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Année liturgique : l’Avent. Propre des saints 8
Décembre
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À LA MESSE.
ÉPITRE
- Lecture du livre de la Sagesse. Proverbes 8,22-31.
Le Seigneur m’a possédée au commencement de ses voies, avant qu’il créât
aucune chose au commencement. J’ai été établie dès l’éternité et de toute
antiquité, avant que la terre fût créée. Les abîmes n’étaient point encore,
et déjà j’étais conçue ; les fontaines n’avaient point encore répandu leurs
eaux ; la pesante masse des montagnes n’était pas encore formée : j’étais
enfantée avant les collines : il n’avait point encore créé la terre, ni les
fleuves, ni les pôles du monde. Lorsqu’il préparait les cieux, j’étais
présente ; lorsqu’il environnait les abîmes de cette circonférence qui a de
si justes proportions ; lorsqu’il affermissait l’air au-dessus de la terre,
et qu’il pesait comme dans une balance les eaux des fontaines ; lorsqu’il
renfermait la mer dans ses bornes, et qu’il imposait une loi aux eaux, afin
qu’elles ne franchissent point leurs limites ; lorsqu’il fondait la terre sur
son propre poids, j’étais avec lui et je réglais toutes choses. Je prenais
plaisir chaque jour, me jouant sans cesse devant lui, me jouant dans
l’univers ; et mes délices sont d’être avec les enfants des hommes.
Maintenant donc, ô mes enfants ! écoutez-moi : Heureux ceux qui gardent mes
voies ! Écoutez mes instructions, soyez sages, et ne les rejetez pas. Heureux
celui qui m’écoute, qui veille tous les jours à l’entrée de ma maison, et qui
se tient tout prêt à ma porte ! Celui qui m’aura trouvée trouvera la vie, et
il puisera le salut dans le Seigneur.
"L’Apôtre
nous enseigne que Jésus, notre Emmanuel, est le premier-né de toute créature
(Colossiens 1,15). Ce
mot profond signifie non seulement qu’il est, en tant que Dieu, éternellement
engendré du Père ; mais il exprime encore que le Verbe divin, en tant
qu’homme, est antérieur à tous les êtres créés.
Cependant ce monde était sorti du néant, le genre humain habitait cette terre
depuis déjà quatre mille ans,
lorsque le Fils de Dieu s’unit à une nature créée. C’est donc dans
l’intention éternelle de Dieu, et non dans l’ordre des temps, qu’il faut
chercher cette antériorité de l’Homme-Dieu sur toute créature. Le
Tout-Puissant a d’abord résolu de donner à son Fils éternel une nature créée,
la nature humaine, et,
par suite de cette résolution, de créer pour être le domaine de cet
Homme-Dieu, tous les êtres spirituels et corporels. Voilà pourquoi la divine
Sagesse, le Fils de Dieu, dans le passage de l’Écriture que l’Église nous
propose aujourd’hui et que nous venons de lire, insiste sur sa préexistence à
toutes les créatures qui forment cet univers.
Comme Dieu, il est engendré de toute éternité au sein de son Pète ;
comme homme, il était dans la pensée de Dieu le type de toutes les créatures,
avant qu’elles fussent sorties du néant. Mais le Fils de Dieu, pour être un
homme de notre filiation, ainsi que l’exigeait le décret divin, devait naître
dans le temps, et naître d’une Mère.
Cette Mère a donc été présente éternellement à la pensée de Dieu comme le
moyen par lequel le Verbe prendrait la nature humaine ; le Fils et la
Mère sont donc unis dans le même plan de l’Incarnation ; Marie était
donc présente comme Jésus dans le décret divin, avant que la création sortît
du néant. Voilà pourquoi, dès les premiers siècles du christianisme, la
sainte Église a reconnu la voix de la Mère unie à celle du Fils dans ce
sublime passage du livre sacré, et a voulu qu’on le lût dans l’assemblée des
fidèles, ainsi que les autres passages analogues de l’Écriture, aux
solennités de la Mère de Dieu.
Mais si Marie importe à ce degré dans le plan éternel ; si, comme son
fils, elle est, en un sens, avant toute créature, Dieu pouvait-il permettre
qu’elle fût sujette à la flétrissure originelle encourue par la race
humaine ? Sans doute, elle ne naîtrait qu’à son tour, ainsi que son
fils, dans le temps marqué ; mais la grâce détournerait le cours du
torrent qui entraîne tous les hommes, afin qu’elle n’en fût pas même touchée,
et qu’elle transmît à son fils qui devait être aussi le Fils de Dieu, l’être
humain primitif qui fut créé dans la sainteté et dans la justice."
Dom Guéranger.
7ème article : Marie d’Ágreda et la Cité mystique
de Dieu.
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"La Cité mystique est divisée
en trois parties, dont nous ferons successivement l’analyse rapide. Commençons
par la première. Il n’est pas besoin, sans doute, de prévenir de nouveau le
lecteur que les détails qui vont suivre ne sont en rien imposés à sa foi, et
qu’il demeure complètement libre de considérer cette vaste synthèse comme une
œuvre purement humaine.
N’est-elle que cela ? Il serait difficile de le soutenir, si l’on tient
compte de l’ensemble des faits qui ont été produits. Quoi qu’il en soit, le
moins que l’on pût dire à la louange de cette œuvre, c’est qu’elle demeure
l’un des plus imposants monuments du génie humain, et qu’elle suppose dans
son auteur la plus merveilleuse pénétration des mystères du christianisme, la
plus profonde connaissance de sa morale, et une rare intelligence des
Saintes-Écritures.
