SS. Jean-Paul II et Maria Valtorta.
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Chapitre premier : Je
crois en Dieu le Père.
Paragraphe 5 - Le ciel et la terre.
325
Le Symbole des apôtres professe que Dieu est "le Créateur du ciel et de
la terre", et le Symbole de Nicée-Constantinople explicite :
" ... de l’univers visible et invisible"
326
Dans l’Écriture Sainte, l’expression "ciel et terre"
signifie : tout ce qui existe, la création toute entière. Elle indique
aussi le lien, à l’intérieur de la création, qui à la fois unit et distingue
ciel et terre : "La terre", c’est le monde des hommes (cf.
Psaume 115, 16) "Le ciel" ou "les cieux" peut désigner le
firmament (cf. Psaume 19, 2), mais aussi le "lieu " propre de
Dieu : "notre Père aux cieux " (Matthieu 5, 16 ; cf.
Psaume 115, 16) et, par conséquent, aussi le "ciel " qui est
la gloire eschatologique. Enfin, le mot "ciel " indique le
"lieu " des créatures spirituelles – les anges – qui entourent
Dieu.
327
La profession de foi du quatrième Concile du Latran affirme que Dieu
"a tout ensemble, dès le commencement du temps, créé de rien l’une et
l’autre créature, la spirituelle et la corporelle, c’est-à-dire les anges et
le monde terrestre ; puis la créature humaine qui tient des deux,
composée qu’elle est d’esprit et de corps " (Denzinger-Schönmetzer
800 ; cf. Denzinger-Schönmetzer 3002 et Credo du Peuple de Dieu (SPF)
8).
I. Les Anges.
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L’existence des anges – une vérité de foi.
328
L’existence des êtres spirituels, non corporels, que l’Écriture Sainte nomme
habituellement anges, est une vérité de foi. Le témoignage de l’Écriture est
aussi net que l’unanimité de la Tradition.
Qui sont-ils ?
329
Saint Augustin dit à leur sujet : "‘Ange’ désigne la fonction, non
pas la nature. Tu demandes comment s’appelle cette nature ? – Esprit. Tu
demandes la fonction ? – Ange ; d’après ce qu’il est, c’est un
esprit, d’après ce qu’il fait, c’est un ange " (Psal. 103, 1, 15).
De tout leur être, les anges sont serviteurs et messagers de Dieu.
Parce qu’ils contemplent "constamment la face de mon Père qui est aux
cieux " (Matthieu 18, 10), ils sont "les ouvriers de sa
parole, attentifs au son de sa parole " (Psaume 103, 20).
330
En tant que créatures purement spirituelles, ils ont intelligence et
volonté : ils sont des créatures personnelles (cf. Pie XII :
Denzinger-Schönmetzer 3801) et immortelles (cf. Luc 20, 36). Ils dépassent en
perfection toutes les créatures visibles. L’éclat de leur gloire en témoigne
(cf. Deutéronome 10, 9-12).
Le Christ "avec tous ses anges"
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331
Le Christ est le centre du monde angélique. Ce sont ses anges à Lui :
"Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire avec tous ses anges
..." (Matthieu 25, 31). Ils sont à Lui parce que créés par et pour
lui : "Car c’est en lui qu’ont été créées toutes choses, dans les
cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles : trônes, seigneuries,
principautés, puissances ; tout a été créé par lui et pour lui"
(Col 1, 16). Ils sont à Lui plus encore parce qu’Il les a faits messagers de
son dessein de salut : "Est-ce que tous ne sont pas des esprits
chargés d’un ministère, envoyés en service pour ceux qui doivent hériter le
salut ? " (He 1, 14).
332
Ils sont là, dès la création (cf. Job 38, 7, où les anges sont appelés
"fils de Dieu ") et tout au long de l’histoire du salut,
annonçant de loin ou de près ce salut et servant le dessein divin de sa
réalisation : ils ferment le paradis terrestre (cf. Genèse 3, 24),
protègent Lot (cf. Genèse 19), sauvent Agar et son enfant (cf. Genèse 21,
17), arrêtent la main d’Abraham (cf. Genèse 22, 11), la loi est communiquée
par leur ministère (cf. Actes 7, 53), ils conduisent le Peuple de Dieu (cf.
Ex 23, 20-23), ils annoncent naissances (cf. Juges 13) et vocations (cf. Juges 6, 11-24 ; Isaïe 6, 6), ils assistent
les prophètes (cf. 1 R 19, 5), pour ne citer que quelques exemples. Enfin,
c’est l’ange Gabriel qui annonce la naissance du Précurseur et celle de Jésus
lui-même (cf. Luc 1, 11. 26).
333
De l’Incarnation à l’Ascension, la vie du Verbe incarné est entourée de
l’adoration et du service des anges. Lorsque Dieu "introduit le
Premier-né dans le monde, il dit : ‘Que tous les anges de Dieu
l’adorent’" (He 1, 6). Leur chant de louange à la naissance du Christ
n’a cessé de résonner dans la louange de l’Église : "Gloire à Dieu
..." (Luc 2, 14). Ils protègent l’enfance de Jésus (cf. Matthieu 1,
20 ; 2, 13. 19), servent Jésus au désert (cf. Marc 1, 12 ; Matthieu
4, 11), le réconfortent dans l’agonie (cf. Luc 22, 43), alors qu’il aurait pu
être sauvé par eux de la main des ennemis (cf. Matthieu 26, 53) comme jadis
Israël (cf. 2 M 10, 29-30 ; 11, 8). Ce sont encore les anges qui
"évangélisent" (Luc 2, 10) en annonçant la Bonne Nouvelle de
l’Incarnation (cf. Luc 2, 8-14), et de la Résurrection (cf. Marc 16, 5-7) du
Christ. Ils seront là au retour du Christ qu’ils annoncent (cf. Actes 1,
10-11), au service de son jugement (cf. Matthieu 13, 41 ; 24, 31 ;
Luc 12, 8-9).
Les anges dans la vie de l’Église.
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334
D’ici là toute la vie de l’Église bénéficie de l’aide mystérieuse et
puissante des anges (cf. Actes 5, 18-20 ; 8, 26-29 ; 10, 3-8 ;
12, 6-11 ; 27, 23-25).
