Liste des sigles.
SS. Jean-Paul II et Maria Valtorta.
Les grands auteurs.
Les encycliques.
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Deuxième
Section.
La prière du Seigneur : "Notre Père !"
2759
"Un
jour, quelque part, Jésus priait. Quand il eut fini, l’un de ses disciples
lui demanda : ‘Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean l’a appris à
ses disciples’ " (Luc 11, 1). C’est en réponse à cette demande que le
Seigneur confie à ses disciples et à son Église la prière chrétienne
fondamentale. S. Luc en donne un texte bref (de cinq demandes : cf. Luc
11, 2-4), S. Matthieu une version plus développée (de sept demandes :
cf. Matthieu 6, 9-13). C’est le texte de S. Matthieu que la tradition
liturgique de l’Église a retenu (Matthieu 6, 9-13).
Notre Père qui es aux cieux,
que ton Nom soit sanctifié,
que ton Règne vienne,
que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour,
pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont
offensés,
et ne nous soumets pas à la tentation,
mais délivre-nous du Mal.
2760
Très tôt,
l’usage liturgique a conclu la Prière du Seigneur par une doxologie. Dans la Didaché (8, 2) : " Car c’est à toi
qu’appartiennent la puissance et la gloire dans les siècles ". Les
Constitutions apostoliques (7, 24, 1) ajoutent en commençant :
" le règne ", et c’est la formule retenue de nos jours
dans la prière œcuménique. La tradition byzantine ajoute après la gloire
" Père, Fils et Saint Esprit ". Le missel romain
développe la dernière demande (cf. Embolisme) dans la perspective explicite
de " l’attente de la bienheureuse espérance " (Tt 2, 13)
et de l’Avènement de Jésus-Christ notre Seigneur, puis vient l’acclamation de
l’assemblée ou la reprise de la doxologie des Constitutions apostoliques.
Article 1
"Le résumé de tout l’Évangile"
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2761
"L’Oraison dominicale est vraiment le résumé de tout
l’Évangile " (Tertullien, or. 1). " Quand le Seigneur
nous eut légué cette formule de prière, il ajouta : ‘Demandez et vous recevrez’
(Luc 11, 9). Chacun peut donc adresser au ciel diverses prières selon ses
besoins, mais en commençant toujours par la Prière du Seigneur qui demeure le
prière fondamentale " (Tertullien, or. 10).
I. Au centre des Écritures.
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2762
Après avoir montré comment les Psaumes sont l’aliment principal de la prière
chrétienne et confluent dans les demandes du Notre Père, S. Augustin
conclut :
Parcourez toutes les prières qui
sont dans les Écritures, et je ne crois pas que vous puissiez y trouver
quelque chose qui ne soit pas compris dans l’Oraison dominicale (ep. 130, 12, 22 : PL 33, 502).
2763
Toutes les
Écritures (la Loi, les Prophètes et les Psaumes) sont accomplies dans le
Christ (cf. Luc 24, 44). L’Évangile est cette " Bonne
nouvelle ". Sa première annonce est résumée par S. Matthieu dans le
Sermon sur la montagne (cf. Matthieu 5-7). Or la prière à Notre Père est au
centre de cette annonce. C’est dans ce contexte que s’éclaire chaque demande
de la prière léguée par le Seigneur :
L’Oraison dominicale est la plus
parfaite des prières ... En elle non seulement nous demandons tout ce que
nous pouvons désirer avec rectitude, mais encore selon l’ordre où il convient
de le désirer. De sorte que cette prière non seulement nous enseigne à
demander, mais elle forme aussi toute notre affectivité (S. Thomas d’A., s.
th. 2-2, 83, 9).
2764
Le Sermon sur la montagne est doctrine de vie, l’Oraison dominicale est
prière, mais dans l’un et l’autre l’Esprit du Seigneur donne forme nouvelle à
nos désirs, ces mouvements intérieurs qui animent notre vie. Jésus nous
enseigne cette vie nouvelle par ses paroles et il nous apprend à la demander
par la prière. De la rectitude de notre prière dépendra celle de notre vie en
Lui.
