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SS. Jean-Paul II et Maria Valtorta
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Article 2 - Dans la plénitude du
temps
2598
Le drame de la prière nous est pleinement révélé dans le Verbe qui s’est fait
chair et qui demeure parmi nous. Chercher à comprendre sa prière, à travers
ce que ses témoins nous en annoncent dans l’Évangile, c’est nous approcher du
Saint Seigneur Jésus comme du Buisson ardent : d’abord le contempler
lui-même en prière, puis écouter comment il nous enseigne à prier, pour
connaître enfin comment il exauce notre prière.
Jésus prie
2599
Le Fils de Dieu devenu Fils de la Vierge a appris à prier selon son cœur
d’homme. Il a appris les formules de prière de sa mère, qui conservait et
méditait dans son cœur toutes les " grandes choses faites par le
Tout-Puissant " (cf. Luc 1, 49 ; 2, 19 ; 2, 51). Il
l’apprend dans les mots et les rythmes de la prière de son peuple, à la
synagogue de Nazareth et au Temple. Mais sa prière jaillit d’une source
autrement secrète, comme il le laisse pressentir à l’âge de douze ans :
" Je Me dois aux affaires de mon Père " (Luc 2, 49). Ici
commence à se révéler la nouveauté de la prière dans la plénitude des
temps : la prière filiale, que le Père attendait de ses enfants,
va enfin être vécue par le Fils unique Lui-même dans son Humanité, avec et
pour les hommes.
2600
L’Évangile selon S. Luc souligne l’action de l’Esprit Saint et le sens de
la prière dans le ministère du Christ. Jésus prie avant les moments
décisifs de sa mission : avant que le Père témoigne de lui lors de son
Baptême (cf. Luc 3, 21) et de sa Transfiguration (cf. Luc 9, 28), et avant
d’accomplir par sa Passion le Dessein d’amour du Père (cf. Luc 22, 41-44). Il
prie aussi avant les moments décisifs qui vont engager la mission de ses
Apôtres : avant de choisir et d’appeler les Douze (cf. Luc 6, 12), avant
que Pierre le confesse comme " Christ de Dieu " (cf. Luc
9, 18-20) et afin que la foi du chef des Apôtres ne défaille pas dans la
tentation (cf. Luc 22, 32). La prière de Jésus avant les événements du salut
que le Père lui demande d’accomplir est une remise, humble et confiante, de
sa volonté humaine à la volonté aimante du Père.
2601
"Un jour, quelque part, Jésus priait. Quand il eut fini, un de ses
disciples lui demanda : Seigneur, apprends-nous à prier " (Luc
11, 1). N’est-ce-pas d’abord en contemplant son Maître prier
que le disciple du Christ désire prier ? Il peut alors l’apprendre du
Maître de la prière. C’est en contemplant et en écoutant le Fils que
les enfants apprennent à prier le Père.
2602
Jésus se retire souvent à l’écart, dans la solitude, sur la
montagne, de préférence de nuit, pour prier (cf. Marc 1,35 ; 6,46 ;
Luc 5,16). Il porte les hommes dans sa prière, puisque aussi bien il
assume l’humanité en son Incarnation, et il les offre au Père en s’offrant
lui-même. Lui, le Verbe qui a "assumé la chair", participe dans sa
prière humaine à tout ce que vivent "ses frères" (Hébreux 2,
12) ; il compatit à leurs faiblesses pour les en délivrer (cf. Hébreux
2, 15 ; 4, 15). C’est pour cela que le Père l’a envoyé. Ses paroles et
ses œuvres apparaissent alors comme la manifestation visible de sa prière
"dans le secret".
2603
Du Christ, durant son ministère, les évangélistes ont retenu deux prières
plus explicites. Or elles commencent chacune par l’action de grâces. Dans la
première (cf. Matthieu 11, 25-27 et Luc 10, 21-23), Jésus confesse le Père,
le reconnaît et le bénit parce qu’il a caché les mystères du Royaume à ceux
qui se croient doctes et l’a révélé aux " tout petits "
(les pauvres des Béatitudes). Son tressaillement " Oui,
Père ! " exprime le fond de son cœur, son adhésion au
" bon plaisir " du Père, en écho au
" Fiat " de Sa Mère lors de sa conception et en prélude à
celui qu’il dira au Père dans son agonie. Toute la prière de Jésus est dans
cette adhésion aimante de son cœur d’homme au " mystère de la
volonté " du Père (Ep 1, 9).
