Le lundi 6 mai 1946.
529> 431.1 – Après
l'incident, ils ont avancé en silence pendant quelque temps, mais quand ils
sont arrivés à une bifurcation dans les champs, Jacques de Zébédée dit :
"Voilà ! D'ici, on va chez Michée... Mais... y allons-nous encore ? Certainement cet
homme nous attend dans son domaine pour nous maltraiter..."
"Et pour t'empêcher de parler aux paysans. Jacques a raison. N'y va
pas" conseille l'Iscariote.
"Ils m'attendent. Je leur ai envoyé dire que j'y vais. Leur cœur est en fête. Je suis l'Ami qui vient les consoler..."
"Tu y iras une autre fois. Ils se
résigneront" dit Judas en haussant les épaules.
"Toi, tu ne te résignes pas facilement quand on t'enlève une chose que
tu espérais."
"Les miennes sont des choses sérieuses, les leurs..."
"Et qu'y
a-t-il de plus sérieux, plus grand que la formation, le réconfort d'un
cœur ? Eux sont des cœurs que tout conspire à éloigner de la paix, de
l'espérance... Et ils n'ont qu'une espérance: celle de la vie future.
Et ils n'ont qu'un moyen pour y aller : mon aide. Oui, j'irai vers eux
au risque d'être lapidé."
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530> "Non, frère ! Non, Seigneur !"
disent ensemble le Zélote et Jacques d'Alphée. "Cela ne servirait qu'à faire punir ces pauvres
serviteurs. Tu n'as pas entendu, mais Yokhanan a dit : "Jusqu'à présent, j'ai supporté, mais
maintenant je ne supporterai plus, et malheur au serviteur qui ira vers Lui
ou qui l'accueillera. C'est un réprouvé, c'est un démon. Je ne veux pas de
corruption dans ma maison", et à un compagnon il a dit : "Même
s'il faut les tuer, je les guérirai de leur insatanation
pour ce maudit"."
Jésus baisse la tête, réfléchissant... et souffrant. Sa douleur est
visible... Les autres s'en affligent, mais que faire ?
431.2 – C'est la sérénité pratique de Thomas qui dénoue la situation :
"Faisons ainsi : restons ici jusqu'au crépuscule pour ne pas violer
le sabbat. Pendant ce temps, l'un de nous va jusqu'aux maisons et il
dit : "En pleine nuit, près de la fontaine hors de Sephoris".
Et nous, après le crépuscule, nous y allons et nous les attendons dans les
bosquets qui sont au bas de la montagne sur laquelle se trouve Sephoris. Le
Maître parle à ces malheureux, les console et, à la première lueur du jour,
ils retournent à leurs maisons. Nous, en franchissant la colline, nous allons
à Nazareth."
"Thomas a raison. Bravo Thomas !" disent plusieurs. Mais Philippe fait remarquer :
"Et qui va les avertir ? Il nous connaît tous et il peut nous
voir..."
"Judas de Simon pourrait y aller.
Lui connaît bien les pharisiens..." dit innocemment André.
"Que veux-tu insinuer ?" demande Judas agressif.
"Moi ? Rien. Je dis que tu les connais parce que tu as été si
longtemps au Temple et que tu y as de bonnes amitiés. Tu t'en vantes
toujours : à un ami, ils ne feront pas de mal..." dit le doux
André.
"Ne le pense pas, tu sais ? Que personne ne le pense. Si nous
étions encore sous la protection de Claudia, peut-être… je pourrais, mais maintenant c'est fini. Car maintenant, pour conclure, elle s'est
désintéressée de nous, n'est-ce pas, Maître ?"
"Claudia continue à admirer le Sage. Elle n'a jamais rien fait de
plus que cela. De cette admiration elle passera, peut-être, à la foi dans le
Dieu vrai. Mais seule l'illusion d'un esprit exalté pouvait croire qu'elle
avait d'autres sentiments pour Moi.
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Et, si elle les avait, Moi je n'en voudrais pas. Je peux encore accepter leur
paganisme parce que j'espère le changer en christianisme. Je ne puis accepter
ce qui serait de leur part idolâtrie : l'adoration d'un Homme, pauvre
idole sur un pauvre trône humain."
Jésus dit cela calmement, comme s'il faisait une instruction pour tous. Mais
le ton est si tranchant qu'il ne laisse aucun doute sur son intention et sur
sa volonté de réprimer toute déviation en ce sens parmi les apôtres.
431.3 – Personne ne réplique en ce qui concerne la royauté
humaine, mais ils demandent :
"Alors que fait-on pour les paysans?"
"Moi, j'y vais. C'est moi qui l'ai proposé, j'y vais, si le Maître le
permet. Les pharisiens ne me mangeront sûrement pas..." dit Thomas.
"Vas-y. Et que ta charité soit bénie."
"Oh ! Maître, c'est si peu de chose !"
"C'est une si grande chose, Thomas. Tu ressens les désirs de tes
frères : Jésus et les paysans, et tu en as pitié. Et ton Frère selon la
chair te bénit aussi en leur nom" dit Jésus en mettant sa main sur la
tête de Thomas incliné devant Lui et qui, ému, murmure : "Moi...
ton... frère ?! C'est trop d'honneur, mon Seigneur. Moi ton serviteur,
Toi mon Dieu... Cela, oui... J'y vais."
"Tu vas seul ? J'y vais aussi !" disent le Thaddée et
Pierre.
"Non, vous êtes trop fougueux. Moi, je sais tourner tout en dérision...
C'est le meilleur moyen pour désarmer certains... caractères. Vous prenez feu
tout de suite... J'y vais seul."
"Moi, je viens" disent Jean et André.
"Oh ! oui ! L'un de vous, oui, et même un comme Simon le
Zélote et Jacques d'Alphée."
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