"L'Évangile tel qu'il m'a été révélé"
de Maria Valtorta

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L'agonie de Jésus au Mont des Oliviers.

Selon "Les Visions" d'Anne-Catherine Emmerich / Clemens Brentano.




 



Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich (1774-1824).

 


Cet extrait de "La Douloureuse Passion de Jésus-Christ" est, de notre avis, un des passages les plus caractéristiques du style d'Anne-Catherine Emmerich. Sa "télépathie" rend visible et vivant l'assaut des tentations.

 


Après l'institution du l'Eucharistie, Jésus quitta le Cénacle avec les onze Apôtres. Son âme était déjà dans le trouble, et sa tristesse allait toujours croissant.  

Il les conduisit par un sentier détourné dans la vallée de Josaphat, en se dirigeant vers la montagne des Oliviers. […]

La tristesse de Jésus devenait de plus en plus grande. Ils voulaient le consoler d'une manière toute humaine en l'assurant que ce qu'il prévoyait n'arriverait pas. Ils se lassèrent dans cette vaine tentative, commencèrent à douter, et la tentation vint sur eux.    

Ils traversèrent le torrent de Cédron, non sur le pont où plus tard fut conduit Jésus prisonnier, mais sur un autre, car ils avaient fait un détour. Gethsémani, où ils allaient, est situé près de la montagne des Oliviers, à une demi-lieue environ du Cénacle. Il y a du Cénacle à la porte de la vallée de Josaphat un quart de lieue, et environ autant de là à Gethsémani.        

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[…] Le jardin des Oliviers est séparé par un chemin de celui de Gethsémani, et s'étend plus haut vers la montagne. Il est ouvert, entouré seulement d'un mur de terre, et plus petit que le jardin de Gethsémani. On y voit des cavernes, des terrasses et beaucoup d'oliviers. Une de ses parties est plus soignée que le reste. On y trouve des sièges, des bancs de gazon bien entretenus et des grottes fraîches et spacieuses. Il est facile d'y trouver un endroit propre à la prière et à la méditation.      

C'est dans la partie la plus sauvage que Jésus alla prier. […] Et, regardant autour de lui, il vit de tous côtés l'angoisse et la tentation s'approcher comme des nuages chargés de figures effrayantes. C'est alors qu'il dit aux trois Apôtres :    

- Restez là et veillez avec moi, priez pour ne pas tomber en tentation.    

Il avança encore quelques pas. Mais les visions horribles l'assaillirent.  

Dans son angoisse, il descendit un peu à gauche et se cacha sous un rocher, dans une grotte d'environ six pieds de profondeur, au-dessus de laquelle les Apôtres se tenaient dans une espèce de renfoncement. Le terrain s'abaissait doucement dans cette grotte, et les plantes suspendues au rocher qui surplombait formaient un rideau devant l'entrée, en sorte qu'on ne pouvait y être vu.     

Lorsque Jésus s'éloigna des disciples, je vis autour de lui un large cercle d'images effrayantes qui se resserrait de plus en plus.        

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Sa tristesse et son angoisse croissaient. Il se retira tout tremblant dans la grotte afin d'y prier, semblable à un homme qui cherche un abri contre un orage soudain. Mais les visions menaçantes le poursuivirent là-bas et devinrent de plus en plus distinctes. Hélas ! cette étroite caverne semblait contenir l'horrible spectacle de tous les péchés commis depuis la première chute jusqu'à la fin du monde, et celui de leur châtiment. C'était ici, sur le mont des Oliviers, qu'étaient venus Adam et Ève, chassés du paradis vers la terre inhospitalière ; ils avaient gémi et pleuré dans cette même grotte.         

J'eus l'impression que Jésus s'enfermait dans sa pure, aimante, innocente humanité, et, armé seulement de l'amour qui enflammait son cœur d'homme, il la livrait, pour les péchés du monde, à toutes les angoisses et à toutes les souffrances.          

Ainsi laissé tout entier à sa seule humanité, implorant Dieu avec une tristesse et une angoisse inexprimables, il tomba sur son visage, et tous les péchés du monde lui apparurent sous des formes infinies avec toute leur laideur intérieure. Il les prit tous sur lui et s'offrit, dans sa prière, à la justice de son Père céleste pour payer cette effroyable dette. Mais Satan, sous une forme effrayante, s'agitait au milieu de toutes ces horreurs avec un rire infernal, et montrait une fureur toujours croissante contre Jésus. Il faisait passer devant son âme des tableaux de plus en plus affreux, et criait sans le cesse à l'humanité de Jésus :  

- Comment ! Prends-tu aussi ce péché-ci sur toi ? En souffriras-tu le châtiment ? Veux-tu satisfaire pour tout cela ?    

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Cependant il partit, de ce côté du ciel où le soleil se montre entre dix et onze heures du matin, un rayon semblable à une voie lumineuse. C'était une ligue d'anges qui descendaient jusqu'à Jésus, et je vis qu'ils le ranimaient et le fortifiaient. Le reste de la grotte était plein d'affreuses visions de nos crimes et de mauvais esprits qui insultaient et assaillaient Jésus. Il prit tout sur lui, mais son cœur, le seul qui aimât parfaitement Dieu et les hommes au milieu de ce désert plein d'horreur, se sentit cruellement torturé et déchiré sous le poids de tant d'abominations. Hélas ! je vis alors tant de choses qu'une année ne suffirait pas pour les raconter.     

