| Le lundi 20 août 1945 229>  258.1 – "C'est la même heure,
  mais le lendemain. 
 Jacques, qui est encore retiré dans la
  fente de la montagne et assis tout pelotonné avec la tête penchée presque
  jusqu'aux genoux qui sont levés et qu'il tient avec ses bras, est dans une
  profonde méditation, ou bien il dort. Je ne me rends pas bien compte.
  Certainement il est insensible à ce qui se passe autour de lui, c'est-à-dire
  au combat de deux gros oiseaux qui, pour quelque motif particulier, se
  battent férocement dans le petit pré. Je dirais que ce sont des coqs de
  montagne, ou des coqs de bruyère, ou des faisans car ils ont la grosseur d'un
  jeune coq, des plumes de toutes les couleurs, mais ils n'ont pas de crête,
  seulement un petit casque de chair rouge comme du corail sur le sommet de la
  tête et sur les joues, et je vous assure que, si la tête est petite, le bec
  doit être comme une pointe d'acier. Les plumes volent en l'air et le
  sang coule par terre dans un fracas violent qui fait taire les sifflements,
  les trilles et les roulades dans les branches des arbres. Peut-être les
  oiseaux observent la joute féroce... Jacques n'entend rien.
 
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 230> Jésus, au contraire entend et
  descend du sommet où il était monté et, en battant des mains, sépare les
  combattants qui s'enfuient, sanglants, l'un vers la côte, l'autre au sommet
  d'un rouvre et là remet en ordre ses plumes toutes hérissées et emmêlées.
 
 Jacques ne lève pas la tête, même au bruit fait par Jésus
  qui, en souriant, fait encore quelques pas et s'arrête au milieu du petit
  pré. Son vêtement blanc semble se teinter de rouge du côté droit tant est
  violent le rouge du crépuscule. On dirait vraiment que le ciel soit en feu.
  Et pourtant Jacques ne doit pas dormir car, dès que Jésus susurre, exactement
  susurre "Jacques, viens ici", il lève sa tête appuyée sur ses
  genoux et défait l'enlacement de ses bras, en se levant et en allant vers
  Jésus. Il s'arrête en face de Lui, à deux pas de distance et le regarde.
 
 Jésus aussi le regarde, sérieux et pourtant il encourage Jacques d'un sourire
  qui ne vient pas des lèvres ni du regard et qui pourtant est visible. Il le
  regarde fixement comme s'il voulait lire les plus petites réactions et
  émotions de son cousin et apôtre qui comme hier, en se sentant au seuil d'une
  révélation, devient pâle et le devient davantage encore au point que son
  visage a la couleur de son vêtement de lin quand Jésus lève les bras et lui met
  les mains sur les épaules, en restant ainsi, les bras tendus.
 
 Alors Jacques semble bien être une hostie. Seuls ses doux yeux châtain foncé
  et sa barbe châtain colorent ce visage attentif.
 
 
  258.2 – "Jacques, mon frère,
  tu sais pourquoi je t'ai voulu ici, seul à seul, pour te parler après des
  heures de prière et de méditation ?" 
 Jacques paraît éprouver de la difficulté à répondre tant il est ému. Mais il
  ouvre enfin les lèvres pour répondre à voix basse :
 
 "Pour me donner une instruction spéciale, ou pour l'avenir, ou parce que
  je suis le plus incapable de tous. Je te remercie dès maintenant, même s'il
  s'agit d'un reproche. Mais crois-moi, Maître et Seigneur : si je suis
  lent et incapable, c'est par défaut de moyens, non par mauvaise
  volonté."
 
 "Ce n'est pas un reproche mais une instruction, oui, pour le temps où je
  ne serai plus avec vous. Dans ton cœur, pendant ces mois, tu as beaucoup
  pensé à ce que je t'ai dit un jour,
  au pied de cette montagne, en te promettant de venir ici avec toi, non
  seulement pour parler du prophète Élie et pour regarder la mer qui resplendit
  là, à l'infini, mais pour te parler d'une autre mer, encore plus grande,
  changeante, traîtresse, que cette mer qui paraît aujourd'hui le plus tranquille
  des bassins et qui peut-être dans quelques heures engloutira navires et
  hommes dans sa faim vorace.
 
