Le mardi 16 octobre
1945
61> 304.1 - "Maître !
Maître ! Maître !"
Les trois cris de Jean d'En-Dor qui sort de sa
petite chambre pour aller se laver au bassin et se trouve en face de Jésus
qui en vient, éveillent Marziam qui court hors de la pièce de Marie avec sa seule
tunique sans manches et courte, encore déchaussé, tout yeux et bouche pour
voir et crie : "Il y a Jésus !" et toutes jambes pour
courir et grimper dans ses bras. Et ils éveillent aussi Syntica qui dort dans
l'ancien atelier de Joseph et qui en sort après
un moment, déjà habillée, mais avec ses tresses très noires encore à moitié
défaites et qui retombent sur ses épaules.
Jésus, qui a encore l'enfant dans les bras, salue Jean et Syntica et les
exhorte à entrer dans la maison car la tramontane est très forte. Et Lui entre le premier, portant Marziam à moitié nu
qui claque des dents malgré son enthousiasme, près du foyer déjà allumé où
Marie se hâte de chauffer du lait et puis les habits de l'enfant pour qu'il
n'attrape pas du mal.
Les deux autres ne parlent pas, mais semblent la personnification de la joie
extatique. Jésus est assis avec l'enfant sur ses genoux, alors que Marie
s'empresse de lui passer les vêtements qu'elle a fait chauffer. Jésus relève
son visage et leur sourit en disant :
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62> "Je vous avais promis que je serais venu. Et
aujourd'hui ou demain arrive aussi Simon le Zélote. Il est allé ailleurs pour
une chose dont je l'ai chargé. Mais il ne va pas tarder et nous resterons plusieurs
jours ensemble."
304.2 - La toilette
de Marziam est terminée et les couleurs reviennent sur ses petites joues
rendues hâves par le froid. Jésus le fait descendre de ses genoux et se lève
pour passer dans la petite pièce à côté, suivi de tout le monde. Marie arrive
la dernière, tenant l'enfant par la main et doucement elle lui fait des
reproches :
"Qu'est-ce que je devrais te faire maintenant, moi ? Tu as désobéi.
Je t'avais dit : "Reste au lit, jusqu'à ce que je revienne" et
tu es venu avant..."
"Je me suis éveillé aux cris de Jean…" dit Marziam pour s'excuser.
"C'est justement alors que tu devais savoir obéir. Rester autant que
l'on dort, ce n'est pas de l'obéissance et il n'y a aucun mérite à le faire.
Tu devais savoir le faire quand il y avait un mérite à le faire, car cela
exigeait de la volonté. Je t'aurais amené Jésus. Tu l'aurais eu tout entier
pour toi et sans risquer de prendre du mal."
"Je ne savais pas qu'il faisait si froid."
"Mais je le savais moi. Je suis affligée de te voir désobéissant."
"Non, Maman. Cela me donne plus de peine de te voir ainsi... Si cela
n'avait pas été pour Jésus, je ne me serais pas levé, même si tu m'avais
oublié au lit sans manger, Maman belle, Maman !... Donne-moi un baiser,
Maman. Tu sais que je suis un pauvre enfant !..."
Marie le prend dans ses bras et l'embrasse, arrêtant ainsi les larmes sur le
petit visage et y ramenant le sourire avec la promesse :
"Je ne te désobéirai plus jamais, jamais, jamais plus !"
304.3 - Jésus
pendant ce temps parle avec les deux disciples. Il s'informe de leurs progrès
en Sagesse et, comme ils disent que tout s'éclaire en eux avec la parole de
Marie, il dit :
"Je le sais. La Sagesse surnaturellement lumineuse de Dieu devient une
lumière intelligible même pour ceux qui ont le cœur le plus dur, quand elle
est dite par elle. Mais vous n'avez pas le cœur dur et, à cause de cela, vous
bénéficiez complètement de son enseignement."
"Maintenant, tu es ici, Fils. La maîtresse redevient écolière."
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63/64> "Oh ! non ! Tu continues à être maîtresse.
Je t'écouterai comme eux. Je suis seulement "le Fils" en ces jours.
Rien de plus. Tu seras la Mère et la Maîtresse des chrétiens. Tu l'es dès
maintenant : Moi, ton premier-né et ton premier élève, ceux-ci et avec
eux Simon, quand il viendra, les autres... Vois-tu, Mère ? Le monde est ici. Le monde de demain dans le
petit israélite pur qui ne s'apercevra même pas qu'il deviendra le
"chrétien" ; le monde, le vieux monde d'Israël dans le
Zélote ; l'humanité dans Jean, les gentils dans Syntica. Et ils viennent
tous à toi, sainte Nourricière qui donne le lait de la Sagesse et la Vie au
monde et aux siècles. Combien de bouches ont désiré s'attacher à ton
sein ! Et combien le feront dans l'avenir ! Les Patriarches et les
Prophètes ont soupiré après toi parce que de ton sein fécond devait venir la
Nourriture de l'homme. Et ils te
chercheront, les "miens", pour être pardonnés, instruits, défendus,
aimés comme autant de Marziam. Et bienheureux ceux qui le feront ! Car il
ne sera pas possible de persévérer dans le Christ si la grâce ne se fortifie
pas par ton aide, Mère pleine de Grâce."
Marie semble une rose dans son vêtement foncé tant son visage s'allume à la
louange de son Fils. Une rose splendide dans un vêtement bien humble de
grosse laine marron foncé...
304.4 - Frappent
et entrent en groupe Marie d'Alphée, Jacques et Jude, ces derniers chargés de
brocs d'eau et de fagots. La joie de se voir est réciproque. Et elle augmente
quand on apprend que bientôt viendra le Zélote. L'affection des fils d'Alphée
pour lui est visible, même sans la phrase que Jude dit en réponse à
l'observation de sa mère qui remarque cette joie qui est la leur :
"Maman, justement dans cette maison et dans une soirée bien triste pour
nous, il nous a donné une affection de père et nous l'a gardée. Nous ne
pouvons l'oublier. Pour nous il est "le père". Nous sommes pour lui
des "fils". Quels fils ne se réjouiraient pas de revoir un bon
père ?"
Marie d'Alphée réfléchit et soupire... Puis, très pratique même dans ses
peines, elle demande :
"Et où va-t-il dormir ? Vous n'avez pas de place. Envoyez-le chez
moi."
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