II. "La prière du Seigneur".
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2765
L’expression traditionnelle " Oraison dominicale "
[c’est-à-dire " prière du Seigneur "] signifie que la
prière à Notre Père nous est enseignée et donnée par le Seigneur Jésus. Cette
prière qui nous vient de Jésus est véritablement unique : elle est
" du Seigneur ". D’une part, en effet, par les paroles de
cette prière, le Fils unique nous donne les paroles que le Père lui a données
(cf. Jean 17, 7) : il est le Maître de notre prière. D’autre part, Verbe
incarné, il connaît dans son cœur d’homme les besoins de ses frères et sœurs
humains, et il nous les révèle : il est le Modèle de notre prière.
2766
Mais Jésus ne nous laisse pas une formule à répéter machinalement (cf.
Matthieu 6, 7 ; 1 R 18, 26-29). Comme pour toute prière vocale, c’est
par la Parole de Dieu que l’Esprit Saint apprend aux enfants de Dieu à prier
leur Père. Jésus nous donne non seulement les paroles de notre prière
filiale, il nous donne en même temps l’Esprit par qui elles deviennent en
nous " esprit et vie " (Jean 6, 63). Plus encore :
la preuve et la possibilité de notre prière filiale c’est que le Père
" a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie :
‘Abba, Père !’ " (Ga 4, 6). Puisque notre prière interprète
nos désirs auprès de Dieu, c’est encore " Celui qui sonde les
cœurs ", le Père, qui " sait le désir de l’Esprit et que
son intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu "
(Romains 8, 27). La prière à Notre Père s’insère dans la mission mystérieuse
du Fils et de l’Esprit.
III. La prière de l’Église.
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2767
Ce don
indissociable des paroles du Seigneur et de l’Esprit Saint qui leur donne vie
dans le cœur des croyants a été reçu et vécu par l’Église dès les origines.
Les premières communautés prient la Prière du Seigneur " trois fois
par jour " (Didaché 8, 3), à la place des
" Dix-huit bénédictions " en usage dans la piété juive.
2768
Selon la Tradition apostolique, la Prière du Seigneur est essentiellement
enracinée dans la prière liturgique.
Le Seigneur nous apprend à faire nos prières en commun pour tous nos frères.
Car il ne dit pas " mon Père " qui es
dans les cieux, mais " notre " Père, afin que notre
prière soit, d’une seule âme, pour tout le Corps de l’Église (S. Jean
Chrysostome, hom. in Matthieu. 19, 4 : PG 57,
278D).
Dans toutes les traditions liturgiques, la Prière du Seigneur est une partie
intégrante des grandes Heures de l’Office divin. Mais c’est surtout dans les
trois sacrements de l’initiation chrétienne que son caractère ecclésial
apparaît à l’évidence :
2769
Dans le Baptême et la Confirmation, la remise (traditio) de la Prière du Seigneur signifie la
nouvelle naissance à la vie divine. Puisque la prière chrétienne est de
parler à Dieu avec la Parole même de Dieu, ceux qui sont
" engendrés de nouveau par la Parole du Dieu vivant " (1
P 1, 23) apprennent à invoquer leur Père par la seule Parole qu’il exauce
toujours. Et ils le peuvent désormais, car le Sceau de l’Onction de l’Esprit
Saint est posé, indélébile, sur leur cœur, leurs oreilles, leurs lèvres, sur
tout leur être filial. C’est pourquoi la plupart des commentaires
patristiques du Notre Père sont adressés aux catéchumènes et aux néophytes.
Quand l’Église prie la Prière du Seigneur, c’est toujours le Peuple des
"nouveaux-nés" qui prie et obtient
miséricorde (cf. 1 P 2, 1-10).
2770
Dans la Liturgie eucharistique la Prière du Seigneur apparaît
comme la prière de toute l’Église. Là se révèle son sens plénier et son
efficacité. Située entre l’Anaphore (Prière eucharistique) et la liturgie de
la Communion, elle récapitule d’une part toutes les demandes et intercessions
exprimées dans le mouvement de l’épiclèse, et, d’autre part, elle frappe à la
porte du Festin du Royaume que la Communion sacramentelle va anticiper.