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 231> Et tu n'as jamais séparé la pensée
  de ce que je t'ai dit alors de celle que la venue ici avait rapport à ton
  futur destin. Si bien que maintenant tu pâlis de plus en plus en voyant que
  c'est un lourd destin, un héritage plein d'une responsabilité telle qu'elle
  ferait trembler un héros ; une responsabilité et une mission qu'il faut
  exécuter avec toute la sainteté possible dans un homme pour ne pas décevoir
  la volonté de Dieu.
 
 N'aie pas peur, Jacques. Je ne veux pas ta ruine. Car si je te destine à
  cela, c'est signe que je sais que tu en auras non un dommage mais une gloire
  surnaturelle.
 
 Écoute-moi, Jacques. Fais en toi la paix par un bel acte
  d'abandon en Moi, pour pouvoir entendre et te rappeler mes paroles. Jamais
  plus nous ne serons ainsi seuls et avec l'esprit ainsi préparé à nous entendre.
 
 
  258.3 – Je m'en irai un jour, comme
  tous les hommes qui ont un temps de séjour sur la terre. Mon séjour cessera
  d'une façon différente de celui des hommes, mais il faudra qu'il cesse et
  vous ne m'aurez plus à côté de vous autrement que par mon Esprit qui, je vous
  en donne l'assurance, ne vous abandonnera jamais. Quant à Moi, je m'en irai,
  après vous avoir donné tout ce qui est nécessaire pour faire progresser ma
  Doctrine dans le monde, après avoir accompli le Sacrifice et vous avoir
  obtenu la Grâce. Par elle et par le Feu sapientiel et septiforme
  vous pourrez faire ce qui maintenant vous paraîtrait folie et présomption
  même à seulement l'imaginer. 
 Je m'en irai et vous resterez. Et le monde qui n'a pas compris le Christ ne
  comprendra pas les apôtres du Christ. Aussi vous serez persécutés et
  dispersés comme les gens les plus dangereux pour le bien-être d'Israël. Mais,
  puisque vous êtes mes disciples, vous devez être heureux de subir les mêmes
  afflictions que votre Maître.
 
 Je t'ai dit un jour de Nisân : "Tu seras celui qui reste des
  prophètes du Seigneur"
  Ta mère,
  par une influence spirituelle, a presque compris le sens de ces paroles.
  Mais, avant qu'elles se vérifient pour mes apôtres, en ce qui te concerne,
  elles se seront vérifiées.
 
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 232>
  Jacques, tous seront dispersés sauf toi, et
  cela jusqu'à ce que Dieu t'appelle à son Ciel. Tu resteras au poste auquel
  t'aura élu Dieu par la bouche de tes frères, toi descendant de la race
  royale, dans la cité royale, pour élever mon sceptre et parler du vrai Roi.
  Roi d'Israël et du monde selon une royauté sublime que personne ne comprend,
  excepté ceux auxquels elle a été révélée. 
 Ce seront des temps où il te faudra une force, une constance, une patience,
  une sagacité sans limites. Tu devras être juste avec
  charité, avec une foi simple et pure comme celle d'un enfant et, en même
  temps, érudite, en vrai maître, pour
  soutenir la foi assaillie en tant de cœurs et par tant de choses qui lui sont
  opposées, et pour réfuter les erreurs des faux chrétiens et les subtilités
  doctrinales du vieil Israël qui, aveugle dès maintenant, sera plus que jamais
  aveugle après avoir tué la Lumière, et qui déformera les paroles prophétiques
  et jusqu'aux commandements du Père de qui je procède, pour persuader lui-même
  et se donner ainsi la paix, et le monde, que Celui dont parlent les
  patriarches et les prophètes ce n'était pas Moi. Mais que Moi, au contraire,
  je n'étais qu'un pauvre homme, un utopiste, un fou pour les meilleurs, un
  hérétique possédé pour les moins bons du vieil Israël.
 
 Je te prie d'être alors un autre Moi-même. Non, ce n'est pas
  impossible ! Cela l'est. Tu devras avoir présent à ton esprit ton Jésus,
  ses actes, sa parole, ses œuvres. Comme si tu t'adaptais à la forme d'argile
  dont se servent les fondeurs pour donner une empreinte au métal, tu devras te
  couler en Moi. Je serai toujours présent, si présent et vivant pour vous, mes
  fidèles, que vous pourrez vous unir à Moi, devenir un autre Moi-même. Il
  suffit de le vouloir. Mais toi, toi qui as été avec Moi dès la plus tendre
  enfance et qui as eu la nourriture de la Sagesse par les mains de Marie,
  avant de l'avoir par les miennes, toi qui es le neveu de l'homme le plus
  juste qu'a eu Israël, tu dois être un Christ parfait..."
 