Lorsque cette masse de forfaits eut passé sur son âme comme un océan et que Jésus, s'étant offert comme victime expiatoire, eut appelé sur lui-même toutes les souffrances et tous les châtiments dus à tous ces crimes, Satan lui suscita, comme autrefois dans le désert, des tentations innombrables. Il osa même présenter contre celui qui était la pureté même une série d'accusations.

- Comment, disait-il, tu veux prendre tout cela sur toi, et tu n'es pas pur toi-même ? Regarde ceci ! Et cela ! Et cela aussi.

Alors il déroula devant lui, avec une impudence infernale, une foule de griefs imaginaires. Il lui reprochait les fautes de ses disciples, les scandales qu'ils avaient donnés, le trouble qu'il avait apporté dans le monde en renonçant aux anciens usages. Il lui reprocha d'avoir été l'occasion du 10> massacre des Innocents et des souffrances de ses parents en Égypte, de n'avoir pas sauvé Jean-Baptiste de la mort, d'avoir désuni des familles, d'avoir protégé des hommes décriés, de n'avoir pas guéri plusieurs malades, d'avoir fait du tort aux habitants de Gergesa en permettant aux possédés de renverser leurs cuves
[1] et aux démons de précipiter leurs porcs dans la mer ; il lui imputa les fautes de Marie-Madeleine parce qu'il ne l'avait pas empêchée de retomber dans le péché ; il l'accusa d'avoir abandonné sa famille, d'avoir dilapidé le bien d'autrui, etc. Le fait que Jésus soit le Fils de Dieu lui était caché, il le tentait donc seulement comme le plus juste des hommes.       

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Notre divin Sauveur laissa tellement prédominer en lui sa sainte humanité, qu'il voulut souffrir jusqu'à la tentation dont les hommes qui meurent saintement sont assaillis sur le mérite de leurs bonnes œuvres : Satan lui reprocha de vouloir effacer les fautes d'autrui tandis que lui-même, dépourvu de tout mérite, avait encore à satisfaire à la justice divine pour beaucoup de soi-disant bonnes œuvres. Il lui présenta les œuvres de son amour comme des actes dépourvus de mérite. Il lui mit sous les yeux, pour toutes ses bonnes œuvres, des contrats où elles étaient inscrites comme des dettes, et il disait en les montrant du doigt :  

- Tu es aussi redevable pour celle-ci et pour celle-là...         

Enfin, il déroula devant lui un contrat selon lequel Jésus avait reçu de Lazare et dépensé le prix de vente de la propriété de Marie-Madeleine à Magdalum
[2], en disant :      

- Comment as-tu osé dissiper le bien d'autrui et faire ce mal à cette famille ?   

Je vis la représentation de tous les péchés pour l'expiation desquels le Seigneur s'était offert. Je sentis avec lui tout le poids des nombreuses accusations que le tentateur éleva contre lui, car parmi les péchés du monde dont le Sauveur se chargea, je vis aussi les miens qui sont si nombreux. Du cercle de tentations qui l'entourait, il sortit vers moi comme un fleuve où toutes mes fautes me furent montrées. Pendant ce temps, j'avais toujours les yeux fixés sur mon fiancé céleste, je gémissais et priais avec lui, je me tournais avec lui vers les anges consolateurs. Hélas ! le Seigneur se tordait comme un ver sous le poids de sa douleur et de ses angoisses.      

Pendant les accusations de Satan contre Jésus, j'avais peine à retenir ma colère. Mais lorsqu'il parla de la vente du bien de Madeleine, il me fut impossible de me contenir, et je criai :

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Comment peux-tu lui reprocher comme un péché la vente de ce bien ? N'ai-je pas vu le Seigneur employer cette somme donnée par Lazare à des œuvres de miséricorde, et libérer à Thirza vingt-sept pauvres prisonniers pour dettes ?    

Au commencement, Jésus était agenouillé et priait avec assez de calme. Mais plus tard, son âme fut épouvantée à l'aspect des crimes innombrables des hommes et de leur ingratitude envers Dieu. Il fut en proie à une angoisse et à une douleur si violentes, qu'il s'écria, tremblant et frissonnant :  

- Père, si c'est possible, que ce calice s'éloigne de moi ! Père, tout vous est possible éloignez ce calice.        

Puis il se recueillit et dit :          

- Cependant que votre volonté se fasse et non la mienne.  

Sa volonté et celle de son Père étaient une. Mais, livré par son amour aux faiblesses de l'humanité, il tremblait à l'aspect de la mort. 

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Je vis la caverne autour de lui remplie de formes effrayantes. Je vis tous les péchés, toute la méchanceté, tous les vices, tous les tourments, toutes les ingratitudes qui l'accablaient : les épouvantes de la mort, la terreur qu'en tant qu'homme, il ressentait à l'aspect de ces souffrances expiatoires le pressaient et l'assaillaient sous la forme de spectres hideux. Il tombait ici ou là. Il se tordait les mains. La sueur le couvrait. Il tremblait et frémissait.  

