Dictée et vision du
samedi 23 septembre 1944.
316> 468.1 – Jésus dit:
"Entre-temps je te dis que l'épisode de mercredi (20 septembre 1944), si
vous faites une œuvre régulière, vous devez le placer un an avant ma mort car
il tombe à l'époque de la moisson de ma trente-deuxième année
.
Des nécessités de réconfort et d'instruction pour toi, mon aimée, et pour
d'autres, m'ont contraint à suivre un ordre spécial pour donner les visions
et les dictées qui s'y rapportaient.
Mais je vous indiquerai, au moment voulu, comment répartir les épisodes
des trois années de vie publique. L'ordre des
Évangiles est bon, mais pas parfait comme ordre chronologique. Un observateur
attentif le remarque.
Celui qui aurait pu donner l'ordre exact des faits car il est resté avec Moi
depuis le commencement de l'évangélisation jusqu'à mon Ascension, ne l'a pas
fait. En effet Jean, vrai fils de la Lumière, s'est occupé et préoccupé de
faire briller la Lumière à travers son vêtement de Chair aux yeux des
hérétiques qui attaquaient la réalité de la Divinité enfermée dans une chair
humaine. Le sublime Évangile de Jean a atteint son but surnaturel, mais la
chronique de ma vie publique n'en a pas été aidée.
Les trois autres évangélistes se présentent semblables entre eux pour les
faits, mais ils altèrent l'ordre du temps, car des trois un seul a été
présent à presque toute ma vie publique: Mathieu, et il ne l'avait écrite que
quinze ans plus tard, alors que les autres l'ont écrite encore plus tard, et
pour en avoir entendu le récit de ma Mère, de Pierre, des autres apôtres et
disciples.
Je veux vous guider pour réunir les faits des trois ans, année par année.
Et maintenant, vois et écris: l'épisode suit celui de mercredi (20-9-1944)."
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317> 468.2 – Je vois Jésus qui lentement va
et vient sur un sentier champêtre éclairé par la lune. C'est la pleine lune,
et sa face riante resplendit dans un ciel absolument serein mais, en raison
de sa position dans le ciel, où elle se prépare à se coucher, je déduis qu'il
doit être plus de minuit.
Jésus marche en réfléchissant et en priant certainement, bien que je
n'entende pas de paroles. Mais il ne perd pas de vue les choses qui l'entourent.
Une fois il s'arrête pour écouter, souriant, le long chant d'un rossignol
énamouré qui exécute toute une mélodie d'arpèges et de trilles et de notes
a-solo, bien tenues, si fortes et si prolongées qu'il paraît impossible que
cela vienne de ce petit être qui n'est que plumes. Pour ne pas le troubler,
même pas par le bruit des sandales sur le gravier du sentier et du vêtement
frôlant l'herbe, Jésus s'est arrêté, les bras croisés, le visage levé et
souriant. Il va jusqu'à fermer à demi les yeux pour s'appliquer mieux à
l'audition, et quand le rossignol termine par un son aigu qui monte, monte,
monte par intervalles de tierce (si j'ai bon souvenir) et finit par une note
suraiguë, tenue aussi longtemps que le souffle le lui permet, il approuve et
applaudit sans mot dire en inclinant deux ou trois fois la tête avec un
sourire de satisfaction.
Maintenant, d'autre part, il se penche sur une touffe de chèvrefeuille en
fleurs dont les mille et mille calices blancs répandent une odeur pénétrante.
Ils ressemblent à des bouches de serpents qui baillent, où tremble la langue
des pistils jaunâtres et où brille une trace d'or sur le pétale inférieur.
Les fleurs, sous le rayon de lune, paraissent encore plus blanches, comme
argentées. Jésus les admire, respire leur parfum et les caresse de la main.
Il revient sur ses pas. L'endroit doit être légèrement élevé car le clair de
lune fait voir au sud une partie du lac certainement, car c'est quelque chose
qui brille comme du verre éclairé par la lune et qui n'est pas un fleuve ni
la mer, étant donné qu'on le voit bordé de collines du côté opposé à celui où
se trouve Jésus.
