"L'Évangile tel qu'il m'a été révélé"
de Maria Valtorta

© Fondation héritière de Maria Valtorta.

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 3.218. - L'arrivo ad Ascalona, città filistea.

 2.218. - Arrival at Ashkelon.

 3.218 - La llegada a Ascalón, ciudad filistea

 4.259 - Jesus und die Seinen auf dem Weg nach Askalon.


Dimanche 7 mai 28
(25 Lyar ou Ziv 3788)
Ashqelôn (Ascalon).

Accueil >> Plan du Site >> Sommaire du Tome.

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 80.
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 218.

218
Diverses rencontres à Ashqelôn (Ascalon), ville de Philistie.

 218.1 : En route, le long du rivage, pour la ville déjà en vue.  218.2 : Sur le marché, Thomas marchande des œufs avec un philistin.  218.3 : Pierre demande du pain au philistin Ananias et lui parle du Messie.  218.4 : Ananias retient à manger Jésus et les siens.  218.5 : Jésus lui parle du Royaume pour tous, même les philistins, et de son âme.  218.6 : Jésus envoie les apôtres prêcher en quatre groupes. Seul, il repousse une prostituée, mais accueille les enfants.  218.7 : Il va avec le petit Alexandre qui lui raconte l'histoire de la petite Dina. Jésus se fait remettre un pantin irrespectueux.  218.8 : Il admire les tapis de la fabrique et la bonté de la mère.  218.9 : Il parle du Messie à la petite Dina qui le conduit chez elle.  218.10 : Où il guérit sa mère mourante.

Le samedi 14 juillet 1945.

460>  218.1 – L'aube, de son haleine fraîche, réveille les dormeurs. Ils se lèvent de la couche de sable où ils ont dormi à l'abri d'une dune parsemée de quelques herbes desséchées, et ils grimpent à son sommet. Une profonde côte sableuse se trouve devant eux, alors que tout près et un peu plus loin il y a des terrains qui portent de belles cultures. Un torrent desséché fait ressortir avec ses pierres blanches la couleur blonde du sable. Il s'en va, avec cette blancheur d'os desséchés jusqu'à la mer qui scintille au loin, avec ses flots que gonfle la marée du matin, mais surtout le léger mistral qui ride l'océan. Ils suivent le bord de la dune jusqu'au torrent desséché, le passent, reprennent leur marche en diagonale sur les dunes qui s'éboulent sous leurs pas et qui ainsi toutes ondulées semblent continuer l'océan avec leurs vagues fixes et sèches, à la place des flots agités.      

Ils arrivent à la côte détrempée et marchent plus à leur aise. Jean est comme hypnotisé par le spectacle de la mer sans fin qu'illuminent les premiers rayons du soleil. Il semble boire cette beauté et son œil en devient plus bleu. Pierre, plus pratique, se déchausse, relève son vêtement et patauge dans les flaques de la rive en quête de quelque crabe ou de quelque coquillage à sucer.   

À deux bons kilomètres de distance, une belle ville maritime s'étend le long de la rive sur une ligne de rochers en forme de demi-lune au-delà de laquelle le vent et la tempête ont transporté le sable. Et la barrière rocheuse, maintenant que l'eau se retire après la marée, se découvre aussi à cet endroit, obligeant à revenir sur le sable sec pour ne pas blesser les pieds nus sur les écueils. 

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461> "Par où entrons-nous Seigneur ? D'ici, on ne voit qu'une large muraille. Du côté de la mer, on ne peut entrer. La ville est au point le plus profond de l'arc" dit Philippe.

"Venez, dit Jésus. Je sais par où on entre."    

"Tu y as déjà été ?"          

"Une fois, quand j'étais tout petit et je ne m'en souviendrais pas. Mais je sais par où on passe." 

"Étrange ! Je l'ai remarqué tant de fois... Tu ne te trompes jamais de route. Parfois nous te faisons tromper, mais Toi ! Il semble que tu as toujours été dans le lieu où tu te déplaces" observe Jacques de Zébédée.        

Jésus sourit mais ne répond pas.         