Il se releva. Ses genoux chancelaient et le portaient à peine. Il était complètement défait et presque méconnaissable. Ses lèvres étaient pâles, ses cheveux se dressaient sur sa tête.        

Il était environ dix heures et demie lorsqu'il se traîna jusqu'auprès des trois Apôtres. Il était baigné d'une sueur froide, il chancelait et tombait à chaque pas. […] Les trouvant endormis, il joignit les mains, tomba près d'eux plein de tristesse et d'inquiétude, et dit :

- Simon, dors-tu ?

[…]Lorsque Jésus se retrouva dans la grotte et toutes ses souffrances il se prosterna, le visage au sol, les bras étendus, et pria son Père céleste. Mais il y eut dans son âme une nouvelle lutte qui dura trois quarts d'heure.         

Des anges vinrent lui montrer dans des séries de visions tout ce qu'il devait accepter de souffrances afin d'expier le péché. Ils lui montrèrent la beauté originelle de l'homme, image de Dieu, et combien la chute l'avait altéré et défiguré. Il vit l'origine de tous les péchés dans le premier péché, la signification et l'essence de la convoitise, ses effets horribles sur les forces de l'âme humaine. Il vit aussi l'essence et la signification de tous châtiments correspondant à la convoitise. Ils lui montrèrent une souffrance du corps et de l'âme qu'il devait endurer, et qui comprenait tous châtiments dus à la convoitise de l'humanité tout entière. Pour prendre sur lui la dette et le châtiment de l'humanité tout entière, il devait aussi combattre et surmonter la répugnance humaine pour la souffrance et la mort.     

Les anges lui montraient tout cela sous des formes diverses. Aucune langue ne peut exprimer l'épouvante et la douleur qui fondirent sur l'âme de Jésus à la vue de ces expiations terribles. L'horreur de cette vision fut telle qu'une sueur de sang sortit de son corps. 

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Jésus ayant résisté victorieusement à toutes les tentations par son abandon complet à la volonté de son Père céleste, un nouveau cercle d'effrayantes visions lui fut offert. Il se posa cette question terrible : "Quel sera le profit ce sacrifice ?"      

Et le tableau du plus horrible avenir accabla son cœur aimant. Il avait avec une grande tristesse l'immensité de la dette humaine et celle de la souffrance qui devait la payer, et il s'était pourtant abandonné avec joie. À présent, il voyait l'ingratitude des hommes.        

Devant l'âme de Jésus parurent toutes les souffrances futures de ses Apôtres, de ses disciples et de ses amis. Il vit l'Église primitive si peu nombreuse, puis à mesure qu'elle s'accroissait, les hérésies et les schismes faisant irruption, et l'orgueil et la désobéissance y répétant la première chute de l'homme. Il vit la tiédeur, la corruption et la malice d'un nombre infini Chrétiens, le mensonge et la fourberie de tous les docteurs orgueilleux, les sacrilèges de tous les prêtres vicieux, les suites funestes de tous ces actes, l'abomination de la désolation dans le Royaume de Dieu, dans le sanctuaire de cette ingrate humanité qu'il voulait racheter de son sang au prix souffrances indicibles.

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Je vis passer devant l'âme du pauvre Jésus, dans une série de visions innombrables, les scandales de tous les siècles jusqu'à notre temps, et même jusqu'à la fin du monde. Toutes les formes de l'erreur, de la fourberie, du fanatisme furieux, de l'opiniâtreté et de la malice ; tous les apostats, les hérésiarques, les réformateurs aux airs de saints, les corrupteurs et les corrompus l'outrageaient et le tourmentaient tour à tour, comme n'ayant pas été bien crucifié à leurs yeux, ou n'ayant pas souffert de la manière que leur présomption orgueilleuse l'entendait et l'imaginait. Tous déchiraient à l'envi la robe sans couture de son Église. Chacun voulait l'avoir pour Rédempteur autrement qu'il ne s'était donné dans l'excès de son amour. Beaucoup le maltraitaient, l'insultaient, le reniaient. Beaucoup haussaient les épaules, .hochaient la tête, évitaient les bras qu'il leur tendait, et s'en allaient vers abîme où ils s'engloutissaient.  

Il en vit une infinité d'autres qui n'osaient pas le renier hautement, mais qui s'éloignaient avec dégoût des plaies de son Église, comme le lévite s'éloigna du pauvre homme laissé presque mort par les voleurs. Comme des enfants lâches et sans foi abandonnant leur mère au moment de la nuit, quand viennent les voleurs et les meurtriers auxquels leur négligence ou leur malice a ouvert la porte, ils s'éloignaient de son épouse blessée [l'Église]. Il les vit s'approprier le butin [humain] qu'ils transportaient au désert [du paganisme], les vases [les âmes] d'or et les colliers [humains] brisés. Il vit tous ces hommes tantôt séparés de la vraie vigne et couchés parmi les raisins sauvages, tantôt comme des troupeaux égarés, livrés en proie aux loups, conduits par des mercenaires dans de mauvais pâturages, et refusant d'entrer dans le bercail du bon pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Ils erraient sans patrie dans le désert au milieu des sables agités par les vents, et ils ne voulaient pas voir sa ville placée sur la montagne qui ne peut rester cachée, la maison de sa fiancée, son Église bâtie sur le roc, auprès de laquelle il a promis d'être jusqu'à la fin des siècles et contre laquelle les portes de l'enfer ne doivent pas prévaloir. Ils refusaient d'entrer par la porte étroite pour n'avoir pas à se courber.

