| 
 
 
 TEXTES
  DE RÉFÉRENCE  Constitution
  pastorale
 GAUDIUM ET SPES
 sur l'Église dans le monde
 de ce temps
 (Paul VI - 7 décembre 1965)
  Lettre
  encyclique
 MATER ET MAGISTRA
 sur le rôle social de l'Église
 (Jean XXIII - 15 mai 1961)
  Lettre
  encyclique
 CENTESIMUS ANNUS
 pour le centenaire
 de Rerum Novarum
 (Jean-Paul II - 1er mai 1991)
  Lettre encyclique
 QUAGRAGESIMO ANNO
 sur l’instauration
 de l’ordre social
 (Pie XI – 15 mai 1931)
  Lettre
  encyclique
 PACEM IN TERRIS
 sur la paix entre toutes les nations
 (Jean XXIII -11 avril 1963)
  Constitution
  dogmatique
 LUMEN GENTIUM
 sur l'Église
 (Paul VI -21 novembre 1964)
  Lettre encyclique
 IMMORTALE DEI
 sur la constitution chrétienne
 des États
 (Léon XIII – 1er novembre 1885)
  Lettre encyclique
 DIUTURNUM ILLUD
 sur l’origine du pouvoir civil
 (Léon XIII – 28 juin 1881)
  Lettre encyclique
 SOLICITUDO REI SOCIALIS
 sur la question sociale
 (Jean-Paul II - 30 décembre 1987)
  Lettre
  encyclique
 SUMMI PONTIFICATUS
 sur l'unité du genre humain
 (Pie XII - 20 octobre 1939)
 | Chapitre Deuxième :         La communauté humaine.
 1877La vocation de l’humanité est de
  manifester l’image de Dieu et d’être transformée à l’image du Fils Unique du
  Père. Cette vocation revêt une forme personnelle, puisque chacun est appelé à
  entrer dans la béatitude divine ; elle concerne aussi l’ensemble de la
  communauté humaine.
 Article 1 :    La Personne et la Société.
 Haut de page           
 I. Le caractère communautaire de la vocation humaine.
 
 
 1878
 Tous les hommes sont appelés à la même fin,
  Dieu lui-même. Il existe une certaine ressemblance entre l’unité des
  personnes divines et la fraternité que les hommes doivent instaurer entre
  eux, dans la vérité et l’amour(1). L’amour du prochain est inséparable de l’amour pour
  Dieu.
 --------------------------------------
 (1) cf. Gaudium et spes 24, § 3.
 
 
 1879
 La personne humaine a besoin de la vie sociale. Celle-ci ne constitue
  pas pour elle quelque chose de surajouté, mais une exigence de sa nature. Par
  l’échange avec autrui, la réciprocité des services et le dialogue avec ses
  frères, l’homme développe ses virtualités ; il répond ainsi à sa
  vocation(1).
 --------------------------------------
 (1) cf. Gaudium et spes
  25, § 1.
 
 
 1880
 Une société est un ensemble de personnes liées de façon
  organique par un principe d’unité qui dépasse chacune d’elles. Assemblée à la
  fois visible et spirituelle, une société perdure dans le temps : elle
  recueille le passé et prépare l’avenir. Par elle, chaque homme est constitué
  "héritier", reçoit des "talents" qui enrichissent son
  identité et dont il doit développer les fruits(1). À juste titre,
  chacun doit le dévouement aux communautés dont il fait partie et le respect
  aux autorités en charge du bien commun.
 --------------------------------------
 (1) cf. Luc 19, 16. 19.
 
 
 1881
 Chaque communauté se définit par son but et obéit en conséquence à
  des règles spécifiques, mais "la personne humaine est et doit
  être le principe, le sujet et la fin de toutes les institutions
  sociales"(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  25, § 1.
 
