"L'Évangile tel qu'il m'a été révélé"
de Maria Valtorta

© Fondation héritière de Maria Valtorta.

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 3.208. - Maria Ss. rivede il pastore Elia e con Gesù va da Elisa a Betsur.

 2.208. - Going to Eliza's at Bethzur.

 3.208- María Santísima ve de nuevo al pastor Elías y con Jesús va a Betsur donde Elisa.

 4.249 - Auf dem Weg zu Elisa in Bethsur.


Vendredi 7 avril 28
(24 Nissan 3788)
vers
Bet-Çur.



Les piscines de Salomon à la fin du XIXème siècle.


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 Les saints innocents.

 Prier pour les méchants.

 Laisse faire, laisse faire le bon Dieu et tu verras comment Il règle bien toutes choses.


 Les références de l'Ancien Testament sont de David Amos.

 Voir aussi l'infographie de Carlos Martinez.

Accueil >> Plan du Site >> Sommaire du Tome.

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 70.
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 208.

208
Marie revoit le berger Élie et va chez Élise de Bet-Çur (Bethsur).

 208.1 : Jésus envoie les apôtres à la recherche des bergers.  208.2 : Marie parle à Marziam des Saints Innocents, des Limbes et du Ciel.  208.3 : Elle lui parle du pardon à donner même à Doras qui l’a fait tat souffrir mais Marziam ne peut s'empêcher de le haïr.  208.4 : Jésus le convainc de ne pas haïr mais de prier.  208.5 : On arrive aux Piscines de Salomon où se trouvaient ses splendides jardins.  208.6 : En route vers Bet-Çur.  208.7 : À Bet-Çur Marie salue Élie qui lui rapporte de bien mauvaises nouvelles d'Élise.  208.8 : Marie et Jésus parviennent à entrer chez elle.  208.9 : Face au chagrin d’Élise, Marie lui dit que son fils mort lui amène le Christ qu'il cherchait.  208.10 : Jésus lui confirme que les siens vivent encore éternellement.  208.11 : Demain il parlera près de sa maison. Marie restera chez elle. Devant le changement d’Élise, la servante crie au miracle.

Le mercredi 4 juillet 1945.

387>  208.1 – "C'est à peu près sûr que nous les trouverons si nous revenons un moment sur le chemin d'Hébron. Je vous en prie, allez deux par deux à leur recherche sur les sentiers de la montagne. D'ici aux Piscines de Salomon, puis de là à Bet-Çur. Nous vous suivrons. C'est ici sa zone de pâturage" dit le Seigneur aux douze.       

Je me rends compte qu'il parle des bergers.  

Les apôtres s'apprêtent à partir, chacun avec son compagnon préféré. Seul le couple quasi inséparable de Jean et André ne se forme pas car ils vont tous les deux vers l'Iscariote en disant : "Je viens avec toi", et Judas répond :      

"Oui, viens, André. Cela vaut mieux ainsi, Jean. Toi et moi nous serions deux qui connaissent déjà les bergers
[1]. Il vaut donc mieux que tu ailles avec un autre."       

"Avec moi, alors, le garçon" dit Pierre en quittant Jacques de Zébédée.  

Sans protester, ce dernier part avec Thomas, alors que le Zélote s'en va avec Jude Thaddée, Jacques d'Alphée avec Matthieu et les deux inséparables Philippe et Barthélemy ensemble. L'enfant reste avec Jésus et les Marie.

La route est fraîche et belle à travers les montagnes couvertes de verdure, bois et prés. On rencontre des troupeaux qui, dans la lumière blonde de l'aurore, s'en vont vers les pâturages.      

À chaque bruit de clarine
[2], Jésus cesse de parler et regarde, puis il demande aux bergers si Elie, le berger bethléemite, se trouve dans les parages. Je saisis que désormais Elie est surnommé "le bethléemite". Même si d'autres bergers sont de Bethléem, ce surnom lui appartient de droit ou traduit aussi le mépris. Mais personne n'est au courant. Ils répondent en arrêtant le troupeau et en cessant de jouer de leurs flûtes champêtres. 