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Il les vit suivre ceux qui s'étaient dirigés ailleurs que vers la porte. Ils bâtissaient sur le sable des huttes qu'ils refaisaient et défaisaient sans cesse, mais où il n'y avait ni autel, ni sacrifice ; ils avaient des girouettes sur leurs toits, et leurs doctrines changeaient avec le vent ; aussi étaient-ils en contradiction les uns avec les autres. Ils ne pouvaient pas s'entendre et n'avaient jamais de position fixe : souvent ils détruisaient leurs cabanes et en lançaient les débris contre la pierre angulaire de l'Église qui restait inébranlable. Les ténèbres régnant dans leurs demeures, plusieurs d'entre eux en sortaient. Mais, au lieu de venir vers la lumière placée sur le chandelier dans la maison de l'épouse, ils se contentaient d'errer les yeux fermés autour des jardins de l'Église. Ne vivant plus que des parfums qui s'en exhalaient, ils tendaient les bras vers des idoles nébuleuses, et suivaient les astres errants qui les conduisaient à des puits sans eau. Au bord du précipice, ils ne voulaient pas écouter la voix de l'épouse qui les appelait, et, dévorés par la faim, ils riaient avec une pitié arrogante des serviteurs et des messagers qui les invitaient au festin nuptial.          

Ils ne voulaient pas entrer dans le jardin, car ils craignaient les épines de la haie. Ivres d'eux-mêmes, ils n'avaient ni blé pour leur faim, ni vin pour leur Et. aveuglés par leur propre lumière, ils disaient que l'Église du Verbe chair était invisible.   

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Jésus les vit tous ; il pleura sur eux ; il voulut souffrir pour tous ceux qui ne le voient pas, qui ne veulent pas porter leur croix avec lui dans sa ville bâtie sur la montagne qui ne peut rester cachée, dans son Église fondée sur le roc, à laquelle il s'est donné dans le Saint-Sacrement, et contre laquelle les portes de l'enfer ne prévaudront pas. 

Je voyais ces tableaux innombrables de l'ingratitude des hommes et de l'abus fait de la mort expiatoire de mon fiancé céleste, passer alternativement sous des formes diverses ou douloureusement semblables devant l'âme contristée du Seigneur, et j'y voyais figurer Satan, qui arrachait violemment à Jésus et étranglait une multitude d'hommes rachetés par son sang, et même ayant reçu l'onction de son sacrement. Le Sauveur vit avec une douleur amère toute l'ingratitude, toute la corruption des premiers Chrétiens, de ceux qui vinrent ensuite, de ceux du temps présent et de ceux de l'avenir. Toutes ces apparitions, pendant lesquelles la voix du tentateur répétait sans cesse : "Veux-tu donc souffrir pour de pareils ingrats ?" fondaient sur Jésus avec tant d'impétuosité et de fureur, qu'une angoisse indicible opprimait son humanité. Le Christ, le Fils de l'homme, luttait et joignait les mains, il tombait. comme accablé, sur ses genoux, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre. Sa volonté humaine livrait un si terrible combat contre la répugnance à tant souffrir pour une race si ingrate, que la sueur en larges gouttes de sang coulait de son corps jusqu'à terre. Dans sa détresse, il regardait autour de lui comme cherchant du secours, et semblait prendre le ciel, la terre et les astres du firmament à témoin de ses souffrances. Il me semblait l'entendre crier :

- Est-il possible de supporter une telle ingratitude ? Je vous prends à témoin de ce que j'endure !  

Dans sa détresse, il éleva la voix et poussa quelques cris douloureux. Les trois Apôtres se réveillèrent et prêtèrent l'oreille, levant les mains avec effroi.

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[…] Les images hideuses de l'ingratitude des hommes futurs dont il prenait sur lui la dette envers la justice divine, roulaient vers Jésus, toujours plus terribles et plus impétueuses, et il continuait à lutter contre la répugnance de la nature humaine à souffrir. Plusieurs fois, je l'entendis s'écrier :    

- Père, est-il possible de souffrir pour tous ces ingrats ? Père, si ce calice ne peut pas s'éloigner de moi, que votre volonté soit faite !  

Au milieu de toutes ces apparitions, je voyais Satan se mouvoir sous diverses formes hideuses, qui se rapportaient aux diverses espèces de péchés. Tantôt il apparaissait comme un grand homme noir, tantôt sous la figure d'un tigre, tantôt sous celles d'un renard, d'un loup, d'un dragon, d'un serpent. Ce n'était pas la forme même de ces animaux, mais seulement le trait saillant de leur nature, mêlé à d'autres formes hideuses. Il n'y avait là rien de semblable à une créature complète, c'étaient seulement des symboles d'abomination, de discorde, de contradiction, de péché, enfin des formes du démon. Ces figures diaboliques poussaient, entraînaient, déchiraient aux yeux de Jésus des multitudes d'hommes, pour la Rédemption desquels il entrait dans le douloureux chemin de la croix.

