TEXTES DE LA MESSE.
Missel de
saint Pie X en usage à l’époque.
Introït : L’Esprit du Seigneur remplit
l’univers, alléluia ; et lui, qui contient tout, entend tout ce qui est
dit, alléluia, alléluia, alléluia. Ps.
Que Dieu se lève, et que ses ennemis soient dispersés ; que ceux qui le
haïssent fuient devant sa face. Gloire au Père, … Sagesse 1,
7 ; Psaume 67 (hébreu 68), 2.
Collecte : Ô Dieu, qui
en ce jour avez instruit les cœurs des fidèles, par l’illumination du Saint
Esprit, donnez-nous, dans le même Esprit, de goûter ce qui est bien et de
jouir sans cesse de sa consolation, Par N.S.J.C… en l’unité du même Esprit
Saint.
Épître : Actes 2,1-11.
Psaume : Psaume 103 (hébreu 104), 30.
Alléluia : Envoyez votre
Esprit, et ils seront créés, et vous renouvellerez la face de la terre.
Séquence : Veni, Sancte Spiritus.
Évangile : Jean 14,23-31.
Offertoire : Affermissez, Ô Dieu ce que vous
avez opéré en nous, dans votre sanctuaire de Jérusalem, les rois vous
offrirons des présents. Psaume 67 (hébreu 68), 29-30.
Secrète : Daignez,
Seigneur, sanctifier les dons que nous vous offrons, et purifiez nos cœurs
par l’illumination du Saint Esprit. Par N.S. J.C… en l’unité du même.
Communion : Tout à coup il vint du ciel un
bruit, comme celui d’un vent qui souffle avec force, où ils étaient assis,
alléluia. Ils furent tous remplis du Saint Esprit, annonçant les merveilles
de Dieu, alléluia, alléluia. Actes 2,2.4.
Postcommunion : Seigneur, que l’effusion de
l’Esprit Saint purifie nos cœurs, et les féconde par l’intime aspersion de sa
rosée Par N.S.J.C… en l’unité du même
Esprit Saint.
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Dimanche 9 juin 1946.
131> Azarias dit :
"Gloire au divin Paraclet
! Gloire ! Alléluia ! Célébrons ensemble ses louanges en cette fête de son
épiphanie
d'amour. Et considérons sa préparation, sa forme, ses effets.
Généralement, les limites humaines font que l'on ne considère qu'une seule
épiphanie : celle du Christ. Il est véritablement clair que l'homme ne sait
pas voir, réfléchir ni comprendre. Si l'homme savait aimer, il verrait, il réfléchirait, il
comprendrait. La proportion de la vue, de la compréhension et de la réflexion
est fonction du degré d'amour atteint par l'âme.
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132> L'homme devient
capable de voir, de réfléchir et de comprendre dans la même mesure qu'il se
donne et s'abandonne à l'amour pour en être enveloppé, brûlé, détruit pour
être reconstruit sous une nouvelle forme, enflammé pour enflammer et ainsi
faire honneur et sanctifier en portant parmi les hommes l'ardeur de
l'immense fournaise où la créature se transforme en séraphin afin qu'elle entre
véritablement en Dieu, dans l'ardent tabernacle qu'est Dieu - celui dont
tout procède, l'infatigable qui accomplit tout, le parfait, l'accompli, le
saint, la puissance, la sagesse, la lumière, la pensée, la parole, l'amour,
la vie, la grâce, celui qui confirme la grâce -. Car alors l'homme possède la
sagesse. L'amour est sagesse. La sagesse est source de vertu. L'amour,
c'est-à-dire la sagesse, n'est jamais séparé de la sainteté. Au contraire, il
incite toujours à la perfection, car il pousse l'homme à réaliser des œuvres
fécondes. Les œuvres fécondes et constructives sont
toujours des œuvres d'amour. Comme les marches d'un escalier d'or, de telles
œuvres l'élèvent toujours davantage vers le ciel. Comme des plumes qui se
fortifient par le vol - et toute œuvre d'amour est un vol vers le ciel -, ces
œuvres se font toujours plus vastes, plus saintes, plus joyeuses de cette
joie dont Dieu lui-même jouit par ses œuvres.