 
 1882
 Certaines sociétés, telles que la famille et la cité, correspondent
  plus immédiatement à la nature de l’homme. Elles lui sont nécessaires. Afin
  de favoriser la participation du plus grand nombre à la vie sociale, il faut encourager
  la création d’associations et d’institutions d’élection "à buts
  économiques, culturels, sociaux, sportifs, récréatifs, professionnels,
  politiques, aussi bien à l’intérieur des communautés politiques que sur le
  plan mondial"(1). Cette "socialisation" exprime
  également la tendance naturelle qui pousse les humains à s’associer, en vue
  d’atteindre des objectifs qui excèdent les capacités individuelles. Elle
  développe les qualités de la personne, en particulier, son sens de
  l’initiative et de la responsabilité. Elle aide à garantir ses droits(2).
 --------------------------------------
 (1) Mater et magistra 60 – (2) cf. Gaudium et spes 25, § 2 ; Centesimus annus 12.
 
 
 1883
 La socialisation présente aussi des dangers. Une intervention trop
  poussée de l’État peut menacer la liberté et l’initiative personnelles. La
  doctrine de l’Église a élaboré le principe dit de subsidiarité. Selon
  celui-ci, "une société d’ordre supérieur ne doit pas intervenir dans la
  vie interne d’une société d’ordre inférieur en lui enlevant ses compétences,
  mais elle doit plutôt la soutenir en cas de nécessité et l’aider à coordonner
  son action avec celle des autres éléments qui composent la société, en vue du
  bien commun"(1)
 --------------------------------------
 (1) Centesimus annus
  48 ; cf. Quadragesimo anno.
 
 
 1884
 Dieu n’a pas voulu retenir pour lui seul
  l’exercice de tous les pouvoirs. Il remet à chaque créature les fonctions
  qu’elle est capable d’exercer, selon les capacités de sa nature propre. Ce
  mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le comportement de
  Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands égards pour la
  liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les
  communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence
  divine.
 
 
 1885
 Le principe de subsidiarité s’oppose à toutes les formes de
  collectivisme. Il trace les limites de l’intervention de l’État. Il vise à
  harmoniser les rapports entre les individus et les sociétés. Il tend à
  instaurer un véritable ordre international.
 
 
 Haut de page
 
 II. La Conversion et la Société.
 
 
 1886
 La société est indispensable à la réalisation de la vocation humaine. Pour
  atteindre ce but il faut que soit respectée la juste hiérarchie des valeurs
  qui "subordonne les dimensions physiques et instinctives aux dimensions
  intérieures et spirituelles"(1) :
 La vie en société doit être considérée avant tout comme une réalité d’ordre
  spirituel. Elle est, en effet, échange de connaissances dans la lumière de la
  vérité, exercice de droits et accomplissement des devoirs, émulation dans la
  recherche du bien moral, communion dans la noble jouissance du beau en toutes
  ses expressions légitimes, disposition permanente à communiquer à autrui le
  meilleur de soi-même et aspiration commune à un constant enrichissement
  spirituel. Telles sont les valeurs qui doivent animer et orienter l’activité
  culturelle, la vie économique, l’organisation sociale, les mouvements et les
  régimes politiques, la législation et toutes les autres expressions de la vie
  sociale dans sa continuelle évolution(2).
 --------------------------------------
 (1) Centesimus annus
  36 – (2) Pacem in terris 35.
 
 
 1887
 L’inversion des moyens et des fins(1), qui aboutit à
  donner valeur de fin ultime à ce qui n’est que moyen d’y concourir, ou à
  considérer des personnes comme de purs moyens en vue d’un but, engendre des
  structures injustes qui "rendent ardue et pratiquement impossible une
  conduite chrétienne, conforme aux commandements du Divin Législateur"(2).
 --------------------------------------
 (1) cf. Centesimus annus
  41 – (2) Pie XII,
  discours 1er juin 1941.
 
 
 1888
 Il faut alors faire appel aux capacités spirituelles et morales de
  la personne et à l’exigence permanente de sa conversion intérieure,
  afin d’obtenir des changements sociaux qui soient réellement à son service. La
  priorité reconnue à la conversion du cœur n’élimine nullement, elle impose,
  au contraire, l’obligation d’apporter aux institutions et aux conditions de
  vie, quand elles provoquent le péché, les assainissements convenables pour
  qu’elles se conforment aux normes de la justice, et favorisent le bien au
  lieu d’y faire obstacle(1).
 --------------------------------------
 (1) cf. Lumen gentium 36.
 