La Sœur commence par donner, avec une grande clarté et une admirable
précision, des notions sur la lumière divine par laquelle les âmes obtiennent
dans l’extase certaines connaissances supérieures, et elle décrit en
particulier les phénomènes de ce genre qu’elle a éprouvés.
Entrant ensuite dans le détail, elle commence par les contemplations de
l’essence divine qui lui ont été accordées : la génération éternelle du
Verbe, la procession du Saint-Esprit. Elle a vu que les trois divines
personnes ont formé de toute éternité le décret de se communiquer aux
créatures. Ce décret, simple et indivisible dans la science de Dieu, lui a
été montré dans un ordre successif, afin qu’elle en pût apprécier la teneur
et l’étendue, et la Sœur, en l’exposant, le divise en six instants de raison.
Dans le premier instant, Dieu contemplant ses propres perfections, a jugé
qu’il lui était convenable et presque nécessaire de les communiquer ad extra,
en les épanchant sur les créatures, et en sorte que cette communication fût
aussi parfaite qu’il est possible, selon les diverses proportions des êtres à
créer.
Au second instant, Dieu a décrété que sa gloire serait le motif et la fin de
son œuvre ;
au troisième, que l’ordre et l’harmonie entre les êtres créés atteindraient
la plus haute perfection ; qu’à cet effet, le Verbe assumerait la nature
humaine, afin qu’entre toutes les créatures il y en eût une qui devînt le
lien intime de toutes les autres avec la divinité.
Au quatrième instant, Dieu a décrété que toutes les grâces possibles seraient
l’apanage de l’humanité de son Fils, et que le Verbe s’incarnerait au moyen
d’une Mère ; en sorte que cette Mère d’un Dieu incarné a précédé dans
l’intention divine, toujours d’une précédence de raison, le décret en vertu
duquel devaient être produites toutes les autres créatures. Il devrait
arriver de là que le torrent des divines perfections se répandrait sur elle
dans toute la plénitude compatible avec la condition d’un être créé. Ce fut à
ce même quatrième instant que Dieu résolut de créer, pour l’habitation du
Verbe incarné et de sa Mère, le ciel, la terre et les astres, destinés, par
une volonté postérieure, à servir aussi à l’habitation des autres créatures
appelées à vivre sous le sceptre du Verbe incarné.
Au cinquième instant, Dieu a décrété la création des anges, qui seront
divisés en neuf chœurs et trois hiérarchies ; ils auront pour fin de
connaître et aimer Dieu, et ils seront assujettis au Verbe incarné comme à
leur Chef, et à sa Mère comme à leur Reine. Toutes les grâces au moyen
desquelles ils mériteront la vision béatifique leur seront accordées en vue
des mérites futurs de l’Homme-Dieu. Ce fut à ce même instant que Dieu décréta
l’élection des bons anges et la réprobation des mauvais, sur la prévision de
la fidélité des premiers et de la désobéissance des seconds ; et qu’il
résolut de destiner le ciel à l’habitation des justes, la terre et le reste
pour l’usage des autres créatures, et le centre de la terre pour être la
prison des esprits rebelles.
Au sixième instant se rapporte le décret par lequel Dieu a résolu de créer un
peuple spécial pour le Verbe incarné ; ce peuple sera le genre humain,
qui participera à la nature que le Fils de Dieu daignera prendre. C’est à ce
même instant que sont ordonnés le mode futur de la propagation de la famille
humaine, qui procédera d’un premier homme ; la série des grâces émanant
des mérites du Christ pour mettre notre race en l’état d’atteindre sa fin,
l’intégrité de la justice originelle, si l’homme veut la conserver. La chute
est prévue, ainsi que le décret en vertu duquel chaque enfant d’Adam
contractera la tache d’origine ; mais la Mère
de l’Homme-Dieu ne sera pas comprise dans ce décret, attendu que le plan
auquel se rapporte sa création est antérieur d’une antériorité de raison à
celui qui s’applique à la formation de la race humaine.
Après cet exposé, la Sœur donne le commentaire du huitième chapitre du livre des Proverbes, où
elle montre l’idée du Christ et de sa Mère conçue dans la pensée divine avant
celle des autres créatures. Elle explique ensuite l’économie de
l’Incarnation, dans l’hypothèse que l’homme n’eût pas péché.
Venant alors à la création, elle enseigne que les anges ont été tirés du
néant lorsque Dieu dit : « Que la lumière soit ; » et que
la séparation des bons et des mauvais esprits eut lieu au moment où, comme le
dit Moïse, Dieu sépara la lumière des ténèbres. Les anges furent peu de temps
dans l’état de l’épreuve. Dieu leur révéla le mystère de l’Incarnation, et le
devoir qu’ils auraient de révérer non-seulement sa divine essence, mais
l’humanité du Verbe, et de reconnaître la Mère de l’Homme-Dieu pour leur
reine, supérieure à eux tous par les dons de la grâce. Ici la Sœur expose le
beau passage du chapitre douzième de
l’Apocalypse, où paraît la femme revêtue du
soleil, ayant la lune sous ses pieds, et autour de sa tête une couronne de
douze étoiles ; puis la rage du dragon contre cette noble et glorieuse créature,
le combat livré entre les Anges et la chute de Lucifer. L’archange Michel,
vainqueur principal dans cette lutte formidable, est signalé comme devant
être désormais, avec. Gabriel, le rapide et puissant messager du Verbe
incarné et de sa Mère."
Dom Guéranger
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Fiche mise à jour le 25 novembre 2022.
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