Jésus regarde ce tranquille miroir d'eau paisible dans le calme d'une nuit
d'été. Puis il fait un demi-tour sur Lui-même, du sud à l'ouest, et regarde
un village qui blanchit, éloigné au maximum de deux kilomètres, plutôt moins
que plus. Un beau village. Il s'arrête pour le regarder, et secoue la tête en
suivant une pensée qui l'afflige beaucoup.
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318> Il reprend ensuite sa promenade
lente et sa prière jusqu'au moment où il s'assoit sur une grosse pierre, au
pied d'un arbre très élevé, et prend sa position habituelle : les coudes
sur les genoux et les avant-bras en avant, avec les mains jointes pour la
prière.
468.3 – Il reste ainsi un moment et
serait resté plus longtemps si un homme, une ombre, ne s'était avancée de la
touffe d'arbres vers Lui et ne l'avait appelé :
"Maître ?"
Jésus se retourne, car celui qui s'avance arrive par derrière, et il lui dit:
"Judas ? Que veux-tu ?"
"Où es-tu, Maître ?"
"Au pied du noyer. Avance."
Et Jésus se lève et vient sur le sentier au clair de la lune, pour que Judas
puisse le voir.
"Tu es venu, Judas, pour tenir un peu compagnie à ton
Maître ?" Maintenant ils sont l'un près de l'autre et Jésus met
affectueusement un bras sur l'épaule du disciple. "Ou bien a-t-on besoin
de Moi à Chorazeïn ?"
"Non, Maître. Aucunement, J'ai eu le désir de venir te trouver."
"Viens alors. Il y a de la place pour tous les deux sur ce rocher."
Ils s'assoient tout près l'un de l'autre. Silence. Judas ne parle pas. Il
regarde Jésus. Il lutte.
Jésus veut l'aider. Il le regarde avec douceur, mais avec pénétration.
"Quelle belle nuit, Judas ! Regarde comme tout est pur ! Je
crois que ne fut pas plus pure la première nuit qui a ri sur la Terre et sur
le sommeil d'Adam dans le Paradis terrestre. Sens le parfum de ces fleurs,
respire, mais ne les cueille pas. Elles sont si belles et si pures ! Je
m'en suis abstenu, Moi aussi, parce que les cueillir, c'est les profaner. Il est toujours mal d'user de
violence, pour la plante comme pour l'animal, pour l'animal comme pour
l'homme. Pourquoi enlever la vie ? Elle est si belle la vie quand elle
est bien employée !...
Et ces fleurs l'emploient bien car elles exhalent leur parfum, réjouissent
par leur vue et leur odeur, donnent du miel aux abeilles et aux papillons et
leur cédait l'or de leur pistil pour mettre des petites gouttes de topaze sur
la perle de leurs ailes, et servent de lit aux nids... Si tu avais été là, il
y a un moment, tu aurais entendu un rossignol chanter si doucement la joie de
vivre et de louer le Seigneur.
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319> Chers oiseaux ! Comme ils sont
un exemple pour les hommes ! Ils se contentent de peu, et seulement de
ce qui est permis et saint : un grain et un petit ver car c'est le Père
Créateur qui le leur à donne. Et s'ils n'en ont pas, ils n'éprouvent pas de
colère ou de dépit, mais ils trompent la faim de leur chair par le trop plein
de leur cœur qui leur fait chanter les louanges du Seigneur et les joies de
l'espérance. Ils sont heureux d'être las pour avoir voleté de l'aube jusqu'au
soir pour se faire un nid tiède, douillet, sûr, non par égoïsme, mais par
amour de leurs petits. Et ils chantent de la joie de s'aimer honnêtement, le
rossignol pour sa compagne et tous les deux pour leurs oisillons. Les animaux
sont toujours heureux car ils n'éprouvent pas de remords dans leurs cœurs qui
ne leur reprochent rien. C'est nous qui les rendons malheureux parce que
l'homme est méchant, sans respect, dominateur, cruel. Et il ne lui suffit pas
de l'être avec ses semblables, sa méchanceté se déverse sur les êtres
inférieurs. Plus il a en lui de remords, plus sa
conscience le pique, et plus il exerce sa méchanceté sur les autres. Je suis
certain que le cavalier qui aujourd'hui éperonnait jusqu'au sang son cheval
tout en sueur et tellement fatigué, et le cravachait jusqu'à lui faire
dresser le poil sur le cou et sur les flancs et jusque sur ses naseaux et sur
ses sombres paupières qui se fermaient douloureusement sur ses yeux si
résignés et si doux, que ce cavalier n'avait pas l'âme tranquille : ou
bien il allait commettre un crime contre l'honnêteté, ou il en venait."
