Vision du dimanche 29 juillet 1945
(Sainte Marthe)
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235.1 - Jésus va monter dans la
barque. C'est une claire aurore d'été qui effeuille les roses sur le crêpe de
soie du lac, quand survient Marthe avec sa servante. "Oh! Maître!
Écoute-moi pour l'amour de Dieu."
Jésus redescend sur la rive et dit aux apôtres :
"Allez m'attendre près du torrent. Entre temps, préparez tout pour la
mission vers Magedan. La Décapole aussi attend la
parole. Allez."
Et pendant que la barque se détache et prend le large, Jésus marche à côté de
Marthe, respectueusement suivie par Marcelle.
Ils s'éloignent ainsi du pays en cheminant sur la rive qui, tout de suite
après une bande de sable, déjà mélangée de rares herbes sauvages, se couvre
de végétation et quitte la ligne horizontale pour grimper en donnant l'assaut
aux pentes qui se mirent dans le lac.
235.2 - Quand ils ont rejoint un
endroit solitaire, Jésus dit en souriant :
"Que veux-tu me dire ?"
"Oh ! Maître... cette nuit peu après la fin de la seconde veille,
Marie est revenue à la maison. Ah ! mais j'oubliais de te dire qu'elle
m'avait dit à sexte, pendant que nous mangions : "Te déplairait-il
de me prêter un de tes habits et un manteau ? Ils seront un peu courts,
mais je laisserai le vêtement flou et je descendrai le manteau..." Je
lui ai dit : "Prends ce que tu veux, ma sœur" et le cœur me
battait très fort parce que, auparavant, dans le jardin, j'avais dit en
parlant à Marcelle : "Au crépuscule; il faut être à Capharnaüm car
le Maître parle à la foule ce soir" et j'avais vu Marie sursauter,
changer de couleur, ne sachant plus rester en place, mais elle allait et
venait seule comme une âme en peine, agitée, sur le point de décider... et ne
sachant pas encore ce qu'accepter, ce que repousser.
Après le repas, elle est allée dans ma chambre et elle a pris le vêtement le
plus sombre que j'avais, le plus modeste, elle l'a essayé et a prié la
nourrice de descendre tout l'ourlet parce que l'habit était trop court. Elle
avait essayé de le faire par elle- même, mais avait reconnu en
pleurant : " Je ne sais plus coudre, j'ai oublié tout ce qui est
utile et bon..." et elle m'a jeté les bras autour du cou en me
disant : "Prie pour moi". Elle est sortie seule, au
crépuscule... Comme j'ai prié pour qu'elle ne rencontre personne qui
l'empêche de venir ici, pour qu'elle comprenne ta parole, pour qu'elle
réussisse à étrangler définitivement le monstre qui la rend esclave...
Regarde : j'ai ajouté à ma ceinture ta ceinture bien serrée sous
l'autre,
et quand je sentais la pression du cuir dur sur ma taille qui
n'est pas habituée aux ceintures si rigides, je disais : "Lui est
plus fort que tout".
Et puis, avec le char on a vite fait, puis nous sommes venues, Marcelle et
moi. Je ne sais si tu nous as vues dans la foule... Mais quelle douleur,
quelle épine dans le cœur, en ne voyant pas Marie !
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56> Je pensais : "Elle a
regretté, elle est revenue à la maison. Ou bien... ou bien elle s'est enfuie,
ne pouvant plus résister à mon autorité qu'elle avait réclamée". Je
t'écoutais et je pleurais sous mon voile. Ces paroles paraissaient faites
pour elle... et elle ne les entendait pas ! Je pensais ainsi, moi qui ne
la voyais pas. Je suis revenue à la maison découragée. C'est vrai. Je t'ai
désobéi parce que tu m'avais dit : "Si elle vient, attends-la à la
maison". Mais considère mon cœur, Maître ! C'était ma sœur qui
venait vers Toi ! Est-ce que je pouvais n'être pas là pour la voir près
de Toi ? Et puis !... Tu m'avais dit: "Elle sera brisée".
Je voulais être près d'elle, tout de suite pour la soutenir...
J'étais agenouillée en larmes et en prière dans ma chambre et la seconde
veille était finie depuis longtemps quand elle est rentrée. Si doucement que
je ne l'ai entendue que quand elle est tombée sur moi, me serrant étroitement
dans ses bras et disant : "C'est vrai tout ce que tu dis, sœur
bénie. Et même c'est beaucoup plus que tu ne dis. Sa miséricorde est beaucoup
plus grande. Oh ! ma Marthe ! Tu n'as plus besoin de me
retenir ! Tu ne me verras plus cynique et désespérée ! Tu ne
m'entendras plus dire : 'Pour ne pas penser !' Maintenant je veux
penser, je sais à quoi penser. À la Bonté faite chair. Tu as prié, ma sœur,
certainement tu as prié pour moi. Mais tu as déjà ta victoire en main. Ta
Marie qui ne veut plus pécher, qui renaît maintenant, la voilà. Regarde-la
bien en face, car c'est une nouvelle Marie au visage lavé par les pleurs de
l'espérance et du repentir. Tu peux me baiser, sœur pure. Il n'y a plus de
traces d'amour honteux sur mon visage. Il a dit qu'il aime mon âme, car c'est
à elle et d'elle qu'il parlait. La brebis perdue, c'était moi. Il a dit,
écoute si je dis bien. Tu la connais la manière de parler du Sauveur..."
et elle m'a répété, mais parfaitement, ta parabole.
Elle est si intelligente, Marie ! Bien plus que moi. Elle sait se
rappeler. Ainsi, je t'ai entendu deux fois. Si sur tes lèvres ces paroles
étaient saintes et adorables, sur les siennes, elles étaient pour moi
saintes, adorables et aimables car c'étaient les lèvres d'une sœur, de ma sœur
retrouvée, revenue au bercail familial qui me les disaient. Nous sommes
restées embrassées, assises sur la natte du sol, comme quand nous étions
petites et que nous restions ainsi dans la chambre de maman ou bien près du
métier où elle tissait ou brodait ses splendides étoffes. Nous sommes restées
ainsi, nous n'étions plus séparées par le péché et il me semblait que maman
aussi était présente par son esprit.
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57> Nous avons pleuré sans douleur et
même avec tant de paix ! Nous nous embrassions heureuses... Et puis
Marie, fatiguée par le chemin qu'elle avait fait à pied, par l'émotion de
tant de choses, s'est endormie dans mes bras et, avec l'aide de la nourrice,
je l'ai couchée sur mon lit... et je l'ai quittée pour accourir ici..."
Marthe, radieuse, baise les mains de Jésus.
235.3 - "Je te dis, Moi aussi, ce
que t'a dit Marie : "Tu as ta victoire en main". Va et sois
heureuse. Va en paix. Aie une conduite toute de douceur et de prudence avec
celle qui vient de renaître. Adieu, Marthe. Fais-le savoir à Lazare, qui
là-bas se tourmente."
"Oui, Maître. Mais Marie, quand viendra-t-elle avec nous, les
disciples?" "
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