 
  258.4 – "Je ne peux pas,
  Seigneur ! Donne cette charge à mon frère, donne-la à Jean, donne-la à
  Simon Pierre, donne-la à l'autre Simon. Pas à moi, Seigneur ! Pourquoi à
  moi ? Qu'ai-je fait pour la mériter ? Tu ne vois pas que je suis un
  bien pauvre homme qui ne peut qu'une seule chose : t'aimer tellement
  bien et croire fermement à tout ce que tu dis !" 
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 233> "Jude a un tempérament trop
  entier. Il fera très bien là où il s'agit d'abattre le paganisme. Pas ici où
  il faudra amener au Christianisme des gens qui, étant déjà le peuple de Dieu,
  se croient absolument dans le juste. Pas ici où il faudra convaincre tous
  ceux qui, croyant en Moi, seront déçus par le déroulement des événements. Les
  convaincre que mon Royaume n'est pas de ce monde, mais que ce Royaume est
  tout spirituel, un Royaume des Cieux, dont la préparation est une vie
  chrétienne, c'est-à-dire une vie où les valeurs prépondérantes sont celles de
  l'esprit.
 
 La conviction s'obtient par une ferme douceur. Malheur à celui qui sautera à
  la gorge des gens pour les persuader. Ceux qui seront assaillis,
  diront : "oui" sur le moment pour se dégager de l'étreinte,
  mais ensuite ils s'enfuiront sans plus vouloir se retourner, sans plus
  vouloir accepter de discuter, s'il ne s'agit pas de pervers mais seulement de
  dévoyés. Fuyant pour aller s'armer et donner la mort à ceux qui veulent les
  convaincre de doctrines différentes des leurs, s'il s'agit de pervers ou
  seulement de fanatiques.
 
 Et tu seras entouré de fanatiques : fanatiques parmi
  les chrétiens, fanatiques parmi les israélites. Les premiers voudront de toi
  des actes de violence ou la permission, au moins, de les accomplir, car le
  vieil Israël, avec ses intransigeances et ses restrictions, agitera encore en
  eux sa queue vénéneuse. Les seconds marcheront contre toi et les autres comme
  dans une guerre sainte pour défendre l'ancienne Foi, ses symboles, ses
  cérémonies. Et tu seras au milieu de cette mer en tempête.
 Tel est le sort des chefs. Et tu seras le chef de ceux
  qui seront dans la Jérusalem christianisée par ton Jésus.
 
 
  258.5 – Tu devras savoir aimer
  parfaitement pour pouvoir être chef saintement. Ce ne sont pas les armes
  et les anathèmes mais ton cœur que tu devras opposer aux armes et aux
  anathèmes des juifs. Ne te permets jamais d'imiter les pharisiens en
  considérant les gentils comme du fumier. C'est aussi pour eux que je suis
  venu, parce que, en vérité, pour le seul Israël aurait été disproportionné
  l'anéantissement de Dieu en une chair pouvant endurer la mort. S'il est vrai
  que mon Amour m'aurait fait m'incarner avec joie même pour le salut d'une
  seule âme, la Justice, qui fait partie de Dieu, impose que l'Infini
  s'anéantisse pour une infinité : le Genre Humain. 
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 234> Tu devras aussi être
  doux avec eux pour ne pas les éloigner, te bornant à être inébranlable dans
  la doctrine, mais condescendant pour les autres formes de vie qui ne sont pas
  semblables aux nôtres, et toutes matérielles, mais sans blesser l'esprit. Tu
  auras beaucoup à combattre avec les frères pour cela parce qu'Israël est tout
  enveloppé de pratiques. Toutes extérieures, toutes inutiles parce qu'elles ne
  changent pas l'esprit. Toi au contraire sois, et enseigne aux autres à être, uniquement
  préoccupé de l'esprit. Ne prétends pas que les gentils changent tout de
  suite leurs habitudes. Toi aussi, tu ne changeras pas d'un seul coup les
  tiennes. Ne reste pas ancré à ton écueil car, pour recueillir en mer les
  épaves et les amener aux chantiers pour les reformer à une nouvelle vie, il
  faut naviguer et ne pas rester sur place. Et tu dois aller à la recherche des
  épaves. Il y en a dans la gentilité et aussi en Israël. Au bout de la mer
  immense, il y a Dieu qui ouvre ses bras à toutes ses créatures,
  qu'elles soient riches de leur origine sainte comme les israélites, ou bien
  pauvres parce que païennes.
 