2604
La seconde prière est rapportée par S. Jean (cf. Jean 11, 41-42) avant la
résurrection de Lazare. L’action de grâces précède l’événement :
" Père, je te rends grâces de m’avoir exaucé ", ce qui
implique que le Père écoute toujours sa demande ; et Jésus ajoute
aussitôt : " je savais bien que tu m’exauces
toujours ", ce qui implique que, de son côté, Jésus demande
d’une façon constante. Ainsi, portée par l’action de grâce, la prière de
Jésus nous révèle comment demander : Avant que le don soit donné,
Jésus adhère à Celui qui donne et Se donne dans ses dons. Le Donateur est
plus précieux que le don accordé, il est le " Trésor ",
et c’est en Lui qu’est le cœur de son Fils ; le don est donné
" par surcroît " (cf. Matthieu 6, 21. 33).
La prière " sacerdotale " de Jésus (cf. Jean 17) tient
une place unique dans l’Economie du salut. Elle sera méditée en finale de la
première Section. Elle révèle en effet la prière toujours actuelle de notre
Grand Prêtre, et, en même temps, elle contient ce qu’il nous enseigne dans
notre prière à notre Père, laquelle sera développée dans la deuxième Section.
2605
Quand l’Heure est venue où Il accomplit le Dessein d’amour du Père, Jésus
laisse entrevoir la profondeur insondable de sa prière filiale, non seulement
avant de se livrer librement (" Abba...
non pas ma volonté, mais la tienne " : Luc 22, 42), mais
jusque dans ses dernières paroles sur la Croix, là où prier et se
donner ne font qu’un : " Mon Père, pardonne-leur, ils ne
savent pas ce qu’ils font " (Luc 23, 34) ; " En
vérité, je te le dis, dès aujourd’hui tu seras avec moi dans le
Paradis " (Luc 24, 43) ; " Femme, voici ton
fils " – " Voici ta mère " (Jean 19,
26-27) ; " J’ai soif ! " (Jean 19, 28) ;
" Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? " (Marc 15,
34 ; cf. Ps 22, 2) ; " Tout est achevé " (Jean
19, 30) ; " Père, je remets mon esprit entre tes
mains " (Luc 23, 46), jusqu’à ce " grand cri "
où il expire en livrant l’esprit (cf. Marc 15, 37 ; Jean 19, 30b).
2606
Toutes les détresses de l’humanité de tous les temps, esclave du péché et
de la mort, toutes les demandes et les intercessions de l’histoire du salut
sont recueillies dans ce Cri du Verbe incarné. Voici que le Père les
accueille et, au delà de toute espérance, les exauce en ressuscitant son
Fils. Ainsi s’accomplit et se consomme le drame de la prière dans l’Economie
de la création et du salut. Le psautier nous en livre la clef dans le Christ.
C’est dans l’Aujourd’hui de la Résurrection que le Père dit :
" Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui je t’ai engendré. Demande,
et je te donne les nations pour héritage, pour domaine les extrémités
de la terre ! " (Ps 2, 7-8 ; cf. Ac
13, 33).
L’Epître aux Hébreux exprime en des termes dramatiques comment la prière de
Jésus opère la victoire du salut : " C’est Lui qui aux jours
de sa chair, ayant présenté, avec une violente clameur et des larmes, des
implorations et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort,
et ayant été exaucé en raison de sa piété, tout Fils qu’il était, il apprit,
de ce qu’il souffrit, l’obéissance ; après avoir été rendu parfait, il
est devenu pour tous ceux qui lui obéissent principe de salut
éternel " (Hébreux 5, 7-9).