335
Dans sa liturgie, l’Église se joint aux anges pour adorer le Dieu trois fois
saint ; elle invoque leur assistance (ainsi dans In Paradisum
deducant te angeli... de la Liturgie des défunts [OEx 50], ou encore dans l’" Hymne chérubinique " de la Liturgie byzantine [(Liturgie de Saint Jean Chrysostome]), elle fête plus particulièrement la mémoire de certains anges (Saint Michel, Saint Gabriel, Saint Raphaël, les anges gardiens).>
336
Du début (de l’existence) (cf. Matthieu 18, 10) au trépas (cf. Luc 16, 22),
la vie humaine est entourée de leur garde (cf. Psaume 34, 8 ; 91, 10-13)
et de leur intercession (cf. Job 33, 23-24 ; Za 1, 12 ; Tb 12, 12).
"Chaque fidèle a à ses côtés un ange comme protecteur et pasteur pour le
conduire à la vie " (Saint Basile, Eun. 3, 1 : PG 29, 656B).
Dès ici-bas, la vie chrétienne participe, dans la foi, à la société
bienheureuse des anges et des hommes, unis en Dieu.
II. Le Monde visible.
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page.
337
C’est Dieu lui-même qui a créé le monde visible dans toute sa richesse, sa
diversité et son ordre. L’Écriture présente l’œuvre du Créateur
symboliquement comme une suite de six jours "de travail "
divin qui s’achèvent sur le "repos "
du septième jour (Genèse 1, 1 – 2, 4). Le texte sacré enseigne, au sujet de
la création, des vérités révélées par Dieu pour notre salut (cf. DV 11) qui
permettent de "reconnaître la nature profonde de la création, sa valeur
et sa finalité qui est la gloire de Dieu " (Lumen Gentium 36) :
338
Il n’existe rien qui ne doive son existence à Dieu créateur. Le monde a
commencé quand il a été tiré du néant par la parole de Dieu ; tous les
êtres existants, toute la nature, toute l’histoire humaine s’enracinent en
cet événement primordial : c’est la genèse même par laquelle le monde
est constitué, et le temps commencé (cf. Saint Augustin, Gen. Man. 1, 2,
4 : PL 35, 175).
339
Chaque créature possède sa bonté et sa perfection propres. Pour chacune
des œuvres des "six jours" il est dit : "Et Dieu vit que
cela était bon" "C’est en vertu de la création même que toutes les
choses sont établies selon leur consistance, leur vérité, leur excellence
propre avec leur ordonnance et leurs lois spécifiques " (Gaudium et
spes 36, § 2). Les différentes créatures, voulues en leur être propre,
reflètent, chacune à sa façon, un rayon de la sagesse et de
la bonté infinies de Dieu. C’est pour cela que l’homme doit respecter
la bonté propre de chaque créature pour éviter un usage désordonné des
choses, qui méprise le Créateur et entraîne des conséquences néfastes pour
les hommes et pour leur ambiance.
340
L’interdépendance des créatures est voulue par Dieu. Le soleil et la
lune, le cèdre et la petite fleur, l’aigle et le moineau : les
innombrables diversités et inégalités signifient qu’aucune créature ne se
suffit à elle-même, qu’elles n’existent qu’en dépendance les unes des autres,
pour se compléter mutuellement, au service les unes des autres.
341
La beauté de l’univers : L’ordre et l’harmonie du monde créé
résultent de la diversité des êtres et des relations qui existent entre eux.
L’homme les découvre progressivement comme lois de la nature. Ils font
l’admiration des savants. La beauté de la création reflète l’infinie beauté
du Créateur. Elle doit inspirer le respect et la soumission de l’intelligence
de l’homme et de sa volonté.
342
La hiérarchie des créatures est exprimée par l’ordre des "six
jours ", qui va du moins parfait au plus parfait. Dieu aime toutes
ses créatures (cf. Psaume 145, 9), il prend soin de chacune, même des
passereaux. Néanmoins, Jésus dit : "Vous valez mieux qu’une
multitude de passereaux " (Luc 12, 6-7), ou encore : "Un
homme vaut plus qu’une brebis " (Matthieu 12, 12).
343
L’homme est le sommet de l’œuvre de la création. Le récit inspiré
l’exprime en distinguant nettement la création de l’homme de celle des autres
créatures (cf. Genèse 1, 26).
344
Il existe une solidarité entre toutes les créatures du fait qu’elles
ont toutes le même Créateur, et que toutes sont ordonnées à sa gloire :
Loué sois-tu, Seigneur, dans toutes tes
créatures,
spécialement messire le frère Soleil,
par qui tu nous donnes le jour la lumière ;
il est beau, rayonnant d’une grande splendeur,
et de toi, le Très-Haut, il nous offre le symbole. ...
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur Eau,
qui est très utile et très humble,
précieuse et chaste. ...
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre mère la Terre
qui nous porte et nous nourrit,
qui produit la diversité des fruits
avec les fleurs diaprées et les herbes. ...
Louez et bénissez mon Seigneur,
rendez-lui grâce et servez-le
en toute humilité.
(Saint François d’Assise, cantique)
345
Le Sabbat – fin de l’œuvre des "six jours" Le texte sacré dit que
"Dieu conclut au septième jour l’ouvrage qu’Il avait fait" et
qu’ainsi "le ciel et la terre furent achevés", et que Dieu, au
septième jour, "chôma" et qu’Il sanctifia et bénit ce jour (Genèse
2, 1-3). Ces paroles inspirées sont riches en enseignements salutaires :
346
Dans la création Dieu a posé un fondement et des lois qui demeurent
stables (cf. He 4, 3-4), sur lesquels le croyant pourra s’appuyer avec
confiance, et qui lui seront le signe et le gage de la fidélité inébranlable
de l’alliance de Dieu (cf. Jérémie 31, 35-37 ; 33, 19-26). De son côté,
l’homme devra rester fidèle à ce fondement et respecter les lois que le
Créateur y a inscrites.
347
La création est faite en vue du Sabbat et donc du culte et de l’adoration de
Dieu. Le culte est inscrit dans l’ordre de la création (cf. Genèse 1, 14).
"Ne rien préférer au culte de Dieu", dit la règle de Saint Benoît
(reg. 43, 3), indiquant ainsi le juste ordre des préoccupations humaines.
348
Le Sabbat est au cœur de la loi d’Israël. Garder les commandements, c’est
correspondre à la sagesse et à la volonté de Dieu exprimées dans son œuvre de
création.
