Douleurs et joie de la
maternité de Marie.
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Troisième mystère glorieux.
569> Marie dit :
Lorsque l’Esprit du Seigneur descendit
pour investir de sa puissance les douze (apôtres) réunis au Cénacle,
il se répandit sur moi aussi. Mais si ce fut pour tous une
connaissance qui les rendit conscients de
l’existence de la Troisième Personne et de ses dons divins, ce ne fut pour moi
que l’occasion de vives retrouvailles. Pour tous, ce fut une flamme; pour
moi, ce fut un baiser.
L’éternel Paraclet
était déjà mon Époux depuis trente-quatre ans et son Feu m’avait tellement
possédée et pénétrée qu’il avait fait de ma blancheur immaculée un corps de
Mère. Même après les noces divines, il m’avait laissée remplie de lui, et il
ne pouvait ajouter perfection à la perfection puisque Dieu ne peut
s’accroître lui-même, étant très parfait et insurpassable dans sa mesure, et
s’étant donné à moi sans limites, afin de faire de ma chair de femme quelque
chose de si saint qu’elle pourrait servir d’habitacle au Divin qui allait
descendre et s’incarner en moi.
Mais maintenant qu’était achevée l’œuvre par laquelle il s’était donné à moi
et moi à lui, et que notre Fils était retourné au Ciel après avoir tout
accompli, il revenait me donner son baiser de grâces.
Oh ! que de choses vous enseigne Dieu sur la
reconnaissance ! Lui, mon Seigneur, ne manquait pas d’être reconnaissant
envers sa Servante qui avait été un instrument à son service et, pendant que
moi, à chaque battement de mon cœur, je répétais : "Saint, saint, saint
et béni es-tu, Seigneur Très-Haut", il quittait le Ciel une deuxième
fois pour renouveler son étreinte d’Époux et me promettre, entre l’ardeur et
la voix de la Flamme partagée, la troisième union sans fin dans la demeure
bienheureuse du Ciel.
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570> Et plus que jamais, le Ciel fut
alors mon but, car lorsqu’on a goûté et regoûté
l’Amour, le soleil et la terre, les créatures et les choses disparaissent à nos
yeux, et il ne reste qu’une vision, une saveur, un seul désir : celui de
Dieu. Celui d’avoir Dieu, non pour quelques instants, mais dans un éternel
présent.
Quatrième mystère glorieux.
Marie
dit :
Une autre perle pour mes bien-aimés. En réalité, je voulais en parler dans
quelques jours, mais je me plie à un souhait, car je suis la Maman. Pour
Noël, vous aurez de moi cette parole aussi.
Tout comme la naissance du Fils fut une
extase pour moi, et je revins sur terre de mon ravissement en Dieu avec mon
Enfant entre les bras, ainsi ma mort fut un ravissement en Dieu.
Me fiant à la promesse reçue dans la splendeur divine du matin de la
Pentecôte,
je pensais que l’approche du moment du retour ultime de l’Amour pour me ravir
en lui serait marquée par une augmentation du feu. Et je ne me trompai pas.
De mon côté, plus la vie passait et plus augmentait en moi le désir de me
fondre à l’éternelle Charité. Le désir de mon Fils m’y poussait et la
persuasion que jamais je ne ferais autant pour les êtres humains que lorsque
je prierais pour eux sur les marches du trône de Dieu.
Et avec un mouvement toujours plus enflammé et accéléré, de toutes les forces
de mon âme, je criais : "Viens, Seigneur, Jésus, viens, viens éternel
Amour !".
L’Eucharistie, qui était pour moi comme la
rosée sur une fleur assoiffée — elle était vie — n’était plus suffisante à
l’irrépressible hâte du cœur. Il ne me suffisait plus de recevoir en moi mon divin
Enfant et de le porter sous les Espèces sacrées comme je l’avais porté dans
ma chair virginale. Mon être tout entier voulait le Dieu Unique et Trin, et
non sous les voiles qu’avait choisis mon Jésus pour cacher l’ineffable
mystère, mais tel qu’il était, est et sera au centre du Ciel.
Mon propre Fils, dans ses transports eucharistiques, me brûlait par des
baisers de désir infini, et chaque fois qu’il venait à moi dans la puissance
de son amour il arrachait presque mon âme dans le premier mouvement, et puis
restait à m’appeler avec une infinie tendresse : ‘Maman !’, et je sentais
qu’il avait hâte de m’avoir avec lui.
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571> Je
ne désirais plus rien d’autre. Je n’avais même pas le désir de défendre
l’Église naissante. Tout s’annulait dans le désir de posséder Dieu, grâce à
la conviction que l’on peut tout quand on possède Dieu.
Maria, parviens à cet amour total. Que rien n’ait une valeur à tes yeux ou
soit une source d’inquiétude. Vise seulement à Dieu. Quand tu seras riche de
cette pauvreté de désir, laquelle est une incommensurable richesse, Dieu se
penchera sur ton esprit et y posera son baiser et tu t’élèveras avec ton esprit
vers le Père, le Fils, l’Esprit Saint, pour les connaître et les aimer pour
une éternité de béatitude et pour posséder leurs richesses de grâces, dont tu
disposeras pour les fins et les êtres qui occupent ta pensée. On n’est jamais
aussi actif pour ses frères et sœurs que lorsqu’on n’est plus parmi eux, mais
qu’on est des lumières réunies à la Lumière.
L’approche de
l’Amour éternel fut accompagnée du signe que je pensais.
Tout perdit sa lumière et sa couleur, sa voix et sa présence dans la
splendeur et la voix qui, des Cieux ouverts, descendaient sur moi pour
cueillir mon âme.