L'homme qui est pénétré d'amour s'approprie, pour ainsi dire,
les sentiments de l'Amour, et, avec l'Amour un et trine, il se recrée
lui-même, rachète les autres en plus de lui-même, se réjouit de créer et de
racheter. Bien qu'il soit actif au-delà de toute mesure par sa double
activité de charité : adoration de Dieu et amour du prochain, il acquiert,
par sa douce extase continuelle et toujours en éveil, les lumières
sapientielles de Dieu dans lequel il est plongé, une majesté profonde,
équilibrée, paisible, solennelle, qui est l'éclat de l'union surhumaine avec
le divin.
En un mot : l'homme amoureux, vivant par son esprit au sein de la très
sainte Trinité, prend les habitudes et les sentiments du lieu où elle réside,
donc l'amour actif, contemplatif, joyeux, la lumière et la science, les
facultés de voir, de réfléchir et de comprendre.
Maintenant, par ce que je te dis, par la
lumière que je t'apporte, par l'ardeur que je te communique, je veux qu'avec
moi tu fixes ton regard sur les connaissances supérieures, celles que
communément l'homme ne contemple pas ; tu verras ainsi qui est Dieu,
le multiforme et l'égal, celui qui se complète lui-même sans se dépasser pour
faire prévaloir l'une de ses parties sur les autres ; en effet, l'esprit qui
pousse à vouloir prédominer est égoïste, et Dieu ne connaît pas d'égoïsme. En
Dieu se trouvent l'obéissance dans le Fils, la fidélité dans
l'Esprit pour resplendir auprès de la puissance du Père, mais jamais le
moindre esprit d'abus de l'Un en vue de dévaloriser les actions des Deux
autres.
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133> Voir Dieu signifie : en remarquer les actions, même celles que les
esprits lourds ne discernent pas. Et voir signifie constater qu'aux
épiphanies (= manifestations) du Christ, que le Seigneur Jésus t'a déjà
expliquées, correspondent les précédentes épiphanies du Père et
celles, même plus tardives, de l'Esprit.
Le Père se manifeste pour la
première fois dans la création. Immense épiphanie de la Puissance qui a tout créé à
partir de rien, car le Tout peut faire les choses à partir du néant, tandis
que le néant, le non-être, ne peut se former par lui-même ni former quoi que
ce soit.
La réponse aux orgueilleux
négateurs de Dieu est cela même que leurs yeux voient indéniablement, tout
comme leur impuissance, - que leur orgueil ne peut que constater -, à créer à
partir de rien ne serait-ce qu'un seul brin d'herbe. Ce n'est pas créer que
de fabriquer des instruments, des médicaments, de nouveaux alliages de
métaux, ou des croisements de plantes ou d'animaux. Cela revient seulement à
travailler sur des matières déjà existantes. Créer, c'est, à partir de rien,
obtenir ce tout qui vous entoure, ce firmament avec ses planètes, ces mers
avec leurs eaux, cette terre avec les plantes et les animaux qui l'habitent,
ces hommes obtenus à partir de ce qui d'abord était poussière et que Dieu
transforma pour en faire l'homme ; en outre, cet homme
créé n'est pas seulement vivifié par une vie limitée, mais aussi par une
vie éternelle par son esprit, il n'est pas seulement doté d'instinct mais
aussi d'intelligence. C'est cela, créer. Et le Créateur s'est manifesté par
sa création, qui est la première épiphanie de Dieu posée comme un soleil
resplendissant au commencement des temps pour ne plus être voilé, jamais plus.
Quel est l'organisme qui, une
fois formé, dure pour l'éternité ? Quelle est la chose qui ne connaît pas ni
dispersion, ni obscurcissement, ni désagrégation, ni oubli, ni mort ? Il
viendra un moment où les astres, et même le grand soleil, ne seront plus. Les
continents ne sont déjà plus ce qu'ils étaient quand Dieu créa la Terre. Les
dynasties périssent. Les noms des grands hommes qui ont vécu sont bien
souvent ignorés aujourd'hui parce que les siècles les ont recouverts de la
poussière oublieuse du temps. Mais l'épiphanie du Créateur et Père est, et
sera. Car avec les ressuscités du dernier jour, il restera de cette parfaite
épiphanie la partie la plus parfaite : les vivants, les hommes, eux qui sont
éternels.