Jésus enseigne à prier
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2607
Quand Jésus prie il nous apprend déjà à prier. Le chemin théologal de notre
prière est sa prière à son Père. Mais l’Évangile nous livre un enseignement
explicite de Jésus sur la prière. En pédagogue il nous prend là où nous
sommes et, progressivement, nous conduit vers le Père. S’adressant aux foules
qui le suivent, Jésus part de ce qu’elles connaissent déjà de la prière selon
l’Ancienne Alliance et les ouvre à la nouveauté du Royaume qui vient. Puis il
leur révèle en paraboles cette nouveauté. Enfin, à ses disciples qui devront
être des pédagogues de la prière dans son Église, il parlera ouvertement du
Père et de l’Esprit Saint.
2608
Dès le Sermon sur la Montagne, Jésus insiste sur la conversion
du cœur : la réconciliation avec le frère avant de
présenter une offrande sur l’autel (cf. Matthieu 5, 23-24), l’amour des
ennemis et la prière pour les persécuteurs (cf. Matthieu 5, 44-45), prier le
Père " dans le secret " (Matthieu 6, 6), ne pas rabâcher
de multiples paroles (cf. Matthieu 6, 7), pardonner du fond du cœur dans la
prière (cf. Matthieu 6, 14-15), la pureté du cœur et la recherche du Royaume
(cf. Matthieu 6, 21. 25. 33). Cette conversion est toute polarisée vers le
Père, elle est filiale.
2609
Le cœur ainsi décidé à se convertir, apprend à prier dans la foi.
La foi est une adhésion filiale à Dieu, au-delà de ce que nous sentons et
comprenons. Elle est devenue possible parce que le Fils bien-aimé nous ouvre
l’accès auprès du Père. Il peut nous demander de
" chercher " et de " frapper ",
puisqu’il est lui-même la porte et le chemin (cf. Matthieu 7, 7-11. 13-14).
2610
De même que Jésus prie le Père et rend grâces avant de recevoir ses dons, il
nous apprend cette audace filiale : " tout ce que vous
demandez en priant, croyez que vous l’avez déjà reçu " (Marc 11,
24). Telle est la force de la prière, " tout est possible à celui
qui croit " (Marc 9, 23), d’une foi " qui n’hésite
pas " (Matthieu 21, 22). Autant Jésus est attristé par le
" manque de foi " de ses proches (Marc 6, 6) et le
" peu de foi " de ses disciples (Matthieu 8, 26), autant
il est saisi d’admiration devant la " grande foi " du
centurion romain (Matthieu 8, 10) et de la cananéenne (Matthieu 15, 28).
2611
La prière de foi ne consiste pas seulement à dire "Seigneur,
Seigneur", mais à accorder le cœur à faire la volonté du Père
(Matthieu 7, 21). Ce souci de coopérer au Dessein divin, Jésus appelle ses
disciples à le porter dans la prière (cf. Matthieu 9, 38 ; Luc 10,
2 ; Jean 4, 34).
2612
En Jésus " le Royaume de Dieu est tout proche ", il
appelle à la conversion et à la foi mais aussi à la vigilance. Dans la
prière, le disciple veille attentif à Celui qui Est et qui Vient dans la
mémoire de sa première Venue dans l’humilité de la chair et dans l’espérance
de son second Avènement dans la Gloire (cf. Marc 13 ; Luc 21, 34-36). En
communion avec leur Maître, la prière des disciples est un combat, et c’est
en veillant dans la prière que l’on n’entre pas en tentation (cf. Luc 22, 40.
46).
2613
Trois paraboles principales sur la prière nous sont transmises par
S. Luc :
La première, " l’ami importun " (cf. Luc 11, 5-13), invite
à une prière instante : " Frappez, et l’on vous
ouvrira ". A celui qui prie ainsi, le Père du ciel
" donnera tout ce dont il a besoin ", et surtout l’Esprit
Saint qui contient tous les dons.
La deuxième, " la veuve importune " (cf. Luc 18, 1-8), est
centrée sur l’une des qualités de la prière : il faut toujours prier
sans se lasser avec la patience de la foi. " Mais le Fils de
l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la
terre " ?