 218.2 – Il va, sûr de Lui, jusqu'à un petit faubourg rural où les maraîchers cultivent des légumes pour la ville. Les petits champs et les jardins sont réguliers et bien entretenus. Femmes et hommes les cultivent et sont en train d'arroser les sillons en tirant l'eau des puits à la force des bras ou bien avec le vieux et grinçant système de seaux soulevés par un pauvre ânon qui, les yeux bandés, tourne autour du puits. Mais ils ne disent rien. Jésus salue :      

"Paix à vous."       

Mais les gens restent, sinon hostiles, du moins indifférents.         

 "Seigneur, ici on court le risque de mourir de faim. Ils ne comprennent pas ton salut. Maintenant je vais essayer, moi" dit Thomas.     

Il aborde le premier maraîcher qu'il voit et lui dit :  

"Ils coûtent chers tes légumes ?"         

"Pas plus que ceux d'autres maraîchers. Chers ou bon marché, cela dépend comme la bourse est garnie."   

"C'est bien dit. Mais comme tu vois, je ne meurs pas de faim. Je suis gras et j'ai de belles couleurs, même sans tes légumes. C'est signe que ma bourse est bien garnie. Bref : nous sommes à treize et nous pouvons acheter. Qu'est-ce que tu vends ?"     

"Des œufs, des légumes, des amandes nouvelles et des pommes qui sont ratatinées car ce n'est pas la saison, des olives... Tout ce que tu veux."    

"Donne-moi des œufs, des pommes et du pain pour tout le monde."       

"Du pain, je n'en ai pas. Tu vas en trouver en ville."

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462> "C'est maintenant que j'ai faim, pas dans une heure. Je ne crois pas que tu n'aies pas de pain."     

"Je n'en ai pas. La femme est en train d'en faire. Mais, tu vois là-bas ce vieux ? Lui en a toujours une grande quantité. Comme il est sur la route, les pèlerins lui en demandent souvent. Va trouver Ananias et demande-lui du pain. Maintenant je t'amène les œufs, mais remarque qu'ils valent un denier
[1] le couple."     

"Voleur ! Ce sont des œufs d'or, peut-être que pondent tes poules ?"       

"Non. Mais ce n'est pas appétissant d'être au milieu de la puanteur des poulets et cela se paie. Et puis, est-ce que vous n'êtes pas juifs ? Payez."   

"Garde-les. Ainsi tu es bien payé".       

Et Thomas lui tourne le dos.     

"Hé ! l'homme ! Viens. Je te les fais meilleur marché. Trois pour un denier."        

"Pas même quatre. Bois-les et qu'ils te restent dans la gorge."      

"Viens, écoute. Combien veux-tu m'en donner ?"    

Le maraîcher suit Thomas.       

"Rien. Je n'en veux plus. Je voulais casser la croûte avant d'aller en ville. Mais c'est mieux ainsi. Je ne perdrai pas ma voix et mon appétit pour chanter les histoires du roi et faire un bon repas à l'hôtellerie."

"Je te les donne pour un didrachme le couple
[2]."     

"Ouf ! tu es pire qu'un taon. Donne-les-moi tes œufs et qu'ils soient frais autrement je reviens et je te fais le museau plus jaune qu'il ne l'est"       

Thomas y va et revient avec au moins deux douzaines d’œufs dans le pli de son manteau.  

"Tu as vu ? Les achats, c'est moi qui les fais à partir de maintenant dans ce pays de voleurs. Je sais comment les prendre. Ils viennent avec de l'argent plein les poches faire des achats chez nous pour leurs femmes, et les bracelets ne sont jamais assez gros et ils marchandent à n'en plus finir. Je me venge.        
 218.3 – Maintenant allons trouver cet autre scorpion. Viens, Pierre, et toi, Jean, prends les œufs."  

Ils vont trouver le vieux qui a son terrain le long de la grand-route qui du côté nord, en longeant les maisons du faubourg, conduit à la ville. C'est une belle route, bien pavée, certainement faite par les Romains. La porte de la ville, du côté de l'orient, est maintenant proche et au-delà on voit que la route continue tout droit, avec un cachet artistique car elle se transforme en un double portique ombragé soutenu par des colonnes de marbre.    