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134> Tu en restes étourdie, mon âme ? Il ne te semble pas
juste d'appeler parfaits les damnés ? Ils seront la perfection du mal et ils
témoigneront là-bas, dans le royaume du Rebelle qui ne veut pas plier son
esprit à l'adoration du Parfait, qui veut être dieu à la place de Dieu, et
pouvoir ce que peut celui qu'il veut traiter comme son égal : ce qu'il peut
comme Créateur, ce qu'il peut comme Juge ; faire à partir de rien des êtres
non seulement vivants mais aussi éternels, non seulement animaux mais aussi
dotés d'esprit, et les juger sur tout leur être, donnant à tout ce qui
fut rebelle ce qu'il a mérité, les maintenant vivants dans les siècles des
siècles tandis que tout ce qui a été créé connaîtra la mort, et les isoler
dans le règne qu'eux-mêmes auront librement élu pour leur règne.
Comme tu vois, la première
épiphanie (= manifestation) du Créateur et Père restera, même au-delà du
temps, dans les deux Royaumes qui ne connaîtront pas de fin, le paradis et
l'enfer, pour rappeler sans cesse à chacun selon sa condition, que Dieu est,
et qu'il s'est manifesté comme tel depuis le premier jour créé. C'est là un
heureux et lumineux souvenir pour les habitants des cieux, mais le souvenir
d'une punition pour ceux de l'enfer, en tout cas un ineffaçable souvenir pour
les deux, même après que tout sera effacé, mis à part les deux Royaumes.
À
cette manifestation créatrice font suite les autres manifestations de la
première Personne
: aux patriarches, des premiers jours jusqu'à la manifestation du
Sinaï, seconde en puissance la troisième fut complète en ce sens qu'y étaient
présentes les trois Personnes, au
Jourdain ; et l'autre encore, pour secouer les Gentils et les
Juifs, les premiers étant meilleurs que les seconds, afin qu'ils aient
l'esprit préparé à la foi en celui dont la passion était désormais éminente,
et puissent ainsi bénéficier de ses mérites.
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135> Puis viennent, unies aux épiphanies du Père, celles de
l'Amour (= L’Esprit-Saint), de l'Amour toujours présent dans toutes les
actions du Père, qui s'est manifesté avec lui et par le "fiat"
depuis la première épiphanie de la première Personne car, comme le dit
l'introït : «L'Esprit du Seigneur emplit le monde entier», mais
particulièrement en se manifestant par les enseignements de sagesse et les
œuvres rédemptrices.
Oh
! Sublimes manifestations de l'Amour dans la demeure virginale de Marie !
L'Amour qui se manifeste avec tout son amour, en se déversant sur l'Amoureuse
pour engendrer le Sauveur ! «Parce qu'il tient unies toutes choses, l'Esprit
perce le secret de chaque parole et sait ce qu'il vous dit»,
professe l'introït. En remplissant le cœur de la Vierge,
l'Esprit savait ce qu'il faisait : il permettait à la Vierge de concevoir
l'Homme par lequel devaient s'accomplir les promesses afin que l'homme
redevienne ami et fils de Dieu, grâce à des œuvres d'amour successives.
Regarde ! Médite ! Celui qui avait
présidé à toutes les actions du Créateur, et donc aussi à la pensée de créer
l'Immaculée, la future Mère du Rédempteur, le voici qui descend à présent
pour l'épouser, et il la trouve plus belle que le paradis lui-même parce que
belle de justice par sa propre volonté, en plus de l'être par la volonté du
Seigneur du paradis !