La troisième parabole, " le pharisien et le publicain " (cf.
Luc 18, 9-14), concerne l’humilité du cœur qui prie. " Mon
Dieu, aie pitié du pécheur que je suis ". Cette prière, l’Église ne
cesse de la faire sienne : " Kyrie eleison ! ".
2614
Quand Jésus confie ouvertement à ses disciples le mystère de la prière au
Père, il leur dévoile ce que devra être leur prière, et la nôtre, lorsqu’il
sera retourné, dans son Humanité glorifiée, auprès du Père. Ce qui est
nouveau maintenant est de " demander en son Nom "
(Jean 14, 13). La foi en Lui introduit les disciples dans la connaissance du
Père, parce que Jésus est " le Chemin , la
Vérité et la Vie " (Jean 14, 6). La foi porte son fruit dans
l’amour : garder sa Parole, ses commandements, demeurer avec Lui dans le
Père qui en Lui nous aime jusqu’à demeurer en nous. Dans cette Alliance
nouvelle, la certitude d’être exaucés dans nos demandes est fondée sur la
prière de Jésus (cf. Jean 14, 13-14).
2615
Plus encore, ce que le Père nous donne lorsque notre prière est unie à
celle de Jésus, c’est " l’autre Paraclet, pour être avec vous à
jamais, l’Esprit de Vérité " (Jean 14, 16-17). Cette nouveauté de
la prière et de ses conditions apparaît à travers le Discours d’adieu (cf.
Jean 14, 23-26 ; 15, 7. 16 ; 16, 13-15 ; 16, 23-27). Dans
l’Esprit Saint, la prière chrétienne est communion d’amour avec le Père, non
seulement par le Christ, mais aussi en Lui :
" Jusqu’ici vous n’avez rien demandé en mon Nom. Demandez et vous
recevrez, et votre joie sera parfaite " (Jean 16, 24).
Jésus exauce la prière
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2616
La prière à Jésus est déjà exaucée par lui durant son ministère, à
travers des signes qui anticipent la puissance de sa Mort et de sa
Résurrection : Jésus exauce la prière de foi, exprimée en paroles (le
lépreux : cf. Marc 1, 40-41 ; Jaïre :
cf. Marc 5, 36 ; la cananéenne : cf. Marc 7, 29 ; le bon
larron : cf. Luc 23, 39-43) ou en silence (les porteurs du
paralytique : cf. Marc 2, 5 ; l’hémorroïsse qui touche son
vêtement : cf. Marc 5, 28 ; les larmes et le parfum de la
pécheresse : cf. Luc 7, 37-38). La demande pressante des aveugles :
" Aie pitié de nous, fils de David " (Matthieu 9, 27) ou
" Fils de David, Jésus, aie pitié de moi " (Marc 10, 48)
a été reprise dans la tradition de la Prière à Jésus :
" Jésus, Christ, Fils de Dieu, Seigneur, aie pitié de moi,
pécheur ! " Guérison des infirmités ou rémission des péchés,
Jésus répond toujours à la prière qui l’implore avec foi :
" Va en paix, ta foi t’a sauvé ! ".
Saint Augustin résume admirablement les trois dimension
de la prière de Jésus : " Il prie pour nous en tant que notre
prêtre, il prie en nous en tant que notre tête, il est prié par nous en tant
que notre Dieu. Reconnaissons donc en Lui nos voix et sa voix en
nous " (Psal. 85, 1 ; cf. IGLH 7).
La prière de la Vierge Marie
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2617
La prière de Marie nous est révélée à l’aurore de la Plénitude des temps.
Avant l’Incarnation du Fils de Dieu et avant l’effusion de l’Esprit Saint, sa
prière coopère d’une manière unique au Dessein bienveillant du Père, lors de
l’Annonciation pour la conception du Christ (cf. Luc 1, 38), lors de la
Pentecôte pour la formation de l’Église, Corps du Christ (cf. Ac 1, 14). Dans la foi de son humble servante le Don de
Dieu trouve l’accueil qu’il attendait depuis le commencement des temps. Celle
que le Tout-Puissant a faite " pleine de grâce " répond
par l’offrande de tout son être : " Voici la servante du
Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole ". Fiat, c’est la
prière chrétienne : être tout à Lui puisqu’Il est tout à nous.