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463> Les gens cheminent dans son ombre fraîche, laissant le milieu de la route aux ânes, chameaux, chiens et chevaux.        

 "Salut ! Tu nous vends du pain ?" demande Thomas.      

Le vieux, ou bien n'entend pas, ou bien ne veut pas entendre. Vraiment le grincement de la noria est tel qu'on ne peut s'entendre.     

Pierre perd patience et crie :     

"Arrête ton Samson ! Laisse-le au moins souffler pour qu'il ne meure pas sous mes yeux, et écoute-nous !"      

L'homme arrête sa bourrique et regarde de travers son interlocuteur, mais Pierre le désarme en disant :    

"Hé ! est-ce que Samson n'est pas un nom approprié pour une bourrique ? Si tu es philistin cela doit te plaire, car c'est une insulte pour Samson. Si tu es d'Israël cela doit te plaire, car cela rappelle une défaite des philistins
[3]. Tu vois donc..."      

"Je suis philistin et je m'en vante."      

"Tu fais bien. Je te vanterai moi aussi si tu nous donnes du pain."

"Mais, n'es-tu pas juif ?"

"Je suis chrétien."

"Où cela se trouve-t-il ?"

"Ce n'est pas un endroit. C'est une personne. J'appartiens à cette personne."        

"Tu es son esclave ?"       

"Je suis libre plus que n'importe qui, car celui qui appartient à cette personne ne dépend plus que de Dieu."   

"Tu dis vrai ? Pas même de César ?"    

"Pouah ! Qu'est-ce César devant Celui que je suis, et auquel j'appartiens, et au nom de qui je te demande du pain !"   

"Mais, où est cet homme puissant ?"  

"Cet homme là-bas qui nous regarde et sourit. C'est le Christ, le Messie. Tu n'en as jamais entendu parler ?"          

"Si, le roi d'Israël. Il vaincra Rome ?"  

"Rome ? Mais le monde entier et même l'Enfer."     

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464> "Et vous, vous êtes ses généraux ? Habillés ainsi ? Peut-être pour fuir les persécutions des juifs perfides ?"         

"Oui et non, mais donne-moi du pain et, pendant que nous mangeons, je t'expliquerai."

"Du pain ? Mais de l'eau aussi, et du vin et des sièges à l'ombre, pour toi, ton compagnon et ton Messie. Appelle-le."           

Et Pierre court vivement vers Jésus :  

"Viens, viens. Il nous donne
ce que nous voulons, ce vieux philistin. Je crois pourtant qu'il va t'assaillir de questions... Je lui ai dit qui tu es... Je le lui ai dit en gros. Mais il est bien disposé."        

 218.4 – Ils vont tous dans le jardin où l'homme a déjà installé des bancs autour d'une table grossière sous une tonnelle bien garnie de vigne.        

"La paix à toi, Ananias. Que grâce à ta charité ta terre soit féconde et te donne de beaux produits."        

"Merci. Paix à Toi. Assieds-toi, assoyez-vous. Anibé ! Nubi ! Du pain, du vin, de l'eau. Tout de suite" commande le vieux à deux femmes.          

Ce sont sûrement des africaines car l'une est tout à fait noire avec des lèvres épaisses et des cheveux crépus, l'autre a le teint très foncé, bien qu'elle soit de type plus européen
[4]. Et le vieux explique :    

"Les filles des esclaves de ma femme. Elle est morte, et mortes aussi celles qui étaient venues avec elle, mais les filles sont restées. Haut et Bas Nil. Mon épouse était de là-bas. C'est défendu, hein ? Mais moi je n'en ai cure. Je ne suis pas d'Israël, et les femmes de race inférieure sont douces."

"Tu n'es pas d'Israël ?"   

"Je le suis par force, car nous avons Israël sur le cou comme un joug. Mais... Tu es israélite et cela t'offense, ce que je dis… ?"      

"Non, je ne m'en offusque pas. Je voudrais seulement que tu écoutes la voix de Dieu."

"Il ne nous parle pas à nous."   

"C'est toi qui le dis. Moi, je te parle, et c'est sa voix."