349
Le huitième jour. Mais pour nous, un jour nouveau s’est levé : le
jour de la Résurrection du Christ. Le septième jour achève la première
création. Le huitième jour commence la nouvelle création. Ainsi, l’œuvre de
la création culmine en l’œuvre plus grande de la rédemption. La première
création trouve son sens et son sommet dans la nouvelle création dans
le Christ, dont la splendeur dépasse celle de la première (cf. MR, Vigile
Pascale 24 : prière après la première lecture).
En bref
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350
Les anges sont des créatures spirituelles qui glorifient Dieu sans cesse et
qui servent ses desseins salvifiques envers les autres créatures :
"Les anges concourent à tout ce qui est bon pour nous" (Saint
Thomas d’A., somme théologique 1, 114, 3, ad 3).
351
Les anges entourent le Christ, leur Seigneur. Ils le servent particulièrement
dans l’accomplissement de sa mission salvifique envers les hommes.
352
L’Église vénère les anges qui l’aident dans son pèlerinage terrestre. et qui
protègent tout être humain.
353
Dieu a voulu la diversité de ses créatures et leur bonté propre, leur
interdépendance et leur ordre. Il a destiné toutes les créatures matérielles
au bien du genre humain. L’homme, et toute la création à travers lui, est
destiné à la gloire de Dieu.
354
Respecter les lois inscrites dans la création et les rapports qui dérivent de
la nature des choses, est un principe de sagesse et un fondement de la
morale.
Paragraphe 6 - L’homme.
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page.
355
"Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et
femme il les créa" (Genèse 1, 27). L’homme tient une place unique dans
la création : il est "à l’image de Dieu" (I) ; dans sa
propre nature il unit le monde spirituel et le monde matériel (II) ; il
est créé "homme et femme" (III) ; Dieu l’a établi dans son
amitié (IV).
I. "À l’image de Dieu"
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page.
356
De toutes les créatures visibles, seul l’homme est "capable de connaître
et d’aimer son Créateur" (Gaudium et spes 12, § 3) ; il est "la seule créature sur
terre que Dieu a voulue pour elle-même" (Gaudium
et spes 24, § 3) ;lui
seul est appelé à partager, par la connaissance et l’amour, la vie de Dieu.
C’est à cette fin qu’il a été créé, et c’est là la raison fondamentale de sa dignité :
Quelle raison T’a fait constituer l’homme en si grande dignité ? L’amour
inestimable par lequel Tu as regardé en Toi-même Ta créature, et Tu T’es
épris d’elle ; car c’est par amour que Tu l’as créée, c’est par amour
que Tu lui as donné un être capable de goûter Ton Bien éternel (Ste.
Catherine de Sienne, dial. 4, 13 : ed. G. Cavallini [Roma 1995] p. 43).
357
Parce qu’il est à l’image de Dieu l’individu humain a la dignité de personne :
il n’est pas seulement quelque chose, mais quelqu’un. Il est capable de se
connaître, de se posséder et de librement se donner et entrer en communion
avec d’autres personnes, et il est appelé, par grâce, à une alliance avec son
Créateur, à Lui offrir une réponse de foi et d’amour que nul autre ne peut
donner à sa place.
358
Dieu a tout créé pour l’homme (cf. Gaudium et spes 12, § 1 ; 24, § 3 ; 39, § 1), mais l’homme
a été créé pour servir et aimer Dieu et pour Lui offrir toute la
création :
Quel est donc l’être qui va venir à l’existence entouré d’une telle
considération ? C’est l’homme, grande et admirable figure vivante, plus
précieux aux yeux de Dieu que la création toute entière : c’est l’homme,
c’est pour lui qu’existent le ciel et la terre et la mer et la totalité de la
création, et c’est à son salut que Dieu a attaché tant d’importance qu’il n’a
même pas épargné son Fils unique pour lui. Car Dieu n’a pas eu de cesse de
tout mettre en œuvre pour faire monter l’homme jusqu’à lui et le faire
asseoir à sa droite (Saint Jean Chrysostome, serm.
in Gen. 2, 1 : PG 54, 587D-588A).
359
"En réalité, c’est seulement dans le mystère du Verbe incarné que
s’éclaire véritablement le mystère de l’homme" (Gaudium
et spes 22, § 1) :
Saint Paul nous apprend que deux hommes sont à l’origine du genre
humain : Adam et le Christ ... Le premier Adam, dit-il, a été créé comme
un être humain qui a reçu la vie ; le dernier est un être spirituel qui
donne la vie. Le premier a été créé par le dernier, de qui il a reçu l’âme
qui le fait vivre ... Le second Adam a établi son image dans le premier Adam
alors qu’il le modelait. De là vient qu’il en a endossé le rôle et reçu le
nom, afin de ne pas laisser perdre ce qu’il avait fait à son image. Premier
Adam, dernier Adam : le premier a commencé, le dernier ne finira pas.
Car le dernier est véritablement le premier, comme il l’a dit lui-même :
"Je suis le Premier et le Dernier" (Saint Pierre Chrysologue, serm. 117, 1-2 : PL 52, 520B).
360
Grâce à la communauté d’origine le genre humain forme une
unité. Car Dieu "a fait sortir d’une souche unique toute la
descendance des hommes" (Actes 17, 26 ; cf. Tb 8, 6) :
Merveilleuse vision qui nous fait contempler le genre humain dans l’unité de
son origine en Dieu (...) ; dans l’unité de sa nature, composée
pareillement chez tous d’un corps matériel et d’une âme spirituelle ;
dans l’unité de sa fin immédiate et de sa mission dans le monde ; dans
l’unité de son habitation : la terre, des biens de laquelle tous les
hommes, par droit de nature, peuvent user pour soutenir et développer la
vie ; unité de sa fin surnaturelle : Dieu même, à qui tous doivent
tendre ; dans l’unité des moyens pour atteindre cette fin ; (...)
dans l’unité de son rachat opéré pour tous par le Christ (Pie XII, enc. "Summi pontificatus"; cf. NA 1).
361
"Cette loi de solidarité humaine et de charité" (Ibid.),
sans exclure la riche variété des personnes, des cultures et des peuples,
nous assure que tous les hommes sont vraiment frères.
II. "Un de corps et d’âme".
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page.
362
La
personne humaine, créée à l’image de Dieu, est un être à la fois corporel et
spirituel. Le récit biblique exprime cette réalité avec un langage
symbolique, lorsqu’il affirme que "Dieu modela l’homme avec la glaise du
sol ; il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint
un être vivant" (Genèse 2, 7). L’homme tout entier est donc voulu
par Dieu.