 
 1889
 Sans le secours de la grâce, les hommes ne sauraient
  "découvrir le sentier, souvent étroit, entre la lâcheté qui cède au mal
  et la violence qui, croyant le combattre, l’aggrave"(1).
  C’est le chemin de la charité, c’est-à-dire de l’amour de Dieu et du
  prochain. La charité représente le plus grand commandement social. Elle
  respecte autrui et ses droits. Elle exige la pratique de la justice et seule
  nous en rend capables. Elle inspire une vie de don de soi : "Qui
  cherchera à conserver sa vie la perdra, et qui la perdra la sauvera"(2).
 --------------------------------------
 (1) Centesimus annus
  25 – (2) Luc 17, 33.
 En bref.       Haut de page
 1890 Il existe une certaine ressemblance entre l’unité des personnes divines et la
  fraternité que les hommes doivent instaurer entre eux.
 
 1891
 Pour se développer en conformité avec sa nature, la personne humaine a
  besoin de la vie sociale. Certaines sociétés, comme la famille et la cité,
  correspondent plus immédiatement à la nature de l’homme.
 
 1892
 "La personne humaine est, et doit être le principe, le sujet et la
  fin de toutes les institutions sociales" (Gaudium et spes 25, § 1).
 
 1893
 Il faut encourager une large participation à des associations et des
  institutions d’élection.
 
 1894
 Selon le principe de subsidiarité, ni l’État ni aucune société plus vaste
  ne doivent se substituer à l’initiative et à la responsabilité des personnes
  et des corps intermédiaires.
 
 1895
 La société doit favoriser l’exercice des vertus, non y faire obstacle.
  Une juste hiérarchie des valeurs doit l’inspirer.
 
 1896
 Là où le péché pervertit le climat social, il faut faire appel à la
  conversion des cœurs et à la grâce de Dieu. La charité pousse à de justes
  réformes. Il n’y a pas de solution à la question sociale en dehors de
  l’Évangile (cf. Centesimus annus 3).
 Article 2 : La participation à la vie sociale. Haut de page           
 I. L’autorité.
 
 
 1897
 "À la vie en société manqueraient l’ordre et la fécondité sans la
  présence d’hommes légitimement investis de l’autorité et qui assurent la
  sauvegarde des institutions et pourvoient, dans une mesure suffisante, au
  bien commun"(1).
 On appelle "autorité" la qualité en vertu de laquelle des personnes
  ou des institutions donnent des lois et des ordres à des hommes, et attendent
  une obéissance de leur part.
 --------------------------------------
 (1) Pacem in terris 46.
 
 
 1898
 Toute communauté humaine a besoin d’une autorité qui la régisse(1).
  Celle-ci trouve son fondement dans la nature humaine. Elle est nécessaire à
  l’unité de la Cité. Son rôle consiste à assurer autant que possible le bien
  commun de la société.
 --------------------------------------
 (1) cf. Immortale Dei et Diuturnum illud.
 
 
 1899
 L’autorité exigée par l’ordre moral émane de Dieu : "Que tout
  homme soit soumis aux autorités qui exercent le pouvoir, car il n’y a
  d’autorité que par Dieu et celles qui existent sont établies par lui. Ainsi,
  celui qui s’oppose à l’autorité se rebelle contre l’ordre voulu par Dieu, et
  les rebelles attireront la condamnation sur eux-mêmes"(1).
 --------------------------------------
 (1) Romains 13, 1-2 ; cf. 1 Pierre 2, 13-17.
 