"Mais, tu es le Roi d'Israël."      

Les femmes qui arrivent avec le pain, l'eau et le vin et qui entendent parler de "roi" s'arrêtent, interdites en regardant le jeune homme blond, souriant, digne, que leur maître appelle "roi" et puis se retirent se courbant presque jusqu'à terre, par respect.

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465> "Merci, femmes, et la paix aussi à vous."         

Puis, se tournant vers le vieil homme :

"Elles sont jeunes... Tu peux aussi continuer ton travail."  

"Non. La terre est arrosée et elle peut attendre. Parle un peu. Anibé, détache l'âne et rentre-le. Et toi, Nubi, vide les derniers seaux et puis... Tu t'arrêtes, Seigneur ?"

"Ne te dérange pas davantage. Il me suffit de prendre un peu de nourriture, et après, j'entre à Ashqelôn."        

"Non, cela ne me dérange pas. Oui, va en ville, mais viens ce soir. Nous romprons le pain et nous partagerons le sel
[5]. Dépêchez-vous ! Toi, au pain. Toi, appelle Geteo pour qu'il tue un chevreau et prépare-le pour ce soir. Allez."        

Et les deux femmes s'en vont sans parler.      

 218.5 – "Alors, tu es roi ? Mais tes armes ? Hérode est cruel, de toutes manières. Il nous a reconstruit Ashqelôn, mais c'est pour sa gloire. Et maintenant… ! Mais les hontes d'Israël, Toi, tu les connais mieux que moi. Comment feras-tu ?"      

"Je n'ai d'autre arme que celle qui me vient de Dieu."        

"L'épée de David ?"         

"L'épée de ma parole."   

"Oh ! pauvre rêveur ! Elle s'épointera et perdra son fil sur le bronze des cœurs."        

"Tu crois ? Je ne vise pas à un royaume terrestre. Pour vous tous, je vise au Royaume des Cieux."     

"Nous tous ? Même moi, philistin ? Même mes esclaves ?"

"Tous. Toi et elles et jusqu'au plus sauvage au centre des forêts africaines."        

"Tu veux faire un si grand royaume ? Pourquoi l'appelles-tu Royaume des Cieux ? Tu pourrais l'appeler : Royaume de la Terre."        

"Non, ne te méprends pas. Mon Royaume est le Royaume du vrai Dieu. Dieu est au Ciel. Par conséquent, c'est le Royaume du Ciel. Tout homme est une âme revêtue d'un corps, et l'âme ne peut vivre que dans les Cieux. Je veux vous guérir l'âme, en enlever les erreurs et les rancœurs, la mener à Dieu par la bonté et l'amour."

"Cela me plaît beaucoup. Les autres, moi, je ne vais pas à Jérusalem, mais je sais que les autres d'Israël depuis toujours ne parlent pas ainsi. Alors, tu ne nous hais pas ?"   

"Je ne hais personne."   

Le vieil homme réfléchit... et demande :        

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466> "Et les deux esclaves ont aussi leur âme, comme vous d'Israël ?"   

"Certainement. Ce ne sont pas des bêtes qu'on a capturées. Ce sont des créatures malheureuses qu'on doit aimer. Les aimes-tu ?"

"Je ne les traite pas mal. Je veux qu'elles obéissent, mais je n'emploie pas le fouet et je les nourris bien. Une bête mal nourrie ne travaille pas, dit-on. Mais même l'homme mal nourri n'est pas un bon travailleur. Et puis, elles sont nées dans la maison. Je les ai vues toutes petites. Maintenant il ne reste qu'elles parce que je suis très vieux, sais-tu ? Presque quatre-vingt ans, Elles et Geteo c'est ce qui me reste de ma maison d'autrefois. J'y suis attaché comme à mes meubles. Elles me fermeront les yeux..."        

"Et puis ?" 

"Et puis... Mais ! Je ne sais pas. Elles entreront en service et la maison se défera. Cela me déplaît. Elle est devenue riche, grâce à mon travail. Cette terre redeviendra sableuse, stérile... Cette vigne... Nous l'avons plantée, ma femme et moi. Et ce rosier... égyptien, Seigneur. C'est l'odeur de mon épouse que je sens en lui... Il me semble que c'est un fils... le fils unique qui est enterré, poussière désormais à ses pieds... Douleurs... Il vaut mieux mourir jeune et ne pas voir cela et la mort qui arrive..."   