363
Souvent, le terme âme désigne dans l’Écriture Sainte la vie humaine
(cf. Matthieu 16, 25-26 ; Jean 15, 13) ou toute la personne
humaine (cf. Actes 2, 41). Mais il désigne aussi ce qu’il y a de plus intime
en l’homme (cf. Matthieu 26, 38 ; Jean 12, 27) et de plus grande valeur
en lui (cf. Matthieu 10, 28 ; 2 M 6, 30), ce par quoi il est plus
particulièrement image de Dieu : "âme" signifie le principe
spirituel en l’homme.
364
Le corps de l’homme participe à la dignité de "l’image de
Dieu" : il est corps humain précisément parce qu’il est animé par
l’âme spirituelle, et c’est la personne humaine toute entière qui est
destinée à devenir, dans le Corps du Christ, le Temple de l’Esprit (cf. 1 Co
6, 19-20 ; 15, 44-45) :
Corps et âme, mais vraiment un, l’homme, dans sa condition corporelle,
rassemble en lui-même les éléments du monde matériel qui trouvent ainsi, en
lui, leur sommet, et peuvent librement louer leur Créateur. Il est donc
interdit à l’homme de dédaigner la vie corporelle. Mais au contraire il doit
estimer et respecter son corps qui a été créé par Dieu et qui doit
ressusciter au dernier jour (Gaudium et spes 14, § 1).
365
L’unité de l’âme et du corps est si profonde que l’on doit considérer
l’âme comme la "forme" du corps (cf. Concile de Vienne en
1312 : Denzinger-Schönmetzer
902) ;
c’est-à-dire, c’est grâce à l’âme spirituelle que le corps constitué de matière
est un corps humain et vivant ; l’esprit et la matière, dans l’homme, ne
sont pas deux natures unies, mais leur union forme une unique nature.
366
L’Église enseigne que chaque âme spirituelle est immédiatement créée par
Dieu (cf. Pie XII, enc. "Humani
generis", 1950 : Denzinger-Schönmetzer
3896 ; Credo du Peuple de Dieu (SPF) 8) – elle n’est pas
"produite" par les parents – ; elle nous apprend aussi qu’elle est
immortelle (cf. Concile de Latran V en 1513 : Denzinger-Schönmetzer
1440) :
elle ne périt pas lors de sa séparation du corps dans la mort, et s’unira de
nouveau au corps lors de la résurrection finale.
367
Parfois il se trouve que l’âme soit distinguée de l’esprit. Ainsi Saint Paul
prie pour que notre "être tout entier, l’esprit, l’âme et le corps"
soit gardé sans reproche à l’Avènement du Seigneur (1 Th 5, 23). L’Église
enseigne que cette distinction n’introduit pas une dualité dans l’âme
(Concile de Constantinople IV en 870 : Denzinger-Schönmetzer
657).
"Esprit" signifie que l’homme est ordonné dès sa création à sa fin
surnaturelle (Concile de Vatican I : Denzinger-Schönmetzer
3005 ;
cf. Gaudium et spes 22, §
5), et que son âme est capable d’être surélevée gratuitement à la communion
avec Dieu (cf. Pie XII, Enc. "Humani generis", 1950 : Denzinger-Schönmetzer
3891).
368
La tradition spirituelle de l’Église insiste aussi sur le cœur, au
sens biblique de "fond de l’être" (Jérémie 31, 33) où la personne
se décide ou non pour Dieu (cf. Dt 6, 5 ; 29,
3 ; Isaïe 29, 13 ; Ez 36, 26 ;
Matthieu 6, 21 ; Luc 8, 15 ; Rm 5, 5).
III. "Homme et femme il les créa".
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page.
Égalité et différence voulues par Dieu.
369
L’homme et la femme sont créés, c’est-à-dire ils sont voulus par
Dieu : dans une parfaite égalité en tant que personnes humaines,
d’une part, et d’autre part dans leur être respectif d’homme et de femme.
"Être homme", "être femme" est une réalité bonne et
voulue par Dieu : l’homme et la femme ont une dignité inamissible qui
leur vient immédiatement de Dieu leur créateur (cf. Genèse 2, 7. 22). L’homme
et la femme sont, avec une même dignité, "à l’image de Dieu" Dans
leur "être-homme" et leur "être-femme", ils reflètent la
sagesse et la bonté du Créateur.
370
Dieu n’est aucunement à l’image de l’homme. Il n’est ni homme ni femme.
Dieu est pur esprit en lequel il n’y a pas place pour la différence des
sexes. Mais les "perfections" de l’homme et de la femme reflètent
quelque chose de l’infinie perfection de Dieu : celles d’une mère (cf.
Isaïe 49, 14-15 ; 66, 13 ; Psaume 130, 2-3) et celles d’un père et
époux (cf. Osée 11, 1-4 ; Jérémie 3, 4-19).
"L’un pour l’autre" – "une unité à deux".
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371
Créés ensemble, l’homme et la femme sont voulus par Dieu l’un pour
l’autre. La Parole de Dieu nous le fait entendre par divers traits du texte sacré.
"Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il faut que je lui fasse une
aide qui lui soit assortie" (Genèse 2, 18). Aucun des animaux ne peut
être ce "vis-à-vis" de l’homme (Genèse 2, 19-20). La femme que Dieu
"façonne" de la côte tirée de l’homme et qu’il amène à l’homme,
provoque de la part de l’homme un cri d’admiration, une exclamation d’amour
et de communion : "C’est l’os de mes os et la chair de ma
chair" (Genèse 2, 23). L’homme découvre la femme comme un autre
"moi", de la même humanité.
372
L’homme et la femme sont faits "l’un pour l’autre" : non
pas que Dieu ne les aurait faits qu’"à moitié" et
"incomplets" ; Il les a créés pour une communion de personnes,
en laquelle chacun peut être "aide" pour l’autre parce qu’ils sont
à la fois égaux en tant que personnes ("os de mes os...") et
complémentaires en tant que masculin et féminin (MD 7). Dans le mariage, Dieu
les unit de manière que, en formant "une seule chair" (Genèse 2,
24), ils puissent transmettre la vie humaine : "Soyez féconds,
multipliez, emplissez la terre" (Genèse 1, 28). En transmettant à leurs
descendants la vie humaine, l’homme et la femme comme époux et parents,
coopèrent d’une façon unique à l’œuvre du Créateur (cf. Gaudium
et spes 50, § 1).