Jésus se tait et pense.
468.4 – Judas se tait. Il pense lui
aussi, puis il dit :
"Comme c’est beau, Maître, de t'entendre parler ainsi ! Tout
dévient clair aux yeux, à l'esprit, au cœur... et tout redevient facile, même
de dire : "Je veux être bon !" Même de te dire... même de
te dire... de te dire : "Maître, moi aussi j'ai l'âme
troublée ! N'aie pas de dégoût pour moi, Maître, Toi qui aimes celui qui
est pur !"
"Oh ! mon Judas ! Moi, du dégoût ? Ami, fils, qu'as-tu
qui te trouble ?"
"Garde-moi avec Toi, Maître. Tiens-moi
étroitement... J'ai juré d'être bon depuis que tu m'as parlé si doucement.
J'ai juré de redevenir le Judas des premiers jours, je te suivais et je
t'aimais comme un époux aime son épouse, et je ne rêvais qu'à Toi, trouvant
en Toi toute satisfaction. C'est ainsi que je t'aimais Jésus..."
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320> "Je le sais... et c'est pour
cela que je t'ai aimé... Mais je t'aime encore, mon pauvre ami
blessé..."
"Comment sais-tu que je le suis ? Sais-tu de quoi ?..."
Silence. Jésus regarde Judas d'un œil si doux... Il semble qu'une larme le
rende plus large et plus doux en tempérant son éclat : un œil d'enfant
innocent et désarmé, qui se donne tout entier dans l'amour.
Judas glisse à ses pieds, le visage sur ses genoux, les bras serrés à ses
côtés et il gémit :
"Garde-moi avec Toi,
Maître... garde-moi... Ma chair crie comme un démon... et, si je cède, voilà
que vient tout le mal... Je sais que tu sais et que pourtant tu attends que
je le dise... Mais il est difficile de dire, Maître : "J'ai
péché"
"Je le sais, ami. C'est pour cela qu'il faudrait bien agir,
pour ne pas s'avilir en disant: "J'ai péché ". Mais
pourtant, Judas, il y a en cela un grand remède, de devoir faire effort en disant la faute retient de la faire et si elle est accomplie, la peine de
s'accuser est déjà une pénitence qui rachète. Si ensuite quelqu'un souffre,
non pas tant par orgueil ni par peur du châtiment, mais parce qu'il sait
qu'en manquant il a causé de la douleur, alors, c'est Moi qui le dis, la
faute disparaît. C'est l'amour qui sauve."
"Moi, je t'aime, Maître, mais je suis si faible... Oh ! Tu ne peux
pas m'aimer ! Tu es pur et tu aimes les purs... Tu ne peux pas m'aimer
parce que je suis... je suis...
468.5 – Oh ! Jésus, enlève-moi la
faim des sens ! Tu sais quel démon il est ?"
"Je le sais. Je ne l'ai pas exaucée, mais je sais quelle voix elle a."
"Le vois-tu ? Le vois-tu ? Tu en as un tel dégoût que
seulement à le dire, ton visage est bouleversé... Oh ! Tu ne peux pas me
pardonner !"
"Judas. Et tu ne te rappelles pas Marie ? Matthieu ? Ce
publicain devenu lépreux ?
Cette femme, courtisane romaine ,
à laquelle j'ai prophétisé une place dans le Ciel parce que, après mon
pardon, elle aura la force de vivre saintement ?"