Au début, je vis rarement le serpent, mais ensuite je le vis apparaître avec une couronne sur la tête. Sa taille était gigantesque, sa force semblait démesurée, et il menait à l'assaut contre Jésus d'innombrables légions de tous les temps et de toutes les races. Armées de toutes sortes d'instruments de destruction, elles combattaient quelquefois les unes contre les autres, puis revenaient sur le Sauveur avec rage. C'était un horrible spectacle. Ils l'accablaient d'outrages et de malédictions, le déchiraient, le frappaient, le perçaient. Leurs armes, leurs glaives, leurs épieux allaient et venaient sans cesse comme les fléaux des batteurs en grange dans une aire immense, et tous brûlaient de rage contre le grain de blé céleste, tombé sur la terre pour y mourir, afin de nourrir éternellement tous les hommes du pain de vie.         

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Au milieu de ces cohortes furieuses, dont quelques-unes semblaient composées d'aveugles, Jésus était ébranlé comme s'il avait réellement ressenti leurs coups. Je le voyais chanceler de côté et d'autre. Tantôt il se redressait, tantôt il s'abattait. Et le serpent, parmi ces multitudes qu'il ramenait sans cesse contre Jésus, frappait çà et là de sa queue, et déchirait ou engloutissait tous ceux qui étaient renversés par elle.         

Il me fut dit que ces troupes innombrables d'ennemis du Sauveur étaient ceux qui le maltraitaient de diverses manières dans le Saint-Sacrement, où il était réellement présent sous les espèces du pain et du vin, avec sa divinité et son humanité. Je reconnus parmi eux toutes les espèces de profanateurs de la divine Eucharistie, ce gage vivant de sa présence personnelle toujours subsistante dans l'Église universelle. Je vis avec horreur tous ces outrages, depuis la négligence, l'irrévérence, l'omission, jusqu'au mépris, à l'abus et au sacrilège le plus affreux... depuis la déviation vers les idoles du monde, les ténèbres et la fausse science, jusqu'à l'erreur, l'incrédulité, le fanatisme, la haine et la persécution. Je vis parmi ces ennemis du Sauveur toutes sortes de personnes, notamment des aveugles, des paralytiques, des sourds, des muets, et même des enfants. Des aveugles qui ne voulaient pas voir la vérité, des paralytiques qui ne voulaient pas marcher avec elle, des sourds qui refusaient d'écouter ses avertissements et ses menaces, des muets qui ne 19> voulaient jamais combattre pour elle avec le glaive de la parole, des enfants égarés à la suite de parents et de maîtres mondains et oublieux de Dieu, nourris de convoitises terrestres, enivrés d'une vaine sagesse et dégoûtés des choses célestes, ou ayant dépéri loin d'elles et devenus à jamais incapables de les goûter.    

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Parmi ces derniers, dont l'aspect m'affligea particulièrement parce que Jésus aimait les enfants, je vis beaucoup d'enfants de chœur mal élevés, irrévérencieux, qui n'honorent pas le Christ dans les saintes messes auxquelles ils prennent part. Leurs fautes étaient dues en partie à la négligence de leurs maîtres et à celle des administrateurs des églises.   

Je vis avec épouvante que beaucoup de prêtres, dont certains s'estimaient pleins de foi et de piété, maltraitaient aussi Jésus dans le Saint-Sacrement. Un grand nombre croyaient et enseignaient la présence du Dieu vivant dans le très saint Sacrement, mais ne la prenaient pas assez à cœur. Car ils oubliaient et négligeaient le palais, le trône, la tente, le siège, les ornements royaux du Roi du ciel et de la terre, à savoir l'église, l'autel, le tabernacle, le calice, l'ostensoir, les vases, les ornements, en un mot, tout ce qui sert à l'usage et à la parure de sa maison. Tout était abandonné, tout dépérissait dans la poussière et dans la saleté, et le culte divin était, sinon profané intérieurement, au moins déshonoré à l'extérieur. Ce n'était pas le fruit d'une pauvreté véritable, mais de l'indifférence, de la paresse, de la préoccupation de vains intérêts terrestres, souvent aussi de l'égoïsme et de la mort intérieure - car je vis des négligences semblables dans des églises riches, ou du moins aisées. J'en vis beaucoup d'autres où un luxe mondain, sans goût et sans convenance, avait remplacé les ornements magnifiques d'une époque plus pieuse, pour recouvrir comme d'un fard éclatant et cacher sous des apparences menteuses la négligence, la malpropreté et les dégâts. Ce que les riches faisaient par une vaine ostentation, les pauvres l'imitaient bientôt sottement par manque de simplicité.       