On dit : "Marie se serait réjouie d’être assistée par son Fils".
Mais mon doux Jésus était bien présent avec le Père quand l’Amour me donna le
troisième baiser de la vie, ce baiser tellement divin qu’en lui l’âme expira
et fut recueillie comme une goutte de rosée que boit le soleil au centre d’un
lys, et je montai, avec mon esprit
qui chantait des hosannas, au milieu de mes Trois que j’adorais et que
j’adore, telle une perle enchâssée dans du feu, suivie de la théorie des
esprits angéliques venus assister à ma naissance éternelle, et attendue au
seuil des Cieux par l’Époux terrestre, par les Rois et les patriarches de ma
souche, par les premiers saints et les premiers martyrs. Et le Ciel se ferma
sur la joie d’avoir sa Reine dont la chair, unique parmi toutes les chairs
mortelles, connaissait la béatitude de la glorification.
Cinquième mystère glorieux.
Marie
dit :
Mon humilité ne pouvait me permettre de penser que tant de gloire m’était
réservée au Ciel.
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572> Dans ma pensée, j’avais la certitude
que ma chair humaine, que le fait d’avoir porté Dieu avait sanctifiée, ne
connaîtrait pas la corruption, puisque Dieu est Vie et lorsqu’un être est
saturé par lui, c’est comme s’il était saturé d’un arôme qui préserve de la
mort. Non seulement je m’étais fondue à lui en une chaste et féconde
étreinte, mais les replis les plus secrets de mon être s’étaient saturés de
la Divinité cachée dans mon sein et tout absorbée à se voiler de chairs
mortelles.
Mais que la bonté de l’Éternel eût réservé à sa Servante la joie de ressentir
sur ses membres le toucher de la main de mon Fils, son étreinte, son baiser,
et de réentendre sa voix de mes oreilles, de voir son visage de mes yeux,
d’éprouver de nouveau la joie de le caresser, non, je ne pensais pas que cela
me fût accordé si vite et je ne le désirais point. Il me suffisait que ces
béatitudes fussent accordées à mon esprit, et cela aurait déjà comblé mon
bonheur de bienheureuse.
Mais en témoignage de sa pensée créatrice
envers l’être humain, Dieu me voulut au Ciel corps et âme. Je suis le
témoignage certain de ce que Dieu avait pensé et voulu pour l’être humain :
une vie innocente, sans la connaissance du péché, un passage paisible de
cette vie à la Vie complète au cours duquel, comme celui qui franchit le
seuil d’une maison pour entrer dans un palais, l’être complet passerait du
soleil du paradis terrestre au Soleil du Paradis céleste, augmentant la
perfection de son moi, dans la chair et dans l’esprit, de la pleine
Lumière qu’il y a aux Cieux.
Devant les Patriarches et les Saints, devant les Anges et les Martyrs, Dieu
me plaça, moi qui avait été élevée à la gloire du Ciel, et dit :
"Voici l’œuvre parfaite du Créateur, voici
ce que je créai à mon image et à ma ressemblance, fruit d’un chef-d’œuvre
divin et créateur, merveille de l’Univers, lequel voit, enfermé en un seul
être, le divin dans l’esprit immortel comme Dieu et comme lui, spirituel,
intelligent, vertueux, et l’animal dans la chair la plus parfaite devant
laquelle chaque être des trois règnes de la Création s’incline.
Voici le témoignage de mon amour pour l’humain, pour qui je créai l’organisme
parfait et le sort bienheureux d’une vie éternelle dans mon Royaume. Voici le
témoignage de mon pardon à l’humain à qui, dans la force d’un trin amour,
j’ai accordé la réhabilitation à mes yeux. Voici la pierre mystique de
comparaison,
voici l’anneau de l’union entre l’humain et Dieu, voici Celle qui ramène les
temps aux premiers jours et qui donne à mon œil divin la joie de contempler
l’Ève que je créai telle que je la créai, et devenue encore plus belle
puisqu’elle est la Mère de mon Fils et la Martyre du Pardon. Pour son cœur
qui ne connut point de tache, j’ouvre les trésors du Ciel, et pour sa tête
qui ne connut point d’orgueil, je fais une couronne de ma splendeur et je la
couronne, car elle m’est Sainte, pour qu’elle soit votre Reine".
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573> Maria,
il n’y a pas de larmes au Ciel. Mais à la place des pleurs joyeux qu’auraient
versés les esprits s’il leur était donné de verser des larmes — humeur qui
coule pressée d’une émotion — il y eut un étincellement de lumières, un
passage de couleurs splendides à de plus vives splendeurs, un incendie de
feux caritatifs en un feu plus ardent encore, un retentissement insurpassé et
indescriptible d’harmonies auxquelles s’unit la voix de mon Fils en une
louange à Dieu le Père et à la Servante de Dieu, bienheureuse pour
l’éternité.
Maria, j’avais pensé finir cette illustration des mystères de mon saint
rosaire
— car, sans que tu t’en rendes compte, je t’ai parlé de tous les mystères et
en particulier des mystères blancs de la joie et des mystères resplendissants
de la gloire, puisque pour les mystères pourprés, il n’y a qu’un nom, douleur
et ils ne forment tous qu’une unique douleur — j’avais donc pensé finir après
Noël. Mais vous qui m’aimez avez tant de peines, et vous comprenez que ce
n’est qu’en oubliant la Terre pour le Ciel que ces peines deviennent
supportables à votre cœur. Et je vous dévoile donc les lumières du Ciel.
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