Y a-t-il une épiphanie de l'Amour divin plus douce que celle-ci ? Par cette
douce épiphanie voici que se forme, dans le sein de la Vierge, la chair du
Verbe et le premier battement du cœur du Christ, ce cœur qui depuis son
premier battement n'a pas connu un seul mouvement qui ne soit obéissance et
amour, et qui se propose à vous comme modèle pour parvenir à la gloire du
ciel.
Mais à cette épiphanie du mois de mars en Galilée,
à l'autre survenue sur les rives du Jourdain,
vient s'unir l'épiphanie lumineuse de la Pentecôte,
véritable couronne dont le Christ avait fait la promesse à ses apôtres pour
les consoler au soir de Pâques et au matin de l'Ascension.
La voici qui s'accomplit, précédée par une préparation d'obéissance et de
prière pour transformer les pauvres apôtres en grands apôtres
"et pour les baptiser par le Feu", comme Jésus le leur avait prédit
afin qu'ils soient purifiés de leurs pesanteurs et, une fois devenus
davantage esprits que chairs, qu'ils sachent se plonger dans le Feu et le
répandre de toute part pour en incendier le monde. L'Esprit savait bien ce
qu'il faisait à ce moment précis : il opérait la transformation des cœurs. De cœurs d'hommes, il faisait des
"voix" de Dieu.
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136> Voilà.
L'Esprit accomplit ces opérations. Il prend le rien qui sait aimer, qui est
obéissant, fidèle, qui parle à Dieu dans une prière confiante, et il
l'envahit de lui-même, le transforme et en fait l'instrument de Dieu.
"Tu fais une création nouvelle", est-il dit. Oui. Il opère la recréation de l'homme en instrument,
afin qu'ensuite la bonne volonté de l'instrument, unie à l'Amour, crée le
saint.
Observe : la première Personne apparut et ordonna : "Que la lumière soit
!" La troisième Personne dit : "Que l'amour
soit !" La première ordonna : "Que l'homme soit !" et la troisième : "Que le saint soit !"
La première cria à Lucifer : "Soit maudit !"
La troisième met la haine en fuite par les foudres de l'amour.
Le Seigneur surgit, disperse ses ennemis et ceux de ses fils, et ceux qui
haïssent l'amour fuient de devant sa face et des alentours de ses fils.
Je t'ai déjà dit que Marie était belle et
aimée, parce que belle de justice par sa propre volonté en plus de l'être par
la volonté de Dieu, ce qui lui valut les noces divines. Et je t'ai également
dit que les apôtres méritèrent le chrême de la Pentecôte par leur obéissance
et leur prière qui les ont préparés à l'événement.
Pour mériter l'Amour, toute âme doit le désirer par sa propre volonté, et se
garder digne de lui par une obéissance et une prière infatigables. Sans cela,
la descente de l'Esprit Saint sur elle serait vaine car, une fois descendu,
il ne pourrait y faire sa demeure. L'Esprit Saint remonterait alors
promptement au ciel, laissant aridité, gel, ténèbres et silence là où il
aurait pu y avoir fécondité, chaleur, lumière et enseignements divins.
Mais si cela est valable pour tous les fidèles, ce l'est encore plus pour les
instruments. D'hommes, les apôtres furent transformés en voix de Dieu par
l'opération du Paraclet et par leur opération personnelle d'obéissance et de
prière. Ceux qui sont appelés à une mission spéciale – et tout appel est une
épreuve, non pas une élection sûre et immuable – sont transformés en
"voix" par l'opération de l'Amour et leur préparation personnelle
d'obéissance et de prière.
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137> Ne donnez jamais d'autre nom que ces deux-là
(obéissance et prière) aux "riens" qui deviennent instrument. C'est
leur dialogue avec Dieu, leur
obéissance aux commandements de Dieu qui font d'eux ce qu'ils sont. Et ne
donnez pas d'autre nom que ceux de désobéissance et d'orgueil aux chutes de
ceux qui paraissaient des justes et qui n'en avaient que la façade
extérieure.