 
 1900
 Le devoir d’obéissance impose à tous de rendre à l’autorité les
  honneurs qui lui sont dus, et d’entourer de respect et, selon leur mérite, de
  gratitude et de bienveillance les personnes qui en exercent la charge.
 On trouve sous la plume du pape saint Clément de Rome la plus ancienne prière
  de l’Église pour l’autorité politique(1) :
 "Accorde-leur, Seigneur, la santé, la paix, la concorde, la stabilité,
  pour qu’ils exercent sans heurt la souveraineté que tu leur as remise. C’est
  toi, Maître, céleste roi des siècles, qui donne aux fils des hommes gloire,
  honneur et pouvoir sur les choses de la terre. Dirige, Seigneur, leur
  conseil, suivant ce qui est bien, suivant ce qui est agréable à tes yeux,
  afin qu’en exerçant avec piété, dans la paix et la mansuétude, le pouvoir que
  tu leur as donné, ils te trouvent propice"(2).
 --------------------------------------
 (1) cf. déjà 1 Timothée 2, 1-2  - (2) Epistula ad corinthios,
  61, 1-2.
 
 
 1901
 Si l’autorité renvoie à un ordre fixé par Dieu, "la
  détermination des régimes politiques, comme la détermination de leurs
  dirigeants, doivent être laissées à la libre volonté des citoyens"(1).
 La diversité des régimes politiques est moralement admissible, pourvu qu’ils
  concourent au bien légitime de la communauté qui les adopte. Les régimes dont
  la nature est contraire à la loi naturelle, à l’ordre public et aux droits
  fondamentaux des personnes, ne peuvent réaliser le bien commun des nations
  auxquelles ils se sont imposés.
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  74, § 3.
 
 
 1902
 L’autorité ne tire pas d’elle-même sa légitimité morale. Elle ne doit
  pas se comporter de manière despotique, mais agir pour le bien commun comme
  une "force morale fondée sur la liberté et le sens de la
  responsabilité" (1) :
 La législation humaine ne revêt le caractère de loi qu’autant qu’elle se
  conforme à la juste raison ; d’où il apparaît qu’elle tient sa vigueur
  de la loi éternelle. Dans la mesure où elle s’écarterait de la raison, il
  faudrait la déclarer injuste, car elle ne vérifierait pas la notion de
  loi ; elle serait plutôt une forme de violence (2).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  74, § 2 – (2) Saint
  Thomas d’Aquin, Somme théologique,
  1-2, 93, 3, ad 2
 
 
 1903
 L’autorité ne s’exerce légitimement que si elle recherche le bien
  commun du groupe considéré et si, pour l’atteindre, elle emploie des moyens
  moralement licites. S’il arrive aux dirigeants d’édicter des lois injustes ou
  de prendre des mesures contraires à l’ordre moral, ces dispositions ne
  sauraient obliger les consciences. "En pareil cas, l’autorité cesse
  d’être elle-même et dégénère en oppression"(1).
 --------------------------------------
 (1) Pacem in terris 51.
 
 
 1904
 "Il est préférable que tout pouvoir soit équilibré par d’autres
  pouvoirs et par d’autres compétences qui le maintiennent dans de justes
  limites. C’est là le principe de ‘l’État de droit’ dans lequel la
  souveraineté appartient à la loi et non pas aux volontés arbitraires des
  hommes"(1).
 --------------------------------------
 (1) Centesimus annus
  44.
 
 
 Haut de page
 
 II. Le bien-commun.
 
 
 1905
 Conformément à la nature sociale de l’homme, le bien de chacun est
  nécessairement en rapport avec le bien commun. Celui-ci ne peut être défini
  qu’en référence à la personne humaine :
 Ne vivez point isolés, retirés en vous-mêmes, comme si vous étiez déjà
  justifiés, mais rassemblez-vous pour rechercher ensemble ce qui est de
  l’intérêt commun(1).
 --------------------------------------
 (1) Barnabé, Epistula,
  4, 10.
 
 
 1906
 Par bien-commun, il faut entendre "l’ensemble des conditions
  sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres
  d’atteindre leur perfection, d’une façon plus totale et plus aisée"(1).
  Le bien commun intéresse la vie de tous. Il réclame la prudence de la part de
  chacun, et plus encore de la part de ceux qui exercent la charge de
  l’autorité. Il comporte trois éléments essentiels :
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  26, § 1 ; cf. aussi Gaudium et spes 74, § 1.
 