2618
L’Évangile nous révèle comment Marie prie et intercède dans la foi :
à Cana (cf. Jean 2, 1-12) la mère de Jésus prie son fils pour les besoins
d’un repas de noces, signe d’un autre Repas, celui des noces de l’Agneau
donnant son Corps et son Sang à la demande de l’Église, son Epouse. Et c’est
à l’heure de la nouvelle Alliance, au pied de la Croix (cf. Jean 19, 25-27),
que Marie est exaucée comme la Femme, la nouvelle Eve, la véritable
" mère des vivants ".
2619
C’est pourquoi le cantique de Marie (cf. Luc 1, 46-55 ; le Magnificat
latin, le Mégalinaire byzantin), est à la
fois le cantique de la Mère de Dieu et celui de l’Église, cantique de la
Fille de Sion et du nouveau Peuple de Dieu, cantique d’action de grâces pour
la plénitude de grâces répandues dans l’Economie du salut, cantique des
" pauvres " dont l’espérance est comblée par
l’accomplissement des Promesses faites à nos pères " en faveur
d’Abraham et de sa descendance, à jamais ".
En bref
2620
Dans le Nouveau Testament le modèle parfait de la prière réside dans la
prière filiale de Jésus. Faite souvent dans la solitude, dans le secret, la
prière de Jésus comporte une adhésion aimante à la volonté du Père jusqu’à la
croix et une absolue confiance d’être exaucée.
2621
Dans son enseignement, Jésus apprend à ses disciples à prier avec un cœur
purifié, une foi vive et persévérante, une audace filiale. Il les appelle à
la vigilance et les invite à présenter à Dieu leurs demandes en son Nom.
Jésus Christ exauce lui-même les prières qui lui sont adressées.
2622
La prière de la Vierge Marie, en son Fiat et en son Magnificat, se
caractérise par l’offrande généreuse de tout son être dans la foi.
Article 3 : Dans le temps de l'ÉGLISE
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2623
Le jour de la Pentecôte, l’Esprit de la Promesse a été répandu sur les
disciples, " assemblés en un même lieu " (Ac 2, 1), l’attendant " tous d’un même cœur,
assidus à la prière " (Ac 1, 14).
L’Esprit qui enseigne l’Église et lui rappelle tout ce que Jésus a dit (cf.
Jean 14, 26), va aussi la former à la vie de prière.
2624 Dans la première communauté de Jérusalem, les croyants
" se montraient assidus à l’enseignement des apôtres, fidèles à la
communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières " (Ac 2, 42). La séquence est typique de la prière de
l’Église : fondée sur la foi apostolique et authentifiée par la charité,
elle est nourrie dans l’Eucharistie.
2625 Ces prières sont d’abord celles que les fidèles écoutent et
lisent dans les Écritures, mais ils les actualisent, celles des Psaumes en
particulier, à partir de leur accomplissement dans le Christ (cf. Luc 24, 27.
44). L’Esprit Saint, qui rappelle ainsi le Christ à son Église orante, la
conduit aussi vers la Vérité tout entière et suscite des formulations
nouvelles qui exprimeront l’insondable Mystère du Christ à l’œuvre dans la
vie, les sacrements et la mission de son Église. Ces formulations se
développeront dans les grandes traditions liturgiques et spirituelles. Les formes
de la prière, telles que les révèlent les Écritures apostoliques
canoniques, resteront normatives de la prière chrétienne.
I. La bénédiction et l’adoration
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2626
La bénédiction exprime le mouvement de fond de la prière
chrétienne : elle est rencontre de Dieu et de l’homme ; en elle le
Don de Dieu et l’accueil de l’homme s’appellent et s’unissent. La prière de
bénédiction est la réponse de l’homme aux dons de Dieu : parce que Dieu
bénit, le cœur de l’homme peut bénir en retour Celui qui est la source de
toute bénédiction.