 J'ai dit :
  "Vous aimerez
  votre prochain". Le prochain ce n'est pas seulement le parent ou le
  compatriote. C'est votre prochain aussi l'homme hyperboréen dont vous ne
  connaissez pas l'aspect, c'est votre prochain aussi celui qui, à cette heure,
  regarde une aurore dans des pays qui vous sont inconnus, ou qui parcourt les
  neiges des chaînes fabuleuses de l'Asie, ou qui boit à un fleuve qui s'ouvre
  un lit au milieu des forêts inconnues du centre africain. Et s'il venait à
  toi un adorateur du soleil, ou bien quelqu'un qui a pour dieu le crocodile
  vorace, ou quelqu'un qui se croit le Sage réincarné qui a su voir la Vérité,
  mais sans en atteindre la perfection ni la donner comme Salut à ses fidèles,
  ou bien un dégoûté habitant de Rome ou d'Athènes qui vient te demander la
  connaissance de Dieu, tu ne peux pas et ne dois pas leur dire : "Je
  vous chasse, car ce serait une profanation de vous amener à Dieu". 
 Aie présent à ton esprit qu'eux ne savent pas, alors qu'Israël sait. Et
  pourtant, en vérité, beaucoup en Israël sont et seront plus idolâtres et plus
  cruels que l'idolâtre le plus barbare qui soit au monde, et ce n'est pas à
  telle ou telle Idole qu'ils sacrifieront des victimes humaines, mais à
  eux-mêmes, à leur orgueil, avides de sang après qu'en eux se sera allumée une
  soif inextinguible qui durera jusqu'à la fin des siècles.
  Seul le fait de boire de nouveau et avec foi
  ce qui a allumé cette soif atroce pourrait l'éteindre. Mais alors ce sera
  aussi la fin du monde car les derniers à dire : "Nous croyons que
  tu es Dieu et Messie" seront les israélites, malgré toutes les preuves
  que j'ai données et que je donnerai de ma Divinité. 
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 235>
  258.6 – Tu veilleras et feras
  attention à ce que la foi des chrétiens ne soit pas vaine. Elle serait vaine
  si elle n'était que paroles ou pratiques hypocrites. C'est l'esprit qui
  vivifie. L'esprit manque dans une pratique machinale ou pharisaïque qui n'est
  qu'une foi feinte et non pas la vraie foi. À quoi servirait à l'homme de
  chanter des louanges à Dieu dans l'assemblée des fidèles si ensuite toute sa
  conduite est une insulte à Dieu qui ne se rend pas le jouet du fidèle mais,
  dans sa paternité, conserve toujours ses prérogatives de Dieu et de Roi ? 
 Veille et surveille pour que personne ne prenne une place qui n'est pas la
  sienne. Dieu vous donnera la Lumière selon votre situation. Dieu ne vous fera
  pas manquer de Lumière, à moins que la Grâce ne se trouve éteinte en vous par
  le péché.
 
 Beaucoup aimeront s'entendre appeler "maître". Il n'y a qu'un
  Maître : Celui qui te parle ; et une seule Maîtresse :
  l'Église qui le perpétue.
 
