Vision
du mardi 16 octobre 1945
532> "Maître !
Maître ! Maître !" Les trois cris de Jean
d'Endor qui
sort de sa petite chambre pour aller se laver au bassin et se trouve en face
de Jésus qui en vient, éveillent Margziam qui court hors de la pièce de Marie avec
sa seule tunique sans manches et courte, encore déchaussé, tout yeux et
bouche pour voir et crie : "Il y a Jésus !" et toutes
jambes pour courir et grimper dans ses bras. Et ils éveillent aussi Sintica qui dort dans l'ancien atelier de Joseph et qui en sort après un moment, déjà habillée, mais avec ses
tresses très noires encore à moitié défaites et qui retombent sur ses
épaules.
Jésus, qui a encore l'enfant dans les bras, salue Jean et Sintica et les
exhorte à entrer dans la maison car la tramontane est très forte. Et
Lui entre le premier, portant Margziam à moitié nu qui claque des dents
malgré son enthousiasme, près du foyer déjà allumé où Marie se hâte de
chauffer du lait et puis les habits de l'enfant pour qu'il n'attrape pas du
mal.
Les deux autres ne parlent pas, mais semblent la personnification de la joie
extatique. Jésus est assis avec l'enfant sur ses genoux, alors que Marie
s'empresse de lui passer les vêtements qu'elle a fait chauffer. Jésus relève
son visage et leur sourit en disant : "Je vous avais promis que je
serais venu. Et aujourd'hui ou demain arrive aussi Simon le Zélote. Il est
allé ailleurs pour une chose dont je l'ai chargé. Mais
il ne va pas tarder et nous resterons plusieurs jours ensemble."
La toilette de Margziam est terminée et les couleurs reviennent sur ses
petites joues rendues hâves par le froid. Jésus le fait descendre de ses
genoux et se lève pour passer dans la petite pièce à côté, suivi de tout le
monde. Marie arrive la dernière, tenant l'enfant par la main et doucement
elle lui fait des reproches : "Qu'est-ce que je devrais te faire
maintenant, moi ? Tu as désobéi. Je t'avais dit : "Reste au
lit, jusqu'à ce que je revienne" et tu es venu avant..."
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533> "Je me suis éveillé aux cris de Jean.…" dit
Margziam pour s'excuser.
"C'est justement alors que tu devais savoir obéir. Rester autant que
l'on dort, ce n'est pas de l'obéissance et il n'y a aucun mérite à le faire.
Tu devais savoir le faire quand il y avait un mérite à le faire, car cela
exigeait de la volonté. Je t'aurais amené Jésus. Tu l'aurais eu tout entier
pour toi et sans risquer de prendre du mal."
"Je ne savais pas qu'il faisait si froid."
"Mais je le savais moi. Je suis affligée de te voir désobéissant."
"Non, Maman. Cela me donne plus de peine de te voir ainsi... Si cela
n'avait pas été pour Jésus, je ne me serais pas levé, même si tu m'avais
oublié au lit sans manger, Maman belle, Maman !... Donne-moi un baiser,
Maman. Tu sais que je suis un pauvre enfant !..."
Marie le prend dans ses bras et l'embrasse, arrêtant ainsi les larmes sur le
petit visage et y ramenant le sourire avec la promesse : "Je ne te
désobéirai plus jamais, jamais, jamais plus !"
Jésus pendant ce temps parle avec les deux disciples. Il s'informe de leurs
progrès en Sagesse et, comme ils disent que tout s'éclaire en eux avec la
parole de Marie, il dit : "Je le sais. La Sagesse surnaturellement
lumineuse de Dieu devient une lumière intelligible même pour ceux qui ont le
cœur le plus dur, quand elle est dite par elle. Mais vous n'avez pas le cœur
dur et, à cause de cela, vous bénéficiez complètement de son
enseignement."
"Maintenant, tu es ici, Fils. La maîtresse redevient écolière."
"Oh ! non ! Tu continues à être maîtresse. Je t'écouterai
comme eux. Je suis seulement "le Fils" en ces jours. Rien de plus.
Tu seras la Mère et la Maîtresse des chrétiens. Tu l'es dès maintenant: Moi,
ton premier-né et ton premier élève, ceux-ci et avec eux Simon, quand il
viendra, les autres... Vois-tu, Mère ? Le monde est ici. Le monde de demain dans le
petit israélite pur qui ne s'apercevra même pas qu'il deviendra le
"chrétien"; le monde, le vieux monde d'Israël dans le Zélote;
l'humanité dans Jean, les gentils dans Sintica. Et ils viennent tous à toi,
sainte Nourricière qui donne le lait de la Sagesse et la Vie au monde et aux
siècles. Combien de bouches ont désiré s'attacher à ton sein ! Et
combien le feront dans l'avenir !
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534> Les Patriarches et les
Prophètes ont soupiré après toi parce que de ton sein fécond devait venir la
Nourriture de l'homme. Et ils te chercheront, les
"miens", pour être pardonnés, instruits, défendus, aimés comme
autant de Margziam. Et bienheureux ceux qui le feront ! Car il ne sera
pas possible de persévérer dans le Christ si la grâce ne se fortifie pas par
ton aide, Mère pleine de Grâce."
Marie semble une rose dans son vêtement foncé tant son visage s'allume à la
louange de son Fils. Une rose splendide dans un vêtement bien humble de
grosse laine marron foncé...
Frappent et entrent en groupe Marie d'Alphée, Jacques et Jude, ces derniers
chargés de brocs d'eau et de fagots. La joie de se voir est réciproque. Et
elle augmente quand on apprend que bientôt viendra le Zélote. L'affection des
fils d'Alphée pour lui est visible, même sans la phrase que Jude dit en
réponse à l'observation de sa mère qui remarque cette joie qui est la
leur : "Maman, justement dans cette maison et dans une soirée bien
triste pour nous, il nous a donné une affection de père et nous l'a gardée.
Nous ne pouvons l'oublier. Pour nous il est "le père". Nous sommes
pour lui des "fils". Quels fils ne se réjouiraient pas de revoir un
bon père ?"
Marie d'Alphée réfléchit et soupire... Puis, très pratique même dans ses
peines, elle demande: "Et où va-t-il dormir ? Vous n'avez pas de
place. Envoyez-le chez moi."
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