2627 Deux formes fondamentales expriment ce mouvement : tantôt,
elle monte, portée dans l’Esprit Saint, par le Christ vers le Père (nous Le
bénissons de nous avoir bénis ; cf. Ep 1,
3-14 ; 2 Co 1, 3-7. ; 1 P 1, 3-9.) ; tantôt, elle implore la
grâce de l’Esprit Saint qui, par le Christ, descend d’auprès du Père (c’est
lui qui nous bénit ; cf. 2 Co 13, 13 ; Rm
15, 5-6. 13 ; Ep 6, 23-24).
2628 L’adoration est la première attitude de l’homme qui se
reconnaît créature devant son Créateur. Elle exalte la grandeur du Seigneur
qui nous a fait (cf. Ps 95, 1-6) et la toute-puissance du Sauveur qui nous
libère du mal. Elle est le prosternement de l’esprit devant le
" Roi de gloire " (Ps 24, 9-10) et le silence respectueux
face au Dieu " toujours plus grand " (S. Augustin, Psal. 62, 16). L’adoration du Dieu trois fois saint et
souverainement aimable confond d’humilité et donne assurance à nos
supplications.
II. La prière de demande
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2629
Le vocabulaire de la supplication est riche en nuances dans le Nouveau
Testament : demander, réclamer, appeler avec insistance, invoquer,
clamer, crier, et même " lutter dans la prière " (cf. Rm 15, 30 ; Col 4, 12). Mais sa forme la plus
habituelle, parce que la plus spontanée, est la demande : C’est par la
prière de demande que nous traduisons la conscience de notre relation à
Dieu : créatures, nous ne sommes ni notre origine, ni maître des
adversités, ni notre fin ultime, mais aussi, pécheurs, nous savons, comme
chrétiens, que nous nous détournons de notre Père. La demande est déjà un
retour vers Lui.
2630 Le Nouveau Testament ne contient guère de prières de
lamentation, fréquentes dans l’Ancien Testament. Désormais dans le Christ
ressuscité la demande de l’Église est portée par l’espérance, même si nous
sommes encore dans l’attente et que nous ayons chaque jour à nous convertir.
C’est d’une autre profondeur que jaillit la demande chrétienne, celle que s.
Paul appelle le gémissement : celui de la création " en
travail d’enfantement " (Rm 8, 22), le
nôtre aussi " dans l’attente de la rédemption de notre corps, car
notre salut est objet d’espérance " (Rm
8, 23-24), enfin " les gémissements ineffables " de
l’Esprit Saint lui-même qui " vient au secours de notre faiblesse,
car nous ne savons que demander pour prier comme il faut " (Rm 8, 26).
2631 La demande du pardon est le premier mouvement de la
prière de demande (cf. le publicain : " aie pitié du pécheur
que je suis " : Luc 18, 13). Elle est le préalable d’une
prière juste et pure. L’humilité confiante nous remet dans la lumière de la
communion avec le Père et son Fils Jésus Christ, et les uns avec les autres
(cf. 1 Jean 1, 7 – 2, 2) : alors " quoi que nous Lui
demandions, nous le recevrons de Lui " (1 Jean 3, 22). La demande
du pardon est le préalable de la liturgie eucharistique, comme de la prière
personnelle.
2632 La demande chrétienne est centrée sur le désir et la recherche
du Royaume qui vient, conformément à l’enseignement de Jésus (cf.
Matthieu 6, 10. 33 ; Luc 11, 2. 13). Il y a une hiérarchie dans les
demandes : d’abord le Royaume, ensuite ce qui est nécessaire pour
l’accueillir et pour coopérer à sa venue. Cette coopération à la mission du
Christ et de l’Esprit Saint, qui est maintenant celle de l’Église, est
l’objet de la prière de la communauté apostolique (cf. Ac
6, 6 ; 13, 3). C’est la prière de Paul, l’Apôtre par excellence, qui
nous révèle comment le souci divin de toutes les Églises doit animer la
prière chrétienne (cf. Rm 10, 1 ; Ep 1, 16-23 ; Ph 1, 9-11 ; Col 1, 3-6 ; 4,
3-4. 12). Par la prière tout baptisé travaille à la Venue du Royaume.