Moi, mon âme, je ne cesserai jamais, au risque de te paraître monotone, de
t'exhorter à ces vertus – nécessaires à tous, mais absolument indispensables,
et dans une pleine mesure, à ceux qui sont élus pour des voies extraordinaires
– que sont une parfaite obéissance et une parfaite humilité, un esprit
d'union avec Dieu, c'est-à-dire une prière vécue et non pas des
prières marmonnées machinalement à des heures déterminées.
Avant-hier, au cours d'un enseignement intime, je t'ai expliqué comment même
ce que ton intelligence ne comprend pas, parce qu'elle n'est pas nourrie
de notions théologiques, opère en toi des transformations spirituelles
parce que l'âme, à l'insu de ton intellect lui-même qui ne peut la suivre par
ignorance de ces notions théologiques, absorbe le suc des leçons que tu
reçois et s'en nourrit. Ne te préoccupe pas si, comme tu le dis, ton cerveau
ne ressent que le son extérieur et incompréhensible d'un si grand nombre de
profondes leçons. Il y a une partie de toi, la meilleure, qui ne manque pas
de s'en nourrir, réellement. D'ailleurs, cela a davantage de valeur que si
toi, par ton intelligence, tu pouvais analyser et comprendre chaque mot, mais
que cette analyse restait une froide étude de l'intellect au lieu d'être le
pain et le feu de l'esprit.
Nombreux sont les savants, mais rares sont ceux qui unissent la science à la
justice. Pourquoi ? Parce qu'ils savent ce qu'est Dieu, mais ils ne
veulent pas faire descendre ce savoir du cerveau jusqu'à leur cœur et à leur
esprit ; ils ont beau être savants, ils ne sont pas justes et n'évoluent pas,
de créatures humaines qu'ils sont, vers l'état de créatures spirituelles. Ils
sont grands en orgueil mais pas en obéissance. Ils sont audacieux pour juger
mais pusillanimes en amour. Un flot de paroles s'écoule de leur bouche. Mais
elles descendent au lieu de monter, parce que ce ne sont que des mots, et
non des flèches d'amour lancées vers le ciel. L'oraison... Oh ! Je veux te
donner une comparaison de ce qu'est la véritable oraison.
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138> Pense
à une femme qui porte son fils en son sein. Le cœur du bébé ne fait
pas qu'un avec celui de sa mère ; ils sont distincts, séparés par des organes
et des membranes, on pourrait dire qu'ils sont indépendants. Néanmoins, à
chaque battement du cœur maternel correspond un battement du cœur du fils,
parce que c'est le même sang qui parcourt leurs veines. Voilà, il en est de
même de l'oraison quand elle est véritable. C'est une action qui unit les
battements d'amour de la créature aux battements d'amour de son Dieu, comme
si un même sang d'amour imprimait le mouvement aux deux cœurs distincts, en
en synchronisant leur mouvement. Mais si l'enfant naît, ses pulsations
deviennent indépendantes parce qu'il est désormais séparé de sa mère,
hors d'elle.
Il en va de même si le croyant se sépare de Dieu et sort de lui ; ses
mouvements ne sont alors plus synchronisés avec ceux de Dieu. L'enfant sort
par une loi naturelle et bonne. Le croyant sort par choix volontaire et
mauvais. Toi, ne sors jamais de l'amoureux sein de l'Amour.
Reprenons notre réflexion sur
cette manifestation de l'Esprit Paraclet.
Je t'ai dit au début que nous allions considérer la Pentecôte sous les
aspects de sa préparation, de sa forme et de ses effets. La préparation peut
être divisée en trois temps. Les temps reculés, les temps proches et les
temps immédiats.
La lointaine préparation de la Pentecôte est celle qui était dans la pensée
de Dieu depuis qu'il a décrété la venue du Verbe sur terre pour racheter et
pour apporter la religion sainte et parfaite qui tire son nom du Christ.
C'est une très lointaine préparation, mais toujours présente et toujours plus
vive à mesure que les temps avançaient vers la limite du temps du châtiment,
donc aussi vers le seuil du temps du pardon. L'amour se trouvant dans toutes
les actions de Dieu, ce n'est pas une erreur de dire que cette préparation
remonte au commencement des temps.