2771
Dans l’Eucharistie, la Prière du Seigneur manifeste aussi le
caractère eschatologique de ses demandes. Elle est la prière propre
aux " derniers temps ", des temps du salut qui ont
commencé avec l’effusion de l’Esprit Saint et qui s’achèveront avec le Retour
du Seigneur. Les demandes à Notre Père, à la différence des prières de
l’Ancienne Alliance, s’appuient sur le mystère du salut déjà réalisé, une
fois pour toutes, dans le Christ crucifié et ressuscité.
2772
De cette foi inébranlable jaillit l’espérance qui soulève chacune
des sept demandes. Celles-ci expriment les gémissements du temps présent, ce
temps de la patience et de l’attente durant lequel " ce que nous
serons n’est pas encore manifesté " (1 Jean 3, 2 ; cf. Col 3,
4). L’Eucharistie et le Pater sont tendus vers la venue du Seigneur,
" jusqu’à ce qu’il vienne ! " (1 Co 11, 26).
En bref.
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2773
En
réponse à la demande de ses disciples (" Seigneur, apprends-nous à
prier " : Luc 11, 1), Jésus leur confie la prière chrétienne
fondamentale du "Notre Père".
2774
"L’Oraison dominicale est vraiment le résumé de tout
l’Evangile " (Tertullien, or. 1), " la plus parfaite des
prières " (S. Thomas d’A., s. th. 2-2, 83, 9). Elle est au centre
des Écritures.
2775
Elle est appelée " Oraison dominicale " parce qu’elle
nous vient du Seigneur Jésus, Maître et modèle de notre prière.
2776
L’Oraison dominicale est la prière de l’Église par excellence. Elle fait partie
intégrante des grandes heures de l’Office divin et des sacrements de
l’initiation chrétienne : Baptême, Confirmation et Eucharistie. Intégrée
à l’Eucharistie elle manifeste le caractère
" eschatologique " de ses demandes, dans l’espérance du
Seigneur, " jusqu’à ce qu’il vienne " (1 Co 11, 26).
Article 2
"Notre Père qui es aux cieux".
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I. "Oser nous approcher en toute
confiance".
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2777
Dans la liturgie romaine, l’assemblée eucharistique est invitée à prier Notre
Père avec une audace filiale ; les liturgies orientales utilisent et
développent des expressions analogues : " Oser en toute
assurance ", " Rends-nous dignes de ". Devant
le Buisson ardent, il fut dit à Moïse : " N’approche pas. Ote
tes sandales " (Ex 3, 5). Ce seuil de la Sainteté divine, Jésus
seul pouvait le franchir, lui qui, " ayant accompli la purification
des péchés " (Hébreux 1, 3), nous introduit devant la Face du
Père : " Nous voici, moi et mes enfants que tu m’as
donnés " (Hébreux 2, 13) :
La conscience que nous avons de
notre situation d’esclaves nous ferait rentrer sous terre, notre condition
terrestre se fondrait en poussière, si l’autorité de notre Père lui-même et l’Esprit
de son Fils ne nous poussaient à proférer ce cri : ‘Abba, Père !’
(Romains 8, 15) ... Quand la faiblesse d’un mortel oserait-elle appeler Dieu
son Père, sinon seulement lorsque l’intime de l’homme est animé par la
Puissance d’en haut ? (S. Pierre Chrysologue, serm.
71 : PL 52, 401CD).
2778
Cette puissance de l’Esprit qui nous introduit à la Prière du Seigneur est
exprimée dans les liturgies d’Orient et d’Occident par la belle expression
typiquement chrétienne : parrhésia,
simplicité sans détour, confiance filiale, joyeuse assurance, humble audace,
certitude d’être aimé (cf. Éphésiens 3,12 ; Hébreux 3,6 ;
4,16 ; 10,19 ; 1Jean 2,28 ; 3,21 ; 5,14).
II. "Père !"
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2779
Avant de faire nôtre ce premier élan de la Prière du Seigneur, il n’est pas
inutile de purifier humblement notre cœur de certaines fausses images de
" ce monde-ci ". L’humilité
nous fait reconnaître que " nul ne connaît le Père, si ce n’est le
Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler ", c’est-à-dire
" aux tout petits " (Matthieu 11, 25-27). La purification
du cœur concerne les images paternelles ou maternelles, issues de notre
histoire personnelle et culturelle, et qui influencent notre relation à Dieu.
