|
Le récent communiqué du Dicastère pour la Doctrine
de la Foi concernant les écrits de Maria Valtorta suscite des
réactions contrastées : si ce texte du Vatican comporte des motifs de
satisfaction pour les lecteurs de Maria Valtorta, il met aussi en lumière des
ambiguïtés persistantes — et révèle, chez certains commentateurs français,
une méconnaissance préoccupante du discernement sur les révélations privées.
Des signes encourageants
Haut de page.
Commençons par les éléments positifs. Ce communiqué apporte à
tout lecteur des œuvres de Maria Valtorta deux motifs clairs
de satisfaction :
1. Une reconnaissance implicite de l’ampleur
du lectorat.
Le Vatican constate lui-même l’affluence croissante autour de ces écrits. Le
fait même qu’un document du Dicastère s’y intéresse témoigne de leur
rayonnement mondial, et d’un impact spirituel désormais impossible à ignorer.
2. Le maintien de la liberté de lecture avec
discernement.
Depuis plus de trente ans, l’Église ne proscrit pas la lecture de ces textes.
Elle en recommande une approche prudente, ce qui est habituel pour les
révélations privées non encore reconnues officiellement. Le Dicastère
confirme ici cette position : il n’y a ni interdiction, ni condamnation,
mais une invitation au discernement personnel.
Une attente toujours présente
Haut de page.
Ce discernement, pour beaucoup de fidèles, nourrit
aujourd’hui une espérance : celle d’une reconnaissance explicite de la valeur
spirituelle de ces écrits, par exemple sous la forme d’un
nihil
obstat.
Et cette espérance ne repose pas sur un enthousiasme naïf. Elle s’appuie sur
une série de soutiens significatifs :
·
L’encouragement oral donné par le pape Pie XII
en 1948.
·
La position conciliante du cardinal Ratzinger,
alors préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, en 1992.
·
Les catéchèses pastorales de l’évêque diocésain
en responsabilité pour la cause de Maria Valtorta (2021–2024).
·
Et plus récemment, une appréciation
bienveillante du Pape François
lui-même.
Ces prises de position — même privées — constituent une continuité
bienveillante, qui appelle logiquement à une
reconnaissance publique des fruits spirituels que ces écrits suscitent depuis
des décennies.
Une inquiétude légitime face aux
réactions médiatiques
Haut de page.
Mais en marge du communiqué, un autre sujet de préoccupation
apparaît : la
réception médiatique en France.
Certains médias, pourtant spécialisés dans les questions religieuses, ont
réagi avec un ton marqué par la suspicion,
voire le
rejet caricatural. Deux formes d’ignorance s’y croisent :
·
Une ignorance du dossier Valtorta,
sans doute excusable tant il est complexe.
·
Mais aussi, et plus préoccupant, une ignorance
— ou un rejet — du principe même des révélations privées.
Ce qui, venant de voix chrétiennes, est autrement plus grave.
Or, comme le rappelle saint Paul, et avec lui toute la
Tradition, il
y a bien “révélation” dans les révélations privées.
C’est-à-dire une possible action de l’Esprit-Saint,
qu’il convient de discerner
à la lumière des fruits. Il ne s’agit pas de tout croire
aveuglément, mais de ne pas mépriser a priori,
et d’“examiner toute chose pour retenir
ce qui est bon”
(1 Thessaloniciens 5,19-21). Le
cardinal Ratzinger lui-même soulignait cette exigence évangélique.
Aujourd’hui encore, on constate chez certains observateurs le
refus de prendre en compte les fruits spirituels —
pourtant manifestes — produits par les écrits de Maria Valtorta : conversions,
vocations, guérisons intérieures, retour à la prière, amour de l’Évangile…
On préfère leur opposer des arguments à charge,
glanés dans une étude documentaire univoque, sans égard pour les lois minimales du discernement.
Le précédent de Medjugorje
Haut de page.
Cette posture de rejet systématique n’est pas nouvelle. Elle
fut déjà observée avec les apparitions de Medjugorje.
Longtemps contestée, cette source de foi et de conversion a fini par recevoir
— après des décennies de débats — le nihil obstat.
Il s’agit là de la plus
haute reconnaissance possible dans le cadre des nouvelles
normes édictées par l’Église.
Le Dicastère, dans son décret, souligne l’abondance des
fruits spirituels constatés à Medjugorje. On
aurait pu s’attendre à un large soulagement, voire un chant d’action de
grâce. Or, certains commentateurs persistent dans une posture d’obstruction :
"Nihil obstat ? Oui, mais l’Église ne reconnaît pas l’origine
surnaturelle, et appelle à la prudence vis-à-vis des voyants…"
Ce type de remarque révèle une profonde méconnaissance des
normes actuelles :
- L’Église ne
décrète jamais le caractère surnaturel d’un phénomène encore en cours.
- Ce n’est pas l’objet des nouvelles procédures de discernement qui
consacrent, par ailleurs, l’importance du sensus fidelium (sens spontané de la foi par les fidèles).
- Même les apparitions reconnues, comme Lourdes
ou Fatima, n’exigent pas un assentiment de foi
théologale, mais seulement un assentiment prudent, fondé sur la raison et les fruits.
De plus, s’il y avait eu de réelles réserves doctrinales ou
pastorales, le
Dicastère aurait choisi une formule plus nuancée —
parmi les six options canoniques possibles — et non la
plus favorable.
Accueillir l’Esprit là où Il souffle
Haut de page.
L’action de l’Esprit ne se laisse jamais enfermer dans des
schémas préétablis. Il agit où Il veut, comme Il veut, souvent
par
des voies imprévues, voire déroutantes.
Mgr Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille et nouveau président de la
Conférence des évêques de France, le constatait récemment à propos de l’augmentation
des demandes de baptême, après des années de déclin. Il
notait que ces nouveaux
catéchumènes ne venaient pas frapper à la porte de l’Église
selon des itinéraires classiques, mais par des chemins insolites
: les réseaux sociaux, les rencontres providentielles, les témoignages vécus.
Cette situation, disait-il, pose une question fondamentale
: comment allons-nous les accueillir ? Comment leur permettre de rester dans
l’Église et d’y grandir ?
Ce même accueil s’impose à nous pour les révélations privées,
qu’elles soient à Medjugorje (depuis 44 ans) ou dans les écrits de Maria
Valtorta (depuis plus de 65 ans).
Ces œuvres ont tenu bon. Elles ont traversé les
décennies, les oppositions, les procès d’intention. Rien
ne les a arrêtées. Et comme le disait Gamaliel,
membre du Sanhédrin, face aux premières communautés chrétiennes :
« Si leur
entreprise vient des hommes, elle disparaîtra. Mais si elle vient de Dieu,
vous ne pourrez pas les faire tomber. Prenez garde de ne pas vous retrouver
en guerre contre Dieu. » (Actes 5,39)
L’Église n’impose pas de croire à ces révélations. Le Catéchisme de
l’Église catholique (n° 67) rappelle que leur
réception relève d’un
assentiment libre, éclairé, prudent — non d’un acte de foi théologale.
Mais à ceux qui ne croient pas à leur origine surnaturelle,
l’Église demande au moins une chose : reconnaître les fruits.
Ne pas mépriser l’œuvre simplement parce qu’elle dérange. Ne pas fermer les
yeux sur les conversions, les appels, les élans de foi qu’elle suscite.
C’est là, peut-être, le premier devoir spirituel : accueillir ce que
Dieu accomplit, même quand cela nous échappe.
François-Michel
Debroise
|