 
 1907
 Il suppose, en premier lieu, le respect de la personne en tant
  que telle. Au nom du bien commun, les pouvoirs publics se tenus de respecter
  les droits fondamentaux et inaliénables de la personne humaine. La société se
  doit de permettre à chacun de ses membres de réaliser sa vocation. En
  particulier, le bien commun réside dans les conditions d’exercice des
  libertés naturelles qui sont indispensables à l’épanouissement de la vocation
  humaine : "ainsi : droit d’agir selon la droite règle de sa
  conscience, droit à la sauvegarde de la vie privée et à la juste liberté, y
  compris en matière religieuse"(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  26, § 2.
 
 
 1908
 En second lieu, le bien-commun demande le bien-être social et
  le développement du groupe lui-même. Le développement est le résumé de
  tous les devoirs sociaux. Certes, il revient à l’autorité d’arbitrer, au nom
  du bien commun, entre les divers intérêts particuliers. Mais elle doit rendre
  accessible à chacun ce dont il a besoin pour mener une vie vraiment
  humaine : nourriture, vêtement, santé, travail, éducation et culture,
  information convenable, droit de fonder une famille, etc.(1).
 --------------------------------------
 (1) cf. Gaudium et spes
  26, § 2.
 
 
 1909
 Le bien-commun implique enfin la paix, c’est-à-dire la durée
  et la sécurité d’un ordre juste. Il suppose donc que l’autorité assure, par
  des moyens honnêtes, la sécurité de la société et celle de ses
  membres. Il fonde le droit à la légitime défense personnelle et collective.
 
 
 1910
 Si chaque communauté humaine possède un bien commun qui lui permet de
  se reconnaître en tant que telle, c’est dans la communauté politique
  qu’on trouve sa réalisation la plus complète. Il revient à l’État de défendre
  et de promouvoir le bien commun de la société civile, des citoyens et des
  corps intermédiaires.
 
 
 191
 Les dépendances humaines s’intensifient. Ils s’étendent peu à peu à la terre
  entière. L’unité de la famille humaine, rassemblant des êtres jouissant d’une
  dignité naturelle égale, implique un bien commun universel. Celui-ci
  appelle une organisation de la communauté des nations capable de
  "pourvoir aux divers besoins des hommes, aussi bien dans le domaine de
  la vie sociale (alimentation, santé, éducation ...), que pour faire face à
  maintes circonstances particulières qui peuvent surgir ici ou là (par
  exemple : l’accueil des réfugiés, l’assistance aux migrants et à leurs
  familles ...)"(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  84, § 2.
 
 
 1912
 Le bien commun est toujours orienté vers le progrès des
  personnes : "L’ordre des choses doit être subordonné à l’ordre des
  personnes, et non l’inverse"(1). Cet ordre a pour base la
  vérité, il s’édifie dans la justice, il est vivifié par l’amour.
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  27, § 3.
 
 
 Haut de page
 
 III. Responsabilité et Participation.
 
 
 1913
 La participation est l’engagement volontaire et généreux de la personne
  dans les échanges sociaux. Il est nécessaire que tous participent, chacun selon
  la place qu’il occupe et le rôle qu’il joue, à promouvoir le bien commun. Ce
  devoir est inhérent à la dignité de la personne humaine.
 
 
 1914
 La participation se réalise d’abord dans la prise en charge des
  domaines dont on assume la responsabilité personnelle : par le
  soin apporté à l’éducation de sa famille, par la conscience dans son travail,
  l’homme participe au bien d’autrui et de la société(1).
 --------------------------------------
 (1) cf. Centesimus annus
  43.
 
 
 1915
 Les citoyens doivent autant que possible prendre une part active à la
  vie publique. Les modalités de cette participation peuvent varier d’un
  pays ou d’une culture à l’autre. "Il faut louer la façon d’agir des
  nations où, dans une liberté authentique, le plus grand nombre possible de
  citoyens participe aux affaires publiques" (1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  31, § 3.
 
 
 1916
 La participation de tous à la mise en œuvre du bien commun implique,
  comme tout devoir éthique, une conversion sans cesse renouvelée des
  partenaires sociaux. La fraude et autres subterfuges par lesquels certains
  échappent aux contraintes de la loi et aux prescriptions du devoir social
  doivent être fermement condamnées, parce qu’incompatibles avec les exigences
  de la justice. Il faut s’occuper de l’essor des institutions qui améliorent
  les conditions de la vie humaine(1).
 --------------------------------------
 (1) cf. Gaudium et spes
  30, § 1.
 