Dieu notre Père transcende les catégories du monde créé. Transposer sur lui,
ou contre lui, nos idées en ce domaine serait fabriquer des idoles, à adorer
ou à abattre. Prier le Père c’est entrer dans son mystère, tel qu’Il est, et
tel que le Fils nous l’a révélé :
L’expression Dieu le Père n’avait
jamais été révélée à personne. Lorsque Moïse lui-même demanda à Dieu qui il
était, il entendit un autre nom. A nous ce nom a été révélé dans le Fils, car
ce nom implique le nom nouveau de Père (Tertullien, or. 3).
2780
Nous
pouvons invoquer Dieu comme " Père " parce qu’il nous
est révélé par son Fils devenu homme et que son Esprit nous le fait
connaître. Ce que l’homme ne peut concevoir ni les puissances angéliques
entrevoir, la relation personnelle du Fils vers le Père (cf. Jean 1, 1),
voici que l’Esprit du Fils nous y fait participer, nous qui croyons que Jésus
est le Christ et sommes nés de Dieu (cf. 1 Jean 5, 1).
2781
Quand nous prions le Père, nous sommes en communion avec lui et
avec son Fils, Jésus-Christ (cf. 1 Jean 1, 3). C’est alors que nous le
connaissons et le reconnaissons dans un émerveillement toujours nouveau. La
première parole de la Prière du Seigneur est une bénédiction d’adoration,
avant d’être une imploration. Car c’est la Gloire de Dieu que nous le
reconnaissions comme " Père ", Dieu véritable. Nous lui
rendons grâce de nous avoir révélé son Nom, de nous avoir donné d’y croire et
d’être habités par sa Présence.
2782
Nous pouvons adorer le Père parce qu’il nous a fait renaître à sa Vie en
nous adoptant comme ses enfants dans son Fils unique : par le
Baptême, il nous incorpore au Corps de son Christ, et, par l’Onction de son
Esprit qui s’épanche de la Tête dans les membres, il fait de nous des
" christs " :
Dieu, en effet, qui nous a
prédestinés à l’adoption de fils, nous a rendus conformes au Corps glorieux
du Christ. Désormais donc, participants du Christ, vous êtes à juste titre
appelés " christs " (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 3, 1 : PG
33, 1088A).
L’homme nouveau, qui est rené et rendu à son Dieu
par la grâce, dit d’abord " Père ! ", parce qu’il
est devenu fils (S. Cyprien, Dom. orat. 9 : PL
4, 525A).
2783
C’est ainsi que, par la Prière du Seigneur, nous sommes révélés à
nous-mêmes en même temps que le Père nous est révélé (cf. Gaudium et spes 22, §1) :
O homme, tu n’osais pas lever ton visage vers le ciel, tu baissais les yeux
vers la terre, et soudain tu as reçu la grâce du Christ : tous tes
péchés t’ont été remis. De méchant serviteur tu es devenu un bon fils....
Lève donc les yeux vers le Père qui t’a racheté par son Fils et dis :
notre Père... Mais ne te réclame d’aucun privilège. Il n’est le Père, d’une
manière spéciale, que du Christ seul, tandis que nous, il nous a créés. Dis
donc toi aussi par grâce : notre Père, pour mériter d’être son fils (S.
Ambroise, sacr. 5, 19 : PL 16, 450C).
2784
Ce don gratuit de l’adoption exige de notre part une conversion
continuelle et une vie nouvelle. Prier notre Père doit développer en
nous deux dispositions fondamentales :
Le désir et la volonté de lui
ressembler. Créés à son image, c’est par grâce que la ressemblance nous
est rendue et nous avons à y répondre.
Il faut nous souvenir, quand nous nommons Dieu ‘notre Père’ que nous devons
nous comporter en fils de Dieu (S. Cyprien, Dom. orat.
11 : PL 4, 526B).
Vous ne pouvez appeler votre Père le Dieu de toute bonté si vous gardez un
cœur cruel et inhumain ; car dans ce cas vous n’avez plus en vous la
marque de la bonté du Père céleste (S. Jean Chrysostome, hom.
in Matthieu. 7, 14 : PG 51, 44B).
Il faut contempler sans cesse la beauté du Père et en imprégner notre âme (S.
Grégoire de Nysse, or. dom. 2 : PG 44, 1148B).