  Dans l'Église seront maîtres ceux qui seront
  consacrés par une charge spéciale à l'enseignement. Cependant parmi les
  fidèles il y en aura qui par la volonté de Dieu et leur volonté personnelle,
  c'est-à-dire par leur bonne volonté, seront pris par le tourbillon de la
  Sagesse et parleront. Il y en aura d'autres qui, sans être sages par eux-
  mêmes mais dociles comme instruments entre les mains de l'artiste, parleront
  au nom de l'artiste en répétant comme de braves enfants ce que le Père leur
  dit de dire, même sans comprendre toute la portée de ce qu'ils disent. Il y
  en aura enfin qui parleront comme s’ils étaient des maîtres et avec une
  splendeur qui séduira les simples, mais seront orgueilleux avec de la dureté
  de cœur, jaloux, irascibles, menteurs et luxurieux. 
 Alors que je te dis de recueillir les paroles de ceux qui sont des sages dans
  le Seigneur et de sublimes petits enfants de l'Esprit Saint, en les aidant
  même à comprendre la profondeur des divines paroles parce que, s'ils sont les
  porteurs de la Divine Voix, vous, mes apôtres, serez toujours les enseignants
  de mon Église, et vous devez venir en aide à ceux qui sont surnaturellement
  épuisés par l'extasiante et lourde richesse que Dieu a déposée en eux pour
  qu'ils l'apportent aux frères, de la même manière je te dis :
  repousse les paroles mensongères des faux
  prophètes dont la vie n'est pas conforme à ma doctrine. L'excellence de la
  vie, la mansuétude, la pureté, la charité et l'humilité ne feront jamais
  défaut chez les sages et les petites voix de Dieu. Toujours chez les
  autres. 
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 236> Veille et surveille pour qu'il n'y
  ait pas de jalousies ni de calomnies dans l'assemblée des fidèles, ni non
  plus de ressentiments ni d'esprit de vengeance. Veille et surveille pour que
  la chair ne prenne pas le dessus sur l'esprit. Il ne pourrait pas supporter
  les persécutions celui dont l'esprit ne domine pas la chair.
 
 
  258.7 – Jacques, je sais que tu le
  feras, mais fais à ton Frère la promesse que tu ne le décevras pas." 
 "Mais Seigneur, Seigneur ! Je n'ai qu'une peur : c'est de n'en
  être pas capable. Mon Seigneur, je t'en prie, donne à un autre cette
  charge."
 
 "Non. Je ne peux pas..."
 
 "Simon de Jonas t'aime et tu l'aimes..."
 
 "Simon de Jonas n'est pas Jacques de David."
 
 "Jean ! Jean ! l'ange instruit. Fais-en ton serviteur
  ici."
 
 "Non. Je ne peux pas. Ni Simon, ni Jean ne possèdent ce
  rien qui est pourtant beaucoup auprès des hommes : la parenté. Tu es mon
  parent. Après m'avoir... après m'avoir méconnu, la meilleure partie d'Israël
  cherchera à avoir son pardon auprès de Dieu et auprès d'elle-même en
  cherchant à connaître le Seigneur qu'ils auront maudit à l'heure de Satan, et
  il leur semblera avoir le pardon, et par conséquent la force de se mettre sur
  mon chemin, s'il y a à ma place quelqu'un de mon sang. Jacques, sur cette montagne
  se sont accomplies de bien grandes choses. Ici le feu de Dieu consuma non
  seulement l'holocauste, le bois, les pierres,
  mais aussi la poussière et jusqu'à l'eau qui était dans le fossé. Jacques,
  crois-tu que Dieu ne puisse plus faire semblable chose, en allumant et
  consumant tout ce qu'il y a de matériel dans l'homme-Jacques, pour faire un
  Jacques-feu de Dieu ? Nous avons parlé pendant que le crépuscule a rendu
  de flamme jusqu'à nos vêtements. Ainsi crois-tu que le char qui emporta Élie
  fut plus ou moins resplendissant ?"
 
 "Beaucoup plus resplendissant parce qu'il était fait de feu
  céleste."
 
 "Et pense alors à ce que deviendra le cœur quand il sera devenu feu
  parce qu'il aura Dieu en lui, car Dieu veut qu'il perpétue son Verbe dans la
  prédication de la Nouvelle du Salut."
 
 
  258.8 – "Mais Toi, mais Toi,
  Verbe de Dieu, Verbe éternel, pourquoi ne restes-tu pas ?" 
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 237> "Parce que je suis Verbe et
  Chair. Comme Verbe je dois instruire et comme Chair racheter."
 
 "Oh ! mon Jésus, mais comment rachèteras-tu ? À la rencontre
  de quoi vas-tu ?"
 
 "Jacques, rappelle-toi les prophètes."
 
 "Mais ne sont-elles pas allégoriques leurs paroles ? Peux-tu, Verbe
  de Dieu, être maltraité par les hommes ? Ne veulent-ils pas dire
  peut-être que c'est à ta Divinité que sera donné le martyre, à ta perfection,
  mais rien de plus, rien de plus que cela ? Ma mère se préoccupe pour moi
  et pour Jude, mais moi pour Toi et pour Marie, et puis aussi pour nous qui
  sommes si faibles. Jésus, Jésus, si l'homme triomphait de Toi, ne crois-tu
  pas que beaucoup d'entre nous te croiraient coupable et s'éloigneraient,
  déçus par Toi ?"
 