 
 1917
 Il revient à ceux qui exercent la charge de l’autorité d’affermir les
  valeurs qui attirent la confiance des membres du groupe et les incitent à se
  mettre au service de leurs semblables. La participation commence par
  l’éducation et la culture. "On peut légitimement penser que l’avenir est
  entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des
  raisons de vivre et d’espérer"(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  31, § 3.
 
 
 En bref.       Haut de page
 1918"Il n’y a d’autorité que par Dieu et celles qui existent sont établies
  par lui" (Romains 13, 1).
 
 1919
 Toute communauté humaine a besoin d’une autorité pour se maintenir et se
  développer.
 
 1920
 "La communauté politique et l’autorité publique trouvent leur
  fondement dans la nature humaine et relèvent par là d’un ordre fixé par Dieu"
  (Gaudium et spes 74, § 3)
 
 1921
 L’autorité s’exerce d’une manière légitime si elle s’attache à la
  poursuite du bien commun de la société. Pour l’atteindre, elle doit employer
  des moyens moralement recevables.
 
 1922
 La diversité des régimes politiques est légitime, pourvu qu’ils
  concourent au bien de la communauté.
 
 1923
 L’autorité politique doit se déployer dans les limites de l’ordre moral et
  garantir les conditions d’exercice de la liberté.
 
 1924
 Le bien commun comprend "l’ensemble des conditions sociales qui
  permettent aux groupes et aux personnes d’atteindre leur perfection, de manière
  plus totale et plus aisée" (Gaudium et spes 26, § 1).
 
 1925
 Le bien commun comporte trois éléments essentiels : le respect et la
  promotion des droits fondamentaux de la personne ; la prospérité ou le
  développement des biens spirituels et temporels de la société ; la paix
  et la sécurité du groupe et de ses membres.
 
 1926
 La dignité de la personne humaine implique la recherche du bien commun.
  Chacun doit se préoccuper de susciter et de soutenir des institutions qui
  améliorent les conditions de la vie humaine.
 
 1927
 Il revient à l’État de défendre et de promouvoir le bien commun de la société
  civile. Le bien commun de la famille humaine tout entière appelle une
  organisation de la société internationale.
 Article 3 :    La Justice Sociale.
 Haut de page           
 1928
 La société assure la justice sociale
  lorsqu’elle réalise les conditions permettant aux associations et à chacun
  d’obtenir ce qui leur est dû selon leur nature et leur vocation. La justice
  sociale est en lien avec le bien commun et avec l’exercice de l’autorité.
 
 
 I. Le respect de la personne humaine.
 
 
 1929
 La justice sociale ne peut être obtenue que dans le respect de la dignité
  transcendante de l’homme. La personne représente le but ultime de la société,
  qui lui est ordonnée :
 La défense et la promotion de la dignité humaine nous ont été confiées par le
  Créateur. Dans toutes les circonstances de l’histoire les hommes et les
  femmes en sont rigoureusement responsables et débiteurs(1).
 --------------------------------------
 (1) Sollicitudo
  rei socialis
  47.
 
 
 1930
 Le respect de la personne humaine implique celui des droits qui découlent de
  sa dignité de créature. Ces droits sont antérieurs à la société et s’imposent
  à elle. Ils fondent la légitimité morale de toute autorité : en les
  bafouant, ou en refusant de les reconnaître dans sa législation positive, une
  société mine sa propre légitimité morale(1). Sans un tel respect, une
  autorité ne peut que s’appuyer sur la force ou la violence pour obtenir
  l’obéissance de ses sujets. Il revient à l’Église de rappeler ces droits à la
  mémoire des hommes de bonne volonté, et de les distinguer des revendications
  abusives ou fausses.
 --------------------------------------
 (1) cf. Pacem in terris 65.
 