La proche préparation est celle du temps qui va de l'Annonciation à
l'immolation.
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139> L'immédiate
est celle qui va de la Résurrection à la Pentecôte. C'est pour cela, petit
Jean, que notre Seigneur Jésus t'a immédiatement transportée dans ce temps de
la Pentecôte, à peine le jour de Pâques terminé. Il te traite comme l'un de
ses disciples bien-aimés, mon âme.
Une fois ressuscité d'entre les morts, il leur donna encore un enseignement,
et cela, pour ainsi dire, dans une ségrégation d'amour : lui et eux, eux et
le Seigneur, sans plus de prédications aux foules ni de miracles
retentissants, afin d'éviter la distraction des foules environnantes lors de
son ultime enseignement. Il les conduisit ainsi jusqu'au moment de son
ascension, les laissant avec l'ordre de rester recueillis en oraison et sous
la direction de la très sainte Vierge Marie, dans l'attente du Paraclet.
Il agit de même envers toi. Ainsi, il te met dans l'ambiance de la
Pentecôte dès que cesse le dernier son des cloches de Pâques. Ce n'est pas
que cinquante jours soient de trop pour se préparer à recevoir l'Esprit, le
Feu qui ne consume que ce qui est inutile, mais, pour l'accueillir comme
celui qui sanctifie et qui agit, il faut un esprit préparé comme un cénacle,
silencieux, isolé, parfumé d'obéissance et d'oraison.
Alors la Pentecôte ouvre ses sept fleuves et donne lumière et virilité spirituelle,
nourrit l'âme de ses dons et la rend apte à accueillir les fruits septiformes
dont l'Esprit dépose la semence que la bonne volonté de l'âme porte à
maturité. C'est certain, l'Esprit Saint ne peut être accueilli là où il n'y a
pas de place pour son abondance ni de dignité pour sa nature, là où ses enseignements
demeureraient vains parce que la rumeur du monde trouble et oppresse, où
l'obéissance fait défaut, où l'oraison est ostentatoire, là enfin où
résistent d'autres saveurs qui ne sont pas la fleur de la farine ni le miel
de la roche - comme le dit la messe de demain, c'est-à-dire les choses
simples et suaves, vraiment nutritives comme les choses qui viennent de Dieu
et que dans sa bonté il donne à ses fils - mais qui sont les saveurs piquantes
et corrompues du monde, de la chair et du démon.
Maria, mon âme, jusqu'à maintenant la
mortification qui t'a opprimée t'a maintenue en condition d'humilité et de
fidélité à Dieu, et c'est pourquoi l'Esprit t'a aimée et s'est communiqué
avec grande grâce. À présent, fortifie ton cœur afin que la fumée des
louanges ne le dévoie pas pour faire de toi une cymbale sonore, mais sans
les lumineuses paroles de la Sagesse.
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140> Fortifie
ton cœur. Je te le dis : "Fortifie". Je t'avais dit :
"Ne crains pas" quand les hommes te livraient bataille et que tu étais seule avec ton Dieu et ton ange gardien.
Maintenant je te dis : "Fortifie-toi". Reste inébranlable sous les
louanges comme tu le fus sous les blâmes. Ce n'est pas toi, mais Dieu seul,
qui est digne de louange.
Élève ton cœur et établis-le en lui ; quels que soient les
hommages qui te sont rendus, adresse-les à celui qui en est digne. Tu as été
et tu es l'intermédiaire qui porte la parole de Dieu aux hommes. Sois
l'intermédiaire qui porte la louange des hommes à l'auteur du prodige. Sois
un humble intermédiaire pour être un intermédiaire utile, et un juste
intermédiaire pour être un saint intermédiaire. Tu as toujours surmonté les
batailles de la souffrance et chacune t'a toujours rendue davantage fille de
Dieu. Saches surmonter les batailles de la satisfaction. Sois juste, humble et
fidèle.
Qu'il soit rendu grâces à Dieu, ma Maria, rendons-lui grâces à la fin de
cette explication particulière qui est ce que le Seigneur voulait que je te
dise.
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