Je ne pus m'empêcher de penser à cette occasion à l'église de notre pauvre couvent, où on avait recouvert le vieil et bel autel de pierre artistement sculpté d'une grande construction en bois avec un barbouillage imitant le marbre, ce qui me faisait toujours beaucoup de peine. Je vis toutes ces offenses à Jésus dans le Saint-Sacrement multipliées par un grand nombre de préposés aux églises, lesquels ne sentaient pas qu'il aurait été juste de partager au moins ce qu'ils possédaient avec le Rédempteur présent sur l'autel, qui s'est livré tout entier à la mort pour eux, et qui pour eux s'est laissé tout entier dans le Sacrement. Je vis que souvent les plus pauvres étaient mieux entourés dans leurs cabanes que le Maître du ciel et de la terre dans son église. Ah ! combien l'inhospitalité des hommes contristait Jésus, qui s'était donné à eux pour nourriture ! Certes, il n'est pas besoin d'être riche pour recevoir celui qui récompense au centuple le verre d'eau donné à celui qui a soif. Mais lui, qui a si soif de nous, n'a-t-il pas lieu de se plaindre quand le verre est impur et l'eau corrompue ? Par suite de semblables négligences, je vis les faibles scandalisés, le Sacrement profané, l'Église abandonnée, les prêtres méprisés. L'impureté et la négligence 20> s'étendaient jusque sur les âmes des fidèles : ils laissaient le tabernacle de leur cœur dans la saleté lorsque Jésus devait y descendre, comme ils laissaient le tabernacle de l'autel dans la saleté.  

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Je vis de ces insensés administrateurs des églises qui, pour plaire aux princes et aux grands du monde, pour satisfaire des caprices et faire réussir des projets ambitieux, travaillaient et s'empressaient avec une activité sans pareille, tandis que le Roi du ciel et de la terre était couché comme le pauvre Lazare devant la porte, et désirait en vain les miettes de l'amour que personne ne lui donnait. Il n'avait que ses plaies qui sont l'œuvre de nos mains et qui étaient léchées par les chiens, je veux dire par ces pécheurs qui retombent toujours, semblables au chien qui revient à son vomissement. 

Quand je parlerais un an entier, je ne pourrais pas dire tous les affronts faits à Jésus dans le Saint-Sacrement, et que je connus de cette manière. J'en vis les auteurs assaillir le Seigneur par foules, et le frapper de diverses armes, selon la diversité de leurs offenses. Je vis des clercs irrévérencieux, des prêtres légers ou sacrilèges dans la célébration du saint Sacrifice et la distribution de la sainte Eucharistie, et des foules de communiants tièdes et indignes.      

Je vis, en nombre infini, des gens pour qui la source de toute bénédiction, le mystère du Dieu vivant, était devenue une imprécation, une formule de malédiction. Je vis des guerriers furieux profanant les vases sacrés, et des serviteurs du démon employant la sainte Eucharistie aux mystères d'un effroyable culte infernal.

À côté de ces insultes brutales et violentes, je vis beaucoup d'impiétés moins grossières qui paraissaient tout aussi abominables. Je vis beaucoup de personnes séduites par de mauvais exemples ou des enseignements perfides perdre la foi en la présence réelle de Jésus dans le Saint-Sacrement et ne plus y adorer humblement le Sauveur. Je vis parmi elles un grand nombre de docteurs que leurs péchés avaient rendu hérésiarques. Ils se disputaient d'abord entre eux, puis ils s'unissaient pour attaquer Jésus avec fureur dans le Saint-Sacrement de son Église. Je vis une foule nombreuse de ces apostats, chefs de secte, insulter le sacerdoce catholique, combattre la présence réelle de Jésus dans l'Eucharistie, nier qu'il ait donné ce sacrement à son Église et qu'elle l'ait fidèlement conservé, et arracher à son cœur, par leurs séductions, une multitude d'hommes pour lesquels il a répandu son sang. 

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Ah ! c'était un affreux spectacle, car je voyais l'Église comme le corps de Jésus dont il avait réuni ensemble, par sa douloureuse Passion, les membres isolés et dispersés, et toutes ces masses d'hommes qui se séparaient de l'Église déchiraient et arrachaient comme des morceaux entiers de sa chair vivante. Hélas ! il jetait sur eux des regards bouleversants et gémissait de les voir se perdre. Lui, qui s'était donné à nous pour nourriture dans le Saint-Sacrement, afin de rassembler en un seul corps celui de l'Église, son épouse, les hommes séparés et divisés à l'infini, il se voyait déchiré dans ce corps même. Car la table de la communion, de l'union dans le Saint-Sacrement, ce chef-d'œuvre de son amour dans lequel il avait voulu rester à jamais parmi les hommes, était devenue, par la malice des faux docteurs, la borne de séparation. Ainsi, là où il est par-dessus tout juste et salutaire que beaucoup ne soient plus qu'un, à cette sainte table où le Dieu vivant lui-même est l'aliment qu'on reçoit, ses enfants devaient se séparer des incroyants et des hérétiques pour ne pas se rendre complices du péché d'autrui. Je vis de cette manière des peuples entiers arrachés de son sein, et privés de la participation au trésor des grâces laissées à l'Église. C'était un spectacle affreux de les voir se séparer d'abord par petits nombres, puis, devenus des peuples entiers, se diviser sur les choses les plus saintes, et se poser en ennemis les uns des autres.  