 
 1931
 Le respect de la personne humaine passe par le respect du
  principe : "Que chacun considère son prochain, sans aucune
  exception, comme ‘un autre lui-même’. Qu’il tienne compte avant tout de son
  existence et des moyens qui lui sont nécessaires pour vivre dignement"(1).
  Aucune législation ne saurait par elle-même faire disparaître les craintes,
  les préjugés, les attitudes d’orgueil et d’égoïsme qui font obstacle à
  l’établissement de sociétés vraiment fraternelles. Ces comportements ne
  cessent qu’avec la charité qui trouve en chaque homme un "prochain",
  un frère.
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  27, §1.
 
 
 1932
 Le devoir de se faire le prochain d’autrui et de le servir
  activement se fait plus pressant encore lorsque celui-ci est plus démuni, en
  quelque domaine que ce soit. "Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de
  ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait"(1).
 --------------------------------------
 (1) Matthieu 25, 40.
 
 
 1933
 Ce même devoir s’étend à ceux qui pensent ou agissent différemment
  de nous. L’enseignement du Christ va jusqu’à requérir le pardon des offenses.
  Il étend le commandement de l’amour, qui est celui de la loi nouvelle, à tous
  les ennemis(1). La libération dans l’esprit de l’Évangile est
  incompatible avec la haine de l’ennemi en tant que personne mais non avec la
  haine du mal qu’il fait en tant qu’ennemi.
 --------------------------------------
 (1) cf. Matthieu 5, 43-44.
 
 
 Haut de page
 
 II. Égalité et différences entre les hommes.
 
 
 1934
 Créés à l’image du Dieu unique, dotés d’une même âme raisonnable, tous les
  hommes ont même nature et même origine. Rachetés par le sacrifice du Christ,
  tous sont appelés à participer à la même béatitude divine : tous
  jouissent donc d’une égale dignité.
 
 
 1935
 L’égalité entre les hommes porte essentiellement sur leur dignité
  personnelle et les droits qui en découlent :
 Toute forme de discrimination touchant les droits fondamentaux de la
  personne, qu’elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur de la peau, la
  condition sociale, la langue ou la religion, doit être dépassée, comme
  contraire au dessein de Dieu(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  29, § 2.
 
 
 1936
 En venant au monde, l’homme ne dispose pas de tout ce qui est nécessaire au
  développement de sa vie, corporelle et spirituelle. Il a besoin des autres.
  Des différences apparaissent liées à l’âge, aux capacités physiques, aux
  aptitudes intellectuelles ou morales, aux échanges dont chacun a pu
  bénéficier, à la distribution des richesses(1). Les "talents"
  ne sont pas distribués également(2).
 --------------------------------------
 (1) cf. Gaudium et spes
  29, § 2 – (2) cf.
  Matthieu 25, 14-30 ; Luc 19, 11-27.
 
 
 1937
 Ces différences appartiennent au plan de Dieu, qui veut que chacun reçoive
  d’autrui ce dont il a besoin, et que ceux qui disposent de "talents"
  particuliers en communiquent les bienfaits à ceux qui en ont besoin. Les
  différences encouragent et souvent obligent les personnes à la magnanimité, à
  la bienveillance et au partage ; elles incitent les cultures à
  s’enrichir les unes les autres : Je ne donne pas toutes les vertus
  également à chacun ... Il en est plusieurs que je distribue de telle manière,
  tantôt à l’un, tantôt à l’autre ... À l’un, c’est la charité ; à
  l’autre, la justice ; à celui-ci l’humilité ; à celui-là, une foi
  vive ... Quant aux biens temporels, pour les choses nécessaires à la vie
  humaine, je les ai distribués avec la plus grande inégalité, et je n’ai pas
  voulu que chacun possédât tout ce qui lui était nécessaire pour que les
  hommes aient ainsi l’occasion, par nécessité, de pratiquer la charité les uns
  envers les autres ... J’ai voulu qu’ils eussent besoin les uns des autres et
  qu’ils fussent mes ministres pour la distribution des grâces et des libéralités
  qu’ils ont reçues de moi(1).
 --------------------------------------
 (1) S. Catherine de Sienne, Dialogi,  1, 6.
 
