Bien qu’elle aille très mal, Maria Valtorta est heureuse d’écrire sur Marie,
en présence de Jésus.
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Vigile de la
fête du Saint Sacrement .
J’écris en présence de Jésus, mon Maître. Pour moi, entièrement
pour moi. Après tant d’absence, le revoici tout à moi.
Vous direz : «Comment donc? Voici presque un mois que tu as recommencé à
l’entendre et à le voir , et tu dis que le revoici
après une telle absence?» Je réponds encore une fois ce que je vous ai dit de
vive voix et écrit à plusieurs reprises
Une chose est de voir, une autre d’entendre. Et surtout, une
chose est de voir et d’entendre pour les autres, une autre de voir et
d’entendre pour moi seule, pour moi exclusivement. Dans le premier cas, je
suis spectatrice et je répète ce que je vois et ce que j’entends; Or, S1 cela
me réjouit, car ce sont toujours des choses qui donnent beaucoup de joie, il
est aussi vrai qu’il s’agit d’une joie extérieure, pour ainsi dire. Ce terme
rend mal ce que je sens tellement bien, mais je n’en trouve pas de meilleur.
En résumé, rendez-vous compte que ma joie est semblable à celle d’une
personne qui lit un beau livre ou voit une belle scène. Il s’émeut, la
savoure, en admire l’harmonie et pense: « Qu’il serait beau d’être à la place
de cette personne! » Dans le second cas, en revanche, c'est-à-dire quand ce
que je vois et entends m’est destiné, alors je suis moi-même "cette personne". La parole que j'entends,
le personnage que je vois sont pour moi. C’est Jésus et moi, Marie et moi,
Jean et moi. Ils sont vivants, vrais, réels, proches, non pas devant moi et
comme si je voyais se dérouler une pellicule cinématographique, mais ils se
tiennent à côté de mon lit, ils marchent dans la chambre, ils s’appuient aux
meubles, ou encore ils sont assis ou debout, comme des personnes vivantes,
mes hôtes: c’est bien différent d’une vision destinée à tout le monde. En un
mot, tout cela "est mien".
Donc aujourd’hui, et même depuis hier après-midi, Jésus est
ici, vêtu de son habituel vêtement en laine blanche, d’un blanc plutôt ivoire
si différent en poids et en nuance du vêtement splendide qu’il porte au ciel et qui semble d’un lin immatériel et si pur qu’il paraît être
de la lumière filée. Il est ici, avec ses belles mains longues et fuselées
d’un blanc qui tend au vieil ivoire, avec son beau visage long et pâle où
brillent ses yeux bleu sombre dominateurs mais doux entre des cils épais d’un
châtain scintillant de blond-roux. Il est ici avec ses beaux cheveux longs et
soyeux, d’un blond-roux plus vif dans les mèches exposées à la lumière et
plus cuivré au fond des plis.
Il est ici! Il est ici! Il me sourit et me regarde écrire sur lui. Tout comme
il le faisait à Viareggio ... et comme il ne le
faisait plus depuis la semaine sainte … puisqu’il m’a alors
donné toute cette désolation, devenue une fièvre presque de désespoir
lorsque, à la souffrance d’être privée de lui, s’unit celle d’être privée de
vivre là où, du moins, je l’avais vu et où je pouvais dire: « Il s’est appuyé
ici, il s'est assis là, là encore il s’est penché pour me poser la main
sur la tête », là encore où mes parents étaient morts. Oh! Qui n’en a
pas fait l’expérience ne peut comprendre cela !
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Ce n’est pas que nous revendiquions la possession de tout cela.
Nous savons bien que ce sont des grâces gratuites et que nous ne méritons pas
de les obtenir, tout comme nous ne pouvons exiger qu'elles durent quand elles
nous sont accordées. Nous le savons. D’ailleurs, plus elles nous sont
accordées, plus nous nous anéantissons dans l’humilité, en reconnaissant
notre misère répugnante face à l’infinie Beauté et à la divine Richesse qui
se donnent à nous.
Mais que dites-vous, mon Père? Un fils ne désire-t-il pas voir son père et sa
mère? Une femme ne désire-t-elle pas voir son mari? Et quand la mort ou une
longue absence les en empêche, ne souffrent-ils pas et ne trouvent-ils pas
quelque réconfort à vivre là où ceux-ci ont vécu? S’ils doivent quitter cet
endroit, ne souffrent-ils pas doublement parce qu’ils perdent jusqu’au lieu
où leur amour fut aimé par l’être absent? Peut-on reprocher quoi que ce soit
à ceux qui souffrent de cette peine? Non. Et moi? Jésus n’est-il pas mon père
et mon époux? Ne m’est-il pas plus cher, bien plus cher que le plus cher des
pères et des époux?
Jugez de ce qu’il en est d’après la façon dont j’ai supporté la
mort de ma mère . J’ai souffert, savez-vous?
Je pleure encore, car je l’aimais bien, malgré son caractère. Mais vous avez
vu comment j’ai surmonté ce moment. Jésus était là. Or il m’est plus cher que
ma mère. Dois-je vous dire quelque chose? J’ai souffert et je souffre davantage
aujourd’hui de la mort de ma mère — qui a eu lieu il y a huit mois — qu’à
l’époque. Car, pendant ces deux derniers mois, je n’avais pas Jésus pour
moi, ni Marie pour moi, et même maintenant, il suffit qu’ils me
quittent un instant pour que je sente plus que jamais ma désolation
d’orpheline malade, et je plonge de nouveau dans la douleur rude et humaine
de ces jours inhumains.
J'écris sous les yeux de Jésus, si bien que je n’exagère ni ne déforme
rien. Ce n’est pas mon habitude, d’ailleurs. Mais même si ce l’était, il
serait impossible de persister sous ce regard.
J’ai écrit cela ici, où je n’ai pas coutume de le faire car je
ne viens pas mêler mon pauvre moi aux visions de Marie je sais bien que je dois
continuer à décrire ses gloires. Sa maternité, à tous ses instants,
n’a-t-elle pas été une couronne de gloires ?
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