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388> Les jeunes ont, presque tous, ces flûtes primitives de roseau, ce qui fait extasier Marziam, jusqu'à ce qu'un bon vieux berger lui donne la flûte de son petit-fils en disant :         

"Lui s'en fera une autre."

Et Marziam s'en va heureux avec son instrument en bandoulière car, pour le moment, il ne sait pas s'en servir.        

 208.2 – "J'aimerais tant de les rencontrer !" s'exclame Marie.       

"Nous les trouverons certainement. À cette saison, ils sont toujours vers Hébron."   

L'enfant s'intéresse à ces bergers qui ont vu Jésus enfant et pose mille questions à Marie qui répond avec patience et bonté.         

"Mais pourquoi les ont-ils punis ? Ils n'avaient fait que du bien !" demande l'enfant après le récit de leurs malheurs.       

"Parce que fréquemment l'homme commet des erreurs en accusant des innocents du mal qu'en réalité un autre a fait, mais comme eux sont restés bons et ont su pardonner, Jésus les aime tant. Il faut toujours savoir pardonner."          

 "Mais tous ces enfants qui ont été tués, comment ont-ils fait pour pardonner à Hérode ?"          

"Ce sont de petits martyrs, Marziam, et les martyrs sont saints. Eux non seulement pardonnent à leur bourreau mais ils l'aiment, car il leur a ouvert le Ciel."          

"Mais, sont-ils au Ciel ?"

"Non, pas pour le moment. Ils sont aux
Limbes où ils font la joie des Patriarches et des justes."         

"Pourquoi ?"        

"Parce qu'ils ont dit, en arrivant avec leur âme empourprée de sang : "Nous voici. Nous sommes les hérauts du Christ Sauveur. Réjouissez-vous, vous qui attendez, car Il est déjà sur la terre". Et tous les aiment parce qu'ils apportent cette bonne nouvelle."   

"La bonne nouvelle, m'a dit mon père, c'est aussi la Parole de Jésus. Alors, quand mon père s'en ira aux Limbes après l'avoir dite sur la terre, et que moi aussi j'irai, ils nous aimeront nous aussi ?"   

"Toi, tu n'iras pas aux Limbes, mon petit."    

"Pourquoi ?"        

"Parce que Jésus sera déjà revenu aux Cieux et les aura ouverts, et tous les bons à leur mort iront tout de suite aux Cieux."       

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389> "Je serai bon, je le promets. Et Simon de Jonas ? Lui aussi, hein ? Car je ne veux pas devenir orphelin une seconde fois."      

"Lui aussi, sois-en certain. Mais au Ciel, il n'y a pas d'orphelins. Nous avons Dieu, et Dieu est tout. Nous ne le sommes même pas ici-bas, car le Père est toujours avec nous."       

"Mais, dans cette belle prière que toi tu dis pendant le jour et ma maman la nuit et que vous m'avez enseignée, Jésus dit : "Notre Père qui es aux Cieux". Nous ne sommes pas encore au Ciel, comment donc sommes-nous avec Lui ?"      

"Parce que Dieu est partout, mon fils. Il veille sur l'enfant qui naît et sur le vieillard qui meurt. L'enfant qui naît en ce moment, dans l'endroit le plus reculé de la terre, a sur lui le regard et l'amour de Dieu et l'aura jusqu'à sa mort."        

"Même s'il est méchant comme
Doras ?"       

"Oui."        

"Mais Dieu qui est bon peut-Il l'aimer ce Doras qui est si méchant et fait pleurer mon vieux père ?"         

"Il le regarde avec indignation et douleur, mais s'il se repentait, Il lui dirait ce que dit le père de la parabole à son fils repentant
[3]. 
 208.3 – Tu devrais prier pour qu'il se repente et..."  

"Oh ! non, Mère ! Je prierai pour qu'il meure !!!" dit l'enfant avec fougue. Bien que sa sortie soit peu... angélique, son impétuosité est telle et si sincère que les autres sont obligés de rire.        

Mais ensuite Marie reprend son doux sérieux de Maîtresse :        

 "Non, mon chéri, cela tu ne dois pas le faire pour un pécheur. Dieu ne t'écouterait pas et te regarderait même avec sévérité. Nous devons souhaiter du bien au prochain, même s'il est très méchant, le plus grand bien possible. La vie est un bien, car elle donne à l'homme la possibilité d'acquérir des mérites aux yeux de Dieu."       

