriture qui affirme qu’il ne
pousse jamais de bons fruits sur un arbre mauvais. Avant sa défaillance, les fruits de la grâce étaient indéniables
chez Madeleine de la Croix, tant dans ses appels à la conversion que dans ces
incitations à embrasser la vie religieuse.
Ces fruits sont à l’opposé de ce que veut Satan. Le Père Francisco Lopez Sedano, exorciste mexicain tirait cet enseignement de plus de
6.000 exorcisme : "Satan veut nous séparer de Dieu, il décourage,
… il nous plonge dans le désespoir et
la haine : tout ce qui est négatif." En aucun cas, il ne pousse à la
sainteté.
"Le critère pour la vérité et pour la valeur d'une révélation privée est
son orientation vers le Christ lui-même", disait
le cardinal Josef Ratzinger. Ce
qui en détourne vient donc de Satan.
Mais il est un deuxième enseignement à retirer des cas exposés ici : la
sainteté est un combat de tous les jours et un combat rude, elle n’est jamais
acquise une fois pour toutes.
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