373
Dans le dessein de Dieu, l’homme et la femme ont la vocation de
"soumettre" la terre (cf. Genèse 1, 28) comme
"intendants" de Dieu. Cette souveraineté ne doit pas être une
domination arbitraire et destructrice. A l’image du Créateur "qui aime
tout ce qui existe" (Sagesse 11, 24), l’homme et la femme sont appelés à
participer à la Providence divine envers les autres créatures. De là, leur
responsabilité pour le monde que Dieu leur a confié.
IV. L’homme au Paradis.
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page.
374
Le premier homme n’a pas seulement été créé bon, mais il a été constitué dans
une amitié avec son Créateur et une harmonie avec lui-même et avec la
création autour de lui telles qu’elles ne seront dépassées que par la gloire
de la nouvelle création dans le Christ.
375
L’Église, en interprétant de manière authentique le symbolisme du langage
biblique à la lumière du Nouveau Testament et de la Tradition, enseigne que
nos premiers parents Adam et Ève ont été constitué dans un état "de
sainteté et de justice originelle" (Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1511). Cette
grâce de la sainteté originelle était une "participation à la vie
divine" (Lumen gentium 2).
376
Par le rayonnement de cette grâce toutes les dimensions de la vie de l’homme
étaient confortées. Tant qu’il demeurait dans l’intimité divine, l’homme ne
devait ni mourir (cf. Genèse 2, 17 ; 3, 19), ni souffrir (cf. Genèse 3,
16). L’harmonie intérieure de la personne humaine, l’harmonie entre l’homme
et la femme (cf. Genèse 2, 25), enfin l’harmonie entre le premier couple et
toute la création constituait l’état appelé "justice originelle".
377
La "maîtrise" du monde que Dieu avait accordée à l’homme dès le
début, se réalisait avant tout chez l’homme lui-même comme maîtrise de soi.
L’homme était intact et ordonné dans tout son être, parce que libre de la
triple concupiscence (cf. 1 Jean 2, 16) qui le soumet aux plaisirs des sens, à la
convoitise des biens terrestres et à l’affirmation de soi contre les
impératifs de la raison.
378
Le signe de la familiarité avec Dieu, c’est que Dieu le place dans le
jardin (cf. Genèse 2, 8). Il y vit "pour cultiver le sol et le
garder" (Genèse 2, 15) : le travail n’est pas une peine (cf. Genèse
3, 17-19), mais la collaboration de l’homme et de la femme avec Dieu dans le
perfectionnement de la création visible.
379
C’est toute cette harmonie de la justice originelle, prévue pour l’homme par
le dessein de Dieu, qui sera perdu par le péché de nos premiers parents.
380
"Dieu, Tu as fait l’homme à ton image et tu lui as confié l’univers,
afin qu’en Te servant, toi, son Créateur, il règne sur la création" (MR,
prière eucharistique IV, 118).
381
L’homme est prédestiné à reproduire l’image du Fils de Dieu fait homme –
"image du Dieu invisible" (Col 1, 15) – afin que le Christ soit le
premier-né d’une multitude de frères et de sœurs (cf. Ep 1, 3-6 ; Rm 8, 29).
382
L’homme est "un de corps et d’âme" (Gaudium
et spes 14, § 1). La doctrine de la foi affirme que
l’âme spirituelle et immortelle est créée immédiatement par Dieu.
383
"Dieu n’a pas créé l’homme solitaire : dès l’origine, ‘il les créa
homme et femme’ (Genèse 1, 27) ; leur société réalise la première forme
de communion entre personnes" (Gaudium et spes 12, § 4).
384
La révélation nous fait connaître l’état de sainteté et de justice
originelles de l’homme et de la femme avant le péché : de leur
amitié avec Dieu découlait la félicité de leur existence au paradis.
Paragraphe 7 - La Chute.
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385
Dieu est
infiniment bon et toutes ses œuvres sont bonnes. Cependant, personne
n’échappe à l’expérience de la souffrance, des maux dans la nature – qui
apparaissent comme liés aux limites propres des créatures –, et surtout à la
question du mal moral. D’où vient le mal ? "Je cherchais d’où vient
le mal et je ne trouvais pas de solution" dit Saint Augustin (conf. 7, 7, 11), et sa propre quête douloureuse ne
trouvera d’issue que dans sa conversion au Dieu vivant. Car "le mystère
de l’iniquité" (2 Th 2, 7) ne s’éclaire qu’à la lumière du mystère de la
piété (cf. 1 Tm 3, 16). La révélation de l’amour divin dans le Christ a
manifesté à la fois l’étendue du mal et la surabondance de la grâce (cf. Rm 5, 20). Nous devons donc considérer la question de
l’origine du mal en fixant le regard de notre foi sur Celui qui, seul, en est
le Vainqueur (cf. Luc 11, 21-22 ; Jean 16, 11 ; 1 Jean 3, 8).
I. Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé.
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La réalité du péché
386
Le péché
est présent dans l’histoire de l’homme : il serait vain de tenter de
l’ignorer ou de donner à cette obscure réalité d’autres noms. Pour essayer de
comprendre ce qu’est le péché, il faut d’abord reconnaître le lien profond
de l’homme avec Dieu, car en dehors de ce rapport, le mal du péché n’est
pas démasqué dans sa véritable identité de refus et d’opposition face à Dieu,
tout en continuant à peser sur la vie de l’homme et sur l’histoire.
387
La réalité du péché, et plus particulièrement du péché des origines, ne
s’éclaire qu’à la lumière de la Révélation divine. Sans la connaissance
qu’elle nous donne de Dieu on ne peut clairement reconnaître le péché, et on
est tenté de l’expliquer uniquement comme un défaut de croissance, comme une
faiblesse psychologique, une erreur, la conséquence nécessaire d’une
structure sociale inadéquate, etc. C’est seulement dans la connaissance du
dessein de Dieu sur l’homme que l’on comprend que le péché est un abus de la
liberté que Dieu donne aux personnes créées pour qu’elles puissent l’aimer et
s’aimer mutuellement.
Le péché originel – une vérité essentielle de la foi
Haut de page
388
Avec la progression de la Révélation est éclairée aussi la réalité du péché.