"Ton fils n'est pas mort, ni ta femme. L'esprit survit. La chair est morte. La mort ne doit pas effrayer. Elle est vie, la mort pour qui espère en Dieu et vit en juste. Penses-y ...Je vais en ville. Je reviendrai ce soir et je te demanderai ce portique pour dormir avec les miens."

"Non, Seigneur. J'ai plusieurs chambres vides. Je te les offre."     

Judas met de l'argent sur la table.       

"Non. Je n'en veux pas. Je suis de cette terre qui vous est odieuse, mais je suis peut-être meilleur que ceux qui nous dominent. Adieu, Seigneur."         

"Paix à toi, Ananias."      

Les deux esclaves sont accourues avec Geteo, un homme robuste, ancien paysan, pour le voir partir :       

"Paix aussi à vous. Soyez-bons. Adieu" et Jésus effleure les cheveux crépus de Nubi et ceux luisants et raides d'Anibé, il sourit à l'homme et s'en va.     

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467>  218.6 – Peu après, ils entrent dans Ashqelôn par la rue au double portique qui va tout droit au centre de la ville et qui singe Rome avec ses bassins et ses fontaines, avec ses places qui servent de Forum, avec ses tours le long de l'enceinte et partout le nom d'Hérode mis par lui-même pour s'applaudir étant donné que les Ascalonites ne l'applaudissent pas. Il y a beaucoup de circulation et elle augmente à mesure que l'heure avance et qu'on approche du centre de la cité, ouverte, aérée, avec des échappées de lumière sur la mer qui paraît enfermée comme une turquoise dans une tenaille de corail rose par les maisons éparses le long de l'arc profond qui forme la côte, non pas un golfe, mais un arc véritable, une portion de cercle que le soleil teint toute entière d'un rose très pâle.        

"Partageons-nous en quatre groupes. Je pars, ou plutôt je vous laisse aller. Puis je choisirai. Allez. Après la neuvième heure, on se retrouve à la Porte par où nous sommes entrés. Soyez prudents et patients."  

Et Jésus les regarde partir, resté seul avec Judas Iscariote qui a déclaré qu'il ne leur parlera pas parce qu'ils sont pires que des païens. Mais quand il s'est rendu compte que Jésus veut aller çà et là sans parler, alors il change d'avis et il dit :         

"Te déplaît-il de rester seul ? Moi, j’irais avec Matthieu, Jacques et André. Ce sont les moins capables..."        

"Vas-y. Adieu."    

Et Jésus seul, fait un tour dans la ville, se promenant en long et en large, anonyme au milieu des gens occupés qui ne le remarquent même pas, Seuls deux ou trois enfants curieux le dévisagent et une femme à la tenue provocante va résolument à sa rencontre avec un sourire plein de sous-entendus. Mais Jésus la regarde si sévèrement qu'elle devient rouge comme la pourpre et s'en va en baissant les yeux. Au coin de la ruelle se retourne encore, et comme un homme du peuple qui a observé la scène lui lance une plaisanterie mordante et méprisante à cause de son peu de succès, alors elle s'enveloppe dans son manteau et s'enfuit.        

 Les enfants, au contraire, tournent autour de Jésus, le regardent, sourient en le voyant sourire. L'un d'eux plus hardi Lui demande : 

"Qui es-tu ?"        

"Jésus" répond-il en le caressant.        

"Que fais-tu ?"     

"J'attends des amis."      

"D'Ashqelôn ?"    

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468> "Non, de mon pays et de la Judée."       

"Es-tu riche ? Moi, oui. Mon père a une belle maison et, à l'intérieur, il fait des tapis. Viens voir. C'est tout près d'ici."

Et Jésus s'en va seul avec l'enfant. Il entre sous un porche très long qui est comme un chemin couvert. Au fond, rendu plus vif par la pénombre du porche, resplendit un coin de la mer, tout illuminé par le soleil.     

