Le dimanche 31
décembre 1944.
437> 67.1 – Je vois Jésus
qui va tout seul sur un chemin ombragé, on dirait dans
une fraîche petite vallée bien arrosée. Je dis une petite vallée car elle est
encaissée entre deux élévations du sol et au centre passe un petit cours
d'eau.
438> Le lieu est désert, à l'heure
matinale. Le jour doit à peine pointer, une belle journée tranquille du
commencement de l'été, et à part les chants des oiseaux dans les arbres - ce
sont surtout des oliviers principalement sur la colline de gauche, alors que
l'autre plus dépouillée, a des arbustes bas : lentisques, acacias
épineux, agaves, etc...– à part ces chants et le triste roucoulement des
tourterelles sauvages qui font leurs nids dans les creux d'une colline, plus
aride, on n'entend rien.
Le petit torrent lui-même, dont les eaux peu abondantes
coulent au centre de son lit, semble ne faire aucun bruit et s'en va,
réfléchissant dans ses eaux la verdure qui l'entoure et lui donne une couleur
d'émeraude foncée.
Jésus franchit un petit pont primitif : un tronc à moitié équarri, jeté
sur le torrent, sans garde fou, sans rien pour se protéger, et il continue
son chemin sur l'autre rive.
Maintenant, on voit des murs et des portes et des marchands de légumes et de
victuailles qui se pressent aux portes encore fermées pour entrer dans la
ville. Les ânes braient et se bagarrent, Les propriétaires eux-mêmes ne
plaisantent pas. Insultes et même coups pleuvent non seulement sur les
échines des ânes, mais aussi sur les têtes des hommes.
67.2 – Deux hommes en viennent
sérieusement aux mains à cause de l'âne de l'un d'eux, qui s'est servi dans
le panier de laitues de l'autre, et en a mangé beaucoup ! Ce n'est
peut-être qu'un prétexte pour rallumer une ancienne querelle. De fait on sort
de dessous les vêtements deux coutelas, courts et larges comme la main :
c'est semble-t-il des dagues courtes mais bien affilées. Elles brillent au
soleil. Cris des femmes, brouhaha des hommes. Mais personne n'intervient pour
séparer les deux qui se préparent à un duel rustique.
Jésus, qui s'avançait, méditatif, lève la tête, voit la scène et à pas très
rapides accourt entre les deux. "Arrêtez, au Nom de Dieu !"
ordonne-t-il.
"Non ! Je veux en finir avec ce chien maudit !"
"Moi aussi ! Tu nous tiens par la frange ? Je te ferai une
frange avec tes entrailles."
Les deux tournent autour de Jésus, le bousculant, l'insultant pour qu'il ne
les sépare plus, cherchant à s'atteindre sans y réussir parce que Jésus, avec
des mouvements de son manteau dévie les coups et leur bouche la vue. Il en a
même le manteau lacéré. La foule crie : "Dégage-toi, Nazaréen et
tire-toi de là." Mais Lui ne bouge pas et tâche de les calmer,
recommandant l'esprit à Dieu. Inutile ! La colère rend fous les deux
combattants.
Jésus va faire un miracle. Il ordonne une dernière fois : "Je vous commande
d'arrêter."
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143> "Non ! Éloigne-toi ! Va ton chemin,
chien de Nazaréen !" Alors Jésus étend les mains, avec son aspect
de puissance fulgurante. Il ne dit pas une seule parole, mais les lames
tombent en morceaux par terre comme des lames de verre qu'on aurait heurtées
contre un rocher.
Les deux regardent les poignées courtes qui leur restent entre les mains. La
stupeur fait tomber la colère. La foule aussi cri stupéfaite.
Dessin de Lorenzo Ferri
réalisé sous les indications de Maria Valtorta.
© FMVC
67.3 – "Et maintenant ?
demande Jésus avec sévérité. Où est votre force ?"
Jusqu'aux soldats, de garde à la porte, accourus aux derniers cris regardent
avec stupeur et l'un d'eux se penche pour ramasser des morceaux des lames et
les essaie sur l'ongle, ne pouvant croire que c'est de l'acier.
"Et maintenant ? répète Jésus. Où est votre
force ? Sur quoi basez-vous votre droit ? Sur ces morceaux de
métal, qui maintenant ne sont plus que des débris dans la poussière ?
Sur ces morceaux de métal qui n'avaient d'autre force que celle du péché de
colère contre un frère, vous dépouillant par ce péché de toute bénédiction de
Dieu et par conséquent de toute force ? Oh ! malheureux ceux qui se
basent sur des moyens humains pour vaincre, et ignorent que ce n'est pas la
violence mais la sainteté qui rend victorieux sur terre et au-delà ! Car
Dieu est avec les justes.
Écoutez tous, vous d'Israël, et vous aussi soldats de Rome. La Parole de Dieu
parle pour tous les fils d'hommes; et ce ne sera pas le Fils de l'homme qui
la refusera aux Gentils.
Le second des commandements du Seigneur est
celui de l'amour du prochain. Dieu est bon et veut la bienveillance parmi ses fils.
Celui qui manque de bienveillance pour son prochain ne peut se dire fils de
Dieu et ne peut avoir Dieu avec lui. L'homme n'est pas un animal sans raison
qui attaque et comme ayant droit à une proie. L'homme a une raison et une
âme. Par la raison, il doit savoir se conduire en homme. Par l'âme il doit
savoir se conduire en saint. Celui qui n'agit pas ainsi se met au-dessous des
animaux. Il s'abaisse jusqu'à embrasser les démons, car il leur livre son âme
par le péché de colère. Aimez. Je ne vous dis pas autre chose. Aimez votre
prochain comme le Seigneur Dieu d'Israël le veut. Ne soyez pas du sang de
Caïn. Et pourquoi l'êtes-vous ? Pour un peu d'argent, vous qui pouviez
être homicides. D'autres pour un lopin de terre.