"Mais, si quelqu'un est méchant, il n'acquiert que des péchés."    

"On prie pour qu'il devienne bon."      

L'enfant réfléchit... mais cette instruction sublime ne lui va guère et il conclut :        

"Doras ne deviendra pas bon ! même si je prie. Il est trop méchant. Même si tous les enfants martyrs de Bethléem priaient avec moi, il le resterait. Tu ne sais pas que... tu ne sais pas que... qu'un jour il a frappé avec une verge de fer mon vieux père parce qu'il l'a trouvé assis à l'heure du travail ?   

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390> Il ne pouvait se lever car il se sentait mal et lui... l'a frappé en le laissant pour mort et puis il lui a donné un coup de pied au visage... Moi, je voyais, car j'étais caché derrière une haie... J'étais allé jusque-là parce que depuis deux jours personne ne m'avait apporté de pain, et je mourais de faim... J'ai dû m'échapper pour qu'on ne m'entende pas, car je pleurais de voir mon père en cet état, avec du sang sur la barbe, allongé par terre, comme mort... Je suis allé en pleurant mendier un pain... mais ce pain, je l'ai toujours ici... et il a le goût du sang et des larmes de mon père, des miennes et de celles de tous ceux qui sont torturés, et qui ne peuvent aimer celui qui les torture. Moi, Doras, je voudrais le frapper pour qu'il sache ce que c'est que les coups, je voudrais le laisser sans pain, pour qu'il sache ce que c'est que la faim, je voudrais le faire travailler sous le soleil, dans la boue, sous la menace des surveillants et sans manger, pour qu'il sache ce qu'il inflige aux pauvres... Je ne puis l'aimer car... il tue, mon père saint et moi, si je ne vous avais pas trouvés à qui serais-je maintenant ?"      

L'enfant se tord de douleur, il crie et pleure, tremblant, bouleversé, frappant l'air de ses petits poings fermés, ne pouvant frapper celui qu'il maudit. Les femmes sont stupéfaites, vivement émues et elles cherchent à le calmer. Mais il est vraiment dans une crise de douleur et n'entend rien. Il crie :

"Je ne puis, je ne puis l'aimer et lui pardonner. Je le hais, pour tous, je le hais, je le hais, je le hais… !"   

Il fait peine, il fait peur.  

 208.4 – C'est la réaction de la créature qui a trop souffert. 

Et Jésus le dit :     

"C'est le plus grand crime de Doras : pousser un innocent à la haine..."  

Mais après cela, il prend dans ses bras l'enfant et lui parle :          

"Écoute, Marziam. Tu veux aller un jour avec ta maman, avec ton père, avec tes frères, avec le vieux père ?" 

"Oui..."      

"Et alors tu ne dois haïr personne. Au Ciel n'entre pas celui qui hait. Tu ne peux, maintenant, prier pour Doras ? Eh bien ne prie pas, mais ne hais pas. Sais-tu ce que tu dois faire ? Tu ne dois jamais te retourner en arrière pour penser au passé..."           

"Mais le père qui souffre, ce n'est pas du passé..."    

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391> "C'est vrai, Marziam, mais essaie de prier ainsi : "Notre Père, qui es aux Cieux, pense, Toi à ce que je désire...". Tu verras que le Père t'écoute de la meilleure des manières. Si même tu tuais Doras, que ferais-tu ? Tu perdrais l'amour de Dieu, le Ciel, l'union avec ton père et ta mère et tu n'enlèverais pas ses peines au vieillard que tu aimes. Tu es trop petit pour pouvoir le faire. Mais Dieu le peut. Parles-en à Lui. Dis-Lui : "Tu sais comme j'aime mon vieux père et comme j'aime tous ceux qui sont malheureux. Penses-y, Toi qui peux tout". Comment ? Ne veux-tu pas annoncer la Bonne Nouvelle ? Mais elle parle d'amour et de pardon ! Comment peux-tu dire à un autre : "Ne hais pas. Pardonne" si tu ne sais pas aimer et pardonner ?  Laisse faire, laisse faire le bon Dieu et tu verras comment Il règle bien toutes choses. Le feras-tu ?"        