 218.7 – Ils rencontrent une fillette chétive qui pleure.         

"C'est Dina. Elle est pauvre, sais-tu ? Ma mère lui donne de la nourriture. Sa mère ne peut plus gagner sa vie. Son père est mort en mer. Une tempête, pendant qu'il allait de Gaza au port du Grand Fleuve
[6] porter des marchandises et en prendre. Comme les marchandises étaient à mon père et que le père de Dina menait notre bateau, maman maintenant pense à eux. Mais ils sont si nombreux les enfants restés ainsi sans père... Qu'en dis-tu, Toi ? Ce doit être dur de rester orphelins et pauvres. Voici ma maison. Ne dis pas que j'étais dans la rue. Je devais être à l'école, mais on m'a renvoyé parce que je faisais rire les camarades avec cela..."   

Et il sort de ses vêtements un pantin taillé dans le bois, dans un morceau de bois tendre, très comique réellement, pourvu d'un menton en galoche et d'un nez très caricaturaux.     

Jésus esquisse un sourire qui Lui tremble sur les lèvres, mais il le refrène et dit : 

"Ce n'est pas le maître, n'est-ce pas ? Ni non plus un parent ? Ce n'est pas bien."        

"Non. C'est le chef de la synagogue des juifs. Il est vieux et laid, et nous nous moquons toujours de lui."        

"Ce n'est pas bien non plus cela. Il est sûrement plus âgé que toi et..."    

"Oh ! c'est un vieux, à moitié bossu et presque aveugle et tellement laid !... Ce n'est pas ma faute s'il est ainsi !"          

"Non, mais tu es fautif de te moquer d'un vieillard. Toi aussi, devenu vieux, tu deviendras laid car tu te voûteras, tu n'auras plus beaucoup de cheveux, à moitié aveugle, tu marcheras avec un bâton. Tu auras ce visage. Et alors ? Cela te plaira d'être alors ridiculisé par un enfant irrespectueux ? Et puis, pourquoi fâcher le maître, distraire tes camarades ? Ce n'est pas bien. Ton père, s'il le savait, te punirait. Ta mère en souffrirait. Moi, je ne leur dirai rien. Mais toi, donne-moi tout de suite deux choses : la promesse de ne plus faire de ces manquements et ce fantoche. Qui l'a fait ?"   

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469> "Moi, Seigneur..." dit l'enfant mortifié, conscient maintenant de la gravité de ses... méfaits...          

Et il ajoute :          

"Cela me plaît tant de travailler le bois ! Parfois j'imite les fleurs des tapis ou les animaux qui s'y trouvent. Sais-tu ? ...Les dragons, les sphinx, et d'autres bêtes encore..."    

"Cela, tu peux le faire. Il y a tant de belles choses sur la terre ! Donc, tu me fais la promesse et tu me donnes ce fantoche ? Sinon, nous ne sommes plus amis. Je le garderai en souvenir de toi et prierai pour toi. Comment t'appelles-tu ?"        

"Alexandre. Et Toi, qu'est-ce que tu me donnes ?" Jésus est embarrassé. Il a toujours si peu de choses ! Mais ensuite il se rappelle qu'il a une très belle boucle au col d'un vêtement. Il cherche dans son sac, la trouve, la détache et la donne à l'enfant.  

"Et maintenant, allons. Mais fais attention même si je pars, cela ne m'empêche pas de tout savoir. Et si j'apprends que tu es méchant, je reviens ici et je dis tout à ta maman."

Cela est convenu.

 218.8 – Ils entrent dans la maison. Après le vestibule, il y a une grande cour avec, sur trois côtés, des grandes pièces où sont les métiers.         

La servante qui a ouvert, étonnée de voir l'enfant avec un inconnu, prévient sa maîtresse, et celle-ci, une femme de grande taille, à l'aspect plein de douceur, accourt et demande :      

"Mais l'enfant s'est peut-être senti mal ?"      

"Non, femme. Il m'a amené pour voir tes tapis. Je suis étranger."

"Tu veux faire des achats ?"      