"Maître... Maître... Maître… Oh ! quel mal j'ai dans le
cœur !... Ce soir j'ai fui... j'ai fui Chorazeïn... car si j'étais
resté... si j'étais resté... j'étais perdu. Tu sais... c'est comme celui qui
boit et en devient malade... Le médecin lui enlève le vin et toute boisson
enivrante, et il guérit et reste sain tant qu'il ne ressent pas ce goût...
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321> Mais s'il cède, une seule fois, et
en sent de nouveau le goût... il lui vient une soif... une soif de cette
boisson... telle qu'il n'y résiste plus... et il boit et il boit... et il est
de nouveau malade... malade pour toujours… fou... possédé...
possédé par son démon... par son démon... Oh ! Jésus, Jésus,
Jésus !... N'en parle pas aux autres… Ne le dis pas... J'ai honte devant
tous..."
"Mais pas devant Moi."
Judas comprend mal.
"C'est vrai ! Pardon ! Je devrais être plus honteux devant Toi
que devant tout autre, car tu es parfait..."
"Non, fils. Ce n'est pas cela que je disais. Que ta douleur, ton
angoisse, ton humiliation ne te cachent pas la vérité. J'ai dit que tu peux
être honteux devant tous, mais pas devant Moi. Un fils n'a pas de peur ni de
honte devant un bon père, ni un malade devant un médecin compétent. Et à l'un
comme à l'autre, il fait son aveu sans crainte puisque l'un aime et pardonne,
l'autre comprend et guérit. Moi, je t'aime et te comprends, aussi je te
pardonne et te guéris. Mais dis-moi. Judas. Qu'est-ce qui te livre à ton
démon ? Moi ? Tes frères ? Les femmes débauchées ? Non. C'est
ta volonté. Maintenant je te pardonne et te guéris... Quelle joie tu m'as donnée, ô mon
Judas ! Déjà je jouissais tant de cette nuit sereine, parfumée, que les
chants rendaient joyeuse, et j'en louais le Seigneur. Mais maintenant la joie
que tu me donnes surpasse ce clair de lune, ces parfums, cette paix, ces
chants. Entends-tu ? Le rossignol semble s'y unir pour te dire avec Moi
qu'il est heureux de ton bon vouloir, lui, le petit chanteur, si plein de
bonne volonté pour faire ce pourquoi il a été créé. Et aussi ce premier vent
du matin, qui passe sur les fleurs et les éveille, en faisant glisser dans le
creux de leur calice un diamant de rosée pour que la trouvent bientôt le
papillon et le rayon de soleil, et que l'un s'en désaltère et que l'autre
s'en fasse un miroir minuscule pour son grand éclat. Regarde : la lune
va se coucher. L'aube s'annonce, avec ce chant lointain du coq. Les ténèbres
nocturnes et les fantômes de la nuit disparaissent : Vois comme il est
passé rapide et doux le temps qui, si tu n'étais pas venu à Moi, serait passé
dans le dégoût et le remords ? Viens toujours quand tu as peur de toi.
Le propre moi !!! Grand
ami, grand tentateur, grand ennemi, et grand juge, Judas ! Et,
vois-tu ?
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322> Alors qu'il est un ami sincère et fidèle si tu as été bon, il sait
être un ami sans sincérité si tu n'es pas bon et, après avoir été pour toi un
complice, il s'élève à être un juge inexorable et te torture par ses reproches...
Lui est féroce dans ses reproches... pas Moi !
468.6 – Eh bien, allons, la nuit est
passée..."
"Maître, je ne t'ai pas laissé reposer... et aujourd'hui, tu devras tant
parler..."
"J'ai reposé dans la joie que tu m'as donnée. Je n'ai pas de leur repos que celui de dire: "Aujourd'hui j'ai sauvé quelqu’un
qui périssait". Viens, viens… Descendons à Chorazeïn ! Oh ! si
cette ville savait t'imiter, Judas !"
"Maître... que diras-tu à mes compagnons ?"
"Rien s'ils ne demandent pas... S'ils m’interrogent, je dirai que nous
avons parlé des miséricordes de Dieu... C'est un vrai sujet, et tellement illimité que la plus longue vie ne
suffit pas à le développer. Allons..."
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