Suite
de l’épisode précédent.
124> 18.7 - Marie dit :
«Ma chère fille, à la fin de l’extase qui m’avait comblée d’une joie inexprimable , j’ai retrouvé mes sens de la terre ; la première pensée,
perçante comme une épine de rose, qui a traversé mon cœur entouré des roses de
l’Amour divin devenu mon époux depuis quelques instants, fut la pensée de Joseph.
Je l’aimais désormais, mon saint et prévenant gardien. Depuis le moment où la
volonté de Dieu, par l’intermédiaire de la parole de son prêtre
, avait voulu que je devienne l’épouse de Joseph, j’avais pu
connaître et apprécier la sainteté de ce juste. À ses côtés, j’avais senti
disparaître mon désarroi d’orpheline et je n’avais plus regretté l’asile du
Temple que j’avais perdu.
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125> Il avait
pour moi la douceur de mon père disparu. Je me sentais autant en sécurité
près de lui qu’auprès du prêtre. Toute hésitation avait disparu, et pas cela
seulement : elle s’était tellement éloignée de mon cœur de vierge que je
l’avais même oubliée. J’avais compris qu’aucune hésitation, aucune crainte ne
se justifiait à l’égard de Joseph. La virginité que j’avais confiée à Joseph était plus en sécurité qu’un enfant dans les bras de sa mère.
18.8 - Mais comment lui
apprendre que j’allais être mère ? Je cherchais les mots pour le lui
annoncer… difficile recherche ! Je ne voulais pas me flatter du don de Dieu,
et je ne pouvais en aucune façon justifier ma maternité sans préciser :
“Le Seigneur m’a aimée entre toutes les femmes et de moi, sa servante, il a
fait son épouse.” Par ailleurs, je me refusais à le tromper en lui
dissimulant mon état.
Mais, pendant que je priais, l’Esprit Saint dont j’étais remplie m’avait
conseillé : “Tais-toi. Laisse-moi le soin de te justifier auprès de ton
époux.” Quand ? Comment ? Je ne l’avais pas demandé. Je m’étais toujours fiée
à Dieu comme une fleur se fie à l’eau qui l’abreuve. Jamais l’Éternel ne
m’avait laissée sans son aide. Sa main m’avait soutenue, protégée, guidée
jusqu’alors. Il allait encore le faire.
18.9 - Ma fille, comme
elle est belle et réconfortante, la foi en notre Bon Dieu éternel ! Il nous
prend dans ses bras comme en un berceau, nous porte comme une barque au port
lumineux du Bien, nous réchauffe le cœur, nous console, nous nourrit, nous
procure repos, joie et lumière, et il nous guide. La confiance en Dieu, c’est
tout, et Dieu donne tout à ceux qui mettent en lui leur confiance. Il se
donne lui-même.
Ce soir-là, j’ai porté ma confiance de créature à la perfection. Je pouvais
désormais le faire, puisque Dieu était en moi. J’avais d’abord eu la
confiance de la pauvre créature que j’étais : toujours moins que rien, même
si j’étais celle qui est aimée au point d’être l’Immaculée. Mais j’avais
maintenant une confiance divine, car Dieu était à moi : mon Époux, mon Fils !
Quelle joie ! Être unie à Dieu ! Non pas pour ma gloire, mais pour l’aimer
dans une union totale, et pouvoir lui dire : “ Toi, toi seul qui es en moi,
agis avec ta divine perfection en tout ce que je fais. ”
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126> S’il ne
m’avait pas dit : “Tais-toi”, j’aurais peut-être osé, face contre terre,
annoncer à Joseph : “ L’Esprit est entré en moi et je porte en moi le
Germe de Dieu.” Et il m’aurait cru, parce qu’il m’estime et parce que, comme
tous ceux qui ne mentent jamais, il ne pouvait croire que les autres mentent.
Oui, pour lui épargner la douleur à venir, j’aurais surmonté ma répugnance à
m’attribuer une telle louange. Mais j’ai obéi au commandement de Dieu.
À partir de ce moment et des mois durant, j’ai senti la première blessure me
faire saigner le cœur. C’était ma première douleur de corédemptrice. Je l’ai supportée et offerte en réparation, et aussi pour
vous donner une règle de vie dans des moments analogues de souffrance lorsque
vous devez garder le silence sur un événement qui vous montre sous un jour
défavorable à ceux qui vous aiment.
18.10 - Remettez à Dieu la
garde de votre bonne réputation et des affections qui vous tiennent à cœur. Méritez
par une vie sainte la protection de Dieu, et avancez tranquillement. Même si
le monde entier était contre vous, lui vous défendrait auprès de ceux qui
vous aiment et fera jaillir la vérité.
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