Bien que le Peuple de Dieu de l’Ancien Testament ait connu d’une certaine
manière la condition humaine à la lumière de l’histoire de la chute narrée
dans la Genèse, il ne pouvait pas atteindre la signification ultime de cette
histoire, qui se manifeste seulement à la lumière de la Mort et de la
Résurrection de Jésus-Christ (cf. Romains 5, 12-21). Il faut connaître le
Christ comme source de la grâce pour connaître Adam comme source du péché.
C’est l’Esprit-Paraclet, envoyé par le Christ ressuscité, qui est venu "confondre
le monde en matière de péché" (Jean 16, 8) en révélant Celui qui en est
le Rédempteur.
389
La doctrine du péché originel est pour ainsi dire "le revers" de la
Bonne Nouvelle que Jésus est le Sauveur de tous les hommes, que tous ont
besoin du salut et que le salut est offert à tous grâce au Christ. L’Église
qui a le sens du Christ (cf. 1 Corinthiens 2, 16) sait bien qu’on ne peut pas
toucher à la révélation du péché originel sans porter atteinte au mystère du
Christ.
Pour lire le récit de la chute
Haut de page
390
Le récit de la chute (Genèse
3)
utilise un langage imagé, mais il affirme un événement primordial, un fait
qui a eu lieu au commencement de l’histoire de l’homme (cf. Gaudium et spes 13, § 1). La Révélation nous
donne la certitude de foi que toute l’histoire humaine est marquée par la
faute originelle librement commise par nos premiers parents (cf. Concile
de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1513 ;
Pie XII : Denzinger-Schönmetzer 3897 ; Paul VI, discours 11 juillet 1966).
II. La chute des anges.
Haut de
page.
391
Derrière le choix désobéissant de nos premiers parents il y a une voix
séductrice, opposée à Dieu (cf. Genèse 3, 4-5) qui, par envie, les fait tomber dans la
mort (cf. Sagesse 2, 24). L’Écriture et la Tradition de l’Église
voient en cet être un ange déchu, appelé Satan ou diable (cf. Jean 8, 44 ; Apocalypse 12, 9). L’Église enseigne qu’il
a été d’abord un ange bon, fait par Dieu. "Le diable et les autres
démons ont certes été créés par Dieu naturellement bons, mais c’est eux qui
se sont rendus mauvais" (Concile de Latran IV en 1215 : Denzinger-Schönmetzer
800).
392
L’Écriture parle d’un péché de ces anges (cf. 2 P 2, 4). Cette
"chute" consiste dans le choix libre de ces esprits créés, qui ont
radicalement et irrévocablement refusé Dieu et son Règne. Nous
trouvons un reflet de cette rébellion dans les paroles du tentateur à nos
premiers parents : "Vous deviendrez comme Dieu" (Genèse 3, 5).
Le diable est "pécheur dès l’origine" (1 Jean 3, 8), "père du
mensonge" (Jean 8,44).
393
C’est le caractère irrévocable de leur choix, et non un défaut de
l’infinie miséricorde divine, qui fait que le péché des anges ne peut être
pardonné. "Il n’y a pas de repentir pour eux après la chute, comme il
n’y a pas de repentir pour les hommes après la mort" (Saint Jean
Damascène, f. o. 2, 4 : PG 94, 877C).
394
L’Écriture atteste l’influence néfaste de celui que Jésus appelle
"l’homicide dès l’origine" (Jean 8, 44), et qui a même tenté de
détourner Jésus de la mission reçue du Père (cf. Matthieu 4, 1-11).
"C’est pour détruire les œuvres du diable que le Fils de Dieu est
apparu" (1 Jean 3, 8). La plus grave en conséquences de ces œuvres a été
la séduction mensongère qui a induit l’homme à désobéir à Dieu.
395
La puissance de Satan n’est cependant pas infinie. Il n’est qu’une créature,
puissante du fait qu’il est pur esprit, mais toujours une créature : il
ne peut empêcher l’édification du Règne de Dieu. Quoique Satan agisse dans le
monde par haine contre Dieu et son Royaume en Jésus-Christ, et quoique son
action cause de graves dommages – de nature spirituelle et indirectement même
de nature physique – pour chaque homme et pour la société, cette action est
permise par la divine Providence qui avec force et douceur dirige l’histoire
de l’homme et du monde. La permission divine de l’activité diabolique est un
grand mystère, mais "nous savons que Dieu fait tout concourir au bien de
ceux qui l’aiment" (Romains 8, 28).
III. Le péché originel.
Haut de
page.
L’épreuve de la liberté
396
Dieu a créé l’homme à son image et l’a constitué dans son amitié. Créature
spirituelle, l’homme ne peut vivre cette amitié que sur le mode de la libre
soumission à Dieu. C’est ce qu’exprime la défense faite à l’homme de manger
de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, "car du jour où tu en
mangeras, tu mourras" (Genèse 2, 17). "L’arbre de la connaissance du bien
et du mal" (Genèse 2, 17) évoque symboliquement la limite
infranchissable que l’homme, en tant que créature, doit librement reconnaître
et respecter avec confiance. L’homme dépend du Créateur, il est soumis aux
lois de la création et aux normes morales qui règlent l’usage de la liberté.
Le premier péché de l’homme
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397
L’homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance
envers son créateur (cf. Genèse 3, 1-11) et, en abusant de sa liberté, a désobéi
au commandement de Dieu. C’est en cela qu’a consisté le premier péché de
l’homme (cf. Rm 5, 19). Tout péché, par la suite,
sera une désobéissance à Dieu et un manque de confiance en sa bonté.
398
Dans ce péché, l’homme s’est préféré lui-même à Dieu, et par là même,
il a méprisé Dieu : il a fait choix de soi-même contre Dieu, contre les
exigences de son état de créature et dès lors contre son propre bien.
Constitué dans un état de sainteté, l’homme était destiné à être pleinement
"divinisé" par Dieu dans la gloire. Par la séduction du diable, il
a voulu "être comme Dieu" (cf. Genèse 3, 5), mais "sans Dieu,
et avant Dieu, et non pas selon Dieu" (Saint Maxime le Confesseur, ambig. :
PG 91, 1156C).
399
L’Écriture montre les conséquences dramatiques de cette première
désobéissance. Adam et Ève perdent immédiatement la grâce de la sainteté
originelle (cf. Romains 3, 23). Ils ont peur de ce Dieu (cf. Genèse 3, 9-10) dont ils ont conçu une fausse image, celle
d’un Dieu jaloux de ses prérogatives (cf. Genèse 3, 5).