"Oui, parce que je t'aime."         

Jésus embrasse l'enfant et le met par terre. L'affaire est réglée et on arrive au bout de la route.  

 208.5 – Les trois grands bassins creusés dans la roche de la montagne, œuvre vraiment grandiose, brillent avec leurs surfaces très limpides et avec la chute d'eau qui, du premier bassin, tombe dans le second plus grand et de celui-ci dans un troisième bassin qui est un véritable petit lac d'où elle part par des conduites vers des villes éloignées.      

Mais par suite de l'humidité du sol en cette région, la montagne, de la source aux piscines et de celles-ci à la plaine, est d'une fertilité merveilleuse. Les fleurs, les plus variées d'entre les fleurs sauvages, rient sur les pentes vertes en même temps que des plantes parfumées et rares. Il semble qu'ici l'homme a semé des fleurs de jardin et les plantes parfumées qui répandent dans l'air, sous le soleil qui les chauffe, leurs arômes de cannelle, de camphre, d’œillet, de lavande et autres odeurs pénétrantes, fortes, suaves, en la fusion la plus merveilleuse des meilleures odeurs de la terre. Je dirais que c'est une symphonie de parfums parce que c'est réellement le poème des plantes et de fleurs dans leurs teintes variées et leurs agréables exhalaisons.    

Tous les apôtres sont assis à l'ombre d'un arbre couvert de grandes fleurs blanches, dont j'ignore le nom, aux énormes clochettes d'émail blanc, pendants qui ondulent au moindre souffle de vent et qui répandent des flots de parfum à chaque ondulation. Je ne connais pas le nom de cet arbre.  

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392> La fleur me rappelle un arbuste qui existe en Calabre et que là-bas on appelle "bottaro", mais le fût certainement pas, car celui-ci est un arbre élevé, au tronc robuste, pas un arbuste.        

Jésus les appelle, et ils accourent.       

"Nous avons trouvé presque immédiatement Joseph qui revenait d'un marché. Ce soir, ils seront tous à Bet-Çur. Nous nous sommes réunis, en nous appelant à haute voix et nous nous sommes installés ici, au frais" explique Pierre.

"Quel bel endroit ! On dirait un jardin ! Nous discutions entre nous s'il était naturel ou non. Les uns sont d'un avis, les autres d'un avis différent" dit Thomas.    

"La terre de Judée a de ces merveilles" dit l'Iscariote qui s'enorgueillit inévitablement de tout, même des fleurs et des plantes.     

"Oui, mais... je crois que si par exemple le jardin de Jeanne à Tibériade était abandonné et devenait sauvage, même la Galilée posséderait au milieu des ruines la merveille de ses roses splendides" réplique Jacques de Zébédée.        

"Et tu ne te trompes pas. C'était dans cette région qu'étaient les jardins de Salomon, célèbres comme ses palais dans le monde de cette époque. C'est peut-être ici qu'il a rêvé le Cantique des Cantiques appliquant à la Cité Sainte toutes les beautés qu'il avait fait pousser ici" dit Jésus.
[4]   

"Alors c'est moi qui avais raison !" dit le Thaddée.   

"Tu avais raison, dit son autre frère Jacques. Sais-tu, Maître ? Il citait l'Ecclésiaste en unissant l'idée des jardins à celle des bassins
[5] et terminait en disant : "Pourtant il s'aperçut que tout est vanité et que rien ne dure sous le soleil sauf la Parole de mon Jésus[6]".  

"Je te remercie, mais remercions aussi Salomon. Que les fleurs primitives viennent ou non de lui, certainement viennent de lui les bassins qui alimentent les plantes et les hommes. Qu'il en soit béni. Allons alors jusqu'à ce grand rosier sauvage qui a formé, d'un arbre à l'autre, une galerie fleurie. Nous allons nous arrêter là. Nous sommes presque à mi-chemin"...      

 208.6 – ...Et ils reprennent la route, vers la neuvième heure[7] lorsque s'allongent les ombres des arbres de cette région bien cultivée. On croit traverser un immense jardin botanique car chaque espèce de plante y est représentée pour son fût, pour son fruit ou sa beauté. Les cultivateurs circulent un peu partout mais ne font pas attention à la troupe des apôtres qui passe. Elle n'est pas la seule, d'ailleurs. D'autres groupes d'hébreux sont sur la route, au retour des fêtes pascales.      