"Non. Je n'ai pas d'argent, mais j'ai des amis qui aiment les belles choses et qui sont riches."         

La femme regarde avec curiosité cet homme qui avoue ainsi sa pauvreté, sans faire de phrases, et elle dit :      

"Je croyais que tu étais un seigneur. Tu as des manières et une mine de grand seigneur." 

"Pas du tout. Je suis simplement un rabbi galiléen : Jésus, le Nazaréen."

"Nous, nous faisons du commerce et nous n'avons pas de préventions. Viens et regarde."           

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470> Elle l'amène voir ses-tapis auxquels travaillent des jeunes filles sous la direction de la maîtresse. Les tapis sont vraiment de grande valeur, pour leurs dessins et leurs couleurs. Grands, souples, on dirait des parterres tout en fleurs ou un kaléidoscope de pierres précieuses. D'autres ont, mêlées aux fleurs, des figures allégoriques comme des hippogriffes, des sirènes, des dragons, ou bien des griffons héraldiques semblables aux nôtres.      

Jésus admire : "Tu es très habile. Je suis content d'avoir vu tout cela. Et je suis content que tu sois bonne."      

"Comment le sais-tu ?"  

"Cela se voit sur ton visage. Et ton enfant m'a parlé de Dina. Dieu t'en récompense. Même, sans le croire, tu es très proche de la Vérité car tu as la charité en toi."     

"Quelle vérité ?"  

"Celle du Seigneur Très-Haut. Celui qui aime le prochain et qui dans sa famille et chez les ouvriers exerce la charité et la déploie sur les malheureux possède déjà en lui-même la Religion.   
 218.9 – Cette petite, c'est Dina, n'est-ce pas ?"          

"Oui, sa mère est mourante. Après je la prendrai, pas pour les tapis. Elle est trop petite et trop grêle. Viens Dina, auprès de ce seigneur."         

La fillette, qui a le visage triste des enfants malheureux, s'approche timidement. Jésus la caresse et dit :    

"Me conduis-tu chez ta mère ? Tu voudrais bien qu'elle guérisse, n'est-ce pas ? Alors, emmène-moi chez elle. Adieu, femme. Et adieu Alexandre, et sois bon."        

Il sort en tenant la fillette par la main.

"Tu es seule ?" demande-t- il.   

"J'ai trois petits frères. Le dernier n'a pas connu son père."

"Ne pleure pas. Es-tu capable de croire que Dieu peut guérir ta mère ? Tu sais, n'est-ce pas, qu'il existe un seul Dieu qui aime les hommes que Lui a créés, et spécialement les enfants qui sont bons ? Et qu'il peut tout ?"        

"Je le sais, Seigneur. Auparavant, mon frère Tolmé allait à l'école, et à l'école, ils sont avec les juifs. Par lui, on sait tant de choses. Je sais qu'il existe et qu'il s'appelle
Jéové et qu'il nous a punis parce que les philistjns ont été mauvais avec Lui.    

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471> Les enfants hébreux nous le reprocheront toujours. Mais en ce temps-là, je n'existais pas, ni maman ni mon père. Pourquoi alors..."

Les larmes lui coupent la parole.         

"Ne pleure pas. Dieu t'aime, toi aussi, et il m'a conduit ici pour toi et pour ta maman. Tu sais que les israélites attendent le Messie qui doit venir pour établir le Royaume des Cieux ? Le Royaume de Jésus, Rédempteur et Sauveur du monde ?"  

"Je le sais, Seigneur. Et ils nous menacent en disant : "Alors, malheur à vous"        

"Et sais-tu ce que fera le Messie ?"      

"Il fera un grand peuple d'Israël et nous traitera très mal."

"Non. Il rachètera le monde, il enlèvera le péché, il apprendra à ne pas pécher. Il aimera les pauvres, les malades, les affligés. Il ira vers eux. Il apprendra aux riches, aux sains, aux heureux à les aimer. Il recommandera d'être bons pour avoir la Vie éternelle et bienheureuse au Ciel. C'est cela qu'il fera et il n'opprimera personne." 

"Et comment comprendra-t-on que c'est Lui ?"       