400
L’harmonie dans laquelle ils étaient, établie grâce à la justice originelle,
est détruite ; la maîtrise des facultés spirituelles de l’âme sur le
corps est brisée (cf. Genèse 3, 7) ; l’union de l’homme et de la femme
est soumise à des tensions (cf. Genèse 3, 11-13) ; leurs rapports
seront marqués par la convoitise et la domination (cf. Genèse 3, 16). L’harmonie avec la création est
rompue : la création visible est devenue pour l’homme étrangère
et hostile (cf. Genèse 3, 17. 19). À cause de
l’homme, la création est soumise "à la servitude de la corruption"
(Romains 8, 20). Enfin, la conséquence explicitement annoncée pour le cas de
la désobéissance (cf. Genèse 2, 17) se réalisera : l’homme
"retournera à la poussière de laquelle il est formé" (Genèse 3, 19). La mort fait son entrée dans l’histoire
de l’humanité (cf. Romains 5, 12).
401
Depuis ce premier péché, une véritable "invasion" du péché inonde
le monde : le fratricide commis par Caïn sur Abel (cf. Genèse 4,
3-15) ; la corruption universelle à la suite du péché (cf. Genèse 6, 5.
12 ; Rm 1, 18-32) ; de même, dans
l’histoire d’Israël, le péché se manifeste fréquemment, surtout comme une
infidélité au Dieu de l’alliance et comme transgression de la Loi de
Moïse ; après la Rédemption du Christ aussi, parmi les chrétiens, le
péché se manifeste de nombreuses manières (cf. 1 Co 1-6 ; Apocalypse
2-3). L’Écriture et la Tradition de l’Église ne cessent de rappeler la
présence et l’universalité du péché dans l’histoire de l’homme :
Ce que la révélation divine nous découvre, notre propre expérience le
confirme. Car l’homme, s’il regarde au-dedans de son cœur, se découvre
également enclin au mal, submergé de multiples maux qui ne peuvent provenir
de son Créateur, qui est bon. Refusant souvent de reconnaître Dieu comme son
principe, l’homme a, par le fait même, brisé l’ordre qui l’orientait à sa fin
dernière, et, en même temps, il a rompu toute harmonie, soit par rapport à
lui-même, soit par rapport aux autres hommes et à toute la création (Gaudium et spes 13, § 1).
Conséquences du péché d’Adam pour l’humanité
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402
Tous les hommes sont impliqués dans le péché d’Adam. Saint Paul
l’affirme : "Par la désobéissance d’un seul homme, la multitude
(c’est-à-dire tous les hommes) a été constituée pécheresse" (Romains 5,
19) : "De même que par un seul homme le péché est entré dans le
monde et par le péché la mort, et qu’ainsi la mort est passée en tous les
hommes, du fait que tous ont péché..." (Romains 5, 12). À l’universalité
du péché et de la mort l’apôtre oppose l’universalité du salut dans le
Christ : "Comme la faute d’un seul a entraîné sur tous les hommes
une condamnation, de même l’œuvre de justice d’un seul (celle du Christ)
procure à tous une justification qui donne la vie" (Romains 5, 18).
403
À la suite de Saint Paul, l’Église a toujours enseigné que l’immense misère
qui opprime les hommes et leur inclination au mal et à la mort ne sont pas
compréhensibles sans leur lien avec le péché d’Adam et le fait qu’il nous a
transmis un péché dont nous naissons tous affectés et qui est "mort de
l’âme" (cf. Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1512). En
raison de cette certitude de foi, l’Église donne le Baptême pour la rémission
des péchés même aux petits enfants qui n’ont pas commis de péché personnel
(cf. Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1514).
404
Comment le péché d’Adam est-il devenu le péché de tous ses descendants ?
Tout le genre humain est en Adam "comme l’unique corps d’un homme
unique" (Saint Thomas d’Aquin, mal. 4, 1) Par cette "unité du genre
humain" tous les hommes sont impliqués dans le péché d’Adam, comme tous
sont impliqués dans la justice du Christ. Cependant, la transmission du péché
originel est un mystère que nous ne pouvons pas comprendre pleinement. Mais
nous savons, par la Révélation, qu’Adam avait reçu la sainteté et la justice
originelles non pas pour lui seul, mais pour toute la nature humaine :
en cédant au tentateur, Adam et Ève commettent un péché personnel, mais
ce péché affecte la nature humaine qu’ils vont transmettre dans un
état déchu (cf. Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1511-1512).
C’est un péché qui sera transmis par propagation à toute l’humanité,
c’est-à-dire par la transmission d’une nature humaine privée de la sainteté
et de la justice originelles. Et c’est pourquoi le
péché originel est appelé "péché" de façon analogique : c’est
un péché "contracté" et non pas "commis", un état et non
pas un acte.
405
Quoique propre à chacun (cf. Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer
1513), le
péché originel n’a, en aucun descendant d’Adam, un caractère de faute
personnelle. C’est la privation de la sainteté et de la justice originelles,
mais la nature humaine n’est pas totalement corrompue : elle est blessée
dans ses propres forces naturelles, soumise à l’ignorance, à la souffrance et
à l’empire de la mort, et inclinée au péché (cette inclination au mal est
appelée "concupiscence"). Le Baptême, en donnant la vie de la grâce
du Christ, efface le péché originel et retourne l’homme vers Dieu, mais les
conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent dans
l’homme et l’appellent au combat spirituel.
406
La doctrine de l’Église sur la transmission du péché originel s’est précisée
surtout au cinquième siècle, en particulier sous l’impulsion de la réflexion
de Saint Augustin contre le pélagianisme, et au seizième siècle, en
opposition à la Réforme protestante. Pélage tenait que l’homme pouvait, par
la force naturelle de sa volonté libre, sans l’aide nécessaire de la grâce de
Dieu, mener une vie moralement bonne ; il réduisait ainsi l’influence de
la faute d’Adam à celle d’un mauvais exemple. Les premiers réformateurs
protestants, au contraire, enseignaient que l’homme était radicalement
perverti et sa liberté annulée par le péché des origines ; ils
identifiaient le péché hérité par chaque homme avec la tendance au mal (concupiscentia), qui serait insurmontable.