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393> La route est en assez bon état, bien que taillée dans les montagnes et les panoramas toujours variés rompent la monotonie de la marche. Ruisseaux et torrents dessinent des virgules d'argent liquide et écrivent des paroles qu'ils chantent ensuite, dans leurs mille méandres qui se recoupent, qui se répandent sous les bois ou se cachent sous des cavernes d'où ils ressortent plus beaux. Ils semblent jouer avec les arbres et les roches comme de joyeux enfants.     

Même Marziam, maintenant complètement rasséréné, joue et essaie son instrument pour imiter les oiseaux. Mais vraiment ce ne sont pas des chants mais de lamentables sons discordants qui me semblent être très désagréables aux plus difficiles de la troupe, c'est-à-dire à Barthélemy à cause de son âge et à Judas de Kérioth pour d'autres motifs. Mais personne ne donne clairement son avis et l'enfant continue en sautant ici et là. Deux fois seulement, il montre un pays niché dans les bois et il dit :    

"Est-ce le mien ?" et il devient tout pâle.        

Mais Simon, qui le garde tout près de lui, répond : "Le tien est très loin d'ici. Viens, viens cueillir ces belles fleurs et les apporter à Marie." Et il le distrait ainsi de ses souvenirs.   

 208.7 – Le crépuscule commence quand apparaît Bet-Çur sur sa colline et tout de suite sur le chemin secondaire qu'on a pris pour y aller, voici les troupeaux des bergers, et avec eux les bergers qui accourent. Mais quand Elie voit qu'il y aussi Marie, il lève les bras, étonné, et reste ainsi n'osant pas en croire ses yeux.         

"La paix à toi, Élie. C'est bien moi. On te l'avait promis et, à Jérusalem, il n'a pas été possible de nous voir... Mais, n'y pensons plus. Maintenant nous nous voyons" dit doucement Marie. 

"Oh ! Mère, Mère… !"     

Élie ne sait que dire. Puis finalement il trouve :       

"Voilà, ma Pâque je la fais maintenant. C'est la même chose, et mieux encore."        

"Mais oui, Elie. Nous avons fait un bon marché. Nous pouvons tuer un agnelet. Oh ! soyez les hôtes de notre pauvre table..." dit Lévi et aussi Joseph.     

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394> "Ce soir nous sommes fatigués. Ce sera pour demain. Écoutez. Connaissez-vous une certaine Élise, épouse d'Abraham de Samuel ?"     

"Oui, elle est dans sa maison de Bet-Çur, mais Abraham est mort, et l'an passé ses fils aussi sont morts. Un malaise subit pour le premier et on n'a jamais compris de quoi il était mort. Le second a décliné lentement et rien n'arrêtait le mal. Nous lui donnions du lait de nouvelle chèvre car les médecins disaient que c'était bon pour le malade. Il en buvait des quantités qui venaient de tous les bergers car la pauvre mère en envoyait chercher auprès de quiconque avait une chèvre de premier lait dans son troupeau. Mais cela n'a servi à rien. Quand nous sommes revenus à la plaine, il ne se nourrissait plus. Quand nous sommes revenus au mois d'Adar, il était mort depuis deux lunes."          

"Ma pauvre amie ! Elle m'aimait bien au Temple... nous avions des aïeux communs... Elle était bonne... Elle quitta le Temple pour épouser Abraham auquel elle était promise depuis son enfance, deux ans avant moi, et je me souviens de sa venue au Temple pour l'offrande de son premier-né au Seigneur. Elle me fit appeler, pas moi seule, mais elle voulut me voir seule plus longtemps... Et maintenant, elle est seule... Oh ! il faut que je me hâte d'aller la consoler ! Vous, restez. Je vais avec Élie et j'entrerai seule. La douleur veut qu'on la respecte..."         

"Pas même Moi, Mère ?"

"Toi, toujours. Mais les autres... Pas même toi, petit. Ce serait pour elle une douleur. Viens, viens Jésus !"