2785
Un cœur
humble et confiant qui nous fait " retourner à l’état des
enfants " (Matthieu 18, 3) : car c’est aux " tout
petits " que le Père se révèle (Matthieu 11, 25) :
C’est un regard sur Dieu seul, un
grand feu d’amour. L’âme s’y fond et s’abîme en la sainte dilection, et
s’entretient avec Dieu comme avec son propre Père, très familièrement, dans
une tendresse de piété toute particulière (S. Jean Cassien, coll. 9,
18 : PL 49, 788C).
Notre Père : ce nom suscite en nous, tout à la fois, l’amour, l’affection
dans la prière, ... et aussi l’espérance d’obtenir ce que nous allons
demander ... Que peut-il en effet refuser à la prière de ses enfants, quand
il leur a déjà préalablement permis d’être ses enfants ? (S. Augustin, serm. Dom. 2, 4, 16 : PL 34, 1276).
III. "Notre"
Père.
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2786
"Notre " Père concerne Dieu. Cet adjectif, de notre part,
n’exprime pas une possession, mais une relation toute nouvelle à Dieu.
2787
Quand nous disons "notre" Père, nous reconnaissons d’abord que
toutes ses Promesses d’amour annoncées par les Prophètes sont accomplies dans
la nouvelle et éternelle Alliance en son Christ : nous sommes
devenus " son " Peuple et il est désormais
" notre " Dieu. Cette relation nouvelle est une
appartenance mutuelle donnée gratuitement : c’est par l’amour et la
fidélité (cf. Os 2, 21-22 ; 6, 1-6) que nous avons à répondre à
" la grâce et à la vérité " qui nous sont données en
Jésus-Christ (Jean 1, 17).
2788
Puisque la Prière du Seigneur est celle de son Peuple dans les
" derniers temps ", ce " notre "
exprime aussi la certitude de notre espérance en l’ultime promesse de
Dieu : dans la Jérusalem nouvelle il dira au vainqueur : "Je
serai son Dieu et lui sera mon fils" (Apocalypse 21, 7).
2789
En priant " notre " Père, c’est au Père de notre
Seigneur Jésus Christ que nous nous adressons personnellement. Nous ne
divisons pas la divinité, puisque le Père en est " la source et
l’origine ", mais nous confessons par là qu’éternellement le Fils
est engendré par Lui et que de Lui procède l’Esprit Saint. Nous ne confondons
pas non plus les Personnes, puisque nous confessons que notre communion est
avec le Père et son Fils, Jésus Christ, dans leur unique Esprit Saint. La
Trinité Sainte est consubstantielle et indivisible. Quand nous prions le
Père, nous l’adorons et le glorifions avec le Fils et le Saint-Esprit.
2790
Grammaticalement, "notre" qualifie une réalité commune à
plusieurs. Il n’y a qu’un seul Dieu et il est reconnu Père par ceux qui, par
la foi à son Fils unique, sont renés de Lui par
l’eau et par l’Esprit (cf. 1 Jean 5, 1 ; Jean 3, 5). L’Église est
cette nouvelle Communion de Dieu et des hommes : unie au Fils unique
devenu " l’aîné d’une multitude de frères " (Romains 8,
29), elle est en Communion avec un seul et même Père, dans un seul et même
Esprit Saint (cf. Éphésiens 4, 4-6). En priant " notre "
Père, chaque baptisé prie dans cette Communion : " La
multitude des croyants n’avait qu’un seul cœur et qu’une seule
âme " (Ac 4, 32).
2791
C’est
pourquoi, malgré les divisions des chrétiens, la prière à "notre"
Père demeure le bien commun et un appel urgent pour tous les baptisés. En
communion par la foi au Christ et par le Baptême, ils doivent participer à la
prière de Jésus pour l’unité de ses disciples (cf. Unitatis redintegratio 8 ; 22).
2792
Enfin, si nous prions en vérité " Notre Père ", nous
sortons de l’individualisme, car l’Amour que nous accueillons nous en libère.
Le " notre " du début de la Prière du Seigneur, comme le
" nous " des quatre dernières demandes, n’est exclusif de
personne. Pour qu’il soit dit en vérité (cf. Matthieu 5, 23-24 ; 6,
14-16), nos divisions et nos oppositions doivent être surmontées.