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144> Pour
une meilleure place. Pour une femme. Que sont toutes ces choses ?
Éternelles ? Non, elles durent moins que la vie qui n'est qu'un instant
de l'éternité. Et que perdez-vous en les recherchant ? La paix éternelle
qui est promise aux justes et où le Messie vous conduira ensemble à son
Royaume. Venez sur le chemin de la Vérité. Suivez la Voix de Dieu.
Aimez-vous. Soyez honnêtes. Soyez continents. Soyez humbles et justes. Allez
et méditez."
67.4 – "Qui es-tu, Toi qui dis
de semblables paroles et dont la volonté brise les épées ? Un seul fait
ces choses : le Messie. Même Jean
le Baptiste n'est pas plus que Lui.
Es-tu peut-être le Messie ?" se demandent trois ou quatre qui sont
là.
"Je le suis."
"Toi ! Es-tu celui qui guérit les maladies et prêche Dieu en
Galilée ?"
"Je le suis."
"J'ai une vieille maman qui meurt, Sauve-la !"
"Et moi, tu vois ? Je suis en train de perdre mes forces par les
souffrances. J'ai des enfants encore tout petits. Guéris-moi !"
"Rentre à ta maison, Ta mère ce soir te préparera
le repas. Et toi, sois guéri, Je le veux !"
La foule pousse un cri. Puis, elle demande : "Ton Nom ! Ton
Nom !"
"Jésus de Nazareth"
"Jésus ! Jésus ! Hosanna ! Hosanna !" La foule
est en allégresse. Les ânes peuvent faire ce qu'ils veulent. Personne n'en a
plus cure. Des mères accourent de l'intérieur de la ville, on se rend
compte que le bruit du miracle s'est répandu. Elles lèvent leurs bébés. Jésus
les bénit et sourit. Il cherche à fendre la foule, le cercle des gens qui
l'acclament pour entrer dans la cité et aller où il veut. Mais la foule ne
veut rien savoir : "Reste avec nous ! En Judée ! En
Judée ! Nous sommés fils d'Abraham, nous aussi !" crie-t-elle.
67.5 – "Maître !"
C'est Judas
qui arrive vers Lui - Maître tu m'as devancé. Mais
qu'arrive-t-il ?"
"Le Rabbi a fait un Miracle ! Pas en Galilée, ici, c'est ici avec
nous que nous le voulons."
"Tu le vois, Maître ? Tout Israël t'aime et il est juste que
tu restes ici aussi. Pourquoi t'en aller ?"
"Je ne me dérobe pas, Judas. Je suis venu exprès seul pour que la
rudesse des disciples galiléens ne heurte pas la susceptibilité juive. Je
veux rassembler toutes les brebis d'Israël sous le sceptre de Dieu."
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145> "C'est pour
cela que je t'ai dit : "prends-moi". Je suis juif et je sais
comment prendre mes concitoyens. Tu resteras donc à Jérusalem ?"
"Peu de jours. Pour attendre un disciple juif, lui aussi. Puis j'irai à
travers la Judée..."
"Oh ! je viendrai avec Toi. Je t'accompagnerai. Tu viendras dans
mon pays, Je te conduirai à ma maison. Tu viendras, Maître ?"
"Je viendrai...
67.6 – Toi qui es judéen et vis près
des puissants, ne sais-tu rien du Baptiste ?"
"Je sais qu'il est encore en prison, mais qu'ils veulent le libérer car
la foule menace de se révolter si on ne lui rend pas son Prophète. Tu le
connais ?"
"Je le connais."
"Tu l'aimes ? Que penses-tu de lui ?"
"Je pense qu'il n'y a eu personne de plus grand que lui qui est
semblable à Élie."
"Le considères-tu vraiment comme le Précurseur ?"
"Oui, il l'est. C'est l'étoile du matin qui annonce le soleil. Heureux
ceux qui se sont préparés à la venue du soleil à travers sa
prédication."
"Il est très sévère, Jean."
"Pas plus pour les autres que pour lui."
"C'est vrai,
mais il est difficile de le suivre dans sa pénitence Toi, tu
es plus bon et il est facile de t'aimer."
"Et pourtant..."
"Et pourtant, Maître ?"
"Et pourtant comme on le hait pour son austérité, on me haïra pour ma bonté, parce que
l'une et l'autre annoncent Dieu, et Dieu est haï par les méchants. Mais il
est dit qu'il en sera ainsi. Comme il me précède dans la prédication, ainsi
il me précèdera dans la mort. Malheur pourtant aux assassins de la Pénitence
et de la Bonté."
"Pourquoi, Maître, ces tristes pressentiments ? La foule t'aime tu
le vois..."
"Parce que la chose est certaine. La foule humble, oui, elle m'aime.
Mais la foule n'est pas toute humble ni composée d'humbles. Mais mon
pressentiment n'est pas tristesse.
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146> C'est
la vision tranquille de l'avenir et l'adhésion à la volonté du Père qui m'a
envoyé pour cela. Et c'est pour cela que je suis venu. Nous voilà au Temple.
Moi je vais au Bel Midrash , pour enseigner les foules. Reste si tu veux."
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