"Attendez-nous sur la place du pays. Cherchez un abri pour la nuit. Adieu" ordonne Jésus à tout le monde.

 208.8 – Et, seuls avec Elie, Jésus et la Mère s'en vont jusqu'à une grande maison toute fermée et silencieuse à laquelle le berger frappe avec son bâton. Une servante met son visage à la fenêtre en demandant qui c'est. Marie s'avance en disant :         

"Marie de Joachim et son Fils, de Nazareth. Dis-le à ta maîtresse."         

"C'est inutile. Elle ne veut voir personne. Elle se laisse mourir en pleurant."        

"Essaie."    

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395> "Non, je sais comment elle me chasse si je cherche à la distraire. Elle ne veut personne, voir personne, parler à personne. Elle ne parle qu'au souvenir de ses fils."

"Va, femme, je te l'ordonne. Dis-lui : "C'est la petite Marie de Nazareth, celle qui était ta fille au Temple..." Tu verras qu'elle me voudra."          

La femme s'en va en secouant la tête. 

Marie explique à son Fils et au berger :          

"Élise était beaucoup plus âgée que moi
[8]. Elle attendait au Temple le retour de son époux, parti en Égypte pour une affaire d'héritage, et elle y resta jusqu'à un âge inhabituel. Elle a environ dix années de plus. Les maîtresses avaient l'habitude de donner aux plus jeunes des élèves plus grandes pour les conduire... et elle fut ma compagne-maîtresse. Elle était bonne et... Voilà la femme."    

En effet la servante accourt, stupéfaite, et elle ouvre toute grande la porte principale :

"Entre, entre !" dit-elle. 

Et puis à voix basse :       

"Bénie sois-tu, toi qui la fais sortir de cette pièce."   

Élie se retire et Marie entre avec son Fils.      

"Mais, cet homme, vraiment... par pitié ! Il a l'âge de Lévi..."         

"Laisse-le entrer. C'est mon Fils, et il la consolera mieux que moi."         

La femme hausse les épaules et les précède à travers un long vestibule d'une maison belle mais bien triste. Tout est propre, mais tout semble mort...

 208.9 – Une femme grande, mais qui est toute courbée dans ses vêtements sombres, s'avance dans le couloir dans la pénombre.          

"Élise ! Chère Élise ! C'est moi, Marie !" dit Marie en courant à sa rencontre et en l'embrassant.  

"Marie ? Toi... Je te croyais morte, toi aussi. On m'avait raconté... quand ? Je ne sais plus... J'ai un vide ici, dans la tête... On m'avait dit que tu étais morte, avec beaucoup de mères, après la venue des Mages. Mais qui m'a dit que tu étais la Mère du Sauveur ?"      

"Les bergers, peut-être..."         

"Oh ! les bergers !"          

Et elle éclate en sanglots.          

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396> "Ne me dis pas ce nom. Il me rappelle l'ultime espérance pour la vie de Lévi... Et pourtant... oui... un berger m'a parlé du Sauveur et j'ai tué mon fils en l'amenant à l'endroit où on disait qu'était le Messie, près du Jourdain. Mais il n'y avait personne... et mon fils est revenu pour mourir... La fatigue, le froid... je l'ai tué... mais je n'ai pas voulu l'assassiner. Je me disais que Lui, le Messie, guérissait les maladies... et je l'ai fait à cause de cela... Maintenant mon fils m'accuse de l'avoir tué..."    

"Non, Élise. C'est de l'imagination. Écoute. Je crois que ton fils, au contraire, m'a prise par la main en me disant : "Va trouver ma chère maman. Conduis-lui le Sauveur. Je suis mieux ici que sur la terre. Mais elle n'écoute que son chagrin et ne peut entendre les paroles que je lui dis tout bas parmi mes baisers, pauvre maman qui est comme possédée par un démon qui la pousse au désespoir parce qu'il nous veut séparés. Alors que si elle se résigne et croit que Dieu fait tout pour le bien nous serons unis pour toujours, avec le père et avec le frère. Jésus peut le faire". Et moi, je suis venue... avec Lui... Ne veux-tu pas le voir ? ..."     

Marie a parlé en tenant toujours dans ses bras la malheureuse en lui donnant des baisers sur ses cheveux gris et avec une douceur qu'elle seule peut avoir.        