 "J'en suis sûr. Il y aura un bouleversement dans toutes les couches
  de mes disciples. Mais ensuite la paix reviendra et même il viendra une
  cohésion des parties les meilleures sur lesquelles, après mon sacrifice et
  mon triomphe, viendra l'Esprit de force et de sagesse : le Divin
  Esprit."
 
 "Jésus, pour que je ne fléchisse pas; et que je ne sois pas scandalisé à
  l'heure redoutable, dis-moi : que te feront-ils ?"
 
 "C'est une grande chose ce que tu me demandes."
 
 "Dis-la-moi, Seigneur."
 
 "Ce sera pour toi un tourment de la connaître
  exactement."
 
 "Peu importe. Au nom de cet amour qui nous a unis..."
 
 "Il ne faut pas que cela soit connu."
 
 "Dis-la-moi, et puis fais m'en perdre le souvenir jusqu'à l'heure où
  elle devra s'accomplir, Alors remets-la-moi en mémoire ainsi que cette heure.
  Ainsi je ne me scandaliserai de rien et je ne deviendrai pas ton ennemi au
  fond de mon cœur."
 
 "Cela ne servira à rien, car toi aussi tu céderas à la bourrasque."
 
 "Dis-la-moi Seigneur !"
 
 "Je serai accusé, trahi, pris, torturé, soumis à la mort de la
  croix."
 
 "Oh ! non, non !"
 
 Jacques crie et se tord comme si c'était lui qui serait mis à mort.
 
 "Non ! répète-t-il. S'ils te font cela, que nous feront-ils, à
  nous ? Comment pourrons-nous continuer ton œuvre ? Je ne puis, je
  ne puis accepter la charge que tu me réserves... Je ne puis !... Je ne
  puis ! Toi mort, je serai un mort, moi aussi, dépourvu de toute force.
  Jésus, Jésus ! Écoute-moi. Ne me laisse pas sans Toi. Promets-moi,
  promets-moi cela au moins !"
 
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 238> "Je te promets
  que je viendrai te guider par mon Esprit, lorsque la glorieuse Résurrection
  m'aura délivré des limites de la matière. Moi et toi serons encore une seule
  chose, comme maintenant que tu es entre mes bras" car en effet Jacques
  s'est abandonné et pleure sur la poitrine de Jésus.
 
 
  258.9 – "Ne pleure plus. Sortons
  de cette heure d'extase, lumineuse et pénible, comme quelqu'un qui sort des
  ombres de la mort se souvenant de tout, sauf ce que c'est que mourir, effroi
  qui vous glace et dure une minute et qui comme fait accompli dure pendant des
  siècles. Viens, je t'embrasse ainsi pour t'aider à oublier la charge de ma
  destinée d'Homme. Tu en retrouveras le souvenir au moment voulu, comme tu
  l'as demandé. Tiens, je te baise sur ta bouche qui devra répéter ma parole
  aux gens d'Israël,
  et sur ton cœur qui devra aimer comme je l'ai dit, et ici, sur ta tempe, où
  la vie cessera en même temps que la dernière parole d'affectueuse foi en Moi. 
 De même que je viendrai, frère que j'aime, près de toi, dans les assemblées
  des fidèles, aux heures de méditation, aux heures de danger, à l'heure de la
  mort ! Personne, et pas même ton ange, ne recueillera ton âme, mais Moi,
  dans un baiser, ainsi..."
 
 Ils restent embrassés longuement et Jacques paraît presque s'assoupir dans la
  joie des baisers de Dieu qui lui font oublier sa souffrance.
 
 Quand il relève la tête, il est redevenu le Jacques
  d'Alphée, paisible et bon, qui ressemble tant à Joseph, l'époux de Marie, Il
  sourit à Jésus, un sourire plus mûr, un peu triste, mais toujours si doux.
 
 "Prenons notre repas, Jacques, et puis dormons sous les étoiles. Aux
  premières lueurs du jour, nous descendrons dans la vallée... pour aller parmi
  les hommes..." et Jésus pousse un soupir... Mais il termine avec un
  sourire : "... et près de Marie."
 
 "Et à ma mère que dirai-je, Jésus ? Et aux compagnons ? Ils ne
  me laisseront pas sans m'interroger..."
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