Catéchèse du mercredi
5 et du jeudi 6 avril 1944
(Semaine sainte)
163> 25.8 – Marie
dit :
"C'est la veille du Jeudi Saint. À certains, cette vision paraîtra hors
de propos. Mais ta douleur d'amante de Jésus Crucifié est en ton cœur et y
persiste, même si une douce vision se présente. C'est comme la tiédeur qui se
développe d'une flamme, qui est encore du feu et ce n'est plus du feu. Le feu
c'est la flamme, pas la tiédeur qu'elle répand autour d'elle. Aucune vision
béatifiante ou purifiante ne viendra t'enlever du cœur cette douleur.
Regarde-la comme précieuse, plus que ta vie même :
c'est en effet, le plus grand don que Dieu puisse faire à celui qui croit en
son Fils. D'ailleurs, ma vision, dans sa paix, s'harmonise bien avec la
commémoration de cette semaine.
25.9 – Mon Joseph
aussi a eu sa Passion.
Et elle commença à Jérusalem quand il se rendit compte de mon état, et elle a
duré des jours comme pour Jésus et pour moi .
Et spirituellement elle ne fut pas moins douloureuse. C'est uniquement par la
sainteté de Joseph, mon époux, qu'elle s'est maintenue sous une forme
tellement digne et secrète qu'elle est passée peu connue à travers les
siècles.
Oh ! Notre première Passion ! Qui peut en dire l'intime et
silencieuse intensité ? Qui peut en dire ma douleur en constatant que le
Ciel ne m'avait pas encore exaucée en révélant à Joseph le mystère ?
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164> Qu'il l'ignorait, je l'avais compris en le voyant à mon
égard simplement respectueux comme à l'ordinaire. S'il avait su que je
portais en moi le Verbe de Dieu, il aurait adoré ce Verbe en mon sein, avec
des actes de vénération dus à Dieu, et il n'aurait pas manqué de les faire,
comme moi je n'aurais pas refusé de les recevoir, non pas pour moi, mais pour
Celui qui était en moi, que je portais comme l'Arche d'Alliance portait les
tables de la Loi et les vases de la manne.
Qui peut dire mon combat contre le
découragement qui tentait de m'accabler pour me persuader que j'avais espéré
en vain dans le Seigneur ? Oh ! je crois que ce fut une rage de
Satan ! Je sentais le doute me saisir aux épaules et allonger ses
tentacules pour emprisonner mon âme et l'arrêter dans sa prière. Le doute, si
dangereux, mortel pour l'esprit. Mortel car c'est bien la première attaque de
la maladie qui se nomme "désespoir" et contre laquelle l'esprit
doit réagir de toutes ses forces pour ne pas voir périr son âme et perdre
Dieu.
Qui pourrait dire avec une exacte vérité la douleur de Joseph, ses pensées,
le trouble de ses affections ? Comme une petite embarcation prise dans
une grande bourrasque, il se trouvait dans un tourbillon d'idées opposées, de
réflexions plus pénibles et plus cruelles l'une que l'autre. En apparence,
c'était un homme trahi par sa femme. Il voyait crouler en même temps son bon
renom et l'estime du monde à cause d'elle, il se voyait déjà montré du doigt
et l'objet de la compassion du pays. Il voyait l'amour et l'estime qu'il
avait pour moi tomber morts devant l'évidence du fait.
25.10 – Ici sa sainteté resplendit
encore plus que la mienne, et j'en témoigne avec mon amour d'épouse, car je
veux que vous l'aimiez, mon Joseph, cet homme sage et prudent, patient et
bon, qui n'est pas étranger au mystère de la Rédemption, auquel il a été
intimement lié, parce qu'il usa sa douleur et lui-même pour celui-ci, en
sauvant le Sauveur au prix de son sacrifice et par sa grande sainteté.
S'il avait été moins saint, il aurait agi humainement en me dénonçant comme
adultère pour me faire lapider et faire périr avec moi le fruit de mon péché.
S'il avait été moins saint, Dieu ne lui aurait pas donné la lumière pour le
guider en une telle épreuve. Mais Joseph était saint. Son esprit, toute
pureté, vivait en Dieu. La charité en lui était
ardente et forte. Et par sa charité, il vous sauva le Sauveur, tant en ne me
dénonçant pas auprès des anciens, qu'en laissant tout par une prompte
obéissance pour emmener Jésus en Égypte.
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165>
25.11 – Journées peu nombreuses, mais
terribles par leur intensité, celles de la passion de Joseph et de ma
passion, de cette première passion dont je dus souffrir. Car je comprenais sa
souffrance et ne pouvais la lui enlever aucunement pour rester fidèle à
l'ordre de Dieu qui m'avait dit : "Tais-toi !"
Et quand à notre arrivée à Nazareth, je le vis me quitter après un laconique
salut, courbé et vieilli, pour ainsi dire, en peu de temps, quand je vis
qu'il ne venait pas chez moi le soir comme il en avait l'habitude, je vous le
dis, mes fils, mon cœur éploré eut à souffrir une douleur aiguë. Enfermée
dans ma maison, seule, dans la maison où tout me rappelait l'Annonciation et
l'Incarnation, et où tout me ramenait au cœur le souvenir de Joseph uni à moi
dans une virginité sans tache, je dus résister au découragement, aux
insinuations de Satan et espérer, espérer, espérer. Et prier, prier, prier.
Et pardonner, pardonner, pardonner à Joseph son soupçon, sa révolte de juste
indigné.
Mes fils : il faut espérer, prier, pardonner, pour obtenir que Dieu intervienne en
notre faveur. Vous aussi vous avez à
vivre votre passion. Vos fautes l'ont méritée. Je vous enseigne comment
la surmonter et la transformer en joie. Espérez sans mesure, priez sans
défiance, pardonnez pour qu'il vous soit pardonné. Le pardon de Dieu, mes
fils, sera la paix a laquelle vous aspirez.
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