L’Église s’est spécialement prononcée sur le sens du donné révélé concernant
le péché originel au deuxième Concile d’Orange en 529 (cf. Denzinger-Schönmetzer
371-372) et
au Concile de Trente en 1546 (cf. Denzinger-Schönmetzer
1510-1516).
Un dur combat...
Haut de page
407
La doctrine sur le péché originel – liée à celle de la Rédemption par le
Christ – donne un regard de discernement lucide sur la situation de l’homme
et de son agir dans le monde. Par le péché des premiers parents, le diable a
acquis une certaine domination sur l’homme, bien que ce dernier demeure
libre. Le péché originel entraîne "la servitude sous le pouvoir de celui
qui possédait l’empire de la mort, c’est-à-dire du diable" (Concile de
Trente : Denzinger-Schönmetzer
1511 ;
cf. He 2, 14). Ignorer que l’homme a une nature blessée, inclinée au mal,
donne lieu à de graves erreurs dans le domaine de l’éducation, de la
politique, de l’action sociale (cf. CA 25) et des mœurs.
408
Les conséquences du péché originel et de tous les péchés personnels des
hommes confèrent au monde dans son ensemble une condition pécheresse, qui
peut être désignée par l’expression de Saint Jean : "le péché du
monde" (Jean 1, 29). Par cette expression on signifie aussi l’influence
négative qu’exercent sur les personnes les situations communautaires et les
structures sociales qui sont le fruit des péchés des hommes (cf. RP 16).
409
Cette situation dramatique du monde qui "tout entier gît au pouvoir du
mauvais" (1 Jean 5, 19 ; cf. 1 P 5, 8) fait de la vie de l’homme un
combat :
Un dur combat contre les puissances des ténèbres passe à travers toute
l’histoire des hommes ; commencé dès les origines, il durera, le
Seigneur nous l’a dit, jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille,
l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien ; et non sans
grands efforts, avec la grâce de Dieu, il parvient à réaliser son unité
intérieure (Gaudium et spes
37, § 2).
IV. "Tu ne l’as pas abandonné au pouvoir de
la mort".
Haut de
page.
410
Après sa chute, l’homme n’a pas été abandonné par Dieu. Au contraire, Dieu
l’appelle (cf. Genèse 3, 9) et lui annonce de façon mystérieuse la victoire
sur le mal et le relèvement de sa chute (cf. Genèse 3, 15). Ce passage de la
Genèse a été appelé "Protévangile", étant la première annonce du
Messie rédempteur, celle d’un combat entre le serpent et la Femme et de la
victoire finale d’un descendant de celle-ci.
411
La tradition chrétienne voit dans ce passage une annonce du "nouvel
Adam" (cf. 1 Co 15, 21-22. 45) qui, par son "obéissance jusqu’à la
mort de la Croix" (Ph 2, 8) répare en surabondance la désobéissance
d’Adam (cf. Rm 5, 19-20). Par ailleurs, de nombreux
Pères et docteurs de l’Église voient dans la femme annoncée dans le "protévangile" la mère du Christ, Marie, comme
"nouvelle Ève". Elle a été celle qui, la première et d’une manière
unique, a bénéficié de la victoire sur le péché remportée par le
Christ : elle a été préservée de toute souillure du péché originel (cf.
Pie IX : Denzinger-Schönmetzer 2803) et durant toute sa vie terrestre,
par une grâce spéciale de Dieu, elle n’a commis aucune sorte de péché (cf.
Concile de Trente : Denzinger-Schönmetzer 1573).
412
Mais pourquoi Dieu n’a-t-il pas empêché le premier homme de pécher ? Saint
Léon le Grand répond : "La grâce ineffable du Christ nous a donné
des biens meilleurs que ceux que l’envie du démon nous avait ôtés" (serm. 73, 4 : PL 54, 396). Et Saint Thomas
d’Aquin : "Rien ne s’oppose à ce que la nature humaine ait été
destinée à une fin plus haute après le péché. Dieu permet, en effet, que les
maux se fassent pour en tirer un plus grand bien. D’où le mot de Saint
Paul : ‘Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé’ (Romains 5, 20).
Et le chant de l’Exultet :
O heureuse faute qui a mérité un tel et un si grand Rédempteur" (Saint
Thomas d’Aquin, s. th. 3, 1, 3, ad 3 ; l’Exsultet
chante ces paroles de saint Thomas).
En bref
Haut de page.
413
"Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de la perte des vivants
(...). C’est par l’envie du diable que la mort est entrée dans le monde"
(Sagesse 1, 13 ; 2, 24).
414
Satan ou le diable et les autres démons sont des anges déchus pour avoir
librement refusé de servir Dieu et son dessein. Leur choix contre Dieu est définitif.
Ils tentent d’associer l’homme à leur révolte contre Dieu.
415
"Établi par Dieu dans un état de sainteté, l’homme séduit par le Malin,
dès le début de l’histoire, a abusé de sa liberté, en se dressant contre Dieu
et en désirant parvenir à sa fin hors de Dieu" (Gaudium
et spes 13, § 1).
416
Par son péché, Adam, en tant que premier homme, a perdu la sainteté et la
justice originelles qu’il avait reçues de Dieu non seulement pour lui, mais
pour tous les humains.
417
A leur descendance, Adam et Ève ont transmis la nature humaine blessée par
leur premier péché, donc privée de la sainteté et la justice originelles.
Cette privation est appelée "péché originel"
418
En conséquence du péché originel, la nature humaine est affaiblie dans ses forces,
soumise à l’ignorance, à la souffrance et à la domination de la mort, et
inclinée au péché (inclination appelée "concupiscence").
419
"Nous tenons donc, avec le Concile de Trente, que le péché originel est
transmis avec la nature humaine, ‘non par imitation, mais par propagation’,
et qu’il est ainsi ‘propre à chacun’" (Credo du Peuple de Dieu (SPF)
16).
420
La victoire sur le péché remportée par le Christ nous a donné des biens
meilleurs que ceux que le péché nous avait ôtés : "La où le péché a
abondé, la grâce a surabondé" (Romains 5, 20).
421
"Pour la foi des chrétiens, ce monde a été fondé et demeure conservé par
l’amour du créateur ; il est tombé, certes, sous l’esclavage du péché,
mais le Christ, par la Croix et la Résurrection, a brisé le pouvoir du Malin
et l’a libéré..." (Gaudium et spes 2, § 2).
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Fiche mise à jour le 17/01/2018.
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