 
 1938
 Il existe aussi des inégalités iniques qui frappent des millions
  d’hommes et de femmes. Elles sont en contradiction ouverte avec
  l’Évangile :
 L’égale dignité des personnes exige que l’on parvienne à des conditions de
  vie plus justes et plus humaines. Les inégalités économiques et sociales
  excessives entre les membres ou entre les peuples d’une seule famille humaine
  font scandale. Elles font obstacle à la justice sociale, à l’équité, à la
  dignité de la personne humaine, ainsi qu’à la paix sociale et internationale(1).
 --------------------------------------
 (1) Gaudium et spes
  29, § 3.
 
 
 Haut de page
 
 III. La Solidarité humaine.
 
 
 1939
 Le principe de solidarité, énoncé encore sous le nom "d’amitié" ou
  de "charité sociale", est une exigence directe de la fraternité
  humaine et chrétienne(1) :
 Une erreur, "aujourd’hui largement répandue, est l’oubli de cette loi de
  solidarité humaine et de charité, dictée et imposée aussi bien par la
  communauté d’origine et par l’égalité de la nature raisonnable chez tous les
  hommes, à quelque peuple qu’ils appartiennent, que par le sacrifice de
  rédemption offert par Jésus-Christ sur l’autel de la Croix à son Père
  céleste, en faveur de l’humanité pécheresse"(2).
 --------------------------------------
 (1) cf. Sollicitudo
  rei socialis
  38-40 ; Centesimus annus
  10 – (2) Summi pontificatus.
 
 
 1940
 La solidarité se manifeste en premier lieu dans la répartition des
  biens et la rémunération du travail. Elle suppose aussi l’effort en faveur
  d’un ordre social plus juste dans lequel les tensions pourront être mieux
  résorbées, et où les conflits trouveront plus facilement leur issue négociée.
 
 
 1941
 Les problèmes socio-économiques ne peuvent être résolus qu’avec
  l’aide de toutes les formes de solidarité : solidarité des pauvres entre
  eux, des riches et des pauvres, des travailleurs entre eux, des employeurs et
  des employés dans l’entreprise, solidarité entre les nations et entre les
  peuples. La solidarité internationale est une exigence d’ordre moral. La paix
  du monde en dépend pour une part.
 
 
 1942
 La vertu de solidarité va au-delà des biens matériels. En répandant les
  biens spirituels de la foi, l’Église a, de surcroît, favorisé le
  développement des biens temporels auquel elle a souvent ouvert des voies
  nouvelles. Ainsi s’est vérifiée, tout au long des siècles, la parole du
  Seigneur : "Cherchez d’abord le Royaume et sa justice, et tout cela
  vous sera donné par surcroît" (1) :
 Depuis deux mille ans, vit et persévère dans l’âme de l’Église ce sentiment
  qui a poussé et pousse encore les âmes jusqu’à l’héroïsme charitable des
  moines agriculteurs, des libérateurs d’esclaves, des guérisseurs de malades,
  des messagers de foi, de civilisation, de science à toutes les générations et
  à tous les peuples en vue de créer des conditions sociales capables de rendre
  à tous possible une vie digne de l’homme et du chrétien (2).
 --------------------------------------
 (1) Matthieu 6, 33 – (2) Pie XII, discours
  1er juin 1941.
 
 
 En bref.       Haut de page
 1943 La société assure la justice sociale en réalisant les conditions permettant
  aux associations et à chacun d’obtenir ce qui leur est dû.
 
 1944
 Le respect de la personne humaine considère autrui comme un " autre
  soi-même ". Il suppose le respect des droits fondamentaux qui
  découlent de la dignité intrinsèque de la personne.
 
 1945
 L’égalité entre les hommes porte sur leur dignité personnelle et sur les
  droits qui en découlent.
 
 1946
 Les différences entre les personnes appartiennent au dessein de Dieu qui veut
  que nous ayons besoin les uns des autres. Elles doivent encourager la
  charité.
 
 1947
 L’égale dignité des personnes humaines demande l’effort pour réduire les
  inégalités sociales et économiques excessives. Elle pousse à la disparition
  des inégalités iniques.
 |