2793
Les baptisés ne peuvent prier " notre " Père sans porter
auprès de Lui tous ceux pour qui il a donné son Fils bien-aimé. L’amour de
Dieu est sans frontière, notre prière doit l’être aussi (cf. NA 5). Prier
" notre " Père nous ouvre aux dimensions de Son amour manifesté
dans le Christ : prier avec et pour tous les hommes qui ne Le
connaissent pas encore, afin qu’ils soient " rassemblés dans
l’unité " (Jean 11, 52). Ce souci divin de tous les hommes et de
toute la création a animé tous les grands priants : il doit dilater
notre prière en largeur d’amour lorsque nous osons dire
" notre " Père.
IV. "Qui es aux
cieux".
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2794
Cette expression biblique ne signifie pas un lieu ["l’espace"], mais
une manière d’être ; non pas l’éloignement de Dieu mais sa majesté.
Notre Père n’est pas "ailleurs", il est "au-delà de tout"
ce que nous pouvons concevoir de sa Sainteté. C’est parce qu’il est trois
fois Saint, qu’il est tout proche du cœur humble et contrit :
C’est avec raison que ces paroles
‘Notre Père qui es aux cieux’ s’entendent du cœur des justes, où Dieu habite
comme dans son temple. Par là aussi celui qui prie désirera voir résider en
lui Celui qu’il invoque (S. Augustin, serm. Dom. 2,
5, 17 : PL 34, 1277).
Les " cieux " pourraient bien être aussi ceux qui portent
l’image du monde céleste, et en qui Dieu habite et se promène (S. Cyrille de
Jérusalem, catech. myst.
5, 11 : PG 33, 1117B).
2795
Le
symbole des cieux nous renvoie au mystère de l’Alliance que nous vivons
lorsque nous prions notre Père. Il est aux cieux, c’est sa Demeure, la Maison
du Père est donc notre " patrie ". C’est de la terre de
l’Alliance que le péché nous a exilés (cf. Genèse 3) et c’est vers le Père,
vers le ciel que la conversion du cœur nous fait revenir (cf. Jr 3, 19 – 4,
1a ; Luc 15, 18. 21). Or c’est dans le Christ que le ciel et la terre
sont réconciliés (cf. Is 45, 8 ; Ps 85, 12), car le Fils " est
descendu du ciel ", seul, et il nous y fait remonter avec lui, par
sa Croix, sa Résurrection et son Ascension (cf. Jean 12, 32 ; 14,
2-3 ; 16, 28 ; 20, 17 ; Éphésiens 4, 9-10 ; Hébreux 1,
3 ; 2, 13).
2796
Quand l’Église prie "notre Père qui es aux cieux", elle
professe que nous sommes le Peuple de Dieu déjà " assis aux cieux
dans le Christ Jésus " (Éphésiens 2, 6), " cachés avec le
Christ en Dieu " (Col 3, 3), et, en même temps,
" gémissant dans cet état, ardemment désireux de revêtir,
par-dessus l’autre notre habitation céleste " (2 Co 5, 2 ; cf.
Ph 3, 20 ; Hébreux 13, 14) :
Les chrétiens sont dans la chair,
mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur terre, mais sont
citoyens du ciel (Epître à Diognète 5, 8-9).
En bref.
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2797
La confiance simple et fidèle, l’assurance humble et joyeuse sont les
dispositions qui conviennent à celui qui prie le "Notre Père".
2798
Nous pouvons invoquer Dieu comme " Père " parce que le
Fils de Dieu fait homme nous l’a révélé, en qui, par le Baptême, nous sommes
incorporés et adoptés en fils de Dieu.
2799
La prière du Seigneur nous met en communion avec le Père et avec son Fils,
Jésus Christ. Elle nous révèle en même temps à nous-mêmes (cf. Gaudium et spes 22, § 1).
2800
Prier notre Père doit développer en nous la volonté de lui ressembler, ainsi
qu’un cœur humble et confiant.
2801
En disant "Notre" Père, nous invoquons la nouvelle Alliance en
Jésus Christ, la communion avec la Sainte Trinité et la charité divine qui
s’étend par l’Église aux dimensions du monde.
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