"Oh ! si c'était vrai ! Mais pourquoi, pourquoi alors Daniel n'est pas venu te trouver pour te dire de venir plus tôt ? ...Mais, qui m'a dit autrefois que tu étais morte ? Je ne me souviens pas... je ne me souviens pas... Même à cause de cela, j'ai peut-être trop attendu à venir au Messie. Mais on m'avait dit qu'il était mort, Lui, toi, tous à Bethléem..."        

"Ne cherche pas qui te l'a dit.    
 208.10 – Viens, regarde, ici, c'est mon Fils. Viens à Lui. Fais plaisir à tes enfants et à ta Marie. Sais-tu que nous souffrons de te voir ainsi ?" Et elle la conduit vers Jésus qui s'est placé dans un coin sombre et qui maintenant seulement s'avance sous une lampe que la femme de service a mise sur un coffre élevé.        

La pauvre mère lève la tête... et je vois alors que c'est Élise qui était aussi sur le Calvaire avec les pieuses femmes. Jésus lui tend les mains en un geste d'invitation qui n'est qu'amour. La malheureuse lutte un peu, puis Lui donne les siennes et enfin de compte s'abandonne sur la poitrine de Jésus en gémissant :

"Dis-moi, dis-moi que je ne suis pas coupable de la mort de Lévi ! Dis-moi qu'ils ne sont pas perdus pour toujours ! Dis-moi que bientôt je serai avec eux… !"      

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397> "Oui, oui. Écoute. Ils sont dans la jubilation maintenant que tu es dans mes bras. Je ne tarderai pas de les rejoindre, et que dois-je leur dire, alors ? Que tu ne t'en remets pas au Seigneur ? Est-ce cela que je dois dire ? Les femmes d'Israël, les femmes de David si courageuses, si sages, dois-tu leur donner un démenti ? Non. Tu souffres, mais parce que tu as souffert seule. Ta douleur et toi. Toi et ta douleur. Alors tu ne peux en porter le poids. Tu n'as plus présentes à ton esprit les paroles d'espoir au sujet de ceux que la mort nous a pris ? "Je vous sortirai de vos tombeaux et je vous amènerai dans la terre d'Israël[9]. Et vous saurez que je suis le Seigneur quand j'aurai ouvert vos tombes et vous aurai tiré de vos tombeaux[10]. Quand j'aurai versé en vous mon esprit vous aurez la vie"[11]. La terre d'Israël, pour les justes endormis dans le Seigneur, c'est le Royaume de Dieu. Je l'ouvrirai et le donnerai à ceux qui attendent."

"Même à mon Daniel ? Même à mon Lévi ? ... Il avait une si grande répulsion pour la mort... Il ne pouvait s'imaginer d'être éloigné de sa maman. C'est pour cela que je voulais mourir et aller à côté de lui au tombeau..."      

"Mais ce n'est pas là qu'ils sont, en ce qui en eux est vivant. Là il n'y avait que des choses mortes qui ne pouvaient t'entendre. Eux sont dans le lieu de l'attente..."

"Mais est-ce vraiment cela ? Oh ! ne te scandalise pas à mon sujet. Ma mémoire s'est fondue dans mon chagrin ! J'ai la tête remplie du bruit des larmes et du râle de mes fils. Quel râle ! Quel râle !... Cela m'a dissous le cerveau. Je n'ai que ce râle, là-dedans..."       

"Et Moi, je t'y mettrai les paroles de la vie. Je sèmerai la Vie, car je suis Vie là où est le fracas de la mort. Rappelle-toi le grand Judas Macchabée qui voulut faire un sacrifice pour les morts avec la juste pensée qu'ils sont destinés à ressusciter et qu'il faut hâter pour eux l'heure de la paix par des sacrifices opportuns
[12]. Si Judas Macchabée n'avait pas été certain de la résurrection, aurait-il prié et fait prier pour les morts[13] ? Lui, au contraire, comme il est écrit, pensa qu'une grande récompense était réservée à ceux qui meurent pieusement[14], comme certainement tes fils sont morts...  