A la fin, je vis tous ceux qui s'étaient séparés de l'Église plongés dans l'incrédulité, la superstition, l'hérésie, la fausse Philosophie mondaine. Pleins d'une fureur sauvage, ils se réunissaient en grandes troupes pour assaillir l'Église, incités par le serpent homicide qui s'agitait au milieu d'eux. Hélas ! c'était comme si Jésus s'était senti déchirer lui-même en mille lambeaux. Le Seigneur, livré à ces angoisses, voyait et sentait tout l'arbre empoisonné de la division avec toutes ses branches et ses fruits qui se subdivisaient sans cesse jusqu'à la fin des temps, quand le froment sera recueilli dans les greniers et la paille jetée au feu.

Je vis le sang rouler en larges gouttes sur son visage. Ses cheveux étaient collés ensemble et se dressaient sur sa tête, sa barbe sanglante et en désordre comme si on avait voulu l'arracher.      

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Après la vision dont je viens de parler, il s'enfuit en quelque sorte hors de la caverne. Mais sa démarche était comme celle d'un homme couvert de blessures et courbé sous un lourd fardeau, il trébuchait à chaque pas. Il vint vers les trois Apôtres, mais ne les trouva pas couchés comme la première fois : ils avaient la tête voilée et affaissée sur leurs genoux, dans une position où je vois souvent les gens de ce pays lorsqu'ils sont dans le deuil ou qu'ils veulent prier. Ils s'étaient assoupis, vaincus par la tristesse et la fatigue.          

Jésus s'approcha d'eux, tremblant et gémissant. Ils se réveillèrent. Mais lorsqu'à la clarté de la lune ils le virent debout devant eux, avec son visage pâle et sanglant et sa chevelure en désordre, leurs yeux fatigués ne le reconnurent pas tout de suite, car il était indiciblement défiguré. Comme il joignait les mains, ils se levèrent et le soutinrent sous les bras avec amour. Il leur dit avec tristesse qu'on le ferait mourir le lendemain, qu'on s'emparerait de lui dans une heure, qu'on le mènerait devant un tribunal, qu'il serait : maltraité, outragé, fouetté, et enfin, livré à la mort la plus cruelle. Il les pria de consoler sa mère et Madeleine. Il leur parla ainsi pendant quelques Minutes.

Ils ne lui répondirent pas, car ils ne savaient que dire, tant son aspect et ces discours les avaient troublés. Ils croyaient même qu'il délirait. Mais lorsqu'il voulut retourner à la grotte, il n'eut pas la force de marcher. Je vis Jean et Jacques le conduire, et revenir lorsqu'il fut entré dans la grotte. Il était à peu près onze heures et quart.         

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[…] Je vis Jésus priant encore dans la grotte et luttant contre la répugnance de la nature humaine à souffrir. Il était épuisé de fatigue et abattu, et il disait :     

— Père, si c'est votre volonté, éloignez de moi ce calice. Cependant, que votre volonté se fasse et non la mienne.       

Mais alors l'abîme s'ouvrit devant lui, et les premiers degrés des limbes lui apparurent comme à l'extrémité d'une voie lumineuse. Il vit Adam et Ève, les patriarches, les prophètes, les justes, ainsi que les parents de sa mère et Jean-Baptiste, attendant son arrivée dans le monde inférieur avec un désir si violent, que cette vue fortifia et ranima son cœur plein d'amour. Sa mort devait ouvrir le ciel à ces captifs ; elle devait les tirer de la prison où ils languissaient dans l'attente.   

Lorsque Jésus eut regardé avec une profonde émotion ces saints de l'ancien monde, les anges lui présentèrent toutes les cohortes des bienheureux à venir qui, joignant leurs combats aux mérites de sa passion, devaient s'unir par lui au Père céleste. C'était une vision inexprimablement belle et consolante. Rangés suivant leurs époques, leurs classes et leurs dignités, tous passèrent devant le Seigneur, parés de leurs souffrances et de leurs œuvres. Il vit le salut et la sanctification sortant à flots intarissables de la source de Rédemption ouverte par sa mort. Les Apôtres, les disciples, les vierges et les saintes femmes, tous les martyrs, les confesseurs et les ermites, les papes et les évêques, des foules nombreuses de religieux, en un mot l'armée entière des bienheureux s'offrit à sa vue. Tous portaient sur la tête des couronnes triomphales, et les fleurs de leurs couronnes différaient par leurs formes, leurs couleurs, leurs parfums et leurs vertus en fonction de la différence des souffrances, des combats et des victoires qui leur avaient valu la gloire éternelle. Toutes leurs vies et tous leurs actes, tous leurs mérites et toutes leurs forces, ainsi que toute la gloire de leur triomphe, venaient de leur union aux mérites de Jésus-Christ.    

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L'action et l'influence réciproques que tous ces saints exerçaient les uns sur les autres, la manière dont ils puisaient à une source unique, le Saint-Sacrement et la Passion du Seigneur, offraient un spectacle singulièrement touchant et merveilleux. Rien ne paraissait fortuit en eux. Leurs œuvres, leur martyres, leurs victoires, leurs aspects et leurs vêtements, toutes ces choses, quoique très diverses, se fondaient dans une harmonie et une unité infinies. Et cette unité dans la diversité était produite par les rayons d'un soleil unique : la Passion du Seigneur. C'était la communauté des saints futurs qui passait devant l'âme du Sauveur, et lui se trouvait placé entre le désir des patriarches et le cortège triomphal des bienheureux à venir. Ces deux groupes s'unissant et se complétant en quelque sorte l'un l'autre, entouraient le cœur aimant du Rédempteur comme une couronne de victoire.        