2633 Quand on participe ainsi à l’amour sauveur de Dieu, on comprend
que tout besoin puisse devenir objet de demande. Le Christ qui a tout
assumé afin de tout racheter est glorifié par les demandes que nous offrons au
Père en son Nom (cf. Jean 14, 13). C’est dans cette assurance que Jacques
(cf. Jc 1, 5-8) et Paul nous exhortent à prier en
toute occasion (cf. Ep 5, 20 ; Ph 4,
6-7 ; Col 3, 16-17 ; 1 Th 5, 17-18).
III. La prière d’intercession
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2634
L’intercession est une prière de demande qui nous conforme de près à
la prière de Jésus. C’est Lui l’unique Intercesseur auprès du Père en faveur
de tous les hommes, des pécheurs en particulier (cf. Rm
8, 34 ; 1 Jean 2, 1 ; 1 Tm 2, 5-8). Il est " capable de
sauver de façon définitive ceux qui par lui s’avancent vers Dieu, étant
toujours vivant pour intercéder en leur faveur " (Hébreux 7, 25).
L’Esprit Saint lui-même " intercède pour nous... et son
intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu " (Rm 8, 26-27).
2635 Intercéder, demander en faveur d’un autre, est, depuis Abraham,
le propre d’un cœur accordé à la miséricorde de Dieu. Dans le temps de
l’Église, l’intercession chrétienne participe à celle du Christ : elle
est l’expression de la communion des saints. Dans l’intercession, celui qui
prie ne " recherche pas ses propres intérêts, mais songe plutôt à
ceux des autres " (Ph 2, 4), jusqu’à prier pour ceux qui lui font
du mal (cf. Etienne priant pour ses bourreaux, comme Jésus : cf. Ac 7, 60 ; Luc 23, 28. 34).
2636 Les premières communautés chrétiennes ont vécu intensément
cette forme de partage (cf. Ac 12, 5 ; 20,
36 ; 21, 5 ; 2 Co 9, 14). L’Apôtre Paul les fait participer ainsi à
son ministère de l’Évangile (cf. Ep 6, 18-20 ;
Col 4, 3-4 ; 1 Th 5, 25), mais il intercède aussi pour elles (cf. 2 Th
1, 11 ; Col 1, 3 ; Ph 1, 3-4). L’intercession des chrétiens ne
connaît pas de frontières : " pour tous les hommes, pour les
dépositaires de l’autorité " (1 Tm 2, 1), pour ceux qui persécutent
(cf. Rm 12, 14), pour le salut de ceux qui
repoussent l’Évangile (cf. Rm 10, 1).
IV. La prière d’action de grâces
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2637
L’action de grâces caractérise la prière de l’Église qui, en célébrant
l’Eucharistie, manifeste et devient davantage ce qu’elle est. En effet, dans
l’œuvre du salut, le Christ libère la création du péché et de la mort pour la
consacrer de nouveau et la faire retourner au Père, pour sa Gloire. L’action
de grâces des membres du Corps participe à celle de leur Chef.
2638 Comme dans la prière de demande, tout événement et tout besoin
peuvent devenir offrande d’action de grâces. Les lettres de S. Paul
commencent et se terminent souvent par une action de grâces, et le Seigneur
Jésus y est toujours présent. " En toute condition, soyez dans
l’action de grâces. C’est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ
Jésus " (1 Th 5, 18). " Soyez assidus à la prière ;
qu’elle vous tienne vigilants dans l’action de grâces " (Col 4, 2).