"Parce qu'il aimera tout le monde et guérira les malades qui croiront en Lui, il rachètera les pécheurs et apprendra l'amour."         

"Oh ! s'il était ici avant que maman ne meure ! Comme je croirais, moi ! Comme je le prierais ! J'irais le chercher jusqu'à ce que je le trouve et je lui dirais : "Je suis une pauvre enfant sans père, ma mère se meurt. J'espère en Toi" et je suis sûre, bien qu'étant philistine qu'il m'accueillerait."

Toute une foi, simple et forte vibre dans la voix de la fillette. Jésus sourit en regardant la pauvre petite qui marche à côté de Lui. Elle ne voit pas ce sourire qui brille, parce qu'elle regarde devant, du côté de la maison, maintenant proche.      

 218.10 – Ils arrivent à une cabane bien pauvre au fond d'une impasse.    

"C'est ici, Seigneur, entre..."     

Une pauvre chambrette, une paillasse avec dessus un corps épuisé. Trois petits, de dix à trois ans, assis près de la paillasse. Partout un tableau de misère et de faim. 

"Paix à toi, femme. Ne t'agite pas. Ne te dérange pas. J'ai trouvé ta fillette et je sais que tu es malade. Je suis venu. Voudrais-tu guérir ?" 

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472 La femme n'a qu'un filet de voix pour répondre :         

"Oh ! Seigneur… ! Mais pour moi c'est fini… !"         

Elle pleure.

"Ta fille est arrivée à croire que le Messie pourrait te guérir. Et toi ?"      

"Oh ! moi, je le croirais aussi, mais où est le Messie ?"       

"C'est Moi, qui te parle" 

Et Jésus qui était penché sur la paillasse, murmurant ses paroles près du visage de la malade, se redresse et crie :         

"Je le veux. Sois guérie."

Les petits ont presque peur de son air majestueux et ils restent trois visages surpris, autour du grabat de la mère.  

Dina serre ses mains contre sa petite poitrine. Une lueur d'espoir, de béatitude brille sur son petit visage. Elle halète, pour ainsi dire, si grande est son émotion. Elle a la bouche ouverte pour dire une parole que déjà son cœur murmure, et quand elle voit sa mère auparavant cireuse et abandonnée, comme si maintenant une force l’attirait et la pénétrait, qui se dresse pour s'asseoir et puis, toujours avec ses yeux dans ceux du Sauveur, qui se lève, Dina pousse un cri de joie : "Maman !" La parole qui gonflait son cœur est dite !... Et puis une autre : "Jésus !" Et, embrassant sa mère, elle l'oblige à s'agenouiller en disant : 

"Adore ! Adore ! C'est Lui, celui dont le maître de Tolmé disait : le Messie annoncé par les Prophètes."



"Adorez le vrai Dieu, soyez bons, souvenez-vous de Moi. Adieu." 

Et il sort vivement pendant qu'heureuses, les deux femmes restent prosternées par terre... 

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Fiche mise à jour le 31/01/2024.

 



[1] Le denier est le salaire journalier d’un ouvrier agricole. Le didrachme vaut 2 deniers. C’est la monnaie du Temple.          

[2] Il doit s’agir du couple de douzaines que l’on voit dans les bras de Thomas, car s’il s’agissait de deux œufs, la négociation serait revenue au point de départ.           

[3] Nous trouvons le récit des entreprises de Samson contre les Philistins en Juges, chapitres 14 à 16.
En outre, les combats entre Israël et les Philistins dont il est fait mention dans ce chapitre et dans les suivants (jusqu’en
EMV 221.9) sont le sujet dominant de 1 Samuel, chapitres 4 à 7 (Samuel)| Chapitres 13, 14 et 17 (Saül)| Chapitres 23 et 28 (David) | Chapitre 31 (mort de Saül).          

[4] Il s’agit sans doute de deux nubiennes dont l’une était du sud de l’Egypte (Anibé) et l’autre du Soudan (Nubi).       

[5] Rite très ancien du repas d’alliance qui perdure encore en orient. On en trouve une trace dans l’alliance avec Dieu (Lévitique 2,13).         

[6] Alexandrie, dans le delta du Nil.