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398> Tu vois que tu dis oui ? Ne désespère donc plus. Mais prie saintement pour tes morts pour que leurs péchés soient effacés avant que je ne vienne à eux. Alors, sans attendre un instant, ils viendront avec Moi au Ciel. Car je suis le Chemin, la Vérité et la Vie et je conduis et je dis la Vérité et je donne la Vie à celui qui croit à ma Vérité et me suit. Dis-moi. Tes fils croyaient-ils à la venue du Messie ?"         

"Certainement, Seigneur. Ils avaient appris de moi cette croyance."        

"Et Lévi croyait-il possible sa guérison par l'effet de ma volonté ?"          

"Oui, Seigneur, nous espérions en Toi mais... cela ne lui a pas servi... et il est mort découragé après avoir tant espéré..."     

Les pleurs de la femme reprennent plus calmes, mais plus désolés dans ce calme que dans leur furie précédente.

"Ne dis pas que cela n'a pas servi. Celui qui croit en Moi, même s'il est mort, vivra éternellement...     
 208.11 – La nuit descend, femme. Je rejoins mes apôtres. Je te laisse, Mère..."        

"Oh ! reste, Toi aussi !... J'ai peur, si tu t'éloignes, d'être reprise par ce tourment... Elle commence à peine, à peine à se calmer la tempête au son de tes paroles..."        

"Ne crains pas ! Tu as Marie avec toi. Demain je reviendrai. J'ai quelque chose à dire aux bergers. Puis-je leur dire de venir près de ta maison. ..."          

"Oh ! oui. Ils y venaient aussi l'an passé pour mon fils... Derrière la maison, il y a un jardin et puis une cour rustique. Ils peuvent y venir comme ils faisaient alors pour rassembler les troupeaux..."          

"C'est bien. Je viendrai. Sois bonne. Rappelle-toi que, au Temple Marie t'avait été confiée. Moi aussi, je te la confie cette nuit."      

"Oui, sois tranquille. J'en prendrai soin, la... Je devrai penser à son souper, à son repos... Il y a combien de temps que je ne pense plus à ces choses ! Marie, veux-tu dormir dans ma chambre comme faisait Lévi durant sa maladie ? Moi, dans le lit de mon fils, toi dans le mien. Et il me semblera entendre sa respiration légère... Il me tenait toujours par la main..."    

"Oui, Élise. Et auparavant nous parlerons de tant de choses."      

"Non, tu es fatiguée. Tu dois dormir."

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399> "Toi aussi..."          

"Oh ! moi ! Je ne dors plus depuis des mois... Je pleure... je pleure... Je ne sais pas faire autre chose..."  

"Ce soir, au contraire, nous prierons et puis nous irons au lit et tu dormiras... Nous dormirons la main dans la main, nous deux aussi. Tu peux aller, Fils, et prie pour nous..."

"Je vous bénis. Que la paix soit avec vous et à cette maison !"       

Et Jésus s'en va avec la servante qui reste interdite et ne fait que répéter :        

"Quel miracle, Seigneur ! Quel miracle ! Après tant de mois, elle a parlé, elle a pensé... Oh ! quelle affaire !... On disait qu'elle mourait folle... Et j'en étais peinée car elle est bonne."



"Oui, elle est bonne, et Dieu lui viendra en aide à cause de cela. Adieu femme. La paix aussi à toi."         

Jésus sort dans la rue à moitié sombre et tout prend fin.   

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Fiche mise à jour le 22/01/2024.

 



[1] Cf. EMV 75.2/6.  

[2] Clarine : Clochette placée au cou du bétail.     

[3] Dans la parabole du fils prodigue (EMV 205.5).           

[4] Cf. Cantique des Cantiques 4,12-16.     

[5] Cf. Ecclésiaste (Qôhèlet) 2,1-10.

[6] Cf. Ecclésiaste (Qôhèlet) 2,11.    

[7] Neuvième heure = 15 heures.    

[8] Une dizaine d’années. Elle a donc une petite soixantaine.      

[9] Cf. Ézéchiel 37,12.          

[10] Cf. Ézéchiel 37,13.        

[11] Cf. Ézéchiel 37,14.        

[12] 2 Maccabées 12,43.      

[13] 2 Maccabées 12,44.      

[14] 2 Maccabées 12,45.