La naissance miraculeuse d’un lys.
Ressemblance dans la vie des âmes dans lesquelles Jésus règne.
Sœur Maria-Gabriella Sagheddu (1914-1939).
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15> Mon Jardinier [1] m’a fait don d’un lys. D’abord
les violettes. Mes chères violettes qui avaient été déracinées par la
violence d’autrui et qui sont nées spontanément, après plus de trois ans,
dans les bacs à fleurs de la terrasse.
Mais puisque ce sont des violettes, il n’y a pas de quoi s’étonner, n’est-ce
pas ? Le vent lui-même peut en apporter les graines; un petit oiseau
peut les laisser tomber de son bec... mais un lys ! Le lys ne pousse qu’à
partir d’un bulbe et un bulbe de lys est trop gros et trop lourd pour être
porté sur les ailes du vent ou dans le bec d’un oiseau. Et pourtant, il en
est né un dans le bac de la terrasse.
Plusieurs diront
que je suis folle, mais je maintiens qu’un lys qui naît ainsi tient du
miracle, et je vois dans cette naissance miraculeuse une exquise gentillesse
et une douce réponse de mon Jésus. Il sait à quel point j’aime les lys et
combien j’ai souffert de les voir tous arrachés de ma cour. Il sait
que je les aime comme fleur et comme symbole et il connaît la
peur, le regret que j’avais au fond du cœur en pensant que peut-être mon lys
n’était plus intact et immaculé. Et alors, d’un peu de terre négligée, maigre
et durcie, désormais stérile, il a fait surgir un lys.
Il peut bien le faire, lui qui a créé les lys des vallées et qui les nomme
avec tant d’amour dans son Évangile ! Ce même Jésus, qui a donné à la petite
Thérèse [2] la neige pour le jour de sa prise
d’habit, ne peut-il pas donner à Maria une seule fleur de neige ? Gare
à toute main humaine qui me le briserait ! Cela me semblerait un sacrilège et
j’en aurais une douleur suprême.
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16> J’écris aussi
ce qui pour certains n’est qu’une bagatelle, mais qui pour moi est en fait
une chose très profonde. C’est une autre caresse de mon Dieu, une gentillesse
de sa part qui vient confirmer et renforcer la douce sensation du 2 mars
dernier[3], sensation ressentie, même si
plus faiblement, ces jours-ci.
Oh ! Paradis ! Que seras-tu si le seul fait de t’effleurer légèrement ici
provoque une telle béatitude ?
Je suis fatiguée, épuisée, et
mon cœur se tourmente pour tant de choses.
Je pense aux miens en Calabre... Je leur ai beaucoup écrit ces derniers
jours, leur parlant ouvertement de Dieu et des devoirs d’un chrétien face à
la mort. Je pense à Clotilde paralysée... je pense à Paola, à Giuseppe aux
théories.., saugrenues, je pense à tous[4]. Comment mourront-ils, s’ils
doivent mourir ? Que la main qui a planté les lys et les violettes pour la
pauvre Maria descende sur ces cœurs et les attire à lui.
L’Abbesse des
Trappistes m’écrit et je lui écris. Je suis
contente d’avoir prié et de prier ainsi pour l’unité des Églises. J’ignorais qu’on prie pour cela. Jésus, mon maître unique,
m’a guidée, comme d’habitude, même en cela. Tout comme il m’a guidée vers
sa servante, sœur M. Gabriella[7]. J’ai vraiment la sensation
qu’il me tient par la main et qu’il me conduit là où je peux trouver le bien
ou des âmes qui, étant déjà dans la gloire, sont en mesure de m’aider, par
leurs doctrines de sainteté, dans mon œuvre de sanctification.
Je peux affirmer
qu’il ne m’est jamais arrivé de chercher à connaître une "Vie" dans laquelle je n’aie trouvé quelque
ressemblance avec la mienne. Ressemblance en beaucoup plus grand et plus
parfait, mais ressemblance néanmoins. J’ai lu d’innombrables "Vies", mais pour moi-même, je me suis
toujours procuré celles qui présentent des points de contact avec ma
vie insignifiante; grâce aux résonances qu’elles ont en moi — alors que les
autres ne suscitent en moi qu’une admiration stérile et rien de plus — je
comprends que moi aussi je me place dans le même sillage (bien loin derrière)
d’amour ardent, d’immolation, de confiance.
17> Dans la "Vie" de sœur Gabriella, je trouve des phrases
pareilles aux miennes, jusqu’aux moindres paroles. Et cela me touche
beaucoup. Je sens que, là où Jésus règne en maître absolu de notre moi, les
âmes, telles des harpes touchées par la même main, rendent le même son...
plus ou moins fort selon leur degré de perfection, mais toujours dans les
mêmes notes.
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