V. La prière de louange
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2639
La louange est la forme de prière qui reconnaît le plus immédiatement que
Dieu est Dieu ! Elle le chante pour Lui-même, elle lui rend gloire,
au-delà de ce qu’il fait, parce qu’IL EST. Elle participe à la béatitude des
cœurs purs qui l’aiment dans la foi avant de le voir dans la Gloire. Par
elle, l’Esprit se joint à notre esprit pour témoigner que nous sommes enfants
de Dieu (cf. Rm 8, 16), il rend témoignage au Fils
unique en qui nous sommes adoptés et par qui nous glorifions le Père. La
louange intègre les autres formes de prière et les porte vers Celui qui en
est la source et le terme : " le seul Dieu, le Père, de qui
tout vient et pour qui nous sommes faits " (1 Co 8, 6).
2640 S. Luc mentionne souvent dans son Évangile l’émerveillement et
la louange devant les merveilles du Christ, les souligne aussi pour les
actions de l’Esprit Saint que sont les Actes des Apôtres : la communauté
de Jérusalem (cf. Ac 2, 47), l’impotent guéri par
Pierre et Jean (cf. Ac 3, 9), la foule qui en
glorifie Dieu (cf. Ac 4, 21), et les païens de Pisidie qui " tout joyeux, glorifient la Parole
du Seigneur " (Ac 13, 48).
2641 " Récitez entre vous des psaumes, des hymnes et des
cantiques inspirés ; chantez et célébrez le Seigneur de tout votre
cœur " (Ep 5, 19 ; Col 3, 16). Comme
les écrivains inspirés du Nouveau Testament, les premières communautés chrétiennes
relisent le livre des Psaumes en y chantant le Mystère du Christ. Dans la
nouveauté de l’Esprit, elles composent aussi des hymnes et des cantiques à
partir de l’Evénement inouï que Dieu a accompli en son Fils : son
Incarnation, sa Mort victorieuse de la mort, sa Résurrection et son Ascension
à sa droite (cf. Ph 2, 6-11 ; Col 1, 15-20 ; Ep
5, 14 ; 1 Tm 3, 16 ; 6, 15-16 ; 2 Tm 2, 11-13). C’est de cette
" merveille " de toute l’Economie du salut que monte la
doxologie, la louange de Dieu (cf. Ep 1, 3-14 ;
Rm 16, 25-27 ; Ep 3,
20-21 ; Jude 24-25).
2642 La Révélation " de ce qui doit arriver
bientôt ", l’Apocalypse, est portée par les cantiques de la
Liturgie céleste (cf. Ap 4, 8-11 ; 5,
9-14 ; 7, 10-12) mais aussi par l’intercession des
" témoins " (martyrs : Ap
6, 10). Les prophètes et les saints, tous ceux qui furent égorgés sur la
terre pour le témoignage de Jésus (cf. Ap 18, 24),
la foule immense de ceux qui, venus de la grande tribulation, nous ont
précédés dans le Royaume, chantent la louange de gloire de Celui qui siège
sur le Trône et de l’Agneau (cf. Ap 19, 1-8). En
communion avec eux, l’Église de la terre chante aussi ces cantiques, dans la
foi et l’épreuve. La foi, dans la demande et l’intercession, espère contre
toute espérance et rend grâce au " Père des lumières de qui descend
tout don excellent " (Jc 1, 17). La foi
est ainsi une pure louange.
2643
L’Eucharistie contient et exprime toutes les formes de prière : elle est
" l’offrande pure " de tout le Corps du Christ
" à la gloire de son Nom " (cf. Ml 1, 11) ; elle
est, selon les traditions d’Orient et d’Occident, " le sacrifice
de louange ".
En bref
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2644
L’Esprit Saint qui
enseigne l’Église et lui rappelle tout ce que Jésus a dit, l’éduque aussi à
la vie de prière, en suscitant des expressions qui se renouvellent au sein de
formes permanentes : bénédiction, demande, intercession, action de grâce
et louange.
2645
C’est parce que Dieu
le bénit que le cœur de l’homme peut bénir en retour Celui qui est la source
de toute bénédiction.
2646
La prière de demande
a pour objet le pardon, la recherche du Royaume ainsi que tout vrai besoin.
2647
La prière
d’intercession consiste en une demande en faveur d’un autre. Elle ne connaît
pas de frontière et s’étend jusqu’aux ennemis.
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