Cette vue inexprimablement touchante donna à l'âme de Jésus un peu de consolation et de force. Il aimait tellement ses frères et ses créatures que, pour sauver une seule âme, il aurait accepté avec joie toutes ces souffrances auxquelles il s'offrait.     

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Mais ces images consolantes s'évanouirent, et les anges lui montrèrent sa Passion tout près de terre, parce qu'elle était proche. Ces anges étaient en grand nombre. Je vis toutes les scènes s'en présenter très distinctement devant lui, depuis le baiser de Judas jusqu'aux dernières paroles sur la croix. Je vis la trahison de Judas, la fuite des disciples, les insultes devant Anne et Caïphe, le reniement de Pierre, le tribunal de Pilate, les moqueries d'Hérode, la flagellation et le couronnement d'épines, la condamnation à mort, le portement de la croix, la rencontre de la sainte Vierge, son évanouissement, les insultes que les bourreaux lui prodigueraient, le voile de Véronique, le crucifiement, les outrages des Pharisiens, les souffrances de Marie, de Madeleine et de Jean, le coup de lance dans le côté. En un mot, tout lui fut présenté dans les plus petits détails. Je vis comment le Seigneur, dans son angoisse, voyait tous les gestes, entendait toutes les paroles, percevait tout ce qui se passait dans les âmes. Il accepta tout volontairement, il se soumit à tout par amour pour les hommes. Ce qui lui fit le plus de peine fut de se voir attaché à la croix dans un état de nudité complète, pour expier l'impudicité des hommes. Il pria instamment pour que cela lui soit épargné et qu'il lui soit au moins accordé d'avoir une ceinture autour des reins. Je vis qu'il serait assisté en cela, non par ses bourreaux, mais par un homme compatissant.   

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À la fin des visions de la Passion, Jésus tomba sur le visage comme un mourant. Les anges disparurent, la sueur de sang coula plus abondante, et je la vis traverser son vêtement. La plus profonde obscurité régnait dans la caverne. Je vis alors un ange descendre vers Jésus. Il était plus grand, plus distinct et plus semblable à un homme que ceux que j'avais vus auparavant.        

Il était revêtu comme un prêtre d'une longue robe flottante, ornée de franges, et portait dans ses mains devant lui, un petit vase ayant la même forme que le calice de la sainte Cène. A l'ouverture de ce calice, je voyais un petit corps ovale. de la grosseur d'une fève, qui répandait une lumière rougeâtre. L'ange, sans se poser à terre, étendit la main droite vers Jésus, qui se releva. Il lui mit dans la bouche cet aliment mystérieux et le fit boire au petit calice lumineux. Ensuite il disparut.   

Jésus, ayant accepté librement le calice de ses souffrances et reçu une force nouvelle, resta encore quelques minutes dans la grotte, plongé dans une méditation tranquille et rendant grâces à son Père céleste. Il était encore affligé mais réconforté surnaturellement, au point de pouvoir aller vers les disciples sans chanceler et sans ployer sous le poids de sa douleur. Il était toujours pâle et défait, mais son pas était ferme et décidé. Il avait essuyé son visage avec un voile et remis en ordre ses cheveux qui pendaient sur ses épaules, humides de sang et de sueur et collés ensemble.



Lorsque Jésus vint vers ses disciples, ils étaient couchés, comme la première fois, contre le mur de la terrasse; ils avaient la tête voilée et dormaient. Le Seigneur leur dit que ce n'était pas le temps de dormir, qu'ils -P-.lient se réveiller et prier. 

- Voici l'heure où le Fils de l'homme est livré aux mains des pécheurs, dit-il. Levez-vous et marchons. Le traître est proche. Mieux aurait valu pour lui qu'il ne soit jamais né. […]     

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Fiche mise à jour le
10/03/2024.

 



[1] Dans le livre où elle raconte la seconde année de la vie publique du Christ, Anne-Catherine Emmerich dit que le Christ, avant de délivrer les possédés de Gergesa et d'autoriser leurs démons à aller dans le troupeau de cochons, leur avait fait renverser une grande cuve pleine d'un vin préparé avec une herbe aphrodisiaque. Les païens de la région l'utilisaient dans les orgies de leurs cérémonies sataniques — qui étaient responsables d'importants phénomènes de possession chez ce peuple.

[2] Dans le livre où elle raconte la seconde année de la vie publique du Christ également, Anne-Catherine affirme que Marie-Madeleine, de laquelle le Christ avait expulsé sept démons, ne fait qu'une avec cette pécheresse publique qui oignit les pieds du Christ, et avec Marie, sœur de Lazare et de Marthe, qui parfuma ses cheveux avant la Passion.          
Après s'être définitivement convertie, elle avait quitté Magdala et ses mauvaises fréquentations, pour venir vivre avec Lazare et Marthe. Elle avait alors fait vendre ses biens et en avait donné le fruit au Christ, pour ses œuvres de charité. Le Christ avait utilisé cet argent à délivrer, de la prison romaine de Thirza, vingt-sept Juifs prisonniers pour dettes.